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1 février 2015 7 01 /02 /février /2015 16:59

 

Pour celles et ceux qui souhaitent revivre mon VOYAGE A VELO AUTOUR DU MONDE 2010/2011, vous pouvez cliquer sur les différentes catégories Tour Du Monde ci-contre à droite, ou simplement faire défiler ce petit article pour revenir au début du périple.

 

Par contre pour suivre mon aventure jusqu'au CAP NORD, il suffit de cliquer sur ce lien  Nord - Cap Nord,

et pour la traversée des Etats-Unis cliquez sur  Etats-Unis

 

Le récit des précédents voyages à vélo devrait être mis en ligne ultérieurement. (cf Mes Précédentes Aventures en bas à droite)

 

 

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31 janvier 2015 6 31 /01 /janvier /2015 14:53

Après de nombreuses années, je me décide enfin à partir en solo à vélo autour du monde. Le trajet va se dérouler en cinq parties (avec un bond en avion à chaque fois) sur une durée de 12 ou 13 mois :

 

 1. L'Europe et le Moyen-Orient

 2. L'Inde

 3. L'Extrême-Orient

 4. L'Amérique du Sud 

 5. Le retour en France

 

Après chaque partie, ma forme physique, morale et mes finances détermineront la poursuite ou non de l’aventure. Le départ est fixé au dimanche 1er août 2010.

 

 

Description du trajet de Neuville en Ferrain à Jérusalem

 

Je compte rejoindre Jérusalem en 3 ou 4 mois. Selon la situation politique des pays traversés, le trajet peut subir des changements.

 

Trajet Europe Moyen-Orient

 

 

Présentation du projet

  

Les prévisions du parcours:

 

1er août : Départ de Neuville en Ferrain dans le Nord de la France

6 août : Strasbourg (puis la Route des Vins jusque Colmar)

11 août : Lausanne en Suisse

14 août : Les lacs d'Italie du Nord (après le passage du col du Simplon, 1200 m de dénivelé, dur dur !)

19 août : Repos de quelques jours à Venise

24 août : Ljubljana en Slovénie

31 aôut : La côte adriatique croate

11 septembre : Dubrovnik

13 septembre : Les Balkans au Montenegro

22 septembre : Sofia en Bulgarie

1er octobre : Repos de plusieurs jours à Istanbul

15 octobre : La Cappadoce en Turquie

24 octobre : Alep en Syrie

31 octobre : Repos de quelques jours à Damas (après la visite du Krak des Chevaliers)

9 novembre : Petra, puis le désert du Wadi Rum en Jordanie

3 novembre : Eilat en Israel

19 novembre : Jérusalem

 

Soit environ 7000 km

 

 

 

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30 janvier 2015 5 30 /01 /janvier /2015 08:30

Dimanche 1er août 2010 : Neuville-en-Ferrain – Wez-Velvain (B) (environ 40 km)

  2 Péniche sur l'Escaut 

Mon départ est plus que précipité. Un petit groupe m’attend déjà sur la place de Neuville. Comme je ne souhaite pas faire attendre les gens, je remplis mes sacs un peu n’importe comment. Cela aura une grosse conséquence par la suite ! Les démarches pour la location de la maison ont grandement perturbé mon timing. Une petite trentaine de personnes sont venus m’encourager. Je remercie d’ailleurs tout le monde ! Après une petite interview avec une charmante journaliste et quelques photos de groupe, je peux démarrer mon périple vers 16 h. L’étape du jour n’est pas bien longue. Je vais rallier la maison d’un couple d’amis, Marie Pierre et Pascal, située à Wez-Velvain en Belgique. Le temps est assez nuageux, mais aucune goutte de pluie pendant le parcours. Le coin m’est forcément coutumier, pour m’y être entraîné régulièrement. Après la ville de Mouscron, le mont St Aubert se dresse sur ma gauche. A Pecq, mes premiers soucis commencent. Mon compteur kilométrique ne répond déjà plus. Ma roue arrière se met également de travers en passant une bordure. Un habitant me propose aimablement de l’aide, mais tout est déjà quasiment rentré dans l’ordre. Je longe ensuite l’Escaut jusque Tournai. La place avec la cathédrale est toujours aussi vivante, mais je ne m’y attarde pas. Je traverse ensuite la campagne environnante jusque Wez-Velvain. J’installe la tente, et déballe mes sacs pour faire l’inventaire. A cause de la précipitation, il me manque pas mal de matériel ! Du coup, il ne me reste plus qu’à prendre la voiture jusque Neuville demain matin, pour tout récupérer. En effet, mon auto stationne chez mes amis durant toute la période de mon aventure. Franchement, cela démarre bien !

  Marie-Pierre et Pascal 

Lundi 2 août : Wez-Velvain

Rien de bien passionnant cette journée ! Après un réveil plus tardif que prévu, je repars chez mes parents en voiture. Il faut reconnaître qu’ils m’ont bien aidé pour les préparatifs ! Je profite donc de la journée pour régler définitivement mes derniers problèmes. Tant est si bien que je retourne à Wez-Velvain sous le coup de 18h30 ! De toute façon, des orages ont éclaté cet après-midi dans le Tournaisis. Et rouler sous les averses ce n’est pas franchement agréable ! Par contre, ma tente a tenu le coup, et ça c’est une bonne nouvelle ! Pascal est bien surpris de me revoir à nouveau. Nous fêtons mon retour avec une bonne bière, en compagnie de son frère. Après le souper, je tente de réparer mon compteur kilométrique, mais l’aimant semble mort. Je remplace alors le compteur, par celui qui été monté sur mon ancien vélo à Neuville. Demain, l’aventure va pouvoir recommencer. Dans de meilleures conditions cette fois, du moins je l’espère !

  1 Chez Marie-Pierre et Pascal 

Mardi 3 août : Wez-Velvain – Beaumont (102,3 km)

 3 Sur la route des Ardennes 

Ce matin, il y a un brouillard à couper au couteau. Mais fort heureusement, il se dissipe au fil des heures. Après avoir commandé sur internet un support filaire pour mon nouveau compteur, je peux enfin quitter les lieux. Un grand merci à Marie-Pierre et Pascal de m’avoir accueilli durant ces deux dernières nuits ! Dans un premier temps, j’emprunte des routes de campagne jusque Peruwelz. Mais le manque d’indication rallonge considérablement mon itinéraire. Bref, je zigzague entre Belgique et France ! L’imposante basilique de Bon-Secours est perchée sur une colline, ("tiens ce ne serait pas une bière ça !"), mais les portes de l’édifice sont malheureusement fermées pendant les heures du midi. Je pique-nique à proximité de l’église de Blaton, la plus ancienne du Hainaut. Comme j’ai déjà perdu beaucoup de temps, je rejoins une nationale pour Tertre. Je m’enfonce ensuite dans le Borinage, au Sud-ouest de Mons. Au Grand Hornu, les maisons ouvrières sont alignées autour de l’ancien site minier. Aussi, le coin devient beaucoup plus vallonné. La météo change également. En effet, des nuages noirs menaçants masquent désormais le soleil. Puis, je rattrape la nationale qui va de Mons à Beaumont. De vraies montagnes russes, et c’est vraiment casse-pattes ! A cela, il faut ajouter une circulation infernale. En vérité, je m’y attendais pour l’avoir emprunté déjà plusieurs fois ! Je bifurque un moment vers le village de Solre-sur-Sambre, afin de découvrir le château fort du 13éme S. Il me reste encore quelques collines à grimper avant d’atteindre Beaumont. A l'entrée de la petite ville, la route pour le camping « Fond de Gouttes » descend un peu trop à mon goût ! En effet, il me faudra tout remonter demain matin ! Par contre, il est agréablement logé au bord d’une petite rivière. Il n'est malheureusement réservé qu'aux caravanes ! Un gamin m’amène alors à l’accueil. Le jeune patron m’explique que la région wallonne interdit les tentes dans son camping. Finalement, il me donne discrètement l’autorisation de m’installer. Et en plus, il ne me fait rien payer ! Bien sympa le gars !

 

Mercredi 4 août : Beaumont – Forêt à proximité de Redu (92,1 km)

  Givet 

Je démonte la tente sous la pluie. Pas des grosses gouttes, mais un crachin qui vous trempe jusqu’aux os ! Bref, une journée de brin en perspective ! C’est pourquoi je pars une nouvelle fois bien tard. Je remonte la fameuse côte de la veille jusque Beaumont. Depuis la tour Salamandre, le paysage vallonné est masqué par un brouillard de pluie. Au bout de quelques kilomètres, je finis par être complètement trempé. La nationale continue à faire le yoyo jusque Philippeville. Mise à part celle de Silenrieux, les côtes sont plus faciles à grimper que la veille. Je poursuis ensuite ma route jusque Givet en bordure de Meuse. Je profite d’une courte accalmie pour casser la graine à côté de la chapelle de Walcourt. A l’office du tourisme, une fille m’informe sur les monuments intéressants de la vieille ville (la forteresse, le couvent des Récollectines, la tour Victoire…). Sur la petite place, le bel hôtel de ville fait face à l’église St Hilaire. Par contre, je suis un peu déçu du mobilier intérieur de l’édifice religieux. Ma route continue jusque Beauraing. Et toujours sous une fine pluie ! La petite ville est désormais un lieu de pèlerinage depuis l’apparition de la Vierge dans les années 30. De nombreux sanctuaires, plus ou moins intéressants, entourent une massive chapelle en pierres. A Wellin, je stoppe à un bistrot pour savourer une Rochefort bien méritée. J’en profite car je doute trouver d’aussi bonnes bières par la suite. Il commence par être tard, deux solutions se présentent à moi. La plus sage serait de rallier le camping à 4 km sur la route de Rochefort, donc hors de mon parcours. L’autre consiste à poursuivre ma route vers Libin, et de trouver un endroit dans la forêt pour bivouaquer à la sauvage. Finalement après maintes hésitations, je choisis la seconde. D’autant plus que la pluie a cessé ! La petite nationale grimpe longuement à travers la forêt ardennaise. Avant le village de Redu, je m’enfonce entre les arbres, de manière à masquer la tente. J’entends les averses au loin qui se précipitent vers mon bivouac. C’est vraiment bizarre !

 

Jeudi 5 août : Forêt à proximité de Redu – Steinfort (L) (82,8 km)

 1 La forêt ardennaise 

Cette nuit, il est tombé des cordes. La tente est complètement trempée. J’attends alors l’accalmie pour pouvoir déguerpir. La route oscille tantôt à travers champs, tantôt dans les forêts. Non loin, l’Euro Space Center présente à l’extérieur quelques reconstitutions de fusées, notamment celle d’Ariane et celle de la navette spatiale américaine. Après Libin, quelques beaux manoirs bordent la petite nationale. Aussi, j’atteins rapidement Neufchâteau. Après quelques courses, je décide de poursuivre mon itinéraire. Je stoppe quelques kilomètres plus loin au village d’Anlier, pour casser la croûte à côté de l’église. Le temps est vraiment instable, les éclaircies alternent avec les petites averses. Du coup, je dois à chaque fois enlever et remettre ma veste. Et c’est vraiment pénible ! Après Habay-la-Neuve, la piste cyclable devient complètement déglinguée. Il me faut zigzaguer pour éviter les trous et les pierres qui traînent. J’aperçois enfin Arlon, perché sur une colline. Je connais un peu la ville, pour avoir rejoint mon frère durant ses études il y a quelques années. A l’office du tourisme, un homme  m’aiguille un peu sur la poursuite de mon itinéraire. En effet, la partie entre Luxembourg et Strasbourg n’est pas encore bien déterminée. Du coup, j’achète une carte routière plus détaillée. Lorsque je commence la visite d’Arlon, le temps vire au mauvais. Des cordes s’abattent sur la ville. Je prends alors mon mal en patience, en allant boire une bière trappiste au café d’à côté. Le patron est d’ailleurs bien sympa. Il est totalement admiratif de mon projet. Après l’averse, je monte au belvédère, à côté de l’église St Donat, pour jouir du panorama. Je me rends ensuite à la source de la Semois. Franchement, il n’y a pas grand-chose ! (Clin d’œil à Guillaume, il y a quelques années !). Puis, je poursuis ma route jusque Steinfort, premier village du Luxembourg à la frontière, pour m’installer au camping. Demain, on annonce une météo clémente. Il est plus que temps, car ma tente n’a pas encore eu l’occasion de sécher complètement.

 2 Mon vélo avant le Luxembourg 

 

 Vendredi 6 août : Steinfort – Sierk-les-Bains (F) (70,1 km)

 1 Luxembourg 

Je remballe mon matos rapidement pour démarrer vers les 9 h du mat. Le ciel est complètement dégagé. Pour une fois que la météo ne s’est pas trompée, on ne va pas se plaindre ! La route jusque Luxembourg-ville est relativement plate. Le seul inconvénient, comme à chaque grosse agglomération, c’est la circulation qui y règne. J’entame la visite le long des fortifications. Les points de vue sur les différents quartiers de la ville sont magnifiques. D’un côté, le pont Adolphe du 19ème enjambe la rivière Pétrusse. De l’autre, depuis le Chemin de la Corniche, l’église St Jean domine la ville basse du Grund, située au bord de la rivière de l’Alzette. Un peu plus loin, les ruines du château fort du Luxembourg, qui date du 10ème S, sont édifiées sur un éperon rocheux. La cathédrale Notre-Dame est malheureusement en rénovation. Tout comme le palais municipal sur la place d’Armes ! L’intérieur de l'édifice religieux ne me paraît pas si intéressant. Seule la tribune à l’entrée présente de jolis motifs sculptés. La crypte est également trop moderne à mon goût ! Après avoir pique-niqué, je déambule dans les quartiers de la ville haute pour découvrir notamment le palais de Grand Ducal, ainsi que la place Guillaume avec son hôtel de ville. Il est presque 14 h 30 lorsque je reprends la route. Les panneaux indicateurs m’ayant induit en erreur, je me retrouve finalement sur une petite nationale en direction de Frisange. Du coup, une personne du coin et un agent municipal me remettent sur les bons rails. Cela m’a valu quand même un petit détour de quelques kilomètres supplémentaires ! A partir de Moutfort, la route ne fait que descendre. J’arrive ainsi à Remich très, très facilement. Plutôt que de passer en Allemagne, je préfère longer le fleuve de la Moselle sur une piste cyclable jusque la frontière française. J’atteins ainsi Sierk-les-Bains et son magnifique château des ducs de Lorraine du 12ème. Malheureusement, les nuages ont refait leur apparition. Peu motivé à reprendre la route, je m’installe au camping municipal. Et ce n’est vraiment pas cher ! Je discute un moment avec un couple de Hollandais qui voyage également à vélo. Aussi, un marché traditionnel se tient au centre de la petite ville jusque 1 h du mat. Plutôt que de préparer mes pâtes quotidiennes, je pars manger un morceau et déguster une bière de la région. Je rentre ainsi la panse remplie, alors que la nuit tombe. Malheureusement, la grille du camping est déjà fermée. Et bien sûr, j’ai oublié le code d'entrée dans la tente ! Je grimpe alors par-dessus, afin de rejoindre mon petit lit douillet. Enfin plutôt mon sac de couchage et mon mince matelas autogonflant !

 2 Sierck-les-Bains 

 

Samedi 7 août : Sierk-les-Bains – Forêt de Fénétrange (101 km)

 1 Sur les routes de Lorraine 

De bonne heure, je rejoins la départementale en direction de Bouzonville. Elle grimpe fortement dans les collines boisées jusque Montenach, puis oscille à travers champs. Le soleil tape vraiment fort aujourd’hui. L’église de la petite ville est édifiée au bord d’une charmante rivière descendant en cascades. L’intérieur est par contre assez quelconque. Après quelques courses, j’emprunte des petites routes bordées d’arbres, qui traversent entre autres les villages de Téterchem, Coume et Porcelette. Et cela pour éviter la circulation infernale de la nationale! J’arrive ainsi sous le coup de 14 h à St Avold. Au premier abord, la ville ne me fait pas grosse impression. Seule l’ancienne abbatiale du 18ème mérite le détour. Elle est malheureusement enserrée par des bâtiments banals. Alors que je mange un bout à proximité, une folle dingue me parle d’un tas de choses incohérentes. A l’intérieur, le chœur, les orgues et quelques sculptures religieuses sont les principaux attraits de l’édifice. Je reprends ensuite mon chemin, toujours sous un soleil de plomb. Quelques côtes me font également mal aux jambes. Fort heureusement, les descentes sont bien plus agréables ! J’atteins même une pointe de vitesse à 61 km/h. Le paysage reste très champêtre. D’ailleurs, beaucoup de paysans s’activent dans les champs. Comme hier en fin de journée, les nuages sont de retour. Au loin, j’aperçois  les montagnes des Vosges, puis les deux flèches de l’église St Nicolas du village de Munster (pas le fromage puant hein !). Une vieille dame me permet une dernière visite. De gros travaux sont engagés pour restaurer l’édifice religieux. Le chœur et un vieux tombeau en pierre sont splendides. Je repars pour une dizaine de kilomètres, avec la ferme intention de trouver un coin pour bivouaquer. Dans la forêt de Fénétrange, je découvre une cabane de chasseurs avec la porte ouverte. Mais comme demain c’est dimanche, j’ai peur d’être délogé aux aurores! Quelques centaines de mètres plus loin, je plante la tente sous les arbres. Surpris par ma présence, un renard détale juste devant moi. Aujourd’hui, c’est la reprise du championnat de football. J’apprends par téléphone la défaite de mon équipe fétiche, le RC Lens. Finalement, je m’endors avec le hululement lointain d’une chouette.       

   2 Etang à Munster en Lorraine                                                                             3 Bivouac dans la forêt de Fénétrange 

 

 

 

  

 

 

 

 Dimanche 8 août : Forêt de Fénétrange –Strasbourg (96,5km)

 1 Le temps menace 

Pendant que je déjeune, il se met à pleuvoir. Quelle poisse ! Et dire que ma tente commençait à sécher ! Je charge quand même mon vélo pour reprendre la route jusque Fénétrange. Le château est assez banal. L’église renferme normalement de beaux vitraux du 15ème, mais les portes sont une nouvelle fois fermées. Quelques beaux bâtiments égayent aussi les rues étroites, comme le vieil hospice. Seulement tout semble à l’abandon, comme bien souvent en Lorraine. Sûrement un manque de moyens ! Je discute un moment avec un couple qui se balade dans la région avec un tandem Pino. C'est-à-dire couché à l’avant et droit à l’arrière. Le soleil finit par pointer son nez, mais de gros nuages noirs menacent. A la sortie du village, une bonne côte me casse un peu les jambes. Je traverse ainsi des petits villages (Kirrberg, Rauwiller, Lixheim entre autres) jusque Phalsbourg. Je croise également une dame qui n’a pas l’air d’avoir toute sa tête. Décidemment, c’est la maladie du coin ! Comme un peu partout en France, Vauban a laissé son empreinte. Je déambule alors dans la petite ville à la découverte des différents monuments : château, portes d’Allemagne et de France, ancienne caserne… L’église domine la large place de l'hôtel de ville. Peu rassuré d’abandonner mon vélo, je découvre rapidement l’intérieur de l’édifice religieux. Puis, je pique-nique sur un banc à l’ombre d’un arbre. La route qui suit n’est pas trop difficile. Je me retrouve rapidement au sommet du col de Saverne à 410 mètres. Il faut quand même reconnaître qu’il est plus difficile de grimper sur l’autre versant. Pour être honnête, j’ai pris progressivement de l'altitude ces derniers jours. J’atteins alors Saverne à grande vitesse, par de grands virages en épingle. La petite ville est vraiment charmante. Je découvre ainsi le château des Rohan, l’église Notre-Dame de la Trinité, la maison Katz avec ses sculptures en bois, et le cloître des Recollets du 14ème. A l’office du tourisme, la fille m’indique une piste cyclable pour rejoindre Strasbourg. Certes, cela rallonge mon parcours, mais elle borde le canal qui va de la Marne au Rhin. Donc parcours relativement plat ! Aussi, je me rends compte avoir perdu mes lunettes. Et bien voilà c’est arrivé, car cela faisait plusieurs fois que je devais les changer de sacoche ! Après toutes ces montées et descentes, il est vraiment agréable d’entraîner des plus gros braquets sur du plat . D'un coup, un jeune d’une vingtaine d’années me rejoint. Il semble passionné par mon vélo chargé. Nous faisons un bout de chemin ensemble, tout en discutant de nos voyages cyclistes. J’arrive enfin à Strasbourg par une moche banlieue. Par contre, le centre est vraiment magnifique. La lumière orangée du soleil tape encore sur la façade de la majestueuse cathédrale. Cependant, je réserve la visite pour la matinée de demain. Puis, je galère un peu pour trouver le camping à la Montagne Verte. Fort heureusement, des gens m’aiguillent finalement dans la bonne direction.

2 Le premier col du voyage 

 

Lundi 9 août : Strasbourg – Dambach-la-Ville (76,1km)

  3 La cathédrale de Strasbourg

Il fait super beau. Au réveil, je me fais offrir le café par mes voisins de tente. Bien sympa ! Ce couple sexagénaire vient de Vendée. La dame est complètement admirative de mon projet. Je quitte enfin le camping vers les 11 h. Je reprends alors la même piste cyclable que la veille pour rejoindre le centre de Strasbourg. Je déambule dans le quartier de la Petite France, de la place Kléber et autour de la cathédrale. Il y a un nombre incroyable de touristes ! Il est vrai que la ville est vraiment super jolie, avec toutes ses maisons à colombages. Ma visite est assez rapide pour y être venu déjà plusieurs fois, notamment lors d’une certaine finale de Coupe du Monde de football en 1998. Quel bon souvenir, pas comme cette année ! Puis, je pique-nique au bord de la rivière de l’Ill, assez loin de la foule. Une piste cyclable permet ensuite de rallier Molsheim en longeant le canal de la Bruche. C’est vraiment agréable ! Sur mon chemin, le village de Dachstein est cerné de remparts et de douves. Je fais un tour rapide à Molsheim pour découvrir notamment le metzig du 16ème (l'ancien hôtel de ville), et la porte des forgerons du Moyen Âge. En effet, l’heure est déjà bien avancée ! De plus, des nuages commencent à faire leur apparition. A la sortie, les cyclistes et les tracteurs sont déviés à travers champs. La grosse nationale est en effet interdite aux vélos à cause du trafic routier. La route des vins d’Alsace démarre réellement à partir de Rosheim, qui renferme une belle église du 12ème. Je traverse ainsi des villages aussi mignons les uns que les autres. La plupart des maisons à colombages sont colorées et richement fleuries. Tant est si bien que je perds un temps fou à prendre des clichés ! Les voitures garées sur les places et dans les ruelles cassent un peu le charme des lieux. Mais il faut bien que les gens vivent ! A Heiligenstein, au sommet d’une bonne côte, je jouis d’un magnifique panorama sur les vignes rangées rectilignement. A cause de l’heure tardive, je sais que je n’atteindrais pas Colmar ce soir. Il faut dire que les travaux sur la route, les indications floues de mon guide, et les clichés m’ont fait perdre un temps considérable. A chaque fois que je veux tirer une photo, le soleil disparaît derrière les nuages. C’est à croire qu’il le fait exprès ! Et cela a le don de m’agacer ! Je décide de m’installer au camping municipal de l’Ours, à Dambach-la-Ville. Dès mon arrivée, un couple de Hollandais m’invite à manger avec eux. Décidemment, c’est la journée ! Mais comme ils ne parlent pas le français (et moi très mal le néerlandais !), nous conversons en anglais. Je passe alors une bonne soirée en compagnie de Nick et Wim

. 1. La Petite France à Strasbourg 

 

Mardi 10 août : Dambach-la-Ville – Bantzenheim (91,4 km)

2 En route pour les vins d'Alsace  3 Les maisons à colombages de Colmar

 

Dans un premier temps, je repars en ville pour découvrir les remparts et les maisons à colombages de Dambach. A peine démarré, je me trompe déjà de route. Du coup, je ne verrai pas le château de Berstein. Par contre, celui d’Ortenbourg est bien visible au loin. Les vignes s'étalent à perte de vue ! Je traverse des villages qui finissent par se ressembler un peu (Scherwiller, Châtenois, Saint-Hippolyte..). A chaque fois, la rue principale est bordée de belles maisons à colombages aux couleurs variées. Le célèbre château du Haut-Koenigsbourg domine fièrement les vignobles depuis le sommet de sa petite montagne. A cause de l’heure qui tourne, je précipite la visite de Bergheim. Plus loin, Ribeauvillé est également bien joli. Cependant, le village perd de son authenticité à cause de la marée humaine qui a envahi les rues. Puis, je fais un dernier crochet jusque Riquewihr, submergé également par les touristes. Dommage, car le village a vraiment beaucoup de charme ! Désormais, je me laisse glisser jusque Colmar. Il est déjà presque 14 h, lorsque je m’apprête à manger sur un banc. A l’office du tourisme, une jolie fille me fournit un itinéraire de découverte de la ville. Il passe notamment par la collégiale St Martin, et par de belles maisons typiques aux pierres sculptées. La Petite Venise est un quartier traversé par un canal bordé par de superbes maisons à colombages. Je m’enfile une bière alsacienne (Licorne), avant de reprendre le pédalage vers 17 h. Il faut absolument que je m’approche au plus près de Bâle en Suisse. La route est complètement plate, traversant de grands champs de maïs. Il fait vraiment chaud, la température avoisine les 32°C. Je roule un peu comme un robot pour avaler les kilomètres. D’un coup, tilt ! Il me semble avoir vu un camping. En effet, je n’ai pas rêvé ! Plutôt que de bivouaquer dans la forêt proche, je préfère m’y installer. Il est déjà 20 h passé, et il reste une grosse vingtaine de kilomètres pour rejoindre Bâle. On verra ça demain ! 

2 Les cigognes d'Alsace   1 Les vignobles  

 

Mercredi 11 août : Bantzenheim – Glovelier (CH) (97,9 km)

  1 La frontière suisse

Je reprends la route plate en direction de Bâle. Elle longe à distance le Rhin. De nombreuses usines, et même une centrale électrique, bordent le fleuve. La propriétaire du camping m’a conseillé de visiter une vieille église romane du 11ème, située à Ottmarsheim. D’après ses dires, c’est la réplique miniature de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle. Quelques belles fresques sont peintes sur les plafonds et les murs. Plus loin à St-Louis, je discute longuement de mon aventure avec le pharmacien. En passant la frontière suisse, je quitte la France pour plusieurs mois. Si tout se passe bien, je serais de retour dans une petite année ! Je pique-nique ensuite sur un banc, avant d’entamer la visite de Bâle. Les fontaines de la ville fournissent de l’eau fraîche et potable. Et c’est bien pratique pour se réapprovisionner ! En grimpant jusque la cathédrale Münster, je jouis d’une vue sur le Petit Bâle et le célèbre pont Mittlererhein Brücke. L’édifice religieux possède de jolis portails en pierres sculptées, ainsi que deux cloîtres gothiques. L’intérieur est par contre assez sobre. A cette période, tous les monuments de Bâle sont malheureusement en rénovation. Le rathaus (hôtel de ville) est même masqué par les échafaudages. Depuis ma visite avec Guillaume et José, il y a quelques années, je ne reconnais absolument pas la ville. Un habitant m’indique la piste cyclable 23, qui part directement dans la région des Franches-Montagnes. Je quitte ainsi la ville sans trafic routier. Elle longe ensuite la rivière de la Birs (et du même coup la voie de chemin de fer !) jusque Delémont. C’est pourquoi je suis agréablement surpris de cet itinéraire quasiment plat dans la vallée. Dans la petite ville, une fille s’intéresse également à mon aventure cyclotouriste. Bien sympa en tout cas ! Depuis plusieurs kilomètres, le temps s’est gâté. Du coup, je pédale jusque Glovelier sous la menace de la pluie. A l’hôtel de la gare, mon ancien compagnon de voyage José a l’air bien surpris de me voir. Il faut dire que je viens un peu à l’improviste ! Nous avions pédalé ensemble en Islande et en Hongrie, il y a plusieurs années. Il me présente alors son amie Sara. Tous deux m’invitent chez eux pour souper, et boire quelques bières locales de la brasserie des Franches-Montagnes. Ils ont également un gros projet à vélo dans plusieurs mois. 

3 Sur la piste de Glovelier

 2 Le Rhin à Bâle 

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29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 23:17


Jeudi 12 août 2010: Glovelier

 

Rien de bien particulier cette journée ! Je flemmarde une bonne partie de la matinée. Pourtant, ma première intention est de partir en début d’après-midi. Et cela pour ne pas trop déranger mes hôtes ! Je tente alors de régler mes derniers problèmes administratifs, et alimente mon blog. Je galère tellement que cela me prend une bonne partie de la journée ! C’est pourquoi, avec l’accord de Sara et José, je décide de rester une nuit de plus à Glovelier. Un jour de repos, cela ne peut pas faire de mal ! Nous finissons la soirée de la même manière que la veille. Nous nous enfilons une, deux…enfin, plusieurs bières locales dans la bonne humeur. Et cela jusque plus de 3 h du mat ! Le réveil risque d’être bien difficile !

   
Sarah--Jose-et-moi.jpg



Vendredi 13 août : Glovelier - Berne (85,1 km)

  Pont-en-pierres-dans-les-gorges.jpg Dans-les-gorges-du-Pichoux.jpg

  

 

 

 

 

 

 

 

 

Après une courte nuit, j’organise mes sacs pour redémarrer mon périple. Sur les conseils de José, je change d’itinéraire pour gagner un peu de temps. En effet, je ne tiens pas à rater le rendez-vous en Slovénie avec Céline, Jérôme et le petit Hugo. Du coup, direction Berne, plutôt que Lausanne ! Il est déjà 11 h lorsque je prends le départ. Malgré mon arrivée à l’improviste, l’accueil de Sara et José était vraiment chaleureux. Un grand merci à eux ! La route s’élève doucement dans les gorges du Pichoux. La montée n’est pas difficile, et le paysage est vraiment splendide. J’atteins ainsi facilement le monastère de Bellelay au sommet. La descente sur Tavannes, par le col de Pierre-Pertuis perché à 827 m, est enivrante. En chemin, je casse la graine sur un banc dans un virage surplombant la ville. Ma route plonge ensuite vers Bienne, empruntant des tunnels dans la montagne. Elle rejoint même durant un bon moment l’autoroute. Un semblant de piste cyclable est d’ailleurs tracé sur la chaussée. C’est quand même incroyable ! La vieille ville de Bienne renferme une petite place entourée de belles maisons bourgeoises. Mais c’est tout ce qu’il y a à se mettre sous la dent ! Je poursuis alors mon chemin vers Berne. Je pédale dans une large vallée relativement plate, le long d’une ligne de chemin de fer. J’emprunte tantôt la nationale, tantôt la piste 64 prévue pour les vélos. Ce tronçon n’est pourtant pas vraiment intéressant. J’atteins alors Berne en fin d’après-midi. Pour la visite de la capitale fédérale, il va falloir attendre le lendemain ! En effet, une sorte de festival de musique a attiré une foule incroyable. Et circuler dans les rues bondées avec un vélo chargé devient vite un calvaire ! C’est pourquoi je décide de me rendre au camping de la ville nommé Eichholz, situé à 3 km. Les tentes sont un peu entassées les unes sur les autres, mais cela fera l’affaire pour une nuit ! 


Samedi 14 août : Berne - Kandersteg (85,8 km) 

 

La-ville-basse-de-Berne.jpg 

Pas de bol, le temps est gris ! Les clichés ne seront pas terribles ! Je repars quand même à la découverte de la ville. Elle renferme de splendides monuments, comme l’immense palais fédéral, la tour de la Prison et la curieuse tour de l’Horloge. Les rues commerçantes sont bordées de maisons aux arcades. De nombreuses fontaines jalonnent également la ville, notamment celle de l’Ogre. La tour de la cathédrale est malheureusement en partie masquée par des échafaudages. C’est à croire que toute la Suisse est en rénovation ! Elle comporte par contre un superbe tympan sculpté. Un peu plus loin, le quartier de la Matte possède de jolies maisons basses. Aussi au bord de la rivière de l’Aare, quelques ours vivent dans une sorte de fosse. Il est à nouveau bien tard lorsque je prends la route. J’emprunte l’itinéraire prévu pour les cyclistes afin de rejoindre Thoune. Cela pour éviter la circulation ! Il longe agréablement la rivière, traversant de temps en temps forêts et champs. La silhouette des premières montagnes alpestres commence à se dessiner au loin. A Thoune, les maisons de la rue principale sont sur deux niveaux. Le toit de l’étage inférieur sert de terrasse pour le commerce supérieur. Le rathaus (hôtel de ville) est à nouveau caché par un écran de cinéma de plein air. Le château du 12ème S domine la petite ville du haut de son escarpement rocheux. Jugeant que l’itinéraire pour les cyclistes s’écarte trop du lac de Thoune, j’emprunte la petite nationale jusque Spiez. La cité possède également un joli château en bordure de l’eau. La pluie se met à tomber, lorsque je prends l’itinéraire 64 jusque Kandersteg. Le paysage est totalement masqué par les nuages. Dans un premier temps, ça grimpe doucettement jusque Frutigen. De nombreux chalets en bois, typiques à la Suisse, sont construits dans les villages traversés. Puis, le bitume cède sa place à un sentier en gravier. De sacrés raidillons n’arrangent pas ma progression. De plus à cause de la pluie, ma roue arrière patine. Et me voilà en train de pousser le vélo sur des pentes terribles ! Et c’est franchement épuisant ! La piste longe en sens inverse la rivière Kander qui dévale la montagne avec fracas. J’arrive ainsi dans un état lamentable à Kandersteg (1124 m), trempé de la tête aux pieds et bien fatigué. Pour la suite du parcours, je suis obligé de prendre le train qui traverse le massif montagneux par un tunnel. De toute façon, je n’ai pas le choix ! En effet, la petite ville est coincée dans un cul-de-sac. Comme il est déjà tard et que je commence à avoir froid, je plante la tente au camping du coin. Il pleut encore et encore. Pourvu que cela cesse durant la nuit ! Aujourd’hui, j’ai passé mon millième kilomètre.

  

Les-chalets-dans-la-montagne.jpg 


Dimanche 15 août : Kandersteg - Mergozzo (I)(90,5 km)

 

Toute la nuit, il a plu ! Ce matin, ça s’est un peu calmé, mais il tombe encore des gouttes ! Au sommet des montagnes, quelques glaciers et névés montrent enfin le bout de leur nez. Le prix du camping est affolant, plus de 15 euros. Mais vu les conditions climatiques d‘hier, il était plus sage d’éviter le bivouac ! Après quelques réglages sur le vélo, j’embarque dans le train qui fait la liaison pour les véhicules motorisés vers Goppenstein. Les voitures sont garées à la queue leu leu sur les wagons. Le trajet ne dure pas bien longtemps. Puis, je dévale à vélo rapidement les derniers kilomètres jusque la vallée du Rhône. La vitesse est grisante, dépassant les 65 km/h. Aussi, de nombreux nuages restent accrochés au sommet des montagnes. Je  prends ensuite la direction de Brigue, situé à une vingtaine de kilomètres.

 

Nuages-dans-les-montagnes-de-la-vallee-du-Rhone.jpgLe-chateau-de-Brigue.jpg 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
Je pique-nique sur un banc alors que le temps menace à nouveau. La petite ville possède un beau château avec une cour intérieure cernée d’arcades. Puis, il me faut attaquer la grimpette du fameux col du Simplon sur 24 km. La pluie se met à tomber dès que j’entame la montée. Et cela empire au fil de ma progression ! L’eau ruisselle sur la chaussée, et les automobilistes m’éclaboussent à chaque dépassement. Au bout de 3 ou 4 km, je suis trempé jusqu’aux os. La mort dans l’âme, je décide de faire demi-tour sur Brigue. Un train, identique à celui du matin, traverse le massif montagneux par un tunnel. Je suis quand même bien frustré ! En effet, j’avais fait du Simplon un défi personnel. Je quitte ainsi la Suisse par la petite porte, pour Iselle en Italie. Le trajet est une nouvelle fois très court. Les douaniers ne font pas de zèle, et me laisse passer. La route descend longuement jusque Domodossola, dans l’impressionnante vallée de la Diveria. Elle s’aplanit ensuite le long de la rivière Toce. Après une journée pluvieuse, les premiers rayons du soleil font enfin leur apparition en début de soirée. Ce qui m’incite à bivouaquer dans un bosquet, juste avant le village de Mergozzo ! 

 

 

Lundi 16 août : Mergozzo - Lenno (111,1 km)

 

Le-petit-port-de-Mergozzo.jpg 

Cette nuit, il y a eu du remue-ménage autour de la tente. J’ai parfois entendu des craquements de branches et des cris d’animaux. La route longe le joli lac de Mergozzo, avant de rejoindre Verbania. Sur la chaussée, un superbe furet vient d’être percuté par une voiture. Quelle tristesse ! Le lac majeur s’étale magnifiquement entre les montagnes escarpées. Je ne m’attarde pas dans cette petite ville sans réel intérêt. J’emprunte alors le bateau, qui fait la liaison jusque Laveno sur la rive opposée. Je quitte ainsi le Piémont pour la Lombardie. Le temps change, le soleil se cache derrière une sorte de brume de chaleur. Derrière moi, les sommets des montagnes sont toujours encombrés par les nuages. J’atteins ainsi facilement le lac de Varese. Par contre, il est souvent masqué par des bâtiments ou des arbustes. Après avoir cassé la graine, je survole Varese qui s’avère peu intéressant. La route devient vite désagréable avec son lot d’automobilistes. Après quelques bonnes côtes, elle rejoint Côme. Les ruelles étroites sont bordées de belles maisons anciennes. La petite ville renferme plusieurs édifices religieux intéressants, comme l’impressionnant Duomo ou l’église plus modeste de San Fedele. Je goûte à la célèbre glace italienne, avant de reprendre mon parcours sur la côte Ouest du lac de Côme. Sur la route, je visite l’église de San Abbondio avec sa série de toits inclinés. J’arrive juste à temps, car un homme vient d'arriver pour fermer les portes. Les derniers rayons de soleil embrasent l’étendue d’eau. De nombreux villages aux somptueuses villas sont accrochés sur les hauteurs. Naïvement, j’espère trouver un endroit isolé pour bivouaquer. Mais les montagnes tombent abruptement dans le lac, ne laissant pas un centimètre carré pour planter la tente ! Je pédale encore et toujours, alors que la nuit commence à tomber. Finalement, j’aperçois un petit camping à Lenno. C’est une nouvelle fois bien cher, mais cela fera l’affaire !  

Village-perche-sur-le-lac-de-Come.jpg

       Moi sur le lac Majeur

 

    
Mardi 17 août : Lenno - Palazollo sull’Oglio (104,1 km)

 

Le camping se trouve entre la route et le lac de Côme. Du coup, le passage des voitures m’a régulièrement réveillé. Je poursuis les quelques kilomètres qui me séparent de l’embarcadère de Tremezzo. Le bateau fait immédiatement la traversée jusque Bellagio. Un motard français me confirme une météo exécrable au sommet du Simplon ce dimanche dernier. Par contre aujourd’hui, c’est plein soleil ! Le village comporte de superbes villas et une vieille église. Puis, mon parcours longe agréablement le lac de Lecco, un bras du lac de Côme. Le paysage est vraiment splendide. Juste avant d’arriver dans la ville de Lecco, je dois emprunter deux tunnels de deux kilomètres chacun. Normalement, c’est interdit aux vélos, mais il n’y a pas d’autres routes ! Je pique-nique face à l’étendue d’eau, dans la banale petite ville. La nationale jusque Bergame est sans aucun intérêt. C'est pourquoi j’enchaîne les kilomètres le nez dans le guidon. Bâtie sur une colline, la ville haute est un  réel enchantement.  

La-ville-haute-de-Bergame.jpg

La-place-medievale-de-Bergame.jpg 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une bonne côte le long des remparts de la citadelle permet d’y accéder. Sur la place Piazza Vecchia, la cathédrale Duomo, la basilique Santa Maria Maggiore et la chapelle Colleoni sont édifiées côte à côte. Elles renferment de superbes fresques, des tapisseries, des statues et du mobilier religieux. Je visite rapidement la ville basse, principalement autour de la place Piazza Matteotti et de la rue Pignolo dans un vieux quartier. Je traverse ensuite un site d’usines désaffectées pour sortir de la ville. Mais quelle galère ! On me renvoie à chaque fois sur l’autoroute. Il faut dire que les indications en Italie du Nord ne sont vraiment pas précises ! C’est comme pour les distances kilométriques, elles oscillent constamment. Une fois, 30 km, puis 20, puis de nouveau 30... Bref, je ne me fis plus qu’à ma carte routière ! Je poursuis mon chemin en direction de Brescia. Cette route inintéressante est désormais complètement plate. J’aperçois au loin la chaîne de montagnes que je viens de quitter. Après une vingtaine de kilomètres, je cherche un endroit pour bivouaquer autour de Palazollo sull’Oglio. Je plante la tente dans un champ humide, au bord d’une piste cyclable. Mon bivouac n’est pas discret, mais presque personne ne circule à cette heure tardive. Enfin, on verra bien !

 

 

Mercredi 18 août : Palazollo sull'Oglio - Castegnato (28,2 km) 

                                                Neuville-en-Ferrain

  

 

Les-champs-pres-de-Brescia.jpg 

L’accident ! ! !

Plusieurs dames ont aperçu mon bivouac. C’est pourquoi je décampe assez tôt pour éviter les problèmes. La tente est complètement trempée par la rosée. Je reprends la même route qu’hier en direction de Brescia. Le paysage est toujours monotone, sans relief. J’avale ainsi les kilomètres à grande allure. Juste avant la petite ville de Castegnato, je laisse passer un train qui freine mon élan. Dès les barrières relevées, une voiture me rase de très près lorsque je me relance. Apeuré, je fais un écart sur la droite. Ma roue se prend dans le rail. Et patatras, je fais un valdingue, tombant lourdement sur l’épaule ! Le véhicule ne s’arrête même pas, c’est celui qui suit qui vient prendre de mes nouvelles. Lorsque je me relève, je sens que quelque chose ne va pas. La douleur me rappelle une certaine cassure à la clavicule, lors d’un combat de judo il y a quelques années. Le conducteur appelle aussitôt une ambulance. Il embarque également mon vélo et mes sacs dans sa camionnette. Mais sans les papiers, je ne suis pas inconscient ! On m’emmène alors aux urgences de la clinique Santa Anna de Brescia. Pour se faire comprendre, c’est assez folklo ! Personne ne parle français, ni anglais, même pas les médecins ! Enfin, tout se passe dans la bonne humeur, les infirmières sont même aux petits soins pour moi. Et ça n’est pas désagréable ! Par contre, je crains pour la suite de mon aventure. Après les radios, le verdict tombe : fracture de la clavicule, donc immobilisation de l’épaule pendant minimum trois semaines. Une infirmière originaire d’Arras m’explique enfin cela dans la langue de Molière. C’est quand même beaucoup plus facile ! Plusieurs choix se présentent à moi. En vacances en Slovénie, ma soeur Céline et Jérôme se proposent pour venir me chercher, et passer les derniers jours ensemble. Finalement, pour ne pas perdre l’avantage d’un rapatriement gratis, je décide de rentrer à la casa. Tout s'organise par téléphone avec l‘assurance ! Un taxi passe me prendre pour récupérer dans un premier temps mes sacoches. Le conducteur a un mal fou à trouver la rue du gars, et le numéro de téléphone ne répond pas. Du coup, j’ai peur de m’être fait berner ! Après maintes recherches, l’adresse correspond à une petite entreprise. L’homme, nommé Oscar Braga, m’amène ma fidèle monture et mon matériel. Ouf ! Je récupère mes biens, puis file jusque l’aéroport de Milan. L’avion décolle à 18 h 15. Avec un seul bras, il est difficile d’organiser les sacoches pour l’enregistrement. Le trajet pour Lesquin dure trois heures, comprenant une petite heure de transit à Lyon. Puis, un taxi m’emmène jusque chez mes parents à Neuville, où mon frère Guillaume m’attend. En effet comme ma maison est louée, je ne peux rentrer chez moi ! Mon vélo est resté en Italie, car j’ai l’intention ferme de poursuivre l’expédition dès mon rétablissement.

 

 

Donc stand-by pour trois ou quatre semaines.

C’est moche, mais ce sont les risques de partir à l’aventure !

 


 

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28 janvier 2015 3 28 /01 /janvier /2015 09:06

                                                                 

Lundi 27 et Mardi 28 septembre 2010 :  Neuville en Ferrain - Castegnato - Sirmione (59,8 km) 

 

        2.Mon vélo et les rails de la chute      1. Le groupe de secours en Italie 

 

Après plus de cinq semaines de convalescence, je peux redémarrer l’aventure. Cependant, ma motivation s’est atténuée au fil des semaines. Aussi sans aucun entraînement, je me demande si ma clavicule va tenir le coup. Enfin, on verra bien ! Mes parents m’emmènent à Lille pour prendre le train de 17 h 30. Après une heure de trajet, ma sœur m’attend à la gare du Nord de Paris pour m’aider à porter mes lourds sacs dans le métro. Quand on n'a pas le vélo, c’est vraiment pénible ! Mon beau-frère Jérôme et le petit Hugo nous rejoignent à la gare de Bercy à bicyclette. Franchement, je ne sais pas comment j’aurais fait s’ils n’étaient pas là ! Après avoir picolé une bière ensemble, j’embarque dans le train de nuit à 20 h 30 pour Brescia. Les cabines sont vraiment minuscules pour six personnes. Je ne peux même pas rentrer mes sacs bien trop volumineux. Le contrôleur m’indique de les laisser dehors, en attendant de trouver une autre place. Entassés les uns sur les autres, je discute principalement avec une famille de péruviens. Enfin, plus particulièrement avec la fille (charmante entre nous !) qui parle bien l’anglais. Ils sillonnent l’Europe pendant un gros mois (un peu comme les américains !). Je finis par les quitter pour m’installer dans une autre cabine, avec deux gars d’origine africaine. Je tente de roupiller malgré le bruit répétitif des rails de chemin de fer. Vers 5 h du matin, la douane italienne nous réveille pour contrôler les sacs et les valises. Par chance, on n'a pas touché aux miens ! Tant et si bien que le train a pris plus d’une heure de retard ! Après encore un arrêt prolongé en gare de Milan, j’arrive enfin à Brescia à 8 h du mat. Raphaël, l’un des deux blacks, me donne un coup de main pour sortir mes bagages jusque la sortie de la petite gare. Bien sympa ! Malgré la proposition d’Oscar (l’homme qui garde mon vélo) de venir me chercher au terminus des bus de Mandolossa, je préfère me rendre chez lui en taxi. Même si c’est plus cher, c’est beaucoup plus facile ! J’arrive donc à Castegnato rapidement. Mon vélo est déjà dehors, prêt à être chargé. Monsieur Zanini, l’homme qui a appelé l’ambulance, est également présent. Après les retrouvailles, je prépare tranquillement ma «bicycleta». Nous faisons un dernier cliché pour le souvenir, et c’est reparti ! A la sortie du village, les rails qui m’ont fait chuter sont vraiment mauvais. A mon avis, je ne suis ni le premier, ni le dernier ! Je déambule ensuite dans les quartiers de Brescia sous le soleil, notamment autour de la gigantesque cathédrale baroque. Malheureusement, beaucoup d’édifices sont en travaux. Les ruines du Capitolium ne sont pas franchement impressionnantes. Il s’agissait d’un temple dédié à des dieux romains. Une petite grimpette me mène ensuite au château féodal qui surplombe la ville. Je me balade à pied un long moment dans l’enceinte. Puis, la route en direction de Vérone ne présente aucun intérêt. En plus de la circulation, ce n’est qu’une succession d’entreprises, de dépôts ou de centres commerciaux. J’atteins ainsi facilement la petite ville de Desenzano del Grada, au bord du lac Majeur. Elle possède un mignon port de plaisance, proche d’une vieille place entourée d’arcades. Après la visite de l’église, je grimpe à nouveau au château pour la vue sur la petite ville et le grand lac. Le paysage est cependant moins impressionnant qu’à Côme. De plus, tout est noyé dans la brume. D’ailleurs, un orage menace au loin. Je remonte rapidement à vélo pour me rendre à Sirmione, au bout d’une petite péninsule. Les vélos ne peuvent même pas rentrer dans le village hyper touristique ! Je préfère alors faire demi-tour jusqu’au camping le plus proche, pour éviter de me faire voler les sacoches. De toute façon, la nuit commence à tomber. En effet, les jours sont beaucoup plus courts. Et franchement, je me suis fais avoir !

 

   3.Brescia    4.Le petit port de Desenzano del Grada 

 

                                                                                                          

Mercredi 29 septembre : Sirmione - Vérone (48,4 km)

   1.Au bout de la péninsule de Sirmione 

 

 

Le gardien du camping a fait des rondes toute la nuit. Bizarrement, cela ne m’a pas rassuré. C’est pourquoi je n’ai pas très bien dormi ! La propriétaire m’autorise à laisser tout mon attirail à la réception, le temps de faire un aller-retour jusqu’au village historique de Sirmione. Je pédale ainsi sans bagages, sous un soleil de plomb. J’abandonne mon vélo à l’extérieur, le temps de la visite. Il est déjà 10 h, mais le flot de touristes n’a pas encore envahi les ruelles du village. Un beau château fort domine les maisons alentour aux façades colorées. La vieille église Santa Maria Maggiore possède un beau portail et quelques fresques du 15ème S. Je marche ensuite le long de la côte jusqu’au bout de la péninsule. Le coin parsemé d’oliviers est vraiment paisible. Au loin, les ruines d’une villa romaine sont visibles. Cependant, il faut payer un droit d’accès pour la visite. Aussi, la mignonne église en pierres San Pietro in Marino est fermée pour rénovation. Les touristes commençant à affluer, il est temps de rejoindre le camping pour récupérer ses affaires ! Même si le camping est bien équipé, le tarif de 16 euros pour une nuitée est tout de même excessif. Oscar m’avait pourtant prévenu «Ils attendent le touriste là bas !» Par contre, il faut quand même reconnaître que l’accueil est très sympa. Je reprends la fameuse nationale en direction de Vérone. Après une petite dizaine de kilomètres, je bifurque vers Peschiera pour avoir un aperçu de la ville. Elle est bâtie sur plusieurs petits îlots. Puis, la route devient infernale. Camions et voitures me rasent de très près. La circulation s’amenuise un peu à la bifurcation pour l’autoroute vers le Nord. Pendant quelques kilomètres, des champs d’arbres fruitiers (principalement des vignes et des kiwis) succèdent aux entrepôts et aux centres commerciaux. Je pique-nique à l’entrée de Vérone sur un banc. Il est presque 15 h, lorsque je pars à la découverte de la ville. L’entrée des églises étant payante, j’achète alors un pass qui permet de visiter les quatre principales. La façade de l’église San Zeno est en rénovation. A l’intérieur, je découvre notamment la célèbre porte de bronze et le triptyque de Mantegna. Le cloître attenant à l’édifice est également bien joli. La cathédrale Duomo présente une belle façade blanche. Elle renferme entre autres de belles fresques et un baptistère roman. Je poursuis la visite de la ville par le château moyenâgeux et les splendides arènes romaines. Au centre, une haute tour domine les places Piazza delle Erbe et Piazza dei Signori. Non loin, la maison de Juliette, rendue célèbre par Shakespeare, est un vrai nid à touristes. Franchement, ce n’est pas ma tasse de thé ! Aussi, je ne peux visiter l’église Ste Anastasie, car une célébration vient de démarrer. Il est déjà bien tard lorsque je tente de rejoindre à l’aveuglette le camping situé sur une colline. La grimpette est bien difficile à cause des pentes très élevées de la route. Je pose d’ailleurs pied plusieurs fois. Au sommet, je plante discrètement la tente derrière des arbustes, au pied des remparts de la forteresse San Pietro. Pour la petite histoire, le camping officiel est situé à peine à 200 m. 

   2.L'église San Zeno de Vérone 

 

 

Jeudi 30 septembre : Vérone - Montegrotto Terme (122 km)

    1.Vérone depuis la tour Lamberti 

 

Je décampe relativement tôt car une grosse étape m’attend. Je descend la colline à grande vitesse jusqu’au centre de Vérone. Le soleil est malheureusement masqué par un voile de brume. L’église Ste Anastasie est la plus grande de la ville. Une nouvelle fois, de nombreuses chapelles intérieures sont en rénovation. Les voûtes sont par contre magnifiquement décorées de fresques. Je monte ensuite les 368 marches de la tour du Lamberti, pour jouir du panorama sur la ville. L’accès est un peu onéreux, mais ça vaut vraiment le coup ! Je m’apprête à reprendre la route, lorsqu’un autochtone m’indique un parcours cycliste le long de la rivière Adige. Au départ, le sentier est bien boueux. Par chance, il se transforme en graviers en sortant de la forêt. Je quitte ainsi agréablement Vérone, loin du trafic routier. A cause de mon volumineux vélo, une sorte de borne posée au milieu d’un petit pont m’empêche de passer. Spontanément, le garde champêtre du coin vient m’aider à porter ma monture. Bien sympa ! Les méandres du cours d’eau rallongent considérablement mon parcours. C’est pourquoi après une dizaine de kilomètres, je m’enfonce dans la campagne. Sans carte précise, il est bien difficile de se repérer. Aboutissant dans des culs-de-sac, je fais ainsi plusieurs allers-retours. Et ça a le don de m’énerver ! Du coup, je finis par rattraper la nationale et sa circulation infernale. Après la petite ville de San Bonifacio, la route devient un peu plus agréable. Puis, je casse la graine au bord d’un cour de tennis dans le village de Lobia. Je fais ensuite quelques kilomètres supplémentaires à cause de ces foutues indications imprécises ! Fort heureusement, la route est relativement plate, s’engageant entre les monts Berici et les collines Euganei. En fin d’après-midi, les nuages envahissent le ciel. Je rejoins alors rapidement la ville de Padoue. Je réserve la visite pour demain, car il est déjà bien tard. Pour l’heure, il faut trouver à loger ! Deux gars, limite clochards, m’aiguillent vers l’auberge de jeunesse. Comme je n’ai pas d’agréables souvenirs avec ces établissements (cf. les journaux de route de mes précédentes aventures), je préfère pousser jusqu’au camping de Montegrotto Terme. Il est situé à une petite dizaine de kilomètres, au pied des collines Euganei. Tout en cherchant vainement un endroit pour bivouaquer à la sauvage, j’arrive à destination alors que la nuit est presque tombée. Le prix est une nouvelle fois exorbitant, mais je n’ai pas trop le choix ! A cause de tous mes aléas de parcours, j’ai facilement pédalé une bonne vingtaine de kilomètres à rien !

    2.Moi à vélo le long de la rivière Adige 

 

 

Vendredi 1er octobre : Montegrotto Terme - Fusina (64,3 km)

  1.La basilique de St Antoine de Padoue 

   

                                                                         

Pas de bol, il pleut ! Quelle poisse ! Je reprends la route de la veille en sens inverse, pour rejoindre Padoue. Un marché se tient sur chaque place du centre. Ce qui met pas mal d’animation dans la ville ! Aussi, des centaines de policiers sont déployés dans le quartier. Mais je ne sais pour quelle raison ! Je visite ensuite le baptistère de la cathédrale, dont les murs et le plafond sont entièrement recouverts de magnifiques fresques du 14ème S. Elles représentent des scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament. Je me fais rappeler à l’ordre par l’homme au guichet, car les photos sont interdites. L’intérieur de la cathédrale est par contre beaucoup plus sobre. Les murs blanchis à la chaux rendent l’édifice très lumineux. Je traverse ensuite la ville pour la chapelle de Scrovegni. La queue d’attente à l’entrée finit par me faire renoncer à la visite. Franchement, j’ai bien du mal à m’orienter dans cette ville ! Dans l’immense basilique San Antonio, un nombre incroyable de pèlerins se massent autour des reliques et de la tombe d’Antoine de Padoue. Les photos sont une nouvelle fois interdites. Certainement pour vendre leurs cartes souvenirs à prix d’or ! Lorsque je reprends la route, il se remet à pleuviner. Comme bien souvent à la sortie de la ville, il y a une circulation terrible. A chaque dépassement, les véhicules m’éclaboussent. Je profite de quelques arbres pour manger un morceau à l’abri de la pluie. Je longe ensuite le canal de la rivière Brenta, en direction de Venise. De nombreuses villas sont construites sur les berges. Certaines sont vraiment somptueuses, d’autres ne sont même plus entretenues. La façade de la villa Pisani est malheureusement en rénovation. Ce palais est surtout devenu célèbre grâce à la rencontre de Hitler et de Mussolini. En cette fin d’après-midi, la pluie a enfin cessé. Je décide finalement de planter la tente dans un camping, plutôt que de réserver une chambre coûteuse à Venise. Cependant, le tarif est quasi identique à celui de la veille. On en profite dans le coin ! Le seul inconvénient est que la cité lacustre se situe encore à une quinzaine de kilomètres. Par contre, le village de Fusina se trouve au bout d’une petite rue en cul-de-sac, non loin d‘une usine pétrochimique. Le gros avantage est qu’il est possible de rejoindre Venise par bateau. Enfin, on verra demain ! Ma tente est plantée au bord de la mer, avec vue sur la ville de Marco Polo au loin.

  2.Le canal de la Brenta 

  

Samedi 2 octobre : Visite de Venise

  1.Les gondoles à Venise

                            2.Venise depuis le Campanile                      

 

Au vu du tarif pour les bateaux, je décide de prendre le bus pour rejoindre Venise. Cela coûte quand même plus de dix fois moins cher ! Après un changement à Mestre, j’arrive à destination sous le coup des 9 h du mat. Le trajet n’a duré qu’une grosse demi-heure. Tout mon barda est resté au camping, je n’ai pris que le strict minimum. Je traverse la ville à pied en longeant le Grand Canal, en direction de la célèbre place San Marco. Aucun véhicule ne circule dans la cité des Doges. Par contre, les ruelles grouillent de monde. Cela finit même par devenir oppressant. Et franchement, ça me saoule ! A tel point qu’il me faut un bon moment pour commencer à apprécier la promenade. Ceci dit, la ville est super jolie ! Les rues sont bordées de belles maisons colorées, entrecoupées par les canaux. Forcément, Venise sans les gondoles ne serait pas Venise ! Je ne vais pas faire un descriptif de tout ce que j’ai vu, car j’ai bien crapahuté. Juste l’essentiel, promis ! Pour plus de détails, vous pouvez toujours acheter un guide touristique ! Dans un premier temps, je déambule autour de la place San Marco. Il y a une longue file d’attente pour visiter les monuments les plus connus. Je grimpe au sommet de la tour du Campanile, pour admirer la ville depuis les hauteurs. Forcément, ce n’est pas gratuit ! L’intérieur de la basilique renferme de superbes mosaïques, mais surtout un magnifique retable en or avec des émaux incrustés. Je me balade ensuite dans le quartier de San Polo et Santa Croce. Le pont du Rialto est assailli par les touristes. Pourtant, je trouve que ce n’est pas le plus beau coin de la ville ! Même si l’on peut admirer les superbes palais qui bordent le Grand Canal ! De très nombreuses églises, plus ou moins intéressantes, jalonnent la ville. Les accès de certaines sont payants. Il faut cependant faire un minimum attention aux dépenses, car on peut vite se faire plumer ! De plus, les photos sont interdites à l’intérieur des édifices. Et malheur à celui qui tente l’expérience ! Il se fait vite réprimander par un gardien. Hors cérémonie religieuse, je ne vois vraiment pas en quoi cela dérange ! M’enfin ! Lorsque j’arrive à l’église des Frari, les portes ferment juste devant mon nez. Après avoir bien marché, je m’attable en terrasse d’un restaurant pour manger une pizza avec un bon verre de vin. Cela me change de mes pâtes quotidiennes ! Cependant, le service est un peu trop express à mon goût. De plus, une taxe (certainement tombée du ciel) est ajoutée à l’addition finale. Pas très honnête tout ça ! La nuit tombée, les rues se vident tout doucement. Ce qui donne une atmosphère particulière à la ville ! Le bus m’amène jusque la gare de Mestre pour ma correspondance. Il me faut patienter encore une bonne heure en compagnie d’un gars d’origine africaine. Bien sympa en tout cas ! Je retrouve finalement avec bonheur ma tente et mon duvet douillet, au camping de Fusina.

 

 

Dimanche 3 octobre : Visite de Venise

  

  1.Lever de soleil sur Venise 

 

 

Au réveil, le soleil à l’horizon donne une magnifique couleur orangée à la mer. C’est féerique ! Je rate ensuite malencontreusement mon bus pour quelques minutes. J’arrive finalement à bon port avec une heure de décalage sur mes prévisions. Je rejoins directement l’immense église des Frari. Cependant, il n’y a pas de visite car la messe du dimanche va commencer. Tant pis, j’abandonne ! C’est dommage car il paraît que c’est l’une des plus intéressantes de Venise. Celle de San Pantalon possède de surprenantes fresques peintes au plafond. Une autre a une tour penchée, prête à s’effondrer. Un peu plus loin, le quartier de Dorsoduro est bien moins fréquenté par les touristes. Ce qui rend la balade plus agréable ! Malheureusement, beaucoup de monuments sont fermés. La foule réapparaît au niveau des quais des Zattere. Le pont de l’Accademia offre une belle vue sur le Grand Canal et ses palais. A la place San Marco, je dois demander à plusieurs personnes pour me tirer en photo. C’est quand même incroyable, les gens se baladent avec des appareils reflex coûteux, et ne savent même pas cadrer une vue ! C’est finalement une Australienne parlant français qui fait mon bonheur. «Je parle de photo, pas de confusion !». Il ne me reste plus qu’à rallier l’ancien quartier juif dans Cannaregio. C’est le premier ghetto de l’histoire, datant du 16ème S. Le mot est d’ailleurs originaire de Venise. «Bon, je ne le savais pas non plus !». Je tente de visiter quelques églises alentour, mais elles ont portes closes en ce jour dominical. Cette fois, c’en est fini avec les édifices religieux de Venise. Parce qu’à force, je vais finir par me retirer dans un monastère ! «Quoique chez les trappistes !». En fin d’après-midi, je reprends le bus pour Fusina. Demain, je poursuivrai ma route vers d’autres horizons. Aussi à l’heure où j’écris ces lignes au bar du camping, je me fais bouffer par les moustiques !

    2.Moi sur la place San Marco 

 

Lundi 4 octobre : Fusina - Téglio Vénéto (96,1 km)

 

 1.Les bateaux du pont mobile à Caposile 

 

   

 

Après avoir remballé tout mon matériel, je reprends le même parcours du bus jusque Mestre. A l’entrée de la ville, quelques prostitués tapinent au bord de la route. Comparé aux deux derniers jours, le temps semble se dégrader. J’abandonne l’idée de rejoindre la place San Marco de Venise avec mon vélo. J’aurais aimé immortaliser l’évènement par une photo, mais les escaliers des passerelles et la foule rendent l’expédition bien trop difficile. Tant pis ! La route qui suit est de nouveau sans intérêt, avec un gros trafic routier. C’est pourquoi après Portegrandi, je bifurque vers le Parc de la Lagune. Des centaines d’îlots se détachent de la côte, sous un ciel de plus en plus menaçant. Je croise deux cyclos du Nord de l‘Angleterre. Barry et Terry sont frères, ils réalisent une boucle depuis Venise à travers la Slovénie et la Croatie. Je leur tire mon chapeau (ou plutôt ma casquette !), car ils ont approximativement la soixantaine. Je mange un morceau au village de Caposile. Etrangement, plusieurs grandes barques servent de soutènement au pont mobile. A Musile di Piave, tous les dix mètres, il y a des panneaux de début et de fin de piste cyclable. C’est complètement absurde ! Aussi, il est bien difficile de se réapprovisionner entre midi et 15 h, car les Italiens font la sieste. J’arrive à Portogruaro en fin d’après-midi. La tour de l’église penche dangereusement. Le centre est assez joli, la petite ville possède deux moulins à eau situés côte à côte. A peine arrivé, j’essuie une averse monumentale. Depuis le temps que ça menace ! J’attends une légère accalmie avant de repartir. Après une grosse dizaine de kilomètres dans la campagne, je plante la tente derrière les arbres un peu à l’écart de la route, non loin d‘un terrain militaire qui semble abandonné. Pourtant, les bâtiments sont éclairés. Bizarre ! D’un coup, il se remet à pleuvoir violemment ! Quelle poisse, d’autant plus que le terrain est complètement boueux ! Je patauge dans la gadoue. Cela risque de ne pas être marrant demain matin !

    2.Mon vélo devant les panneaux de la piste cyclable de Mus 

 

Mardi 5 octobre : Téglio Vénéto - Stupizza (85,2 km)

 

    1.La place d'Udine 

 

La pluie est tombée toute la nuit. Et ça continue encore et encore ! De plus, un vent d‘Est s‘est levé. Bref, je me retrouve dans un sacré bourbier ! Tout mon équipement est trempé et maculé de boue. Aussi, je peine à plier la tente à cause des violentes rafales. Avant de démarrer, je décrotte mes chaussures et nettoie succinctement mes vêtements pour éviter de ressembler à l’homme des bois ! Je reprends alors la route plate et directe pour Udine. Les champs alternent avec de petits bois récents. Bizarrement, les arbres ont été plantés rectilignement. Quelques geais s’envolent à mon passage. Il y a également un nombre incroyable de limaces qui cherchent la chaleur du bitume. Un vrai carnage ! En effet, en plus de la météo exécrable, le trafic routier est incessant. Je quitte ainsi la région de la Vénétie, pour celle du Frioul. A Galleriano, je bifurque sur des routes plus tranquilles, traversant des petits villages. Par contre, il n’y a aucune boulangerie d’ouverte ! C’est finalement à la périphérie d’Udine que je trouve mon Graal. Je casse la graine dans un parc, avant d’entamer la visite. Le centre est bien joli avec ses petites places pavées, bordées de jolies maisons aux arcades. Quelques bâtiments historiques méritent également le coup d’œil. La grande église Duomo est malheureusement fermée à cette heure. Je poursuis alors mon bonhomme de chemin jusque Cividale. Les montagnes des Alpes Juliennes se profilent au loin. A la sortie d'un supermarché de la petite ville, une dame d’une cinquantaine d’années m’interpelle. Anne-Marie est une Française expatriée en Italie. Venant de Montreuil-sur-Mer, elle paraît émue de parler de la région de son enfance avec un Chti. Elle m’offre même un café au bar d’en face. Une grosse demi-heure plus tard, je m’enfonce dans les montagnes alors que le soleil fait enfin son apparition. La route longe la vallée de la rivière Natisone, en direction de la Slovénie. Après quelques kilomètres, je bivouaque derrière des arbustes, sur un terrain privé qui semble à l’abandon. Le grondement du cours d’eau à proximité finit par me bercer. Tiens, il se remet à pleuvoir, cela faisait longtemps !

    2.Ruisseau devant les Alpes Juliennes 

 

 

 

Mercredi 6 octobre : Stupizza - Sovodenj (82,7 km)

 

            3. La rivière Idrijca dans les montagnes slovènes   1. A la frontière slovène                            

 

Quelques kilomètres me séparent de la frontière slovène. J’ai hâte de découvrir ce nouveau pays. La route monte doucement dans la vallée de la rivière Nadiža. En fait, c’est le même cours d'eau qu’hier, mais avec un nom slave. Les montagnes sont toutes parsemées de forêts. Les feuilles des arbres se parent des jolies couleurs de l‘automne. De plus, il n’y a quasiment plus de circulation sur la petite nationale. Cela me change du trafic démentiel en Italie ! La route bifurque ensuite vers Kobarid, situé dans la vallée de la Soca. La ville est tristement célèbre à cause une bataille meurtrière durant la Première Guerre mondiale. Je pédale ainsi facilement le long de la rivière jusque Tolmin. Quelques percées du soleil me réchauffent un peu le corps. Je décide ensuite de me rendre aux gorges à proximité de Zatolmin. Je laisse alors mon vélo à la billetterie, et m’aventure à pied. Le sentier est devenu très glissant par les récentes pluies. D’ailleurs, ça dégouline de partout ! La montée des eaux de la rivière Tolminka empêche malheureusement d’apercevoir la source thermale. Un peu plus loin, un gros rocher s’est coincé entre les deux parois du canyon de la rivière Zadlašcica. A cause de sa forme et de la mousse qui le recouvre, il évoque une tête d’ours poilu pour les habitants du coin. Après une bonne heure de randonnée, je récupère mon vélo pour attaquer en sens inverse la côte qui me sépare de Tolmin. Je mange ensuite un morceau au centre de la petite ville. Le vent se lève d’un coup, ramenant de gros nuages gris bien menaçants. Et bien sûr, je l’ai dans le pif ! La route continue de longer agréablement la rivière Soca, puis dévie sur la rivière Idrijca. Je quitte ensuite la petite nationale pour m’enfoncer dans la montagne. A partir de Cerkno, ça grimpe vraiment sec ! La pente atteint même par endroits 12 %. Après 7 km d‘ascension, j’atteins le sommet au village de Kladje, situé à 787 mètres d’altitude. Soit un dénivelé de plus de 600 mètres ! Bonne nouvelle, ma clavicule ne m’a pas gênée ! Je ne m’attarde pas à cause du froid ambiant. La nuit commence à tomber, lorsque j’amorce la descente. J’espère récupérer ainsi plusieurs degrés. Là haut, il fait à peine 8°C ! A la sortie du village de Sovodenj, je plante la tente sur un terrain herbeux complètement trempé. Il faut reconnaître que mon bivouac n’est pas franchement discret. Aussi demain, ça serait bien de passer la nuit dans un camping officiel. Car trois nuits à la sauvage, ça commence à sentir le fennec !

 

  2. La tête de l'ours dans les gorges de Tolmin 

Jeudi 7 octobre : Sovodenj - Ljubljana (61,5 km)

 

    2. Sur le pont des dragons à Ljubljana 

 

Une petite bruine n’a pas arrêté de tomber toute la nuit. Je poursuis la descente dans l’étroite vallée de la rivière Poljanšcica. Le paysage est époustouflant. Il manque juste un peu de soleil pour débarbouiller ce ciel grisâtre. De plus, cela réchaufferait l’atmosphère, car il fait vraiment froid ce matin ! J’atteins ainsi très facilement Škofja Loka. Quelques automobilistes et motards klaxonnent ou me font un signe pour m’encourager. Cela fait toujours plaisir ! La place principale de la petite ville est entourée de belles demeures aux façades renaissance. L’imposant château domine la cité depuis une colline. La circulation est de plus en plus dense à l’approche de la capitale slovène. La route devient même interdite aux vélos. Cependant n’ayant d’autres alternatives, je finis par l’emprunter quand même ! Il ne me reste plus qu’à croiser les doigts pour ne pas rencontrer une patrouille de police. A Ljubljana, je me balade autour de la place Prešeren et de l’hôtel de ville. Aussi, l’église St Nicolas est malheureusement fermée. Tout à coup, deux cyclistes s’arrêtent à ma hauteur, et me questionne sur mon voyage. Ils m’offrent même une bière à une terrasse de café, au bord de la rivière Ljubljanica. Leon est slovène, tandis qu’Adam est irlandais. Et c’est ainsi que nous discutons en anglais pendant presque trois heures. Tant est si bien que ma visite de Ljubljana est reportée à demain matin ! Cela fait parti des imprévus agréables d’un voyageur à vélo ! Après une paire de bières locales, je remonte à bicyclette pour rejoindre le camping. Il se situe à environ 4 km au Nord du centre-ville. Ce n’est pas aujourd’hui que ma tente pourra sécher, car il fait vraiment froid à la nuit tombée !

 

    1. La rivière Poljanscica 

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27 janvier 2015 2 27 /01 /janvier /2015 13:25

Vendredi 8 octobre 2010 : Ljubljana - Spodnji log (57,5 km)

 

  1. La place Preseren de Ljubljana

 

A cause de la rosée du matin, la tente est à nouveau détrempée. Décidemment, elle ne séchera jamais ! Cette nuit, il a fait à nouveau très froid. Il est 10 h, lorsque je prends la route pour rejoindre le centre de Ljubljana. Par moments, quelques rayons de soleil finissent par percer l’épaisse couche nuageuse. C’est dingue ce que ça peut vous réchauffer ! La partie la plus jolie de la ville se situe sur les berges de la rivière Ljubljanica. Bâtiments historiques, petites places et édifices religieux se côtoient pour former un agréable ensemble architectural. L’église baroque de St Nicolas renferme de superbes fresques et des orgues ornementés de dorures. Je flâne ensuite autour de la place Kongresni. Elle est malheureusement en travaux. De nombreux bâtiments, pour la plupart administratifs, sont masqués par des palissades. La bibliothèque nationale fut achevée par le célèbre architecte slovène Plecnik. Briques et pierres forment une superbe façade. Après de longues hésitations, je décide de monter au château sur la colline. En effet, l’heure est déjà bien avancée ! J’emprunte alors le funiculaire pour gagner du temps, plutôt que de monter à pied. De plus, mon vélo reste sous la surveillance du gars au guichet. C’est beaucoup plus sûr ! L’enceinte n’est pas franchement intéressante. Par contre, la vue circulaire depuis la tour sur Ljubljana vaut le détour. Je remonte ensuite à bicyclette pour filer vers l’Est. A la sortie de la ville, le trafic routier diminue considérablement. La route longe facilement la rivière Sava, traversant de beaux villages de montagne. Une agréable odeur de feu de bois embaume l’air ambiant. Avant Litija, dans le méandre du cours d’eau, le bitume cède la place à un sentier caillouteux dans la forêt. Une bonne côte me donne du fil à retordre ! Quelques kilomètres plus loin, je plante la tente à la sauvage au bord de la Sava, derrière quelques arbres. Cette nuit, le ciel est bien étoilé. La Voie Lactée est même visible ! J’espère du beau temps pour demain !

 

  2. Ljubljana depuis le château

 

Samedi 9 octobre : Spodnji log - Mostec (86,5 km)

 

  1. Le village de Radece au bord de la Sava

Ce matin, la brume a envahi la vallée. Je poursuis mon chemin le long de la tumultueuse rivière Sava. Le soleil a tendance à montrer le bout de son nez, mais les nuages restent bien accrochés aux cimes des montagnes. Sans trop de circulation, la route est bien agréable dans ce décor naturel. Seule une usine de production hydroélectrique gâche la beauté du paysage. Elle possède cependant une très haute cheminée, assez impressionnante. La vallée commence à s’évaser aux environs de Radece, laissant place à quelques champs. De jolis granges en bois et séchoirs à foin sont disséminés entre les villages. Comme le soleil est revenu, je bombarde le coin de clichés ! Plus loin, une usine de production de bois dénature le village de Sevnica. Il possède cependant un vieux château perché sur une colline. Je casse la graine dans un pré herbu à la sortie de Log. Les montagnes deviennent de plus en plus ratiboisées, à mesure de mon avancée. De nouveau, un autre château, celui de Brestanica, domine la vallée. A partir de Krško, les montagnes disparaissent du paysage. Le coin est enlaidi par de nombreuses usines et une centrale nucléaire. Le cours d’eau est également régulé par des barrages. Je rejoins ensuite Brežice et son château féodal. Malheureusement, une aile est en rénovation, et l’autre est masquée par la végétation. Vers 17 h 30, je prends la direction de la frontière croate, à la recherche d‘un terrain pour bivouaquer. En fait, sans décalage horaire, plus je vais vers l‘Est, plus la nuit tombe rapidement ! Je campe entre deux champs de maïs, à l’écart du village de Mostek. L’odeur qui se dégage me rappelle un peu celle des filatures de lin «din ch’Nord».

 2. Grange isolée dans la vallée de la Sava 

 

Dimanche 10 octobre : Mostec - Zagreb - Rakov Potok (65,5 km)

  1. A la frontière croate

Incroyable, il fait à peine 3° C ! Autant dire que je ne suis pas pressé de quitter mon duvet ! De plus, tout est noyé dans la brume. On ne voit pas à plus de 100 mètres ! La frontière croate est à peine à quelques kilomètres. Les douaniers ont bien l’air étonné de voir un cyclocampeur venant de France. Ce sont d’ailleurs les premiers que je rencontre, car la Croatie ne fait pas encore partie de la Communauté Européenne. Je retire quelques kunas à un guichet automatique de Zaprešic, avant de partir à la découverte de Zagreb. Les abords de la ville ne présentent guère d‘intérêt. Durant de nombreux kilomètres, ce n‘est qu’une succession de vieilles usines délabrées et de buildings datant du communisme. Je respire également les gaz d’échappements des nombreux véhicules polluants qui me dépassent. Le soleil fait enfin son apparition sous le coup de midi. Tout le centre de la capitale est bloqué. En effet ce dimanche, c’est le marathon de Zagreb. Et au final, c’est un Ethiopien qui gagne la course (comme souvent d’ailleurs !). Je roule avec précaution, à cause des nombreux rails de tramways qui serpentent dans les rues. Ça me rappelle un sale souvenir ! Dans un premier temps, je déambule autour de la cathédrale et du marché aux fruits et légumes. Il est bien difficile de visiter la ville avec un vélo chargé, à cause des nombreux escaliers et des sens interdits. Il faut alors faire un grand détour pour accéder à la partie haute. Le palais présidentiel et le parlement bordent l’église St Marc. L’édifice religieux est le symbole de la ville. Sa toiture est constituée de tuiles vernissées, représentant les armoiries de Zagreb et des différentes régions de Croatie. Un peu plus loin, la Porte en pierre est devenu un lieu de culte, depuis qu’une peinture de la Vierge à l’Enfant aurait survécu à un incendie au 18ème S. Je redescends ensuite vers la grande place Josipa Jelacica. Dans une rue adjacente, je suis surpris de trouver un troquet proposant de la Karmeliet (clin d’œil aux amis du snooker de Mouscron !). Pour l’heure, je préfère goûter une bière locale. Il faut reconnaître que la ville ne m’a pas trop emballé ! Je quitte alors la capitale de la Croatie vers le Sud, sur une route détériorée et surchargée de voitures. Le stade de football du Dinamo de Zagreb est tout proche. Quelques kilomètres plus loin, au niveau de Rakov Potok, je m’enfonce dans un sentier pour bivouaquer dans un pré herbu. Le froid s’installe à nouveau, lorsque le soleil disparaît sous l’horizon.

  2. L'église St Marc de Zagreb 

 

Lundi 11 octobre : Rakov Potok - Podmelnica (107,5 km)

  1. Vendeuse au marché de Jastrebarsko

Encore une nuit bien fraîche ! La tente est de nouveau trempée par la rosée et la condensation. Fort heureusement, le soleil est au rendez-vous. Je décampe rapidement, car une longue étape m’attend. La route traverse tranquillement des petits villages campagnards. Après plusieurs kilomètres, la brume retombe sur la région. Là franchement, je n’ai pas tout compris au phénomène ! A l’entrée de Jastrebarsko, un marché de fleurs, de fruits et de légumes se tient en plein air. Beaucoup de personnes du coin viennent faire leurs emplettes. J’en profite pour tirer quelques clichés, avec l‘accord des vendeurs. Le soleil réapparaît enfin à mon arrivée à Karlovac. La petite ville se trouve au confluent de quatre rivières. Seul le centre historique vaut le coup d’œil. Il a la forme d’une étoile à six branches. L’église de la Ste Trinité et le monastère franciscain sont fermés, et de nombreux édifices sont en rénovation. Un peu plus loin à Turang, des chars, des canons et les restes d’un avion de chasse sont exposés autour de bâtiments en ruines. Ils témoignent des combats serbo-croates durant les années 90. D’ailleurs, quelques façades de maisons sont encore criblées d’impacts de balles. Cela me rappelle l’incursion en Slavonie (région orientale de la Croatie), lors du tour de la Hongrie à vélo avec José en 2001 ! La route oscille ensuite dans de belles collines boisées. Je pique-nique au village de Krnjak sur une minuscule aire aménagée. Souvent, plusieurs personnes curieuses tentent une discussion avec moi. Cependant, la langue reste le gros problème. Et c’est bien dommage ! Après quelques petites côtes, j’atteins finalement Slunj. De belles cascades se jettent dans la rivière Korana. Certaines passent carrément dans le petit village de Rastoke, situé en contrebas de la route. Vraiment splendide ! Il commence à se faire tard. Et il est bien difficile de trouver un terrain plat dans ces collines envahies de végétation sauvage !Tout à coup dans un sentier, une biche détale juste devant moi. Quelques dizaines de mètres plus loin, je m’installe sur une large pâture, près d’une maison abandonnée.

  2. Barque sur une rivière de Karlovac 

 

Mardi 12 octobre : Podmelnica - Lacs de Plitvice - Korenica (50,1 km)

  1. La Grande Cascade des chutes de Plitvice

Une grosse vingtaine de kilomètres me sépare du parc national des lacs de Plitvice. Je continue à grimper tout doucement à travers les collines. J’entre ainsi dans la région de Dalmatie. Le soleil dissipe rapidement la brume matinale. Pour rallier le camping le plus proche, une petite route monte jusqu’au village de Poljanak. Cependant après plus de 3 km, il n’y a toujours pas de bifurcation pour les lacs. Du coup, je redescends pour emprunter la nationale sur l‘autre rive de la rivière Korana. Tout cela m’a fait perdre un temps fou ! Je grimpe alors jusque l’entrée principale du parc. Il est déjà 11 h ! J’abandonne mon vélo sur une palissade, et enferme mes bagages dans une sorte de gros casier mis à disposition. Le sentier pédestre descend dans la vallée. Seize lacs échelonnés sont reliés entre eux par une série de cascades. La couleur de l’eau, allant du turquoise au vert, et le feuillage automnal des arbres rendent le site vraiment spectaculaire. Je me balade dans ce splendide décor, passant des lacs inférieurs aux supérieurs. Malheureusement, les nuages finissent par masquer le soleil. C’est également le paradis des passereaux. Pinsons, mésanges, rouges-gorges, sitelles et autres ont colonisés le coin. Je discute un moment avec un Canadien, qui me propose une adresse pour passer la nuit. Cependant, il est peu probable que je m’y rende ! Il est 17 h, lorsque je remonte récupérer ma bicyclette. Dans une petite cabane en bois, une dame vend ses gâteaux maison, fourrés aux fruits et au pavot. Un peu comme le makoviec polonais ! Et c’est franchement délicieux ! Deux campings se trouvent à proximité. Le plus proche m’oblige à faire marche arrière. Et ça ne me plaît pas beaucoup ! Le second se situe à une vingtaine de kilomètres dans la bonne direction. Malgré l’heure tardive, j’opte pour la seconde solution. Tant pis si j’arrive dans le noir ! Je continue ainsi à grimper doucement jusque 782 mètres d’altitude. La petite descente m’amène au camping situé juste avant le village de Korenica. La Bosnie-Herzégovine n’est qu’à une dizaine de kilomètres à vol d’oiseau. J’espère enfin atteindre la côte adriatique dans la soirée de demain, pour retrouver un peu de chaleur.

  2. Vue d'ensemble des chutes de Plitvice 3. Couleurs d'automne dans la parc de Plitvice

 

Mercredi 13 octobre : Korenica - Posedarje (108,8 km)

  1. Attention danger mines

Dans la nuit, le vent a séché complètement la tente. Il a malheureusement ramené les nuages gris avec lui. La route continue de monter, sans réelle difficulté. Elle traverse de vastes plateaux à la végétation rase, au pied des montagnes. Quelques bergers profitent de cet espace pour faire paître leurs moutons ou leurs chèvres. Quant aux vaches, elles dédaignent mes prises de photos. D’un seul coup, un chien surgit. A cause de l’animosité de la race canine pour les cyclistes, je pense que c’est pour ma pomme ! Pas du tout, il s’amuse à courir derrière les gros camions ! Un peu fou le cabot, mais c’est bien mieux pour mes mollets ! Je grimpe ainsi facilement jusqu’à un peu plus de 800 mètres. Le vent souffle de plus en plus fort. Au village de Bruvno, la route bascule enfin dans la descente. Au fil des kilomètres, la végétation se fait plus éparse, laissant affleurer des blocs rocheux. Il commence à tomber des gouttes de pluie, lorsque j’entre dans la petite ville de Gracac. Je profite d’une petite cahute pour m’abriter et manger un morceau. La petite ville semble sinistrée. De nombreuses habitations restent à l’abandon. Puis, une dernière côte me fait remonter de plus de 150 mètres. Le pourcentage moyen de la pente reste cependant raisonnable. Dans la descente, c’est l’horreur ! Pourtant en général, on se laisse griser ! Le vent souffle terriblement par rafales, me déportant violemment vers le ravin. Je fais ainsi les 12 km au ralenti, les mains sur les freins. Comme par magie, le paysage est devenu complètement désertique. En bas, dans la large vallée de la rivière Zimanja, quelques panneaux indiquent que le terrain n’a pas encore été déminé. J’arrive ainsi à Posedarje, au bord du lac Novigradsko. Au rudimentaire camping, le propriétaire de forte corpulence m’indique que je peux m’installer gratuitement. D’ailleurs, je suis seul ! Je passe par l’intermédiaire de sa jolie fille pour converser en anglais. En tout cas, c’est bien sympa de sa part ! Les commodités ne sont pas géniales, mais je n’ai vraiment pas besoin de plus !

  2. Les montagnes désertiques avant Posedarje 

 

Jeudi 14 octobre : Posedarje - Sukošan (47,9 km)

  L-eglise-St-Donat-et-la-cathedrale-de-Zadar.jpg

La température de l’air est sensiblement plus élevée. Mais à mon réveil, il pleut ! C’est pourquoi je flemmarde un moment dans mon duvet. En attendant l’accalmie, je décide de classer une partie de mes photos. Le temps reste gris, mais la pluie s’est enfin calmée. Vers 11 h, je remercie Drago, le propriétaire du camping, avant de m’élancer. Posedajre possède un joli port de plaisance au bord du lac Novigradsko. Au centre, il y a au moins cinq pekarna (boulangeries) à 50 m à la ronde. Les villageois doivent se nourrir qu’avec du pain ! La route traverse des collines parsemées d’arbustes et de plantes. D’ailleurs, une agréable odeur d’anis embaume l’air. Surtout lorsque les gaz d‘échappement se dissipent ! Comme souvent dans les pays de l’Est, les gens vendent leurs produits à l’étalage au bord de la chaussée. De nombreux panneaux rappellent à nouveau le danger de mines sur les bas-côtés. Zadar se profile après une bonne vingtaine de kilomètres. Je mange sur un banc à proximité de la vieille ville. Elle a beaucoup souffert des bombardements de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre serbo-croate. A chaque fois, tout a été reconstruit à l’identique. Elle possède des fortifications datant de l’époque romaine et vénitienne. La tour de l’Horloge du 18ème domine la petite place Narodni. La cité renferme également de beaux édifices religieux. L’église circulaire St Donat est bâtie sur un ancien forum romain. A l’intérieur, les dalles et deux colonnes d’époque sont encore visibles. Elle est également entourée de nombreux vestiges. A proximité, la cathédrale avec sa haute tour est fermée au public. Plus loin, l’église St Siméon renferme un splendide sarcophage recouvert d’or et d’argent. Les autres sont malheureusement en rénovation. Je peux cependant me glisser discrètement dans le cloître du monastère des Franciscains. Sur le quai, l’Orgue Marin de Bašic émet des sons avec le ressac des vagues. Assez fascinant ! Juste à côté, la Salutation au Soleil est un disque de 22 m produisant un jeu de lumière. Mais comme il n’y a pas de soleil, c'est plutôt raté ! Je quitte ensuite Zadar en fin d’après-midi. Après quelques kilomètres le long du canal Zadarski, je trouve un petit camping privé à Sukošan. Comme hier, le jeune propriétaire ne me fait pas payer la nuitée. Peut-être à cause de mon aventure à vélo ! Et comme hier, je suis tout seul sur le terrain. Aussi, triste nouvelle, j’apprends le décès de ma grand-mère hier dans l’après-midi.

 

 

Vendredi 15 octobre : Sukošan - Razina (74,4 km)

 Arbres devant l'île de Murter 

 

Il y a un beau ciel bleu ce matin. Cependant, ma joie sera de courte durée, car les nuages arrivent avec le vent. Je redémarre le long de la côte adriatique, à travers une forêt de résineux. J’aperçois l’île de Pašman à quelques kilomètres du rivage. Mis à part son grand port de plaisance, le petit village de Biograd n’a aucun intérêt. Puis, la route passe sur une langue de terre, avec la mer d’un côté, et le lac de Vransko de l’autre. C’est à ce moment qu’une voiture de police m’arrête pour contrôler mes papiers. Les agents sont surtout curieux de mon aventure cycliste ! Ils ont du mal à croire que j’ai parcouru autant de kilomètres. Le paysage côtier est malheureusement souvent masqué par la brume. Quelques trouées permettent quand même d’entrevoir les îles au large. Certains villages affichent leur héros de la guerre serbo-croate. Un peu comme à l’époque communiste ! Je pique-nique sur un banc à côté d’un supermarché de Pirovac, non loin de la presqu’île de Murter. La route vers Sibenik devient de plus en plus infernale. De nombreux véhicules me dépassent en crachant leurs gaz d’échappement polluants. Franchement désagréable ! Le fait de rouler dans cet air vicié durant des heures me donne mal à la tête. Au bord de la chaussée, quelques personnes cueillent les olives. Plus loin, le pont qui enjambe la large rivière Krka offre une vue lointaine sur Sibenik et sa citadelle. Aussi, la petite ville est truffée d’escaliers. Je cadenasse alors mon vélo, et poursuis à pied. J’espère seulement ne pas avoir une mauvaise surprise à mon retour ! La cathédrale St Jacques est classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Une longue frise avec des têtes sculptées parcourt les murs extérieurs. Elle possède également une superbe porte, avec deux lions supportant les colonnes d’Adam et Eve. A l’intérieur, le minuscule baptistère est splendide. Le bel hôtel de ville de style renaissance fait face à l’édifice religieux. Je me balade ensuite au hasard dans les ruelles sombres et tortueuses de la vieille ville. Après une bonne heure, je retrouve mon vélo sain et sauf ! Quelques kilomètres plus loin à Ražina, je déniche un petit camping privé. Le gars rouvre spécialement pour moi, car la saison est terminée. Par contre, il va falloir que je paye la nuitée.

 

 

Samedi 16 octobre : Ražina - Split (84 km)

 

  1. L'hôtel de ville et la tour de l'Horloge sur la place d

Il est tombé des cordes cette nuit. Le temps est gris, mais la pluie a cessé. Je décampe rapidement pour tenter de rallier Split avant ce soir. La route dévoile de superbes points de vues sur le rivage et les îlots au large. L’eau est d’une clarté incroyable ! Par endroits, elle change de teinte, passant du bleu au vert émeraude. Je m’arrête ainsi fréquemment pour tirer des photos. Et forcément, je n’avance pas beaucoup ! Par contre, les incendies récents ont ravagé les forêts sur les collines alentour. Tout est calciné ! Je bifurque un moment vers le petit village de Primošten, posé sur une presqu’île. Le clocher de l’église domine les étroites ruelles de la bourgade médiévale. Les belles pierres plates des toitures font place désormais aux tuiles rouges classiques. Et c'est bien dommage ! Après une courte balade, je reprends mon itinéraire. La route traverse les collines un peu plus dans les terres. Je retrouve alors le rivage quelques kilomètres avant Trogir. Dans une boulangerie, la vendeuse m’offre le pain, en me voyant sortir un gros billet. Sympa ! Puis, je pique-nique sur un banc au bord de la rivière Fosa. La petite ville possède une splendide cathédrale. Elle renferme notamment un superbe baptistère, une chapelle abondamment décorée et une salle au trésor. Le clou du bâtiment reste cependant la porte latérale à l‘extérieur. Comme à Sibenik, deux lions vénitiens supportent les statues d’Adam et Eve posées sur des colonnes. Je monte également au sommet du clocher pour jouir de la vue sur la place. Split est même visible au loin. L’hôtel de ville du 15ème et le joli palais Cipiko sont disposés autour de l’édifice religieux. Je me rends ensuite à la forteresse en longeant les quais. Puis, je termine la promenade dans les petites ruelles, le vélo à la main. Plus loin, la côte aux alentours de Kaštela est truffée de châteaux du 15ème et 16ème. Je découvre entre autres celui de Lukšic, de Gomilica et de Sucurac. Il fait presque noir lorsque je pénètre dans Split. Le stade du Hadjuk est illuminé pour un match du championnat de football croate. D'un coup, un cycliste m’aborde et me questionne sur mon périple. Il finit par m’inviter chez lui pour passer la nuit. Il habite au rez-de-chaussée d’un building, dans un quartier pas trop rassurant. Je le suis encore moins lorsqu’il m’apprend que le vélo doit rester à l’extérieur. Marjan est slovène. Il est marié, et a un enfant. C’est un très grand adepte de Krishna. D’ailleurs, toutes les discussions reviennent sur la déesse hindoue. Son petit appartement recèle de nombreux objets à son effigie. Il me prépare une pizza végétarienne avec du thé. Car mon homme ne mange ni viande, ne boit ni alcool ni café ! Il me présente ensuite sa femme qui rentre du boulot. Bref, un accueil assez loufoque, mais bien aimable !

 2. Soleil couchant sur le port de Stari Kastela 

 

Dimanche 17 octobre : Split - Stari Grad (île de Hrvar) (16,4 km)

  1. Marjan et moi à Split 

Je me lève vers 8 h, plus tard qu’à l’accoutumée. Marjan commence à préparer le déjeuner. Il est vraiment fanatique de Krishna. C’est incroyable, il respecte tout un rituel avec des chants et des incantations ! Il m’offre même un collier et un bouquin sur le yoga. Je refuse d’autres cadeaux, prétextant le manque de place dans mes sacoches. Tant et si bien que l’heure tourne, et je n‘ai toujours rien mangé ! Mais surtout, je commence à perdre patience ! Une soirée et une matinée sur les bienfaits de la philosophie de Krishna, ça commence à faire beaucoup ! Le déjeuner à base de fruits, de pop-corn et de riz au lait est enfin servi. Du coup, il est déjà midi lorsque je quitte mon hôte. Cependant, il faut reconnaître qu’il m’a reçu avec beaucoup de gentillesse. Je rejoins directement l’embarcadère des ferries, pour me renseigner sur les horaires pour l’île de Hvar. Un bateau de la compagnie Jadrolinija part vers 14 h 30. Cela risque d’être bien difficile de visiter Split en moins de deux heures ! Krishna m’aura fait perdre un peu trop de temps ! Le palais de Dioclétien est un centre romain en plein cœur de la ville. C’est un vrai labyrinthe de ruelles étroites, entourées de fortifications. Il renferme notamment quelques palais transformés en musée, les ruines de thermes romains, la cour d’honneur de l’Empereur et la cathédrale St Domnius. Les escaliers m’empêchent encore de circuler librement dans la cité. Et ça devient pénible ! De plus, les commerces sont presque tous fermés ce dimanche. Le coin serait vraiment tranquille, sans la horde de touristes en voyage organisée. Finalement à une demi-heure près, j’aurais pu attraper le bateau prévu. Il me faut attendre le prochain qui part à 20 h30. Soit plus de cinq heures à poireauter dans la ville ! Je m’attable alors à une terrasse de café pour siroter une bonne bière, et continuer ainsi de classer mes photos. La nuit tombée, j’embarque dans le ferry pour l’île de Hvar. Pendant la traversée, un terrible orage éclate. Les éclairs jaillissent de partout. Vraiment impressionnant ! Après deux heures de navigation, j’arrive à destination sous le déluge. J’attends alors une légère accalmie, avant de rejoindre le camping de Stari Grad à quelques kilomètres. Malheureusement, il est fermé depuis la mi-septembre. A cause de l’heure tardive et de la météo exécrable, je m’installe quand même. L’eau et l’électricité sont coupées, mais cela fera l’affaire ! L’orage rapplique de nouveau, il tombe des cordes.

  2. La statue de Grégoire de Nin à Split 

 

Lundi 18 octobre : Stari Grad - Hvar - Stari Grad (41,7 km)

  1. Le village de Stari Grad

Les cloches des églises alentour me sortent de mon sommeil. Je pense m’être rendormi. Pas du tout, il est 6 h du matin ! Incroyable, c’est l’heure de la messe ! Aujourd’hui, le soleil montre le bout de son nez. Stari Grad est une ville bien paisible qui me plaît beaucoup. Peu de touristes s’aventurent jusque ici. Du moins à cette période de l’année ! Les maisons en pierres bordent les ruelles sinueuses, pavées de marbre. Je pénètre ensuite dans la cour intérieure du monastère fortifié des Dominicains. L’église est par contre fermée. Près du petit port, je sympathise avec deux gars qui viennent de Paris. Laurent et Pablo ont déjà bien bourlingué. Nous buvons un verre ensemble à la terrasse d’un bistrot. Ils finissent même par m‘inviter pour dîner dans un petit snack. Mon aventure cycliste favorise grandement les bonnes rencontres ! Il est presque 15 h lorsque nous nous séparons. Plutôt que de traverser l’île sur sa longueur, je décide de rejoindre Hvar, afin d’attraper le bateau pour l’île de Korcula. La route grimpe facilement jusqu’à un tunnel. Je dévale ensuite à grande vitesse vers la côte Sud. Une forteresse domine la petite ville depuis une colline. Plusieurs palais, un arsenal et une cathédrale sont édifiés autour d’une grande place. Je déambule un moment dans les ruelles autour du port de plaisance. Poliment, je demande pour embarquer mon vélo sur le catamaran. Le gars dédaigne me regarder, et m’annonce que c’est impossible. J’ai du mal à comprendre, il y a pourtant de la place à l’arrière ! Même en expliquant mon aventure cycliste, rien y fait ! J’ai l’impression qu’il ne m’écoute même pas. Je commence sérieusement à en avoir marre du comportement des Croates. «Attention, c’est mon coup de gueule !».  Les gens sont souvent froids et peu aimables. La seule chose qui les intéresse, c’est le porte-monnaie des touristes ! Le reste, ils s’en foutent ! Furieux, je reprends la route en sens inverse vers Stari Grad, alors que la nuit tombe. Je retrouve ainsi ma place de la nuit précédente au terrain de camping. Tous ces kilomètres ne me font pas avancer beaucoup sur mon itinéraire ! Le vent vient de se lever. Il souffle de violentes rafales.

  2. La ville et la forteresse de Hvar 

 

Mardi 19 octobre : Stari Grad - Zaostrog (70,5 km)

 

  1. L'île de Korcula et la presqu'île de Peljesac sous un

Aujourd’hui, j’ai une pensée pour ma grand-mère, car c’est le jour de son enterrement. Le vent a soufflé terriblement cette nuit. Et c’est pas fini ! A tel point que j’ai eu peur qu’une branche d’arbre vienne s’abattre sur la tente. Comme hier, les cloches me réveillent à 6 h. Je prends la route en direction de l’Est, toujours sur l’île de Hvar. J’arrive facilement à Jelsa, blotti dans une petite crique. J’erre un moment dans les vieilles ruelles et autour du port. A la sortie du village, je grimpe aisément les 300 mètres de dénivelé. En effet, le pourcentage des pentes n’est pas très élevé ! Comme par magie, le vent s’est arrêté d’un coup ! Par contre, une pluie fine s’est mise à tomber. La route oscille ensuite dans la montagne jusque Bogomolje. L’île de Korcula et la presqu’île de Peljesac sont presque à portée de main. Tout à coup, une dame m’interpelle pour m’indiquer que ce n’est pas la route pour Sucuraj. Je lui explique alors que je cherche un endroit pour manger. Du coup, elle m’invite chez elle pour dîner. Veronika me propose du bouillon en entrée, puis des calamars frais avec des pommes de terre. Tout cela avec un bon verre de vin du pays ! Son fils et un de ses amis m’apprennent qu’ils sont pêcheurs. Ils sont également admiratifs de mon aventure cycliste. Lorsqu’ils nous quittent, je suis un peu gêné de manger seul sous le regard rude de Veronika. Je tente alors d’engager une conversation franco-anglo-croate assez originale. Elle cultive fruits et légumes, sur un lopin de terre à proximité de sa maison. Elle m’apprend également qu’auparavant le français était enseigné à l’école. C’est dingue de voir comment la langue française s’est fait supplanter par l’anglais dans de nombreux pays ! Après l’avoir remerciée, je poursuis mon chemin en direction de Sucuraj. La pluie a enfin cessé. Les montagnes sont parsemées de nombreux arbousiers et oliviers. Désormais, la route descend longuement jusqu’au petit port d’embarquement. Une bonne heure plus tard, le bateau appareille pour Drvenik sur le continent. La traversée ne dure qu’une grosse demi-heure. Après quelques kilomètres de pédalage, j’atteins Zaostrog. Depuis Split, le blason du club de football du Hadjuk est peint sur tous les murs. Les supporters sont vraiment fanatiques ! Les deux campings du village sont fermés à cette saison. Cependant, je cherche à m’y installer quand même. La propriétaire du premier me jette littéralement, tandis que la vieille dame du second accepte ma demande. Elle me propose même un bungalow pour le prix d’un emplacement de tente. Tout compte fait, la côte d’accueil des Croates a bien remonté aujourd’hui !

  2. Moi sur l'île de Hvar 

 

Mercredi 20 octobre : Zaostrog - Prapratno (87 km)

  1. Temps menaçant sur la presqu'île de Peljesac

Je poursuis mon chemin en direction de Ploce, afin d‘attraper le bateau pour la presqu’île de Pelješac. Aujourd'hui, le temps est mitigé. Dès les premiers kilomètres, une pluie fine se met à tomber. Les traversées pour Trpanj sont très limitées en basse saison. Il me faut alors poireauter pendant plus de trois heures. Décidemment, je n’ai pas de chance avec les ferries ! Du coup, je change mes plans pour ne pas perdre trop de temps. Malgré une circulation plus importante, je préfère poursuivre sur la route continentale qui longe la côte. Elle borde la large plaine maraîchère Jadranska, cultivée principalement d’agrumes. D’ailleurs, de nombreuses personnes vendent clémentines et oranges à côté de la chaussée. La route grimpe ensuite doucement, offrant de belles vues sur la plaine irriguée. D’autant plus que le soleil a dissipé les nuages ! Au sommet de la colline, je profite d'un banc pour manger un morceau. Puis, mon parcours plonge vers Neum en Bosnie-Herzégovine. A la frontière, la jolie douanière semble amusée de mon passage avec mon vélo chargé. Le pays possède un bien petit accès sur la mer Adriatique. C’est un couloir d’à peine une petite dizaine de kilomètres. Le découpage du territoire balkanique est quand même bien étrange ! Mon séjour en Bosnie est par conséquent de courte durée. A la frontière croate, je surprends le douanier jouant sur son ordinateur. L’avantage du vélo, c’est que cela ne fait pas beaucoup de bruit ! Le canal qui me sépare de la presqu’île de Pelješac se rétrécit au fil des kilomètres. Il est parsemé de centaines de flotteurs servant à l‘ostréiculture. Je bifurque en direction de Mali Ston et Ston, à la base de la presqu’île. Les deux villages sont reliés par des remparts médiévaux serpentant dans la montagne. Cependant, je ne traîne pas car la nuit commence à tomber. De toute façon, je reprends le même chemin demain en sens inverse ! En effet, je compte faire un petit aller-retour sur l’île de Mljet. Un peu plus loin, le camping de Prapratno est fermé. Tant pis, je m’y installe ! Demain, le bateau part à 7 h du matin. Il va falloir se coucher tôt !

  2. Ostréiculture dans le canal Malostonski 

 

Jeudi 21 octobre : Prapatno - île de Mjlet - Prapratno (83,9 km)

 1. Bateau de pêche au lever de soleil

La nuit a été perturbée par des cris d'animaux qui ont rôdé autour de la tente. Il y a même une bête qui est entrée dans le auvent. Il s’agit peut-être d’un chat ! Je me lève vers 5 h 30, afin d’attraper le ferry pour l’île de Mjlet. Forcément à cette heure, il fait noir ! Pendant la traversée, j’assiste au lever du soleil depuis le pont. La mer et les montagnes alentour prennent une teinte rougeâtre, qui s’éclaircit au fil des minutes. Le débarcadère de Sobra est un peu à l’écart du village. La route grimpe ensuite directement dans les montagnes boisées. Je déjeune au village de Babino Polje, au bord de la chaussée. Puis, cela ne fait que monter et descendre sur une bonne trentaine de kilomètres, à une altitude moyenne de 200 mètres. Le soleil brille sans aucun nuage à l’horizon. La température de l’air flirte même avec les 22 °C. En plein mois d’octobre, c’est quand même super agréable ! Polace est la porte d’entrée du parc national de Mjlet. L’accès est une nouvelle fois payant. Toutefois, je pénètre dans le site protégé sans billet. On verra bien ! Aussi, le village possède encore quelques ruines datant de l’époque romaine. Après une petite côte, j’atteins les jolis lacs de Malo Jezero et Veliko Jezero. L’eau claire passe du bleu au vert émeraude selon les zones. Un sentier, tantôt bitumé, tantôt caillouteux, borde les rives. Il n’est cependant pas possible de faire le tour à cause du canal d’accès à la mer. Un monastère bénédictin du 12ème se dresse sur un îlot au beau milieu de l’étendue d’eau. Le coin est vraiment paradisiaque. De nombreux animaux vivent dans les forêts de l’île. J’aperçois notamment un furet, et manque de rouler sur un serpent de couleur grisâtre. Après le pique-nique, je prends le chemin du retour par la même route. C’est bête, mais je n’ai pas le choix ! Les pentes dans ce sens sont beaucoup plus pénibles. Elles varient entre 8 et 10 %. En cette fin d’après-midi, cela me casse un peu les jambes ! Je retrouve l’embarcadère de Sobra, avec deux heures d’avance sur le prochain départ. Du coup, je patiente dans un troquet en sirotant une bière du pays. Vers 19 h, j’embarque pour Prapratno. Après une grosse demi-heure, je remonte la tente dans l’obscurité au même endroit que la veille.

  2. Le lac Velo Jezero sur l'île de Mjlet 

 

Vendredi 22 octobre : Prapratno - Dubrovnik (69 km)

 1. La muraille médiévale de Ston

Au petit matin, je rejoins le village de Ston. Une muraille médiévale d’une longueur de plus de 5 km serpente dans la montagne jusque Mali Ston. C’est la plus longue d’Europe. Dans le parc entouré d‘arbres, les habitants étendent leur linge pour le faire sécher. C’est assez insolite ! Je retrouve ensuite la nationale en direction de Dubrovnik. La circulation est forcément plus importante. La côte dalmate est vraiment splendide sous ce beau soleil. Les îles au large baignent dans une eau bleu écarlate. Au village de Trsteno, deux gigantesques platanes de plus de 400 ans se dressent au bord de la route. Après plusieurs kilomètres, la nationale s’élève en surplombant le port du Dubrovnik moderne. Je plonge ensuite vers la vieille ville. Je pique-nique alors sur les marches d’un escalier en retrait de la chaussée, juste à côté d’une école. La ville entourée de remparts est vraiment superbe. Par contre, il y a un monde fou ! Je déambule au hasard des rues, à la recherche de beaux clichés. La vieille ville est beaucoup plus petite que je me l’imaginais. L’heure tournant, je prends la direction du camping dans le quartier Solitudo, situé sur une petite presqu‘île. Après plusieurs jours, je peux enfin profiter d’une douche bien chaude. Je discute avec Fred, un Canadien de l’Ontario qui voyage également à vélo. Il tente de joindre Istanbul par l’Albanie et la Grèce. D’ailleurs c’est une solution à laquelle j’avais pensée, au cas où le froid s’installerait dans les montagnes balkaniques. Demain, c’est ma journée de repos, j’ai tout mon temps pour y réfléchir et visiter Dubrovnik. 2. La côte dalmate à proximité de Dubrovnik 

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26 janvier 2015 1 26 /01 /janvier /2015 12:56

  

Samedi 23 octobre 2010 : Visite de Dubrovnik

    1. Le Stradun de Dubrovnik 

Aujourd’hui, c’est une journée de repos. Enfin presque ! Je fais à pied les 3 km qui séparent la vieille ville du camping. Comme hier, le soleil est de la partie. La cité est interdite aux voitures. Et c’est bien plus agréable ! Elle est entourée par d’épais remparts médiévaux. Plusieurs tours et bastions furent construits au 14ème et au 15ème S pour la protéger contre d'éventuels envahisseurs. Deux portes fortifiées permettent d’accéder à la longue avenue Stradun pavée de marbre. Une foule énorme de touristes flâne autour des boutiques, des cafés et des restaurants. De nombreux édifices historiques ont souffert des bombes et des obus, durant le siège de 1991. D’ailleurs, des panneaux ne manquent pas de le rappeler. Fort heureusement, tout a été reconstruit à l’identique. Les églises et la cathédrale sont ouvertes au public. St Ignace renferme notamment de belles fresques murales et une surprenante reproduction de la grotte de Lourdes. Quant à l’église St Blaise, elle est fermée pour rénovation. Par contre, les différents palais et monastères sont payants. Je me contente de visiter celui des Dominicains, qui recèle un joli cloître et de belles peintures religieuses du 15ème et 16ème S. Comme en Italie, la tour de l’Horloge de la place Luza possède deux statues de bronze qui sonnent les heures. Aussi, j’ai bien du mal à trouver la vieille synagogue dans les ruelles étroites aux raides escaliers. La célèbre fontaine d’Onofrio se situe à proximité de l’accès aux remparts. Je suis surpris qu’il faille une nouvelle fois payer. Vraiment, on fait de l’argent avec tout ! D’une longueur de 2 km, la muraille offre de splendides vues sur la cité. Les habitations reconstruites après la guerre sont reconnaissables à la couleur rouge des tuiles plus criarde que les autres. Je retourne ensuite au camping, vers la fin d’après-midi. Dans un jardin, un mariage est célébré avec des chansons slaves jouées par un accordéoniste, que tout le monde reprend en chœur. Je retrouve ensuite Fred, le Canadien, qui a changé ses plans à cause d’un ennui technique sur son vélo. Il compte rejoindre Sarajevo par bus demain, pour trouver la pièce défectueuse. Puis, nous finissons la soirée ensemble à boire de la bière dans un bistrot.

    2. Le cycliste devant la ville de Dubrovnik 

 

Dimanche 24 octobre : Dubrovnik - Zelenika (MNO) ( 63,6 km)

 

  1. Attention au serpent sur la route

Après quelques rafistolages, je prends la route tardivement vers 11 h. Cette journée de repos m’a redonné de l’allant ! Par contre, les nuages gris et noirs ne présagent rien de bon. Je retourne dans la vieille ville de Dubrovnik, pour immortaliser l’évènement avec une photo. Mon vélo a bien du succès. D’ailleurs plus que moi ! Les gens interloqués m’abordent en me posant un tas de questions sur mon voyage. Bien souvent, ils me prennent pour un étudiant. Cela fait toujours plaisir, mais la casquette joue beaucoup en ma faveur ! Je regrimpe ensuite vers la nationale qui longe la côte. En Croatie, il y encore beaucoup de 4 ailes et de vieilles Skoda (comme celle d’un ami supporter lensois !). Souvent sur les bas-côtés des chaussées, de nombreuses croix et calvaires témoignent des accidents de la circulation. Après quelques kilomètres, je bifurque vers Cavtat. La petite route descend jusqu’au niveau de la mer, me faisant perdre ainsi tout ce que je venais de monter. Le village possède un joli port, un monastère et un mausolée sculpté d’une riche famille. Je profite des quelques rayons de soleil pour casser la graine. Puis, je retrouve ma fameuse nationale en prenant le même chemin en sens inverse. Elle s’enfonce dans une petite vallée, cernée par des montagnes parsemées de cyprès effilés. La circulation se fait de plus en plus rare, au fur et à mesure que j’approche de la frontière monténégrine. Au passage à la douane, je fais une nouvelle fois fureur avec mon vélo chargé. Je plonge ensuite vers Igalo, alors que la nuit commence à tomber. C’est quand même assez pénible de s’arrêter de pédaler à 17 h ! Au premier abord, le Monténégro ne me fait pas grosse impression. Ce n’est qu’une succession de gros buildings délabrés. Le ciel sombre menaçant n’arrange rien ! En faisant quelques courses, je suis surpris que la monnaie du pays soit passée à l’euro. A Herceg Novi, je cherche vainement un coin pour loger. A mon grand malheur, toute la côte est urbanisée. Pas un petit morceau de terrain pour planter la tente ! Finalement à l’entrée de Zelenika, je trouve un camping très rudimentaire pour pas cher. Il est tenu par un petit vieux bien sympa, qui parle un peu français. Le terrain est parsemé de centaines de châtaignes tombées des arbres. Dans la soirée, il tombe des cordes. Cela ne se goupille pas très bien pour demain dans les Balkans !

    2. A la frontière du Monténégro

 

 

 

Lundi 25 octobre : ZeleniKa (Visite d'Herceg Novi) 

 

  La place d'Herceg Novi

Comme je le présageais, la pluie ne s’est pas arrêtée. C’est le vrai déluge, avec de fortes bourrasques ! Du coup, j’attends une accalmie toute la matinée qui ne viendra jamais. Pédaler sous ce temps est complètement insensé ! C’est pourquoi je pars à pied jusque la ville de Herceg Novi pour une visite très humide. En effet, je ne tarde pas à être trempé des pieds à la tête. La vieille ville possède encore quelques tours des anciennes fortifications. Malheureusement, les grilles sont fermées. Au centre, la tour de l’Horloge domine une petite place piétonne. Dans les ruelles, l’eau ruisselle de partout. A proximité, l’église de l’Archange St Michel mélange les styles byzantin et baroque. Dans le quartier de Topla, l’église St George renferme normalement un bel icône. Cependant, je fais marche arrière à la vue d’un cercueil trônant au milieu de l’édifice. Puis, je cherche longuement la forteresse de Spanjola. Sans succès ! Sur le chemin du retour, je visite le monastère de Savina. Trois églises sont édifiées sur une petite colline boisée. Les deux édifices religieux de la Vierge de la Dormition renferment de superbes fresques et iconostases orthodoxes. Il pleut encore et toujours ! Tant et si bien que je décide de rester sur place pour la nuit. Au camping, le terrain est complètement noyé. Fort heureusement, ma tente a survécu au naufrage. Dans la soirée, je reçois un SMS inconnu, qui m’annonce du mauvais temps pour demain. Bizarre !

 

 

Mardi 26 octobre : Zelenika - Route Serpentine (61,8 km)

 

    1. Les baies de Perast et Kotor sous les nuages 

 

Le ciel est de nouveau menaçant. Cependant, il s’est arrêté enfin de pleuvoir ! J’enfourche alors mon vélo pour poursuivre l’aventure. La route longe agréablement la côte, sans aucune difficulté. Après quelques kilomètres, j’atteins le détroit de Verige. Il relie la baie de Tivat avec celles de Risan et de Kotor. D’ailleurs au débouché, la vue est superbe. Les montagnes encombrées de nuages plongent dans les eaux limpides. L’abbaye St Georges et l’église Notre-Dame du Récif sont érigées séparément sur deux îlots au milieu de la baie. Il se met à pleuvoir lorsque j’arrive à Risan. Le temps d’enfiler mes vêtements, et la pluie s’arrête ! C’est vraiment pénible ! A la sortie du village, le monastère de Banja s’étage sur le flanc d’une montagne parsemée de cyprès. Plus loin, Perast renferme un grand nombre de palais et d’églises. Le haut clocher de St Nicolas domine le centre du village. Je me balade un moment dans les ruelles pentues à proximité. La route traverse ensuite Dobrota et ses nombreux palais. Il est par contre dommage que certains soient à l’abandon. Je mange un morceau au bord de l’eau, juste à l’entrée de Kotor. La vieille ville ceinturée de remparts est interdite aux automobilistes. Et c‘est tant mieux ! En franchissant la porte de la Mer, je débouche sur la place d’Armes. Elle recèle notamment la tour de l’Horloge et le palais du Prince avec son long balcon. Kotor fourmille également de palais et d’églises. Je pénètre dans la cathédrale St Tryphon. Elle possède entre autres des fonts baptismaux sculptés, un superbe ciborium gothique, et une belle chapelle décorée de marbre renfermant les reliques du Saint. Tous les autres édifices religieux sont fermés. J’attaque ensuite la fameuse montée du Lovcen par les lacets de Skaljari. La route «Serpentine» décrit une trentaine de virages en épingle à cheveux dans la montagne sur 17 km. Elle offre de superbes vues sur les baies de Kotor et Tivat. Comme les pentes ne sont pas trop élevées, la grimpette est assez aisée. Mais j’ai également déjà plus de 3000 km dans les jambes depuis mon départ ! Dans l’ascension, les rares automobilistes m’encouragent en klaxonnant. Au loin, un orage projetant de violents éclairs se rapproche tout doucement. Le ciel finit par se couvrir de nuages bien menaçants. La pluie se met à tomber, alors qu’il commence à faire bien noir. L’environnement semble complètement irréel ! Il me faut vite trouver un endroit pour bivouaquer. Les flancs escarpés de la montagne rendent bien difficile ma recherche. Finalement après plusieurs kilomètres, je trouve un bout de terrain relativement plat sur les hauteurs. Cependant à 850 mètres d’altitude, je ne suis pas rassuré de la présence de l’orage. Je domine les bouches de Kotor avec ses rives complètement illuminées. Vraiment grandiose !   

 

 

  3. La route Serpentine dans la baie de Kotor2. Porche d'une ruelle de Kotor 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mercredi 27 octobre : Route Serpentine - Podgorica (79,1 km)

 

    1. Couleurs d'automne dans les montagnes de Lovcen 

 

C’est l’une des nuits sous tente les plus terribles que j’ai vécues. Pour commencer, une bête a rôdé autour de la tente. C’était peut-être un chien errant, mais il n’y a aucune habitation aux alentours qui puisse expliquer sa présence. J'ai pensé alors à un loup, voire un ours noir. En effet, ces animaux peuplent le parc national de Lovcen à proximité. Donc, je suis resté sur mes gardes un bon moment avant de m’endormir. Puis, un orage a éclaté juste au-dessus de mon bivouac. Des trombes d’eau se sont abattues d’un coup avec de violents éclairs. Le vent était tellement déchaîné que la tente a été secouée dans tous les sens. J’ai même eu peur qu’un arceau finisse par casser. Et pour parachever le tout, c’est la grêle qui tombe ce matin. Pendant une petite accalmie, je démonte la tente trempée en compagnie de ma bête féroce. Au final, ce n’est qu’un chien perdu ou abandonné ! Je poursuis alors ma grimpette avec le vent de face. La passe de Krstac n’était qu’à peine à deux petits kilomètres ! J’atteins ainsi un plateau avec des villages complètement isolés. La maison natale de Njegos, grand homme de l’histoire nationale, se situe à Njegosi. Les montagnes alentour sont couvertes de forêts aux couleurs de l’automne. Même sous le ciel gris, c’est vraiment très beau ! Je grimpe à nouveau quelques kilomètres pour atteindre plus de 1000 mètres d'altitude. La route bascule ensuite dans la longue descente pour Cetinje. En arrivant dans l’ancienne capitale du royaume, je suis complètement frigorifié. Heureusement, le soleil commence à faire son apparition. Quelques beaux bâtiments sont dispersés un peu partout dans la petite ville. De nombreuses anciennes ambassades ont été construites autour du palais du Gouvernement. Celle de la France est par contre en rénovation. Tout comme le palais Bleu ! Dans la chapelle du monastère fortifié, plusieurs personnes viennent prier et brûler un cierge. Après avoir mangé un morceau, je reprends mon parcours en direction de la capitale actuelle. A ma grande surprise, la route continue de descendre longuement jusque Podgorica à une altitude de 30 mètres. Les montagnes environnantes sont comme craquelées, certainement à cause de l’infiltration des eaux de pluie. A l’entrée de la ville, un homme en voiture m’interpelle. Raiko est né au Monténégro, mais vit depuis 40 ans en France. Fasciné par mon périple, il m’invite à boire une bière dans un troquet. Lorsque nous nous séparons, le soleil commence à se coucher. J’effectue encore quelques kilomètres pour sortir de la capitale. En effet, Podgorica n‘a pas vraiment d’intérêt ! Dans un quartier isolé, je plante la tente derrière des arbustes au bord d’une prairie. En effet, le vent du Nord souffle à nouveau violemment. C’est pourquoi je fixe quatre tendeurs supplémentaires à mon frêle abri. Je ne tiens pas à avoir le même coup que la nuit précédente !

    2. Rakio et moi devant un café de Podgarica 

 

Jeudi 28 octobre : Podgorica - Kolasin (67,9 km)

 

    1. Le canyon de la rivière Moraca

 

Depuis hier, cela n’a pas arrêté de souffler ! La haie d’arbustes m’a quand même bien protégé ! Je décampe rapidement dans la vallée de la rivière Moraca. Bien sûr, je prends le vent en pleine face. Les bourrasques sont tellement violentes, qu’elles me font poser pied à plusieurs reprises. Une véritable tempête ! Je zigzague ainsi sur plusieurs kilomètres, tentant de maîtriser mon lourd vélo. Tout à coup, un bus me rase de très près. Je décide alors de stopper, jugeant l’entreprise un peu trop périlleuse. Je trouve alors refuge dans un troquet d'un minuscule village (Dromita ?). Tout le monde a l’air surpris qu’un cycliste commande une bière. Spontanément, les trois jeunes clients m’offrent des morceaux de porc et de mouton, avec quelques verres de rakija (une eau-de-vie locale). Cependant, nos conversations restent assez limitées. Seul l’un d’eux parle un tout petit peu l’anglais. Il est midi lorsque je quitte les lieux. En effet, je veux parcourir un maximum de kilomètres, même à vitesse réduite. Dans le défilé de Platije, la vallée se resserre. La rivière se faufile entre les parois abruptes d’un canyon, au pied de hautes montagnes. Sur l’autre rive, la voie ferrée passe sur les hauteurs, au-dessus du vide. Le paysage est vraiment magnifique sous le soleil. Puis, des travaux bloquent la route. En fait dans un des nombreux tunnels, un rocher manque de se détacher. Les ouvriers m’invitent alors dans leur cabane pour que je ne prenne pas froid. Je discute avec l’un d’eux en anglais. Il finit par m’offrir une demi-bouteille de rakija. Les Monténégrins ont vraiment le cœur sur la main. J’aime cette authenticité qui demeure encore dans les pays de l’Est. Du moins, dans certaines régions ! Car de nos jours, tout le monde cherche à faire du profit ! Sympathiquement, les ouvriers me laissent passer avant d’entreprendre les travaux. Par contre, les voitures et les camions en file indienne restent sur place. Par chance, le vent s’est soudain calmé. Sans circulation, je pédale ainsi plus facilement jusqu’au monastère de Moraca, blotti dans les montagnes boisées. Au loin, les hautes cimes enneigées dominent la vallée. Les murs et plafonds des deux églises sont recouverts de splendides fresques. Une belle iconoclaste est également exposée derrière l’autel. Tout cela sous la surveillance d’un moine, car les photos sont interdites dans les édifices. La route commence ensuite à grimper longuement jusqu’à une altitude de 1060 mètres, soit plus de 900 mètres de dénivelé. La pente reste cependant raisonnable, ne dépassant pas les 8 %. Au sommet, certaines parcelles de terrain sont recouvertes de neige. A mon compteur, il fait à peine 1°C ! Du coup, je descends rapidement vers Kolasin. J’ai les mains complètement gelées. A l’entrée de la ville, je plante rapidement la tente sur un bout de terrain, un peu à l’écart de la route. J’espère ne pas avoir trop froid pour cette nuit !

   

 2. Mon vélo et les tunnels de la vallée de la Moraca 

Vendredi 29 octobre : Kolasin - Tunnel de Lokve (90,6 km)

 

    1. Les montagnes enneigées à Kolasin

La toile de tente est complètement givrée. L’eau commence même à se transformer en glace. La température dans la nuit a dû avoisiner les 0°C. Malgré le soleil, je me couvre plus qu’à l’accoutumée, car le froid pique encore ce matin. Kolasin est une station de sport d’hiver, sans réel intérêt. La route descend tout doucement le long de la rivière Tara, serpentant dans les montagnes boisées et encore enneigées localement. A l’entrée de Mojkovac, je croise un cyclo français se prénommant Tom. Nous discutons un moment au bord de la chaussée. Parti depuis le mois de juin, il a déjà sillonné quelques pays européens. Après une bonne côte, je continue de descendre jusque la rivière Lim. Je mange dans une petite cabane isolée, juste à l’intersection de la route pour Berane. La vallée est désormais beaucoup plus évasée, laissant place à des prairies et des champs. Partout, plusieurs meules de foin sont disposées devant les habitations. De nombreuses ruches sont aussi disséminées dans la région. Aussi, les montagnes alentour sont beaucoup plus arrondies. La religion musulmane se fait également un peu plus présente. J’aperçois dans un village une mosquée avec un minaret en construction. Juste à l’entrée de Berane, la rivière traverse de courtes gorges. La ville est peu intéressante. Je préfère donc poursuivre mon chemin vers Rozaje. La route se met à grimper longuement. De nombreux automobilistes et routiers klaxonnent pour m’encourager… ou simplement parce que je gêne. Enfin, je ne sais plus ! C’est une vraie manie dans le coin ! En cette fin de journée, je commence à fatiguer. De plus, je me fais une nouvelle fois rattraper par la nuit. A quelques kilomètres du tunnel de Lovke, je plante la tente sur un terrain plat recouvert de neige, juste à côté de deux chalets de montagne vides. L’altitude de mon bivouac est à plus de 1200 mètres. Il est 19 h, il fait -3°C à l’extérieur. Bref, ça caille sec !

 

   2. Meules de foin et habitation isolée 

 

Samedi 30 octobre : Tunnel de Lovke - Novi Pazar (SRB) (90,8 km)

 

    1. Bivouac enneigé au tunnel de Lovke

Il fait toujours aussi froid. Tout est quasiment gelé ! Je remballe le matériel avec les doigts complètement engourdis. Je poursuis ma grimpette sur 2 km jusqu’au tunnel de Lovke, culminant à 1336 mètres. La petite station de ski semble déserte. Toutes les remontées mécaniques sont figées. Je descends ensuite longuement à travers les montagnes enneigées jusque Rozaje. De nombreux minarets s’élèvent au-dessus de la ville. La route surplombe ensuite les gorges sombres et étroites de la rivière Ibar. Le paysage est vraiment magnifique. Par contre le gros désagrément, ce sont les immondices sauvages. Tout le monde balance ses déchets dans le ravin. Plusieurs personnes viennent d’ailleurs fouiller et brûler les détritus. L’odeur n’est pas toujours agréable ! Après un grand nombre de tunnels, j’arrive à la frontière serbe. Le policier refuse de me tamponner mon passeport. Pas vraiment sympa, j'aurais aimé garder un souvenir ! Un autre m’interpelle pour savoir si j’ai quelque chose à déclarer. L’importation de nourriture est bizarrement interdite dans le pays. Et bien sûr, mes sacs en sont pleins ! « No food, no food… », me dit-on. Ouf, on finit par me laisser passer quand même ! Je fais quelques kilomètres jusque Spiljani, pour m’éloigner un peu de la frontière. Je peux alors manger plus sereinement sur le seuil d’une cabane en bois. Beaucoup d’automobilistes me regardent bizarrement. La rivière continue sa course dans de nouvelles gorges bien jolies jusque Ribarice. Puis, je cherche longuement le monastère Crna Reka. Je m’engage dans un petit chemin délabré avec des pentes élevées. Incertain de l’emplacement du site, je préfère abandonner. Tout cela m’a fait perdre un temps fou ! Aussi, le Kosovo n’est qu’à une poignée de kilomètres. L’apposition du tampon kosovar sur mon passeport m’interdit un retour en Serbie. C’est pourquoi je dois faire un gros détour vers le Nord pour rejoindre la Bulgarie. Du coup, la route grimpe à nouveau à plus de 1000 mètres. J’ai bien du mal à progresser en cette fin d‘après-midi. La descente est par contre vertigineuse avec de nombreux virages. Depuis que le soleil a disparu derrière les montagnes boisées, le froid s’est installé dans la large vallée de la rivière Josanica. J’arrive ainsi facilement dans la ville de Novi Pazar. Avec toutes ces mosquées, j’ai plus l’impression d’être en Orient qu’en Serbie ! Les hauts parleurs des minarets appellent les fidèles à la prière. Après tous ces kilomètres, je décide de passer la nuit dans un hôtel. J’en ai bien besoin après tous ces bivouacs sauvages ! L’accueil de la pension Han est franchement désagréable. De plus, il refuse mon vélo. A quelques mètres de là, je m’installe dans une chambre de l’hôtel Kan, tenu par un gars bien plus sympathique.

    2. Le cycliste devant le tunnel au sommet

  3. La rivière Ibar en Serbie 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dimanche 31 octobre : Novi Pazar - Maglic (85,5 km) 

 

   1. La mosquée de Novi Pazar

Il fait une chaleur de bête dans la chambre ! En fait, mon corps s’est habitué progressivement au froid. Il est déjà bien tard lorsque je quitte l’hôtel. Les ruines d’une ancienne forteresse dominent la place principale de Novi Pazar. Un marché à la mode orientale se tient sur la rive de la rivière Raska. Le vieux quartier musulman renferme des basses maisons sans étage, recouvertes de vieilles tuiles ondulées. Je pénètre ensuite dans la cour intérieure de la mosquée Alem Dzamija. Cependant, un homme me demande poliment de quitter les lieux. A la sortie de la ville, le beau monastère Durdevi Stupovi est juché sur une colline. La route borde la rivière Raska dans une large vallée, propice à la culture et à l‘élevage. Elle se jette dans l’Ibar, au niveau de la ville de Raska. Quelques kilomètres plus loin, je casse la graine sur les marches d’un bâtiment du village de Brvenik. Une petite route assez pentue m’amène aux monastères de Stara et Nova Pavlica. Situé à côté d’un vieux cimetière, il ne subsiste plus grand-chose du premier. Pourtant, l’édifice surplombe gracieusement la vallée. Le second monastère ressemble plus à une grosse église de couleur blanche. De belles fresques du 13ème S sont peintes sur les murs intérieurs. Je retrouve ensuite la route principale en direction de Krajelvo. La rivière traverse un long défilé juste avant le village d’Usce. Dans le coin, personne ne veut me vendre une bouteille de bière, sans que je fournisse une consigne. Vraiment bizarre ! Le soleil commence à disparaître derrière les montagnes. La vallée s’évase de nouveau à l’approche de Polumir. Un coin me tente un moment pour bivouaquer. Pourtant, je préfère poursuivre mon chemin afin de m'avancer encore d'une bonne dizaine de kilomètres. Mauvais choix ! En effet, l’Ibar passe ensuite dans des gorges aux parois abruptes. Donc, impossibilité de trouver un terrain plat ! Tant et si bien que je pédale encore et encore ! La nuit tombée m’oblige à rouler avec la frontale. Je suis d'ailleurs peu rassuré lorsque je croise une patrouille de police. Merveilleusement éclairée, la forteresse de Maglic apparaît d’un coup au détour d’un virage. Je plante enfin la tente en bordure de la rivière, à l’entrée du village. Par chance, il fait largement moins froid que les jours précédents. Perché sur les hauteurs, l’impressionnant château médiéval surplombe mon frêle bivouac. C'est franchement magnifique !

 

   2. Le monastère de Stara Pavlica 

 

Lundi 1er novembre : Maglic - Mackovac (90,3 km)

   1. La forteresse de Maglic 

 

De bonne heure, je grimpe à pied jusque la forteresse médiévale. L’immense château possède sept tours et un grand donjon. Il est édifié dans un méandre de la rivière Ibar. La porte est cadenassée, mais je réussis quand même à me glisser dans la cour intérieure. Des escaliers en bois permettent de monter sur les remparts, pour jouir d’une splendide vue sur toute la vallée. Le vent au sommet souffle terriblement. Après de longues minutes de contemplation, je redescends pour retrouver ma bicyclette. Au fil des kilomètres, les montagnes s’aplanissent de plus en plus. A Progorelica, je bifurque vers le monastère de Zica. En chemin, je pénètre dans l’église de Mataruska Banja, garnie de fresques récentes. Plus loin, le monastère de couleur ocre est juché sur une petite colline. Au 13ème S, c’était le siège de l’épiscopat serbe. Son église possède quelques fresques anciennes. Celles de la voûte à l’entrée ont été endommagées par un incendie durant la période ottomane. Je reprends ensuite la route pour Kraljevo, situé à quelques kilomètres. Pendant mon pique-nique quotidien, une dame farfelue vient à ma rencontre pour m’inviter chez elle. Du moins, je pense car mon serbe est plus que limité ! Dans le doute, je préfère refuser. La ville ne présente pas grand-chose d’intéressant. Seule une petite église baroque renferme un joli iconostase du 19ème. Puis, je me balade dans la rue piétonne Omladinska, à la recherche d’une belle demeure. Tout est écrit en lettres cyrilliques ! Du coup, je finis par abandonner car j’ai un mal fou à m’orienter. Cela promet pour la Bulgarie ! La route plate en direction de Krusevac n'est pas vraiment agréable. Elle longe à distance la rivière Morava Occidentale. La vallée est partiellement tournée vers l’agriculture. Elle s’élargit, alors que les montagnes disparaissent petit à petit. En chemin, la petite bourgade de Trstenik renferme la plus ancienne demeure de Moravie. Malgré l’heure tardive, je traverse la rivière pour rejoindre le splendide monastère de Ljubostinja. A chaque fois, il faut enfiler un pantalon pour pénétrer dans les édifices orthodoxes. Les photos sont malheureusement interdites. Je me fais même rappeler à l’ordre par un gars, alors que je tire un cliché à l’extérieur. Selon lui, je dois acheter les cartes proposées au magasin. Complètement grotesque ! Cela devient un business, voilà la raison ! Je rebrousse chemin pour retrouver ma fameuse nationale au trafic routier infernal. Je pédale encore quelques kilomètres au crépuscule. A l’entrée de Mackovac, j’installe mon bivouac derrière une haie en bordure d’un champ. Quelques engins agricoles s’activent, j’espère ne pas être dérangé en pleine nuit.

   2. Le monastère de Zica 

Mardi 2 novembre : Mackovac - Nis (103,2 km)

 

     1. Paysanne au village de Gaglovo

Je me lève avec une heure de retard sur mes prévisions, car je n'ai pas entendu le réveil sonner. Je prends alors la direction de Krusevac sous le soleil. La petite ville n'est pas trop attrayante. Seules les ruines d’un vieux donjon et l’église Lazarica valent le coup d’œil. Cette dernière est agrémentée de belles sculptures, représentant des plantes ou des animaux. A la sortie de Krusevac, je me fais accoster par une romanichelle. Elle m’avoue mieux se plaire en France qu’en Serbie. Mon itinéraire traverse ensuite des petits villages de campagne blottis dans de douces collines. A Gaglovo, un homme d’origine française vient à ma rencontre pour discuter. Michel vit en Serbie depuis plus de 40 ans. Il est admiratif devant mon projet. La route longe ensuite la rivière Morava Méridionale dans une vallée agricole très évasée. Je traverse ainsi plusieurs villages typiques. Comme un peu partout en Serbie, les maisons ne sont pas toujours achevées. Aussi, la température avoisine la vingtaine de degrés. Il faut avouer que c’est bien agréable au mois de novembre ! Malheureusement, je prends le vent en pleine poire. Et cela commence sérieusement à m’énerver ! Beaucoup de monde s’active dans les champs. Les agriculteurs brûlent leurs parcelles pour les préparer à la prochaine moisson. De nombreuses fumées s’élèvent d'ailleurs dans toute la vallée. A Gornji Ljubes, je casse la croûte sur un banc, sous les arcades d’un vieux bâtiment décrépi. Les autochtones ne sont pas toujours aimables. En effet, je me fais rabrouer par une femme sans raison valable. J’oscille encore quelques kilomètres dans la campagne, avant d’arriver aux portes de Nis. Toutes ces petites routes secondaires ont rallongé considérablement mon parcours. Cependant, c’est bien plus agréable qu’une nationale encombrée de véhicules ! Comme il fait presque nuit, je réserve la visite de la grande ville pour le lendemain. Je déambule quand même autour de la rue piétonne Obrenoviceva. Je découvre ainsi une minuscule mosquée avec son minaret. Plus loin, la cathédrale est enserrée par d’affreux buildings. Elle renferme une iconostase et des fresques contemporaines. Aussi, j’hésite longuement à louer une chambre en auberge de jeunesse ou à l’hôtel. Finalement, je m’écarte de la ville pour tenter de dégoter un terrain isolé. Après de très nombreux kilomètres de recherche, je trouve enfin un endroit au sommet d’une petite colline pour planter la tente.

   

 2. Maison typique du village de Donjiadrovac 

Mercredi 3 novembre : Nis - Pirot (89,2 km)

 

    1. Le mirador du camp nazi Croix Rouge de Nis

Mon bivouac est entouré de quelques tas d’ordures que je découvre de jour. C’est ça les joies du camping sauvage ! Sur la route du centre-ville, je fais une halte au camp de concentration Croix Rouge. Les bâtiments, les guérites, les miradors et les barbelés n’ont pas bougé depuis la Seconde Guerre mondiale. Ils témoignent des atrocités commises par les nazis sur la population serbe, durant cette triste période de l’histoire. Plus loin, la vaste forteresse turque renferme le plus ancien hammam du règne ottoman, ainsi que la mosquée Bali-Beg et quelques ruines romaines. A la périphérie de la ville, une chapelle est édifiée à l’emplacement de la tour aux Crânes. Au début du 19ème, un sultan fait décapiter des centaines d’officiers serbes, en représailles des soulèvements contre l’autorité ottomane. Les crânes sont empilés formant ainsi une tour. Malheureusement, les portes de l’édifice sont fermées. Je reprends alors mon itinéraire en direction de Pirot. Au bout de quelques kilomètres, la route franchit l’obscur et étroit défilé de la rivière Nisava. Les gorges sont magnifiques, mais le passage incessant des poids lourds finit par être déplaisant. Puis, la vallée s’élargit entre de basses montagnes arrondies. Je traverse ainsi quelques villages tournés vers l’agriculture et l’élevage. Lors de mon pique-nique à Bela Palanka, quelques enfants roms sont intrigués par ma bicyclette. Je reste cependant attentif à ce qu’ils ne me chapardent pas quelque chose. Aujourd’hui, je ne suis vraiment pas motivé pour pédaler ! Pendant des dizaines de kilomètres, mon esprit divague sur les bons et mauvais souvenirs du passé. J’arrive ainsi en fin d’après-midi à Pirot. Malgré un joli château médiéval, la petite ville n’est vraiment pas attirante. Les bâtiments en béton datant de l’ère communiste sont bien souvent délabrés. Je m’enfile une bière à la terrasse d’un café, avant de partir à la recherche d’un terrain pour bivouaquer. A la sortie de la petite ville, je m’installe sous de jeunes arbres, juste à l’intersection de la route pour Sofia. En effet demain, j’entre en Bulgarie !

    2. Mon vélo dans le défilé de la rivière Nisava 

 

Jeudi 4 novembre : Pirot - Sofia (BG) (85,3 km)

 

   1. Luc et moi sur la route à Pirot

 

Le passage des trains d’un côté, et la circulation routière de l’autre, ont grandement perturbé ma nuit. Je décampe rapidement pour la frontière bulgare. A peine démarré, un homme m’interpelle sur le bord de la chaussée. Luc est prêtre du côté de Bourg-en-Bresse. Il effectue un pèlerinage à pied jusque Jérusalem. Quasiment le même itinéraire que moi ! Sauf qu’à vélo, on va forcément plus vite ! C’est vraiment agréable de discuter un moment avec lui en français ! Je finis par lui souhaiter bon vent ! Après une vingtaine de kilomètres, je quitte la Serbie pour la Bulgarie. Juste après la frontière, la route se met à grimper doucement dans des montagnes boisées, le long d’un paisible ruisseau. Depuis mon entrée en Croatie, de nombreuses croix et calvaires témoignent des accidents de la circulation. Des fleurs, des bougeoirs et même des bouteilles d’alcool ou de bière sont amenés par la famille ou les amis du défunt. Je casse la croûte à côté d’un lugubre bâtiment de la petite ville de Dragonman. Il fait à nouveau très bon en ce début d’après-midi. Le thermomètre dépasse encore la vingtaine de degrés. J’atteins ensuite un vaste plateau d’apparence désertique. Les prairies sont couvertes d’une multitude de chardons desséchés, et les quelques champs viennent juste d’être fauchés. Ce qui rend le paysage assez monotone ! J’avale ainsi les kilomètres, tout en surveillant les quelques chiens errants qui aboient à mon passage. D’un coup, les hautes tours de la capitale bulgare surgissent à l’horizon. Comme souvent dans les grandes villes, la circulation est complètement hallucinante. Les voitures s’arrêtent n’importe où, et dépassent de tous les côtés. Je rejoins le centre-ville à la recherche d’un endroit pour dormir. Forcément, tout est écrit en cyrillique. Ce qui complique largement ma tâche ! Du coup, j’abandonne l’idée de rejoindre le monastère conseillé par Luc. Je finis par louer une chambre peu onéreuse à l’hôtel Maya, en plein centre de Sofia. La dame ne parle pas un mot d’anglais, ce qui donne quelques situations assez cocasses.   2. Les chardons dans les prairies bulgares 

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25 janvier 2015 7 25 /01 /janvier /2015 09:56

Vendredi 5 novembre 2010: Visite de Sofia

 

 

1.-Le-monument-de-Sofia-depuis-la-fenetre-de-l-hotel.jpg 

 

 

L’hôtel est situé juste à côté de la place centrale Sveta Nedelya. Je vois même le monument de Sofia depuis ma fenêtre. Il représente une statue féminine en bronze brandissant une couronne, avec une chouette sur l’épaule. La chambre est assez spacieuse, avec une décoration un peu vieillotte. Mon vélo est resté sur la terrasse à l’arrière du bâtiment. Je me rends à pied jusque la cathédrale édifiée sur la place. Je déambule ensuite dans la rue Maria Louisa, afin de découvrir extérieurement la mosquée Banya Bashi, la grande synagogue et les anciens bains de Sofia. A proximité, plusieurs personnes remplissent leurs bouteilles aux fontaines thermales. Tout le quartier est malheureusement en travaux. Puis, j’assiste à la relève de la garde devant la présidence, située dans un bâtiment massif et froid. Plus loin, le joli palais Royal borde le jardin municipal. La population locale vient chercher le calme dans ce petit coin de verdure. Certains se divertissent même aux échecs en plein air. Quelques musiciens jouent également des airs traditionnels. Je poursuis la balade jusque l’église russe Svetni Nikolai. Elle est surmontée de dômes dorés avec des croix orthodoxes. Dans la crypte, l'illustre évêque Sérafim du début du siècle est enterré. A quelques centaines de mètres, l’imposante cathédrale Alexandre Svetni domine tout le quartier. Elle contient d’immenses lustres, de sombres fresques et de jolis trônes en albâtre. Je rejoins ensuite le monument de l’Armée rouge par le jardin des Docteurs. Il a été construit pour commémorer le dixième anniversaire de la libération de la Bulgarie par les russes, pendant la Seconde Guerre mondiale. Non loin, je mange à la terrasse d’une petite échoppe du grand parc Borisova Gradina, tenue par un jeune patron vraiment sympa. Je reviens ensuite sur mes pas, pour visiter la magistrale synagogue sépharade. C’est la plus grande d’Europe ! Par contre, il est trop tard pour pénétrer dans la mosquée Banya Bashi. J’assiste ensuite à des chants religieux orthodoxes, lors d’une cérémonie dans la cathédrale Sveta Nedelya. Aussi, les icônes ont une grande importance pour la population orthodoxe bulgare. Elles représentent un lien entre le sacré et l’humanité. Je soupe enfin dans une petite cafétéria proche de l‘hôtel. Au menu, des plats typiquement bulgares : kebaptcheta et kavarma avec une bonne bière!

 2.-La-releve-de-la-garde-devant-le-palais-presidentiel.jpg 

 

Samedi 6 novembre : Sofia - Pirdop (89,6 km)

 1.-Le-cycliste-devant-l-eglise-Alexandre-Nevski.jpg

Je quitte l’hôtel relativement tôt. Dans les magasins, il est difficile de repérer les différents produits à cause de l’alphabet cyrillique. Par exemple, je pensais avoir acheté du beurre, qui s’avère être de la margarine. Après ces quelques courses, je déjeune sur un banc, juste à côté de la mosquée Banya Bashi. Le soleil commence à réchauffer la capitale bulgare. Je passe ensuite à la cathédrale Alexandre Svetni pour un dernier cliché avec la bicyclette. Deux petits vieux s’intéressent à mon voyage. Ils essayent même de soulever le vélo avec les bagages. Plus de cinquante kilos, c’est quand même bien lourd ! La route vers l’Est pour quitter Sofia est surchargée de véhicules. Cependant, la circulation devient beaucoup moins importante après l’embranchement de l’autoroute. Quelques prostituées racolent également le long de la chaussée. Le parcours reste assez monotone jusqu’au village de Saranci. Plusieurs chiens errants aboient à mon passage, en montrant les crocs. Mais rien de bien dangereux pour l’instant ! La route grimpe ensuite dans de moyennes montagnes, à travers de belles forêts. En bas de la descente, j’aperçois un gros chien peu rassurant. En jaillissant, il se fait percuter de plein fouet par une voiture. Mort sur le coup ! Malgré les dégâts sur son véhicule, le conducteur ne s’arrête même pas ! A Dolno Kamarci, je casse la graine sur un banc à l’ombre. Depuis mon entrée dans les pays de l’ex-Yougoslavie, de nombreux paysans et ferrailleurs se déplacent en charrette tirée par des chevaux ou des ânes. Après le village, ça regrimpe doucement jusque 900 mètres d’altitude (d’après mon altimètre qui n’a pas été calibré depuis quelques jours !). Soit plus de 300 mètres de dénivelé ! Puis, je replonge vertigineusement dans un sublime décor montagneux. Mon premier incident technique apparaît après plus de 4000 km de pédalage. Rien de bien grave, juste un maillon de chaîne qui a cassé ! Le paysage s’enlaidit à l’approche de la petite ville industrielle de Zatlica. Les vieilles usines avec leurs hautes cheminées côtoient les habitations crasseuses et délabrées de la population. Quelques kilomètres plus loin, j’atteins Pirdop, une autre ville peu élégante. Alors que la nuit est tombée, j’installe le campement en bordure d’un petit ruisseau, juste à la sortie. Le gargouillement de l’eau finit par me faire tomber dans les bras de Morphée.

 2.-Les-montagnes-avant-Pirdop.jpg 

 

Dimanche 7 novembre : Pirdop - Lac Pjasacnik (77,2 km) 

 1. Les arbres jaunis par l'automne 

 

Encore une nuit bien froide ! La toile de tente est complètement givrée. Après quelques kilomètres, le paysage redevient superbe. La base des montagnes est boisée de jeunes bouleaux, au feuillage jauni par l’automne. Tandis qu‘aux sommets, la végétation a complètement disparu. Du coup, je tire de nombreux clichés qui me font perdre énormément de temps. Mon parcours bifurque ensuite dans l’étroite vallée de la rivière Topolnica. La splendide route grimpe dans les forêts jusque Koprivshtitsa. Le village est vraiment joli. En fait, de nombreux édifices sont protégés. Les ruelles pavées de gros galets sont bordées par de belles maisons traditionnelles en pierres ou en torchis. Je flâne longuement dans le village, avant de pique-niquer dans un petit jardin public. Puis, je jette un coup d’œil rapide sur les différentes maisons-musées restaurées, qui appartenaient à des célébrités locales. A mon avis, le coin doit quand même être bondé de touristes en plein été ! A la sortie de Koprivshtitsa, la route continue de monter légèrement à plus de 1100 mètres, sur le flanc de la montagne Bunaja. Elle plonge ensuite interminablement sur une petite quinzaine de kilomètres. En quelque sorte, la récompense après l’effort ! J’atteins alors à grande vitesse le village de Strelcha, blotti dans les collines. Ces dernières s’aplanissent au fur et à mesure de mon avancée. La région devient également beaucoup plus agricole. J’emprunte alors des routes secondaires relativement plates, avec une maigre circulation. A la sortie de Krasnovo, le conducteur d'une voiture demande de m’arrêter. La dame sort de son véhicule pour m’offrir des pommes. Un geste simple qui fait vraiment plaisir ! Le long du lac Pjasacnik, la chaussée devient complètement déglinguée. Je zigzague dans la poussière entre les trous, les bosses et les ornières. A cause du nombre important de détritus au bord de l’étendue d’eau, je préfère planter la tente en retrait à une centaine de mètres. Les gens sont vraiment dégueulasses ! Cette journée sous le soleil a été vraiment magnifique. L’une des plus belles depuis mon départ

 

2. Maison de Koprivstica 

Lundi 8 novembre : Lac Pjasacnik - Backovo (70,7 km)

 

 1.-Maisons-colorees-du-vieux-Plovdiv.jpg

Des nuages gris sont malheureusement arrivés dans la nuit. Je reprends ma route cabossée en direction de Plovdiv. Après quelques kilomètres, elle redevient beaucoup plus roulante. Les montagnes ont complètement disparu, cédant la place à une vaste plaine agricole. Je traverse des villages isolés, où le temps semble s’être arrêté. Les gens me regardent passer, intrigués par ce cycliste un peu fou. Beaucoup ramassent et brûlent les feuilles mortes tombées sur leur trottoir. Comme souvent dans les pays de l’Est, les maisons sont carrées, sans aucune mitoyenneté. Des odeurs de feu de bois et de charbon se dégagent des cheminées. J’arrive ainsi sans peine dans la seconde ville de Bulgarie. J’abandonne alors mon vélo le temps de la visite. Je découvre notamment la mosquée Djoumaia, et les églises Sveta Bogoroditsa et Sveta Nedelya. Ces dernières renferment de belles fresques et de jolies iconostases. Malheureusement, l’accueil est parfois à la limite de l’impolitesse. Plovdiv conserve également de nombreuses ruines romaines et thraces. L’accès à l’amphithéâtre romain est payant, mais le gardien me laisse finalement entrer gratuitement. Il sert actuellement à la représentation de concerts et de spectacles. Plusieurs galeries d’art, ainsi que de belles demeures célèbres, bordent les ruelles pavées de grosses pierres. Franchement, cela aurait été bien difficile de pédaler dans ces conditions ! Je pique-nique ensuite sur la place Stambolov, sous la surveillance d‘un vigil pas très compréhensif. A cause du manque d’indication, je quitte Plovdiv à la boussole. La nationale en direction d’Asenovgrad est surchargée de véhicules. En plus, un vent de face s’est soudainement levé. Après la petite ville industrielle, j’emprunte une route grimpant le long de la rivière Cepelarska. Le monastère de Backovo se situe quelques kilomètres plus au Sud, dans de moyennes montagnes. Malgré la lumière terne de fin d’après-midi, l’édifice religieux est magnifique. Des peintures murales dans la cour intérieure relatent l’histoire du lieu. L’église renferme également une superbe iconostase du 17ème S et des fresques colorées. A cause d’une célébration, je préfère ne pas m’y attarder. Par contre, il est interdit de tirer des photos à l’intérieur, comme à l’extérieur du bâtiment. Et cela me plaît beaucoup moins ! Il y a même des vigils qui surveillent tous les faits et gestes. Un vrai pénitencier ! De plus, l’accueil n’est pas franchement amical. Contrarié, je quitte les lieux par le même chemin en sens inverse. Après un petit tunnel, je bifurque sur une route abandonnée, pour planter la tente en bordure de la rivière. Une agréable odeur de thym se dégage autour du bivouac.

 2.-C-est-par-ou.jpg 

 

Mardi 9 novembre : Backovo - Brjagovo (99,8 km)

 

 1.-Paysans-sur-une-charette.jpg 

 

La température est sensiblement plus élevée que les nuits précédentes. Malheureusement, il tombe une fine pluie qui s‘estompe assez rapidement. Je poursuis la descente sur Asenovgrad, le long de la rivière Cepelarska. J’emprunte ensuite des routes secondaires dans la grande plaine agricole, juste au pied des montagnes. Elles traversent quelques villages possédant encore des rues en terre battue. Le ciel reste toujours bien menaçant, et le vent ralentit considérablement ma progression. Du coup, je rejoins péniblement la nationale en direction d’Haskovo. Forcément, le trafic routier devient beaucoup plus important. De plus, cela n’arrête pas de faire le yoyo dans les basses collines. Avec ce vent de m…, c’est vraiment épuisant ! Aussi, quelques habitants du coin vendent leurs produits à l’étalage au bord de la route. Puis, je m’arrête à Gorski Izvor pour manger un morceau dans un petit parc. Le village semble complètement désert. En apercevant ma lourde bicyclette placardée d’un F, un petit vieux possédant un minuscule commerce vient spontanément me serrer la main. Quelques kilomètres plus loin, j’atteins enfin Haskovo qui possède la plus vieille mosquée de Bulgarie. Par contre, le bâtiment ne frappe pas aux yeux ! Je me balade rapidement dans les rues commerçantes de cette petite ville sans charme. Plusieurs personnes s’attroupent autour de mon vélo. Lorsque je rapplique, un homme me met en garde contre les vols. Ce qui m’incite un peu plus à déguerpir ! Je retrouve alors la même nationale qui file désormais vers Slivengrad. Il faut savoir également que la CEE finance de nombreux travaux routiers dans toute la Bulgarie. Le parcours reste ennuyeux jusque la fin de journée. Au crépuscule vers 17 h 30, je m’installe dans une petite prairie derrière quelques arbustes. La route est toute proche, mais cela fera l’affaire pour une nuit. Demain si pas d’inconvénient, je quitte la Bulgarie !

 2.-Etal-de-fruits-et-legumes-au-bord-de-la-route.jpg 

 

Mercredi 10 novembre : Brjagovo - Edirne (TR) (91 km) 

 

 1.-Le-cycliste-a-la-frontiere-turque.jpg

 

Le vent n’arrête pas de souffler ! Désormais, je me lève à 6 h pour bénéficier au maximum du jour. La nationale continue d’osciller dans les basses collines jusque Harmanli. La ville industrielle n’est vraiment pas attirante. De vieilles usines délabrées ceinturent de nombreux buildings crasseux, ainsi que des maisons à la limite de l’insalubrité. Certaines inachevées tombent carrément en ruines ! Le ciel gris menaçant rend l’endroit encore plus sordide. J’emprunte ensuite une route secondaire complètement plate pour joindre Slivengrad. Dans les rues déglinguées de la petite ville, il faut zigzaguer entre les trous et les bosses. De plus, j‘ai un mal fou à me repérer. Par manque d’indications, je fais plusieurs allers-retours pour tenter de trouver mon chemin. Et ça commence sérieusement à me gonfler ! Finalement, je décide d’emprunter la voie rapide en direction de la frontière turque. Une file incroyable de camions attendent sur plusieurs kilomètres pour passer la douane. Certains routiers me saluent amicalement lors de mon passage. Je pique-nique à Kapitan Andreevo, le dernier village de Bulgarie de mon itinéraire. A la frontière, il faut attendre un bon moment avant d’avoir l’autorisation de pénétrer en Turquie. Par chance, on me laisse passer assez facilement. C’est ça l’avantage de voyager à bicyclette ! Dès le franchissement de la douane, une grande mosquée rappelle que l’on entre dans un pays musulman. Aussi, les nuages ont complètement disparu à la frontière. Drôle de coïncidence ! A moins que cela ne soit le même phénomène qu’avec le nuage de Tchernobyl pour la France ! Par contre, le vent est toujours présent. Je pédale alors péniblement jusque Edirne, truffée de belles mosquées. Au loin, celle de Selim est vraiment impressionnante, avec son dôme et ses quatre minarets d’une hauteur de 70 mètres. Avant d’entrer en ville, je me rends à un complexe musulman du 15ème S, au bord de la rivière Tunca. Il comprend entre autres une mosquée, un hammam et un asile. Je décide ensuite de passer la nuit à l’hôtel Kent, dans une rue commerçante bordée de vieilles maisons en bois. Le prix de la nuitée n’est pas trop élevé. La chambre est petite et sommaire, sans douche ni WC. Puis, je pars visiter la mosquée aux Trois Balcons, la mosquée Selim et la Vieille mosquée avec ses bazars. Comme c'est l'anniversaire de la mort d'Atatürk, des soldats veillent sans bouger sur le monument de la ville. D'ailleurs, on trouve des pancartes à son effigie partout. Puis, je mange une spécialité locale dans un petit restaurant : du Taga Civer. Il s’agit de morceaux de foie panés et frits. Spécial, mais bien bon ! Ce qui m’inquiète plus, ce sont les crudités ! En effet, l’eau du robinet n’est pas toujours saine dans le pays. Les chants traditionnels turcs du café d’à côté, et l’appel à la prière du muezzin me rapprochent un peu plus de l’Orient.

 2.-La-vieille-mosquee-d-Erdine-au-soleil-couchant.jpg 

 

Jeudi 11 novembre : Edirne - Büyük Karistiran (104,4 km)   

 

Au petit matin, je pars en ville à pied pour tirer quelques clichés. Il est 10 h lorsque j’enfourche mon vélo pour démarrer l’étape. Une nouvelle fois, il y a un vent à décorner les bœufs ! Soufflant de côté, il me fait vaciller régulièrement. Le soleil crée une brume de chaleur noyant les basses collines. Elles sont saturées de grands champs, s’étirant à perte de vue. Seuls quelques arbres isolés sont plantés par-ci, par-là. D’où mon inquiétude à trouver un terrain plat et discret pour le campement de ce soir ! De plus, la route n’arrête pas de monter et descendre. Cela devient vite épuisant et ennuyeux ! De nombreux ouvriers travaillent à son élargissement sur quatre voies, allant d’Edirne jusque Istanbul. La circulation est également démente. Tout est réuni pour perdre le moral et la motivation ! Après plusieurs dizaines de kilomètres, je stoppe au petit village de Kuleli pour m’alimenter au bord de la chaussée. A l’entrée de Babaeski, un homme tenant une petite échoppe m’invite à m’asseoir pour discuter. Je ne reste cependant que très peu de temps. Je traverse ensuite la ville sans m’arrêter. Le vent a curieusement disparu. Ce qui n’est pas pour me déplaire ! Je parcours ainsi plus aisément la distance qui me sépare de la grande ville de Lüleburgaz. Toute la journée, j’ai eu droit aux klaxons. A la fin, on n’y prête même plus attention ! Il fait presque noir lorsque j’arrive à Büyük Karistiran. Les usines à la périphérie rendent encore plus difficile la recherche pour planter la tente. Je trouve un coin pas trop rassurant sous des conifères, entre deux complexes industriels. La nationale avec son gros trafic routier est vraiment tout proche. Je passe également un bon moment à chercher mon pantalon de pluie tombé du vélo. Demain, je vais tenter de rejoindre Istanbul à plus de 120 km.

 

 

Vendredi 12 novembre : Büyük Karistiran - Istanbul (141,6 km) 

 1.-Mehmet--le-vendeur-de-melons.jpg

 

Malgré le bruit de la circulation, j’ai passé une bonne nuit. Je prends la route vers 8 h en direction d’Istanbul. Le paysage baigne dans une fine brume matinale. Le ciel est couvert de nuages gris, mais miracle, il n’y a plus de vent ! Le parcours est en général beaucoup plus plat que la veille. Par contre, ce n’est qu’une succession d’usines jusque Corlu. Donc pas intéressant pour un sou ! La grande ville s’étale entre les basses collines dénudées. Quelques chiens errants tentent de me courser. Ils s’arrêtent net, apeurés par mes cris plus puissants que leurs aboiements. Quelques-uns gisent sur le bas-côté, percutés par les véhicules. Puis, je pédale carrément sur une voie rapide jusque la mer de Marmara. Il faut reconnaître que la Thrace turque ne me laissera pas un souvenir impérissable ! A Silivri, je pique-nique sur un banc juste en face des flots. La route côtière n’arrête pas de monter et descendre. Quelques côtes ne sont d’ailleurs pas négligeables ! A la sortie de Kumburgaz, un vendeur au bord de la chaussée me demande de m’arrêter. Mehmet m’offre spontanément des morceaux de melon frais. Succulent ! A cause du problème de la langue, il est dommage que je ne puisse engager une conversation plus sérieuse avec lui. La périphérie d’Istanbul commence à partir de Büyük-çekmece. La circulation augmente considérablement, et il n’y a plus un espace de libre. Les rues grouillent également de monde. Je ne suis cependant pas trop rassuré de pédaler entre les véhicules, sur une route à huit voies. Les Turcs roulent comme des cinglés, tout en klaxonnant à la moindre occasion. Avec la nuit qui tombe, cela devient carrément fou ! Des motards flics m’encouragent quand même en me dépassant. Après avoir demandé plusieurs fois mon chemin, je finis par rejoindre péniblement le quartier de Sultanahmet. Je réserve une chambre pour trois nuits à l'hôtel Sur dans une ruelle sombre. Par contre, le tarif est bien élevé pour ma bourse ! Je commençais à prendre l’habitude de vivre avec moins de 10 euros la journée ! Toute proche, la mosquée Bleue est complètement illuminée. Après plus de 140 km à vélo, un bon gros dodo s’impose enfin !

 

2.-Sur-la-route-d-Istanbul.jpg 

 

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24 janvier 2015 6 24 /01 /janvier /2015 10:08

Samedi 13 novembre 2010: Visite d’Istanbul

 1. La mosquée bleue à Istanbul 

 

Je prends le déjeuner en terrasse de l’hôtel Sur, avec vue sur la mer de Marmara. Je goûte notamment une succulente confiture de roses. La visite d’Istanbul commence forcément par la mosquée Bleue. En effet, ma chambre ne se trouve qu’à peine à 300 mètres de l’édifice ! Elle comporte sept minarets élancés. A l’entrée, on fournit un sac plastique pour mettre ses chaussures. L’intérieur est décoré d’une multitude de faïences bleutées, représentant des motifs floraux. D’où son nom ! Le dôme central repose sur quatre énormes piliers. Je déambule ensuite autour de l’hippodrome romain. Du moins, ce qu’il en reste ! Seules deux obélisques et une colonne serpentine sont encore érigés. La mosquée Ste Sophie n’est qu’à deux pas. Initialement basilique, elle fut transformée par le sultan Mehmet II au 15ème S. Le prix d’entrée est élevé, mais le monument vaut vraiment le coup. Quatre minarets entourent l’énorme dôme construit en briques roses. L’intérieur renferme notamment plusieurs mosaïques byzantines. Celle de la Vierge et l’Enfant est sertie de pierres précieuses. Malheureusement, elle est en partie cachée par un haut échafaudage. D’autres aussi belles se trouvent dans les tribunes surplombant la gigantesque nef centrale. Juste à côté de la mosquée, je descends dans la citerne-basilique qui alimentait le Grand Palais des sultans. Des centaines de colonnes supportent l’édifice. Certaines sont même sculptées, représentant des têtes de méduse baignat dans l'eau. Je prends ensuite la direction du palais de Topkapi. Ce fut durant des siècles la résidence principale des sultans. Une nouvelle fois, l’accès est assez onéreux. Pavillons, hammams, fontaines, bibliothèques et cuisines composent ce merveilleux ensemble architectural, répartis dans quatre cours intérieures. La salle du Trésor renferme de splendides bijoux, notamment le poignard Hancer (rendu célèbre par le film de Jules Dassin) et le fameux diamant Kasikci de 86 carats. Des reliques saintes musulmanes sont également exposées dans une autre pièce. Par contre, il est déjà trop tard pour visiter le harem. De toute façon, il faut de nouveau payer pour y accéder, alors que l’entrée du palais coûte déjà de nombreuses livres turques. Si ça, ce n’est pas de l’arnaque touristique ! Je rejoins le quartier proche de l’hôtel, afin de trouver un petit restaurant de cuisine turque (Cesme Restaurant). Je mange en terrasse un plat de kebab de mouton, avec une bouteille de pinard du pays. Puis, je déguste quelques baklavas en guise de dessert. Le plat consistant est assez bon. Par contre, le vinaigre est difficile à avaler. De plus, la facture s’élève horriblement à cause du breuvage. Bref, je suis déjà vacciné du vin turc !

 2. Vue sur la Corne d'Or depuis le palais de Topkapi 

 

Dimanche 14 novembre : Visite d’Istanbul

 

 1. Etal d'épices dans le bazar égyptien

 

Je poursuis la découverte d’Istanbul dans des rues adjacentes moins fréquentées, autour des mosquées de la Petite Ste Sophie et de Sokollu Mehmet Pasa. Beaucoup de maisons en bois sont cependant délabrées. Je prends ensuite la direction du Grand Bazar. Malheureusement, il est fermé le dimanche ! En fait, j’ai perdu complètement la notion du temps ! Je visite quand même les mosquées Beyazit, Kalender et Sehzade, aux alentours de l’université et du marché aux livres. Plus loin, celle de Soliman le Magnifique est immense, mais l’entrée est momentanément interdite pour cause de rénovation. Seuls les mausolées du sultan et de son épouse sont accessibles. Un gamin me suit soudain en réclamant de l’argent. A cause de mon refus, il finit par me jeter quelques cailloux, avant de fuir rapidement. Puis, je me balade longuement dans le Bazar égyptien, à côté de la mosquée Rüstem Pasa. Les ruelles grouillent de monde. Il est d’ailleurs bien difficile de progresser dans cette cohue ! On vend tout et n’importe quoi dans un vacarme assourdissant. Tout le monde marchande leurs produits en criant. Aussi, d’agréables odeurs d’épices et de confiseries se dégagent des nombreux étals colorés. J’assiste ensuite pendant quelques minutes à la prière dans la mosquée Neuve. Plusieurs fidèles s’agenouillent et se lèvent à l’appel du muezzin. Puis, j’emprunte le pont de Galata pour joindre l’Istanbul moderne. Un nombre incroyable de pêcheurs s’étalent le long de l’édifice enjambant le cours d’eau. Sur l’autre rive, je renonce à grimper au sommet de la tour de Galata, à cause de la grosse file d’attente. Je préfère alors me balader dans la longue rue commerçante Istiklal Caddesi, pour découvrir les différents palais, édifices religieux et passages qui la bordent. Le quartier est noir de monde ! Il reste d’ailleurs vivant une bonne partie de la nuit. Dans la soirée, après de nombreux kilomètres de marche, je mange un Tavuk Sis dans une petite échoppe du quartier. Il s‘agit de morceaux de poulet épicés avec quelques légumes, disposés dans du pain. Je rentre finalement à l‘hôtel, tout en flânant dans les ruelles.

 2. La mosquée neuve et les pêcheurs sur le pont de Galata 

 

Lundi 15 novembre : Visite d’Istanbul

 

1. Escalier en colimaçon dans l'Istanbul moderne 

Après un déjeuner copieux, je rejoins rapidement l’Istanbul moderne pour poursuivre la visite. Je peux monter enfin dans la tour de Galata, sans perdre de temps. Malgré le temps couvert, la vue depuis le sommet est spectaculaire. Sur l’autre rive de la Corne d‘Or, les mosquées, l’université et le palais de Topkapi se détachent derrière le voile de brume. Aussi, le trafic maritime sur le Bosphore est toujours incessant. Je retrouve ensuite la rue commerçante Istikdal Caddesi. Les ruelles adjacentes sont peu fréquentées par les touristes. Et c’est tant mieux ! Elles descendent abruptement dans des coins plus populaires, recélant quelques monuments intéressants. Le quartier des Antiquaires est notamment animé. Les habitants étalent leurs objets à même le trottoir, attendant un éventuel acheteur. Et ça papote tout en buvant du thé, boisson fortement consommée par les Turcs ! Je déambule ensuite autour de la tour de Galata, avant de traverser sur le pont du même nom. Je coupe ainsi par le Bazar égyptien pour rallier le Grand Bazar. A cause de la foule oppressante, il est bien difficile de progresser. C’est vraiment du délire ! Les entrées du bâtiment sont toutes surveillées par la police. Le lieu semble beaucoup plus touristique, perdant ainsi de son authenticité. Du coup, cela me plaît beaucoup moins que l’atmosphère du Bazar égyptien ! Sur la place Beyazit, je goûte au fameux çay (thé turc) à la terrasse d’une petite échoppe. En rentrant à l’hôtel, je croise Lance, un Anglais qui sillonne l’Europe à vélo. Pour lui, c’est fini car Istanbul est le terminus de son parcours! Le soir, dans le quartier de Sultanahmet, j’avale du kebab enroulé dans une galette fine, avec quelques pâtisseries locales. La vie trépidante d’Istanbul me plaît vraiment, mais la route m’appelle pour poursuivre l‘aventure. Demain, je traverse la mer de Marmara pour m‘attaquer au plateau d‘Anatolie.

 2. Le viel Istanbul depuis la tour de Galata 

 

Mardi 16 novembre : Istanbul - Orhangazi (20,2km)

 Le cycliste devant la mosquée Ste Sophie d'Istanbul

 

Pour éviter le trafic routier à la périphérie d’Istanbul, je préfère prendre le bateau qui traverse la mer de Marmara vers Yalova. Par hasard, je retrouve Lance qui me souhaite bonne chance pour la suite de mes aventures. Après un dernier cliché devant la mosquée de Ste Sophie, je rejoins l’embarcadère de Yenikapi. A ma plus grande surprise, on m’annonce qu’il n’y a plus de place avant 15 h. Il aurait fallu réserver auparavant ! Encore fallait-il que je le sache ! Par conséquent, ma journée de pédalage risque d’être bien courte. J’occupe alors mon temps à bouquiner à la terrasse d’un çay bahçesi. Ce type d‘établissement ne servant pas d‘alcool, je bois comme tout le monde du thé et du sahlep. Il s'agit d'une boisson laiteuse chaude, à base de racines d‘orchidées et de cannelle. Franchement, ce n’est pas mauvais ! Sans billet pour le vélo, le contrôleur à l’embarquement me laisse gentiment passer. Le bateau est une sorte de grosse vedette qui fait la traversée rapidement en une heure. Tout le monde doit d’ailleurs rester assis. Il est alors bien tard lorsque j’accoste à Yalova. Je décide de prendre quand même la route jusque la tombée de la nuit. Dès le début, elle grimpe dans de basses montagnes jusque 250 mètres environ. Avant la descente sur Ohrangazi, je m’arrête pour planter la tente dans une humide prairie, à l’écart des habitations. Tout à coup, des éclairs jaillissent. Les quelques gouttes qui tombent suffisent à tremper mes affaires. Quelle poisse, tout s’est joué à un quart d’heure près ! Enfin, il ne faut pas longtemps pour que je trouve le sommeil.

 

 

Mercredi 17 novembre : Orhangazi - Bayirköy (102,7 km)

 1. Enfants d'Iznik

 

Je reprends le rythme de me lever à 6 h, pour profiter au maximum de la lumière du jour. La route plonge agréablement vers Orhangazi, dans les montagnes boisées. Mon itinéraire borde ensuite la rive Nord du lac d’Iznik, à travers les plantations d’oliviers. La chaleur du soleil forme une fine brume au-dessus de la grande étendue d’eau. Par conséquent, le paysage se retrouve en partie masqué. La petite ville est célèbre pour ses faïences depuis le 16ème S. Beaucoup de monuments en Turquie en sont décorés. Je visite l’église Ste Sophie, transformée en mosquée. Il ne reste quasiment rien à l’intérieur. Ce qui rend le prix d’entrée un peu excessif à mon goût ! Iznik possède également d’épais remparts avec des portes fortifiées, des ruines d’un théâtre romain, ainsi qu'une mosquée avec un minaret de faïences vertes. Pendant le pique-nique, je partage un peu de pain et de fromage avec un vieux Turc démuni. Je finis par décamper lorsque quelques adolescents commencent à toucher un peu trop à ma bicyclette. La route remonte doucement durant une petite vingtaine de kilomètres. Après la bifurcation pour Osmaneli, la pente s’accentue terriblement à plus de 12 %. Fort heureusement sur une courte distance ! Dans la descente, deux jeunes en scooter me suivent à la trace. Mes gaillards semblent un peu louches. En effet, ils ne tardent pas à me réclamer de l’argent. Comme je feins de ne pas comprendre, ils me lâchent au bout de plusieurs kilomètres. Je rejoins ensuite une nouvelle route sur quatre voies, non précisée sur ma carte. La circulation devient forcément plus dense. Au village de Bayirköy, un homme m’invite à m’attabler à une terrasse avec un petit groupe. Je passe par l’intermédiaire d’un Stambouliote pour converser en anglais. Je deviens vite l’attraction du coin. Tout le monde me pose des questions, mais mon turc est plus que limité. On m’offre même thé, pain, confiseries et légumes. Après un long moment dans la bonne humeur, je quitte la troupe les sacoches pleines. Juste à la sortie du village, je bivouaque dans une prairie surplombant la nationale. Aujourd’hui, c’est le jour de mon anniversaire. Il coïncide avec la fête du sacrifice (Kurban Bayrami), qui est très important pour les musulmans. Moi, je fais kermesse tout seul avec mon vélo !

 

2. Minarets des mosquées d'Iznik 

 

Jeudi 18 novembre : Bayirköy - Cukurhisar (84,4 km)

 

 1. Les montagnes à Bilecik 

 

La rosée a une nouvelle fois complètement trempé la tente. Lorsque je démarre l‘étape, le soleil commence à peine à percer la brume matinale. Après le village de Vezirhan, je préfère bifurquer sur l’ancienne route, afin d’éviter la circulation. Elle grimpe en lacets dans les montagnes pour joindre Bilecik. Le paysage est malheureusement défiguré par de nombreuses carrières. A l’entrée de la petite ville, un gendarme m’aiguille spontanément sur la direction à prendre. Un peu plus loin, je rencontre un groupe de trois Anglais qui voyage également à vélo. La route replonge ensuite vers la fameuse nationale à quatre voies. Le tronçon qui suit n’est vraiment pas plaisant. En effet, les montagnes sont creusées pour élargir la voie. De plus, la rivière est canalisée par de gros blocs de béton. Bref, cela devient vite lassant et épuisant ! Quelques kilomètres avant Bozüyük, je retrouve le petit groupe de cyclistes anglais. Dan et Tim ont quasiment suivi le même itinéraire que moi depuis l‘Angleterre. Russ les a rejoint en Turquie. Dans une petite boutique de la ville, nous mangeons ensemble du gözleme, sorte de crêpe à la viande hachée, avec quelques baklavas en dessert. La route devient ensuite un peu plus agréable. Elle traverse des collines plus arides, à une altitude de 700 mètres en moyenne. En chemin, nous faisons quelques courses au village de Cukurhisar. Forcément, quatre cyclistes avec des vélos chargés ne passent pas inaperçus. Tout d'abord, le patron du commerce nous offre gentiment le thé. Puis, c’est un autre qui nous sert un verre de limonade. Bref, tout le monde cherche à discuter avec nous. Nous finissons par refuser plusieurs invitations, en prenant la fuite. En effet, il commence à faire tard. Quelques kilomètres plus loin, nous plantons les tentes au sommet d’une colline. Nous ne sommes pas seuls à fréquenter le coin. De nombreuses petites souris nous tiennent compagnie, en poussant des cris stridents. Avant le souper, nous assistons au coucher du soleil, tout en sirotant une bière.

 

2. Arbre isolé dans les collines de Bozuyuk 

 

Vendredi 19 novembre : Cukurhisar - Sükranli 76,2 km)

 

 1. La troupe anglaise et moi même à Eskisehir

 

A 6 h, je suis réveillé par l’appel à la prière du muezzin du village voisin. Mes compagnons préparent un déjeuner à l’anglaise avec les moyens du bord. Puis, nous repartons ensemble jusque Eskicehir. Dans une rue commerciale, nous nous attablons à une petite terrasse pour manger à nouveau du gözleme. Nos chemins se séparent ici ! Dan, Tim et Russ veulent rejoindre directement la Cappadoce vers l’Est, alors que je préfère prendre la direction du Sud vers la vallée Phrygienne. Peut-être que l’on se croisera à nouveau en Turquie ! «Cycling safe» me disent-ils lorsque je repars. A quelques centaines de mètres, un taxi me coupe littéralement la route. Ma roue dérape en freinant, et le vélo se couche sur la chaussée. Rien de bien méchant, juste quelques égratignures au mollet en évitant la chute ! Avant de quitter la ville, je me balade rapidement dans le quartier Kursunlu, qui renferme une jolie mosquée et plusieurs maisons ottomanes colorées. La route oscille ensuite dans des collines désertiques de l‘Anatolie occidentale. Le paysage est vraiment surprenant. Aussi, je profite de l’ombre d’un arbre isolé pour casser la graine. A 1000 mètres d’altitude, le soleil cogne fort sur le plateau ! Puis, je rejoins Seyitgazi en milieu d’après-midi. Une mosquée du 13ème S domine le petit village. Quelques autochtones cherchent à nouveau à discuter avec moi. Mon turc n’a cependant pas beaucoup progressé depuis hier ! Je bifurque ensuite sur une petite route délabrée, en direction de la vallée Phrygienne. Il n’y a quasiment pas de circulation ! Les rares villages traversés possèdent encore de belles maisons en pierres. Malheureusement, la plupart semblent à l’abandon. Quelques côtes me donnent du fil à retordre. En plus, le coin est peuplé de gros chiens de berger, qui se mettent à aboyer à mon passage. Pas vraiment rassurant ! Au sommet d’une colline, juste avant le village de Sükranli, j’installe le campement dans une forêt de résineux. Le froid se fait sentir dès le soleil couché. A plus de 1200 mètres, ce n’est pas étonnant !

  2. Le plateau d'Anatolie avant Seyitgazi 

 

Samedi 20 novembre : Sükranli - Gazligöv 67,9 km)

1. En route pour la vallée phrygienne 

 

Il fait encore frisquet ce matin. Fort heureusement, le soleil réchauffe rapidement le milieu ambiant. L’écart de température entre la nuit et la journée est énorme ! Je traverse des villages pauvres, complètement isolés. De nombreuses formations rocheuses sont disséminées tout autour de la vallée. Certaines ont de curieuses silhouettes, d’autres renferment des grottes ou des temples phrygiens. J’emprunte d’ailleurs la piste jusqu’à celui du site de Mezar Aniti, complètement taillé dans la roche. Celui de Küçük Yazilikaya est beaucoup moins impressionnant. Quelques kilomètres plus loin, un immense bloc rocheux, appelé par les archéologues Midas Sehri, surplombe le minuscule village de Yazilikaya. Le gardien du lieu me fournit gentiment une brochure explicative. De plus, il me laisse entrer gratuitement ! La façade d’un gigantesque temple est sculptée dans la montagne. A côté, de nombreuses cavités sont creusées dans une forteresse rocheuse. L’une d’elles a même été aménagée en un petit monastère. Plus loin, des escaliers abrupts permettent de descendre aux citernes qui alimentaient l’acropole au sommet. Je me balade longuement dans le site, tellement le décor est somptueux. Quelques kilomètres plus loin dans la descente, de nombreux bergers font paître leurs moutons dans les prairies environnantes. Malgré l‘aide des habitants, je perds facilement une bonne heure à chercher du pain dans les villages de Yapildak et Kümbet. Ce dernier possède un temple phrygien avec des lions taillés sur sa façade, ainsi qu‘une sépulture seldjoukide. Je pique-nique à côté du site à une heure déjà bien avancée. Je rejoins ensuite la route en direction d’Afyon. A ma grande surprise, elle grimpe dans des montagnes boisées de résineux. J’atteins ainsi le col de Karayollari, situé à plus de 1300 mètres. La route plonge ensuite dans des collines plus désertiques, parsemées d’étranges blocs rocheux. Malgré l’imminence du soleil couchant, je bifurque vers Ayazini à quelques kilomètres. De nombreuses maisons troglodytes creusées dans la pierre jalonnent le parcours. Le village est composé principalement de vieilles maisons délabrées, construites en pierres et en torchis. La lumière est cependant bien trop faible pour tirer des clichés ! De toute façon, tout le monde semble me dévisager, ce qui me met mal à l’aise ! Je reprends ensuite le même chemin en sens inverse, pour retrouver la route d’Afyon. Juste avant Gazligöv, je m’installe au sommet d’une colline, à côté d’une maison en construction. A nouveau, ce fut une splendide journée !

 3. Bergers turcs dans la vallée

 

  2. Le site de Midas Sehri 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dimanche 21 novembre : Gazligöv - Yakasenek (88,6 km)

 

 1. Maisons ottomanes devant la citadelle perchée d'Afyon

 

La brume a complètement envahi la région. La température ambiante est par conséquent très basse. Il fait environ 3°C ! Comme la visibilité est très réduite, je pédale machinalement jusque Afyon. Le soleil commence à percer lorsque j’atteins la petite ville. Sur la place centrale, une grande statue commémore la victoire des Turcs sur les Grecs en 1922. Aussi, une monumentale citadelle est perchée sur un massif rocheux isolé, de plus de 200 mètres de hauteur. Vraiment impressionnant ! Je visite également la mosquée seldjoukide Ulu Cami. Elle possède de nombreuses colonnes en bois, avec des chapiteaux sculptés. Le quartier renferme de jolies maisons ottomanes aux couleurs vives. Plus loin, la mosquée Mevlevihane Cami est fermée ce dimanche. Au centre-ville, Imaret Cami possède un minaret en forme de spirale, décoré de faïences bleues. L’accès est momentanément défendu pour cause de funérailles. Je quitte ensuite la ville sur une grosse nationale à quatre voies, en direction de Konya. Elle reste relativement plate, parcourant le plateau à une altitude de 1000 mètres. Fort heureusement, le bas-côté est assez large pour m’écarter du trafic routier. A la sortie d'Afyon, je mange un morceau à proximité d’un champ, tout en faisant sécher la tente au soleil. Sur mon parcours, de nombreuses personnes m’interpellent pour boire le fameux thé turc. Je ne peux cependant m’arrêter à chaque proposition ! De plus, je préfère largement une autre infusion à base d’orge et de houblon ! Aussi à Cay, je perds mon temps dans plusieurs commerces pour faire les courses. Puis, la route passe au pied de la chaîne montagneuse Sultan Dagla. Quelques kilomètres plus loin, je bivouaque dans une plantation d’arbres fruitiers, juste avant le village de Yakasenek. Le froid se fait sentir dès le soleil sous l’horizon.

  2. Muret de pierres devant les montagnes de Sultan Daglari 

 

Lundi 22 novembre : Yakasenek - Orhaniye (100,9 km)

 

  Rivière asséchée après Yakasenek

Encore des températures négatives cette nuit ! Il fait -3°C, lorsque je me lève. La tente est une nouvelle fois givrée. Les montagnes sont toutes envahies par la brume. Les lacs Eber Gölü et Aksehir Gölü sont invisibles depuis la route. Je traverse rapidement la ville d’Aksehir qui ne présente vraiment aucun intérêt. Les montagnes s’éloignent peu à peu, laissant place à des collines parsemées de champs et de prairies. L’herbe rase est partout brûlée par le soleil. Les travaux de rénovation de la chaussée m’obligent à rouler dans les gravillons durant de nombreux kilomètres. En plus de la circulation, cela devient vite pénible ! Je pédale encore et encore, la tête dans le guidon. De toute façon, il n’y a que cela à faire ! Je mange au bord d’un sentier de campagne, juste avant la ville d’Argithani. Ma tente, en train de sécher au soleil, s’envole d’un coup à cause d’une bourrasque. C’est vraiment étrange, car le vent n’était pas du tout violent jusqu’alors ! Le paysage reste semblable jusque Ilgin. Pendant les courses, je fais une nouvelle fois fureur dans la petite ville. Les gens s’attroupent autour de ma bicyclette. Un jeune commerçant m’invite même à boire un verre de coca dans sa boutique. J’ai beau lui expliquer que je n’apprécie pas la boisson, rien n’y fait ! Comme je ne veux pas le froisser, je finis par céder. Aussi, il est bien difficile de trouver un emplacement discret dans le coin. Le moindre lopin de terre est exploité, et les arbres se font rares. Après de longues recherches, je plante finalement la tente au sommet d’une colline, juste à côté d’une antenne de télécommunications. Le terrain fraîchement labouré est rempli de grosses pierres. De plus, mon campement n’est vraiment pas discret sous la pleine Lune. Au loin, les cheminées de l’usine sucrière d’Ohraniye crachent leurs fumées polluantes. Juste devant le bâtiment, il y a une file incroyable de camions et de tracteurs chargés de betteraves.

 

 

Mardi 23 novembre : Orhaniye - Konya (80,3 km)

 

  1. Paysage des montagnes Bozdag 

 

La température est un peu plus clémente aujourd’hui, mais je ne sortirais quand même pas le short et le tee-shirt ! Je poursuis mon parcours dans les collines dénudées de végétation. Le temps est instable. Le soleil se cache derrière une fine brume qui a bien du mal à se dissiper. Dans les villages traversés, de nombreuses paysannes ramassent les pissenlits poussant dans les fossés remplis de détritus. Pas franchement appétissant, mais quant on n’a pas le sou ! La première difficulté de la journée intervient après le village d’Halici. La route grimpe de plus de 300 mètres dans la chaîne montagneuse Bozdag. Elle tourne autour de la montagne Atagri Tepe, qui culmine à 2129 mètres. Comme je pédale déjà à une bonne altitude, le sommet ne paraît pas si élevé. Je grignote mon banal casse-croûte en bordure d‘une récente plantation d‘arbres. Puis, je redescends doucement sur Konya, peuplé de plus d’un million d’habitants. Les abords de la grosse ville sont truffés de buildings disgracieux. De plus, la circulation est encore démentielle. Les dolmus, sorte de mini autocars, sont les plus dangereux. Je m’en méfie comme de la peste ! Ils roulent à grande vitesse, s’arrêtent n’importe où, sans se soucier de la signalisation. Après une bonne quinzaine de kilomètres, j’atteins sain et sauf le centre-ville. Je décide alors de passer une nuit dans le petit hôtel Ulusan, pour recharger les batteries du matos et du bonhomme. En milieu d’après-midi, je me balade autour de la mosquée d’Alâaddin, située au sommet d’une basse colline. Elle renferme notamment un mihrab en bois sculpté, et de nombreuses colonnes surmontées de chapiteaux. Je découvre ensuite les jolis portails des médersas Büyük Karatay et Ince Minare. Ces édifices servaient autrefois d'écoles coraniques. Konya est également la capitale des célèbres derviches tourneurs, qui prônent la danse et la musique pour prier. Le soir venu, dans une petite échoppe d’une rue commerçante, je mange du kebab de poulet avec un verre d’ayran. Il s’agit d’une boisson composée de yaourt, d’eau et de sel. Assez spécial, mais il fallait bien tester ! Plus loin dans une pâtisserie, je me gave de spécialités turques fortement sucrées. Je retrouve ensuite ma petite chambre, pour me décrasser après ces nombreuses nuits de camping sauvage.

 

 2. Portail éclairé d'une médersa

 

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23 janvier 2015 5 23 /01 /janvier /2015 10:20

Mercredi 24 novembre 2010: Konya - Kizören (73,8 km)

 

 

 1.-Le-Tekke-de-Mevlana.jpg 

 

Le patron de l’hôtel est vraiment aimable et souriant. Il m’autorise à laisser les sacoches et le vélo, le temps de poursuivre la visite. La ville est très conservatrice. Plusieurs femmes sont voilées de la tête au pied. Je retourne à la mosquée Alâaddin, afin de découvrir les mausolées seldjoukides dans la cour. Les portes étaient fermées hier soir ! Puis, je me rends au tekke de Mevlana, ancien couvent des derviches tourneurs. Le splendide édifice possède une tour recouverte de céramique verte. Il est entouré d’un jardin agrémenté de fleurs et d’arbustes. J’y accède sans le savoir par la sortie. Du coup, je ne paye pas l’entrée ! A l’intérieur, plusieurs tombeaux sont recouverts de tapis, avec un turban par-dessus. Celui du poète vénéré est merveilleusement décoré de faïences et de calligraphies. Des livres anciens, des tapis de prière et des vêtements sont également exposés dans une autre salle. Les photos sont malheureusement interdites ! Je retourne à l’hôtel, en flânant dans le bazar de la ville. Il est cependant beaucoup moins peuplé et achalandé que celui d’Istanbul. A proximité, la mosquée Aziziye Cami possède deux étranges minarets en forme de lanternes. Je charge ensuite le vélo, pour quitter Konya en direction d’Aksaray. Le temps est assez variable. Parfois, le soleil arrive à percer l’épaisse couche nuageuse grise. La route traverse des steppes à perte de vue, à une altitude moyenne de 1000 mètres. Elle reste relativement plate jusqu’au petit massif montagneux Obruk Yaylasi. Le vent souffle terriblement. Et pour une fois, il me pousse vers l’avant ! Je pique-nique à côté d’un bâtiment en ruines, à l’écart de la nationale peu fréquentée. Quelques loukoums pour caler l’estomac, et c’est reparti ! Je grimpe ainsi la côte assez facilement. Au sommet, le paysage est bien joli. Les montagnes arides s’écartent pour laisser place à une vaste plaine. Certains trouveraient cela banal, mais moi, ça me plaît bien ! Seuls quelques bergers et leurs troupeaux de moutons semblent peupler la région. Les rares villages fantômes sont complètement déserts. J’ai d’ailleurs bien du mal à me réapprovisionner pour le repas du soir. Juste une minuscule épicerie à Kizören... et pas de bière ! Snif ! A la sortie du village, j’installe le campement en bordure d’un champ, juste derrière une inespérée plantation d’arbres. Aussi, il fait largement moins froid que les nuits précédentes.

 2.-Mon-velo-dans-la-steppe-anatolienne.jpg 

 

Jeudi 25 novembre : Kizören - Aksaray (94 km)

 1. Menderes le vendeur de tapis

 

 

Le vent n’a pas arrêté de souffler toute la nuit. Fort heureusement, il n’a pas changé de direction. Aujourd’hui, le temps est bien maussade. Les nuages gris assombrissent considérablement le paysage. La route traverse des steppes et des prairies complètement plates. J’arrive ainsi à Sultanhani très rapidement. La petite ville possède un joli caravansérail, renfermant une petite mosquée dans sa cour intérieure. Ces larges édifices étaient bâtis tous les 30 km sur les routes de la soie, qui reliaient l’Occident à la Chine. En fait, une journée de marche pour les caravanes ! Ils abritaient hommes et bêtes avec leurs précieuses marchandises contre les pillards. Devant la porte d’entrée, quelques Japonais me tirent en photo avec ma monture. Je vais finir par devenir célèbre dans le monde entier ! Je discute longuement avec un villageois parlant français. Menderes m’invite même à boire un çay (le fameux thé) dans sa boutique. Puis, il m’explique la différence de qualité des tapis anatoliens. Un petit, avec de fins motifs, me plaît beaucoup. Son prix, un peu moins, 200 euros ! Le poids et l’encombrement sur le vélo, plus la crainte de me faire arnaquer, me font renoncer. Cependant, c’était un réel plaisir de parler avec ce sympathique homme. Il m’aiguille vers un petit restaurant local qui sert des pide.Cela ressemble à des tartes flambées très allongées, garnies de viande. Après ce délicieux repas, je poursuis mon monotone itinéraire durant une quarantaine de kilomètres jusque Aksaray. A l’approche de la ville, de hautes montagnes se dessinent à l’horizon. Au loin, le sommet du volcan Hasan Dagi, culminant à plus de 3200 mètres, est complètement enneigé. Une nouvelle fois, je dois faire plusieurs commerces pour trouver les quelques aliments qui composeront mon maigre souper. Cela devient agaçant ! Puis, je me trompe de direction malgré les indications. Encore plus agaçant ! Du coup, j’ai perdu énormément de temps. Remis sur les bons rails, je quitte Aksaray en grimpant une côte bien pentue. Dur, dur en cette fin de journée ! Au sommet, je plante la tente parmi quelques sapins. Le vent souffle encore et encore !

 2. Le caravansérail de Sultanhani 

 

Vendredi 26 novembre : Aksaray - Göreme (82,1 km)

 1. La steppe avant la Cappadoce 

 

Le vent a ramené les nuages gris et la pluie. Le terrain est devenu complètement humide. Tant et si bien que pendant la descente vers la route bitumée, mes roues finissent par coincer à cause de la boue accumulée. Ce qui m’oblige à décrotter plusieurs fois les pneus. La journée commence bien ! Je poursuis mon chemin jusqu’au caravansérail d’Agzikarahan, un peu à l’écart de la nationale. De nombreuses maisons en pierres du village sont en ruines. L’édifice est par contre assez bien conservé. Il est cependant beaucoup plus petit que celui de Sultanhani. A l'entrée, le gardien du site m’offre gentiment le thé à l’abri du mauvais temps. Lorsque je quitte les lieux, la pluie cesse enfin. Puis, la route n’arrête pas de monter et descendre dans les collines, pour finalement atteindre un petit plateau situé à 1300 mètres d’altitude. La steppe environnante est parsemée de nombreux gros rochers. Le soleil fait enfin son apparition à l’approche d’Acigöl. Je profite de ces quelques rayons pour faire sécher la tente, et pique-niquer à la sortie du village. Après plusieurs kilomètres, je dévale les 250 mètres de dénivelé jusque Nevsehir. Dominée par une citadelle seldjoukide, la ville ne présente guère d’intérêt. C'est pourquoi je traverse le centre rapidement, et prends la direction de Göreme. Sur le parcours, le village d’Uchisar est dominé par un gigantesque piton rocheux, criblé de centaines de cavités. Je réserve cependant la visite pour plus tard, car le soleil diffuse les derniers rayons de la journée. Dans la descente, la forteresse naturelle domine de splendides aiguilles rocheuses aux étranges silhouettes. Là, je suis vraiment en Cappadoce ! Le village de Göreme est archi-touristique. De nombreux hôtels proposent des chambres creusées dans les falaises. Je décide cependant de passer les prochaines nuits dans un dortoir de la pension Flintstones. Le tarif est beaucoup plus abordable pour ma bourse ! En plus, je ne risque pas d’être dérangé par les ronflements, car je suis seul dans le bâtiment ! Je pars ensuite en ville pour manger des pide dans une petite échoppe.

 

 2.-La-forteresse-naturelle-d-Uchisar.jpg

 

Samedi 27 novembre : Visite de la Cappadoce (32 km)

 1.-Les-eperons-rocheux-a-Goreme.jpg 

 

Après un copieux déjeuner, je remonte sur le vélo pour visiter la région de la Cappadoce. Bien sûr, les sacoches restent à la pension ! Je me rends tout d’abord au musée en plein air de Göreme. Il renferme plusieurs églises rupestres creusées dans la roche. Certaines conservent de magnifiques fresques peintes sur les murs et les plafonds. Tandis que d’autres sont fermées à cause des dégradations causées par le temps. Sous le soleil matinal, le lieu est vraiment merveilleux. La vallée est parsemée d’aiguilles rocheuses percées de nombreuses cavités. La sérénité du lieu est cependant perturbée par l’affluence constante des touristes en voyage organisé. Tout le monde se précipite pour entrer dans les sanctuaires. Et cela devient vite pénible ! Plus loin, la vieille ville de Cavusin est édifiée dans une large falaise. Un pan complet s’est écroulé, laissant apparaître les habitations dans la roche. Je grimpe à pied jusqu’au sommet pour découvrir une petite église incrustée du 6ème S. Les fresques sont malheureusement bien abîmées. Les murs sont également couverts de graffitis. Il y a vraiment des imbéciles partout ! Je rejoins ensuite l’église du Grand Pigeonnier, à l’autre extrémité du village. Les splendides fresques religieuses sont en bien meilleur état. Puis, je poursuis mon parcours à vélo dans la vallée du Pacha. De nombreuses colonnes sont surmontées d’une grosse pierre qui semble en équilibre. Certaines "cheminées de fées" ont été creusées par les moines pour se réfugier. Vraiment impressionnant ! Malheureusement, une épaisse couche nuageuse empêche le soleil d’éclairer le site. Malgré l’heure avancée, je décide de rallier Zelve à quelques kilomètres. La ville troglodytique est répartie dans trois petites vallées encaissées. Un vrai labyrinthe ! Un tunnel permet même de passer d’une vallée à l’autre. Là aussi, plusieurs sanctuaires menacent de s’écrouler. Vraiment dommage ! Au vu des dépenses pour la visite des différents sites, j’aurais mieux fait de prendre un pass pour la journée. Cela aurait été plus intelligent ! M’enfin ! Je fais ensuite un aller-retour pour découvrir rapidement Avanos. La vieille ville possède encore des maisons grecques blanchies à la chaux. Elle est également réputée pour ses poteries. Je ne m’y attarde pourtant pas, car il commence à faire noir. Il est temps de rentrer sur Göreme !

 2.-Les-cheminees-de-fees-de-la-vallee-des-Moines.jpg 

 

Dimanche 28 novembre : Visite de la Cappadoce 46,7 km)

  

 

 1.-Formations-rocheuses-a-proximite-de-Goreme.jpg

 

Je décide de rester une journée de plus à Göreme. En effet, cette belle région de la Cappadoce dispose d’une quantité impressionnante de sites intéressants. De plus, le soleil fait grimper la température extérieure à une vingtaine de degrés. Une belle journée en perspective ! Je monte à vélo la côte de l’avant-veille pour revenir sur Uchisar. La forteresse naturelle (le kale) est encore plus jolie sous les rayons lumineux matinaux. Je grimpe alors au sommet situé à plus de 60 mètres, pour jouir d’une extraordinaire vue sur toute la région. Les nombreuses aiguilles, cheminées de fées et autres formations rocheuses s’étalent à perte de vue. Le mont Erciyes, complètement enneigé, est même visible au loin. Je longe ensuite la magnifique vallée des Pigeons, pour rejoindre la route d‘Urgüp. Comme dans toute la Cappadoce, de nombreux pigeonniers sont creusés dans la falaise. En chemin, je bifurque vers Ortahisar pour découvrir un autre piton rocheux truffé de cavités. L’accès est malheureusement fermé pour cause de rénovation. Le village à l’écart des circuits touristiques est d’autant plus agréable. La route plonge ensuite vers Urgüp avec une pente terrible. Dans ce sens, c’est bien plus plaisant ! Ce sera beaucoup moins drôle, lorsque je la prendrai en sens inverse pour retrouver mon itinéraire ! Dominée par une haute falaise, la vieille ville possède plusieurs anciennes maisons grecques peintes à la chaux. Certaines tombent malheureusement en ruines. Je parcours ensuite la magnifique vallée de Devrent. Les nombreux éperons rocheux à la forme ondulante côtoient les cheminées de fées coiffées d’un rocher. Le paysage est à nouveau merveilleux, comme sorti d’un rêve ! Plus loin, je retrouve la vallée des Moines, afin de tirer quelques clichés sous la lumière du soir. En voyant le vélo, un guide du coin vient discuter avec moi. Il me propose gentiment le fameux thé turc. De retour à Göreme, je réitère le souper d’il y a deux jours dans le même restaurant. Le patron m’offre également le thé à la fin du repas. C’est sympa, mais moi qui n’en bois jamais en France, je vais finir par avoir une overdose !

 

2.-Cheminees-de-fees-a-proximite-d-Urgup.jpg 

 

Lundi 29 novembre : Göreme - Gölcük (58 km)

 

 1.-Le-cycliste-devant-le-site-de-Goreme.jpg

 

Je reprends mon itinéraire plus tardivement qu’à l’accoutumée. En effet, le déjeuner à la pension n’est servi qu’après 8 h. Je regrimpe ensuite cette côte terrible qui monte jusque Uchisar. C’est bien plus difficile avec un vélo chargé ! Un panneau indique une pente de 5 %, je l’estime à plus du double. Du moins au début ! A la sortie du village, je crève de la roue arrière. C’est la première fois depuis mon départ ! Une grosse épine s’est plantée dans mon pneu. Après la réparation, je retrouve la grande ville de Nevsehir. Puis, la route en direction de Nigde traverse une vallée, tout en s’élevant lentement. Cependant, rien de bien passionnant ! Je mange un morceau à la sortie de Kaymakli, à coté d’un silo à grains. Quelques kilomètres plus loin, Derinkuyu ne paye vraiment pas de mine. En effet, les habitations sont sales ou complètement délabrées. Le grand intérêt du village, c’est sa ville souterraine. De nombreuses galeries sont creusées sur plusieurs étages jusqu’à une profondeur de 80 mètres. Elle pouvait abriter jusque 10 000 personnes. On peut découvrir parmi les habitations une salle pour la cuisine, une étable, les puits d’aération et une église. Il y a vraiment de quoi se perdre ! De plus, les couloirs de liaison sont vraiment étroits. Mieux vaut ne pas être trop grand (tant pis pour moi !), ni claustrophobe ! La Cappadoce fourmille de sites intéressants. La vallée d’Ihlara me tente bien, mais cela m’oblige à faire un détour de plus de 100 km. Malheureusement, il faut faire des choix !A moins de passer plusieurs mois en Turquie ! Du coup, je reprends la route initialement prévue en direction de Nigde. Quelques kilomètres plus loin, juste avant le village de Gölcük, j’emprunte un sentier dans la campagne pour m’écarter de la nationale. Je plante la tente à côté d’une baraque, sur un tapis de feuilles mortes. Le froid s’installe tout autour du bivouac..2. Salle de la ville souterraine de Derinkuyu 

 

 

Mardi 30 novembre : Gölcük - Bereket 76,4 km)

 

 

 1.-Le-mont-Erciyes-derriere-la-steppe.jpg

 

Avant de reprendre la route, je contrôle mon vélo à cause d’un bruit suspect perçu la veille. En effet, la cage des roulements du moyeu de la roue arrière est complètement desserrée. La réparation me prend quand même une petite heure ! Après quelques kilomètres de pédalage, un vent contraire se lève d’un coup. Franchement, il y a de quoi péter les plombs ! La journée, qui devait être relativement tranquille, se transforme en véritable calvaire ! Je roule des kilomètres et des kilomètres, le nez dans le guidon. Le superbe paysage est voilé par une légère brume de chaleur. La steppe aride est coincée entre de hautes montagnes. A l’Est, les volcans Melendiz et Hasan ont leur sommet enneigé. Tout comme le majestueux mont Erciyes à l’Ouest ! Tandis que la chaîne montagneuse du Taurus se profile vers le Sud. Aussi, de nombreux paysans vendent leurs pommes de terre sur le bord de la route. A cause du peu de distance parcourue ce matin, j’arrive à Nigde assez démoralisé. Je mange un bout sur le seuil d’une maison, dans un quartier peu fréquenté. Depuis quelques temps, j’ai pris l’habitude de m’isoler pendant le repas du midi, afin de ne pas être dérangé par les nombreux curieux. La mosquée seldjoukide d’Alâaddin est perchée sur une petite colline, juste à côté de la tour de l’Horloge. D'un coup, deux autochtones m’invitent amicalement à boire du thé. Puis, c’est un jeune qui me propose de loger chez lui. Bref, il faut reconnaître qu’en Turquie les gens sont en général très accueillants. Par contre, certains me crient «tourist !» lors de mon passage, et ça c’est moins sympa ! D’autant plus que je m’identifie plus à un voyageur ou à un aventurier ! Après ce long intermède, il ne me reste plus beaucoup de temps pour visiter la ville. Je parcours les différents monuments assez rapidement, notamment la médersa blanche et le mausolée Hüdavend Hatun. Le plus curieux, c’est quand même l’étoile de David sur la façade de la mosquée Sungur Bey. Encore un dernier thé offert par un commerçant, et je peux enfin quitter la ville ! Par chance, le vent s’est enfin calmé. Après quelques kilomètres, je m’écarte de la nationale pour découvrir l’aqueduc romain de Tyana. Et bien, je cherche encore après ! Les indications sont vraiment très mauvaises. Plus loin, je rencontre trois bergers du coin, surpris que je veuille bivouaquer dans la steppe. Du sommet de ma colline, j’assiste à un magnifique coucher de soleil dans les montagnes alentour.

 2.-Les-montagnes-au-crepuscule--depuis-le-bivouac.jpg 

 

 

Mercredi 1er décembre : Bereket - Tekir (76,1 km)

 

 

 1.-Le-bivouac-dans-la-steppe.jpg

 

Je suis réveillé par le tintement des cloches des moutons qui errent autour de la tente. Les rayons du soleil matinal donnent une magnifique teinte rosâtre aux montagnes Melendiz Dagi et Hasan Dagi. La journée débute par l’ascension du col de Kolsuz qui culmine à 1490 mètres. La pente frôle par endroits les 9 %. J’atteins cependant le sommet assez facilement. Par contre, mon vélo tangue bizarrement de la roue arrière. Depuis la crevaison, j’enchaîne les pépins mécaniques ! Plus loin, le col de Caycavak à 1600 mètres d’altitude n’est qu’une simple bagatelle. Le dénivelé positif cumulé s’élève alors à un peu moins de 600 mètres. La route descend ensuite longuement dans une petite vallée, dominée par de hautes montagnes abruptes. Une brume de chaleur recouvre malheureusement ce splendide paysage. Je rejoins ainsi une grosse nationale, surchargée de camions roulant dangereusement à vive allure. De plus, le vent s’engouffre dans la vallée, ralentissant considérablement ma progression. Il s’accentue terriblement lorsque les montagnes se resserrent. C'est quand même bien rageant de devoir pédaler lorsque cela descend ! Au passage, un sympathique vendeur à l’étalage m’offre une pomme. Je pique-nique juste à la sortie du village d’Hasangazi, en bordure de la chaussée. En plus du chemin de fer, la route finit par longer quelques kilomètres plus loin une grosse autoroute. Je ne sais même plus situer le cours de la petite rivière ! Ce tronçon devient vite désagréable. Et c’est pas fini ! J’atteins Pozanti, une ville sans aucun charme, défigurée par de nombreux travaux. Elle est noyée dans un nuage de poussière, soulevé par le passage des routiers. Des centaines de camions stationnent en file indienne, au bord de la route. D’ailleurs, la plupart des commerces vendent des pièces pour poids lourds. Pas étonnant, avec tous ces véhicules en panne qui jalonnent la Turquie ! Bref, c’est l’horreur ! Autant dire que je ne traîne pas dans le coin ! A la sortie de la ville, la route se rétrécit. Et bonne nouvelle, la circulation a quasiment disparu, les routiers et les automobilistes préférant emprunter l’autoroute ! Par contre, je suis surpris de grimper à nouveau. En chemin, quelques chiens tentent bien de me courser. Ils s’arrêtent net après un petit coup de Dazer (un appareil à ultrasons). En cette fin d’après-midi, mes jambes ne tournent plus rond. De plus, cette pénible descente m’a mis un coup au moral. Je plante alors la tente dans une sorte de clairière, en surplomb de la route. L’endroit serait idéal, s’il n’y avait pas le bruit de la circulation autoroutière. Demain, je poursuivrai la grimpette !

 2.-Les-montagnes-au-sommet-du-col-de-Caycavak.jpg 

 

Jeudi 2 décembre : Tekir - Adana (105,9 km)

 

 1.-Le-cycliste-au-dernier-col-anatolien.jpg 

La route continue de monter jusque Tekir. Ce n’est pas vraiment ce qu’il y a de mieux pour démarrer la journée ! D’autant plus que certaines portions ont des pentes atteignant les 10 %. Un peu plus bas, les poids lourds sur l’autoroute peinent autant que moi. Enfin pour eux, c’est quand même beaucoup moins physique ! Les maisons colorées de la petite ville sont accrochées aux parois des montagnes. La jolie vallée est cependant défigurée par le gros axe routier. Puis, mon chemin s’en écarte pour gravir le col de Kandilsirti, à 1370 mètres d’altitude. En tout, j’ai regrimpé plus de 400 mètres de dénivelé ! La route plonge ensuite longuement vers Tarsus. A mon grand plaisir, cela n’arrête pas de descendre sur une bonne vingtaine de kilomètres. Les hauts sommets disparaissent petit à petit, laissant place à de petites montagnes couvertes de végétation basse et éparse. L’Anatolie, c’est bel et bien fini ! Juste avant le village de Tasobasi, je mange à l’ombre d’un olivier pour me protéger du soleil brûlant. Quelques détritus jonchent malheureusement le sol. Je traverse ensuite des collines arides, rognées par les bulldozers. Les camions soulèvent énormément de poussière à chaque dépassement. La route s’aplanit ensuite à l’approche de Tarsus, situé au niveau de la mer. Elle est bordée de vastes plantations d’orangers, de mandariniers ou de citronniers. Je renoue avec une circulation démente sur la nationale en direction d’Adana. De plus, les usines se succèdent les unes après les autres. Vraiment rien d’intéressant ! J’enchaîne alors les kilomètres pour me rapprocher de la grosse ville, qui renferme plus d’un million d’habitants. Puis, je cherche tant bien que mal un endroit pour planter la tente. Lors d’un aller-retour, un officier de la gendarmerie m’interpelle pour m’offrir le thé dans la caserne. La situation est assez amusante, tout le monde me questionne dans un charabia anglo-turc. Après de longues recherches, je trouve une petite plantation de citrons en bordure de la nationale. Le coin n’est cependant pas rassurant ! En effet un peu plus tard, trois jeunes viennent fumer quelque chose d’assez bizarre. Je reste alors discret pour ne pas me faire repérer. On ne sait jamais ! Du coup, je préfère attendre un moment avant de m’installer définitivement. De toute façon, il me reste toujours la solution de l’hôtel au centre-ville ! Finalement, je décide de rester sur place. On verra bien jusqu’à demain !

 


2.-Cactus-sur-le-bord-de-la-route-copie-1.jpg 

   3.-Les-collines-fertiles-avant-Tarsus.jpg

 

Vendredi 3 décembre : Adana - Kervansaray (86,5 km)

 

 Le-pont-romain-et-la-grande-mosquee-a-Adana.jpg 

 

La nuit a été considérablement moins froide, par rapport à celles passées sur le plateau d‘Anatolie. Ce matin, je ne me sens pas très bien, peut-être à cause du changement brusque d’altitude et de température. Je rejoins rapidement le centre d’Adana. La ville possède quelques belles mosquées (entre autres Ulu Cami et Yag Cami), disséminées dans des quartiers grouillant de monde. La gigantesque Sabanci Merkez Cami est plus récente. C’est la plus grande entre Istanbul et l’Arabie Saoudite. Un joli pont romain enjambe également la rivière Seyhan. Je poursuis mon chemin vers l’Est, sur la grosse nationale inintéressante. La circulation est toujours aussi dense. Certains camions me rasent de très près ! Ils sont complètement fous ! La chaleur est accablante, la température atteint même les 30°C. Sur les bas-côtés, de nombreux animaux gisent, percutés par les véhicules. Quel carnage ! La route dévie ensuite à travers de basses collines dénudées, pour éviter la petite chaîne montagneuse Nurdagi. Au loin, le château fort de Yilanlikale apparaît majestueusement sur son éperon rocheux. Depuis de nombreux kilomètres, je cherche tant bien que mal une boulangerie ou une petite épicerie pourme ravitailler. Seules un nombre incalculable de stations-service se succèdent au bord de la chaussée. On ne risque vraiment pas de tomber en panne d’essence, même si pour moi cela n'a pas grande importance ! A une heure déjà bien avancée, j’atteins Ceyhan pour faire mes achats. Contrairement à mes habitudes, je casse la croûte sur une table de la petite ville. Il ne faut pas cinq minutes pour être une nouvelle fois l’attraction du coin ! L’un cherche à discuter, puis un gamin me réclame de l’argent… Bref, pas moyen de manger tranquille ! Cela devient vite pénible ! En plus, des adolescents m‘insultent en quittant la ville. J‘emprunte ensuite une petite route plus au Sud, pour éviter le gros trafic routier. Elle oscille dans des collines parsemées de champs labourés. Quelques côtes me donnent d’ailleurs du fil à retordre ! Dans un village isolé, plusieurs gamins me jettent des cailloux sans m‘atteindre. A cause de tous ces petits incidents, le Sud de la Turquie m’est beaucoup moins agréable ! A l'inverse, un vendeur à l’étalage m’offre généreusement des kakis. Ce sont des fruits exotiques qui ressemblent à de grosses tomates. Au détour d’un virage, je retrouve enfin la Méditerranée dans la baie d’Iskenderun. Juste avant le village portuaire de Kervansaray, je plante la tente dans un champ fraîchement coupé, juste derrière un buisson. La mer se pare des couleurs chatoyantes du soleil couchant. C’est merveilleux !

 

 

Samedi 4 décembre : Kervansaray - Antakya (124,6 km)

 

 1. Lever de soleil dans la baie d'Iskenderun 

 

Au petit matin, j’assiste au lever du soleil dans la baie d’Iskenderun. Désormais, la route longe la côte, malheureusement polluée par quelques usines. Je traverse ensuite de larges plantations d’agrumes. De nombreuses personnes, surtout des femmes, s’empressent de cueillir les fruits. Au passage, je chipe deux oranges pour le dessert du midi. Je rejoins ensuite une nationale encombrée par de nombreux camions. En plus de la brume matinale, le paysage est noyé dans un nuage de poussière. Les villes traversées, comme Dörtyol et Payas, sont crasseuses. Le littoral est truffé en majorité d’usines pétrochimiques crachant leurs fumées polluantes. Par conséquent, une odeur nauséabonde flotte dans l’air. Tous les bâtiments sont sous haute surveillance. Il est d’ailleurs impossible d’accéder au rivage. C’est l’horreur ! Il me faut vite quitter cet enfer ! Fort heureusement, la route est relativement plate. C’est pourquoi, j’atteins rapidement Iskenderun. Soit plus de 70 km dans la matinée ! A la sortie de la ville, je pique-nique à l’ombre d’un gros panneau de signalisation. La route grimpe ensuite jusque 700 mètres dans le massif de Nur Dagi, en passant par le village de Belen. Les pentes atteignent par endroits les 10 % ! Pas facile, mais j’ai de bonnes jambes aujourd’hui ! Dans l’enivrante descente, la route zigzague sur une bonne dizaine de kilomètres. Ma vitesse de pointe flirte même avec les 60 km/h. Je passe ensuite au pied des montagnes pour rejoindre Antakya. De l’autre côté de la chaussée, les champs s’étalent à perte de vue. J’atteins la ville alors que la nuit tombe. Je décide de réserver une chambre dans le modeste hôtel Divan, afin de me décrasser après cette longue distance. «Je suis noir comme une gaillette !» comme on dit din ch’Nord ! Puis, je soupe copieusement dans un petit snack, tenu par un sympathique patron. Il m’offre d’ailleurs le café turc ! Après cette harassante journée, je m’enfile une…, et même deux bières bien méritées. Demain, il est possible que je franchisse la frontière syrienne. A suivre !

2.-Les-horribles-usines-dans-la-baie.jpg 

 

 

Dimanche 5 décembre : Antakya - Bab al Hawa (SYR) (55,2 km)

 

1. Maisons ottomanes d'Antakya

 

 

Dans la matinée, je parcours à pied la vieille ville d’Antakya. Il ne reste rien de l’ancienne cité romaine d’Antioche. Les ruelles sont bordées de vieilles maisons ottomanes, mêlées à des bâtiments de style français. En effet, la ville fut sous le protectorat de la France jusqu’en 1939. Malheureusement, de nombreuses habitations sont délabrées, et les rues principales sont en travaux. Le quartier renferme quelques édifices de religions différentes. Cependant, la mosquée Sermaye Cami, l’église catholique et la synagogue ont portes closes. On m’interdit également l’accès à l’église orthodoxe, à cause de la messe dominicale. Deux hommes finissent par se disputer sur la question. Scène assez loufoque ! De plus, les souks sont fermés ce dimanche. En résumé, je n’ai pas vraiment de chance ! A côté de la mosquée Ulu Cami, je m’attable dans une petite échoppe pour goûter du künefe. Il s'agit d'une pâtisserie locale fourrée de fromage fondu, et servie tiède. Pas mauvais du tout ! Aussi en Turquie, les hommes se baladent souvent enlacés. Cela surprend au début, mais c'est juste de la simple camaraderie. Je rejoins ensuite l’hôtel pour charger le vélo. A la sortie de la ville, la route traverse une plaine fertile complètement plate. Le soleil fait fondre le goudron de la chaussée en rénovation. Je pédale des kilomètres en respirant cette odeur nauséabonde. A l’heure du midi, je mange mes sandwichs quotidiens, à l’ombre des arbres d’une bâtisse isolée. A l’approche de la Syrie, mon itinéraire traverse des basses collines rocailleuses. De nombreux soldats sont postés sur des miradors pour surveiller la région. D'un coup, quatre jeunes Turcs en voiture m’arrêtent sur le bord de la chaussée. Les deux garçons me posent un tas de questions en anglais sur mon aventure cycliste. J’atteins ensuite la frontière syrienne. Les formalités administratives sont longues. Je passe d’un guichet à l’autre, car il semble que personne ne veuille traiter ma demande. Les chauffeurs routiers sont vraiment sans gêne ! Ils dépassent tout le monde, en vociférant des paroles incompréhensibles. Le policier vérifie mon passeport, et m’interroge sur mes futures destinations. Ne surtout pas divulguer mon intention de rejoindre Israël, sous peine de se voir refuser l’entrée dans le pays ! Finalement après une bonne heure d‘attente, j’obtiens le précieux tampon. On me laisse même passer, sans fouiller les bagages. «Welcome in Syria !». Le soleil commence à se coucher derrière les montagnes arides. J’installe alors le bivouac dans la pierraille, à quelques centaines de mètres de la frontière. Un nouveau pays s’ouvre à moi !

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Lundi 6 décembre : Bab al Hawa - Alep (70,5 km)

 1.-Le-monastere-de-St-Simeon.jpg 

 

Un troupeau de chèvres erre autour de la tente. Les gamins qui gardent les bêtes sont impressionnés par le vélo. Ce matin, les nuages gris couvrent le ciel. Par conséquent, la température a considérablement chuté en dessous des 10°C. Je reprends la route en direction d’Alep. A part quelques parcelles dégagées pour les cultures, le paysage reste assez rocailleux. Après plusieurs kilomètres, je bifurque plus au Nord pour rejoindre le monastère de St Siméon. Il est terriblement difficile de s’orienter, car les panneaux indicateurs sont majoritairement écrits en arabe. Fort heureusement, il y a toujours quelqu’un pour m’aider ! A l’approche de Daret Azze, la route se met à grimper fortement. Je fais une nouvelle fois fureur dans la petite ville. Des gamins courent gentiment à côté de moi. De nombreuses personnes me souhaitent également la bienvenue. Un peu plus loin, le monastère est perché sur une petite colline. La pente est fortement élevée pour y accéder. Datant du 5ème S, la magnifique basilique est composée des vestiges de quatre édifices disposés en croix. Pendant plus de 40 ans, St Siméon vécut sur une colonne qui s’élevait au milieu de la cour centrale. Je me balade autour du monument pour découvrir le baptistère et les sépultures des hauts dignitaires. Ces dernières sont creusées dans la roche, autour d’une crypte. Après la visite, je traînaille dans l’antique village abandonné de Deir Samaan, situé au pied de la colline. Je reprends ensuite la direction de Daret Azze. Dans une petite échoppe au bord de la chaussée, le tenancier Zacharie m’offre le thé et des galettes de pain. Une nouvelle fois, il est bien difficile de communiquer. Par contre, le football est un sujet qui reste universel ! Après la petite ville, la route pour Alep n’arrête pas de monter et descendre. Durant les premiers kilomètres, quelques pentes atteignent même les 13 %. Certes sur de courtes distances, mais difficile quand même ! Sur le parcours, j’emprunte un sentier en pierres pour accéder aux jolies ruines de la basilique de Mouchabbak. Cette fois, je reconnais avoir poussé le vélo jusqu’au sommet ! Le chemin est bien trop raide pour une bicyclette chargée ! Je rencontre ensuite des bergers de moutons, coiffés du traditionnel keffieh à carreaux rouges et blancs. J’atteins finalement la grosse agglomération d’Alep, avec une circulation démentielle. Je suis complètement perdu avec tous ces panneaux écrits en arabe. Plusieurs personnes m’aiguillent sur le quartier de Boustan Koulab. Je réserve alors une minuscule chambre à l’hôtel Zahert al Rabih, pour une modique somme. A proximité, je soupe un plat à base de mouton dans le restaurant Al Koummeh. Le cadre est forcément oriental, avec chanteur et musiciens. De plus le repas est copieux et délicieux ! Pour cette première journée, la Syrie m’a réellement émerveillé !2.-Berger-de-moutons-sur-la-route-d-Alep.jpg 

 

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