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2 janvier 2015 5 02 /01 /janvier /2015 10:08

Mercredi 13 juillet 2011 : Vol vers Lima (Pérou)

Voiture-de-police-a-l-aeroport-de-Los-Angeles.jpg

 

C’est le jour le plus long ! Vers 4 h, les portes de l’aéroport de Sydney s’ouvrent enfin ! Je vais pouvoir me réchauffer un peu. Aussi, il me reste encore plus de 6 heures avant d’embarquer. Du coup, j’ai tout mon temps pour démonter Tornado, afin de le caser dans sa minuscule boite en carton. En effet, je reprends la même compagnie aérienne qu’à l’aller pour quitter l’Australie. Il faut dire que Quantas a quasiment le monopole sur la terre de Skippy le kangourou ! Cette fois-ci, il ne devrait pas y avoir de problème ! Pour les états américains, j’ai droit à deux bagages de 23 kg. Va comprendre ! Toutefois, je préfère prendre mes précautions en m’habillant chaudement pour les alléger au maximum. Le gars à l’enregistrement est beaucoup plus sympathique que son collègue de Singapour. Etonnamment, cela passe tout juste ! Ce problème épineux résolu, je peux embarquer sereinement pour un vol de plus de 13 heures en direction de Los Angeles aux Etats-Unis. Malgré ma nuit blanche, je n’ai vraiment pas sommeil ! Avec le décalage horaire positif de 7 heures et le vol dans le sens de la rotation de la Terre, j’atterris le même jour à 6 h 45 au matin, plus tôt qu’au décollage. Cela peut paraître étrange, mais pour bien comprendre, il faut relire le roman d’aventures de Jules Vernes « Le tour du monde en 80 jours ». Le temps de transit à L.A. pour San Salvador va durer encore 19 heures. La fatigue et l’éloignement de l’aéroport me font renoncer à une visite express de la mégapole américaine. Je ne tiens vraiment pas à rajouter du stress pour attraper ma correspondance ! J’erre alors de terminal en terminal pour tuer le temps durant cette très longue journée. Dans la nuit (donc du mercredi au jeudi !), l’Airbus de la compagnie Taca décolle pour l’Amérique Centrale à 2 h du mat.

 

 

Jeudi 14 juillet : Vol vers Lima

Le-cycliste-au-Perou.jpg

 

Le vol jusque San Salvador dure un peu moins de 5 heures. Mon transit devait normalement être très rapide, mais l’avion de la même compagnie est retardé jusqu’en début d’après-midi. Il me faut encore patienter un très long moment dans le petit aéroport international. De toute façon, je ne suis plus à quelques heures près ! La connexion internet étant gratuite, j’en profite pour mettre à jour mes différents pépins informatiques. Aussi, je discute longuement avec Marco, un Péruvien qui retourne au pays. Avec plus de 6 heures de retard, j’embarque enfin pour ma destination finale. Il est environ 14 h 30, si l’on rajoute la petite heure de décalage positive par rapport à Los Angeles ! « Pas de panique, je commence par m’y perdre aussi ! ». Encore un bon 5 heures de vol… et l’Airbus atterrit enfin au Pérou à presque 21 h (encore une heure de décalage horaire !). Après ce parcours du combattant, le soleil ne m’a pas attendu pour se coucher. Et rallier à vélo le quartier touristique de Miraflores dans le noir ne me rassure pas du tout ! En effet, Lima n’est pas une ville très sécurisante. De plus, le temps de récupérer les bagages et de remonter le vélo, il est déjà minuit passé ! Du coup, je décide de passer la nuit dans l’aéroport. Apparemment, c’est chose routinière car plusieurs individus somnolent complètement affalés sur les sièges. C’est pourquoi je n’hésite pas à sortir le matelas pour m’installer. Interloquées par le vélo chargé, quelques personnes viennent à ma rencontre. Un citoyen américain se propose de veiller sur Tornado pendant une courte absence, tandis qu’un Péruvien me tend généreusement de l’argent lorsqu’il apprend mon aventure. Bien entendu, je décline l’offre !

 

 

Vendredi 15 juillet : Lima (23,6 km)

1.-Les-falaises-a-Lima.jpg

 

Ma courte nuit fut peu réparatrice. Elle a été de surcroît perturbée par les agents de nettoyage de l‘aéroport. Encore à moitié assoupi, je prends la direction du quartier de Miraflores vers 8 h au matin. Après de longs mois, je retrouve très rapidement mes repères de conduite à droite. La circulation routière me tire rapidement de ma somnolence. C’est complètement fou ! Les véhicules doublent n’importe comment, et changent de direction sans prévenir. Les plus dangereux sont encore les minibus pour le transport public. Ils n’hésitent pas à me couper la route, pour freiner quelques mètres plus loin. L’air est également rendu suffocant par les gaz d’échappement. Après une vingtaine de kilomètres de frayeur, j’atteins le quartier touristique situé en bordure de l’océan Pacifique. De petites falaises abruptes bordent le littoral noyé dans la brume. Peut-être d'ailleurs à cause de la pollution ! Au loin, les silhouettes des montagnes sont à peine perceptibles. Une impudique statue, représentant l’acte sexuel d’un couple, trône au milieu du parc de l’Amour. De nombreux amoureux viennent d’ailleurs poser pour la photo. « Si c’est pas mignon tout ça ! ». En cette fin de matinée, je pars à la recherche d’un logement. Les habitations sont comme barricadées. Toutes les portes et fenêtres possèdent des grillages ou des barreaux de fer. Tout cela n’est pas très rassurant ! Après une recherche peu fructueuse, je pose mes sacoches dans une chambre de la maison de Lex Luthor, l’ennemi juré de Superman. « Non, je ne suis pas encore saoul ! » Cette modeste guesthouse est tenue par Victor, un homme souriant et aimable. Je déambule ensuite à pied dans les rues commerçantes de Miraflores. C’est certainement la proximité de l’océan qui a rendu touristique le quartier, car les bâtiments sont d‘une banalité déconcertante ! Dans un petit snack, je goûte à la célèbre papa. En effet, la pomme de terre, originaire d’Amérique du Sud, est préparée dans de nombreux plats péruviens. Mon après-midi n’a rien d’exceptionnel ! J’erre tranquillement de commerce en commerce, tout autour du parc central. Un peu de repos ne fait pas de mal ! La musique, notamment la salsa, émane agréablement des restaurants et des bars. La fatigue commençant à peser, je préfère rentrer à la guesthouse dans la soirée. J‘espère récupérer rapidement du manque de sommeil de ces dernières nuits, avant d‘attaquer l‘ascension des Andes.

2.-La-statue-du-parc-de-l-Amour.jpg

 

 

Samedi 16 juillet : Visite de Lima

1.-La-cathedrale-de-Lima.jpg 

A cause de la fatigue et du décalage horaire, je me lève beaucoup plus tard que prévu. Le centre de Lima est situé à plus de 8 km de la guesthouse. Après réflexion, je décide quand même de m’y rendre à pied. Je longe ainsi le grand boulevard Arequipa jusqu’au parc de la Culture. Ce petit havre de paix dans l’assourdissante agglomération renferme quelques jolis pavillons dispersés dans les jardins. Mon parcours se poursuit jusqu’à la plaza San Martin, entourée de grands bâtiments austères du début du 20ème S. Un peu plus loin, la massive cathédrale domine la place principale, ornée d’une jolie fontaine en bronze. Je ne peux malheureusement visiter l’intérieur de l‘édifice, car un mariage y est célébré. Juste à côté, le palais de l’Archevêché possède de splendides balcons en bois sculpté. D’autres bâtiments bordent la place, comme le sobre hôtel de ville, et le palais du Gouverneur de style baroque. Aussi, une procession religieuse se déroule autour de l’esplanade. Des hommes portent sur leurs épaules des grandes statues de Saintes, disposées sur des brancards. Un bon nombre de croyants catholiques (et de curieux comme moi !) assistent au long cortège musical. La population en Amérique du Sud est encore très pratiquante ! Puis, je mange sur le pouce dans un petit resto, avant de me balader autour de la place pour découvrir les autres édifices religieux et les anciennes maisons coloniales. L’église de Santo Domingo, peinte tout en rose, renferme les crânes de San Martin de Porres et de Santa Rosa de Lima. Celles de la Merced et de San Agustin ont de splendides façades sculptées de style baroque. Le monastère de San Francisco possède également d’impressionnantes catacombes, mais l’heure tardive me fait renoncer à la visite. Je découvre encore rapidement de jolis monuments, notamment le reposant sanctuaire de Santa Rosa de Lima, les églises San Pedro et Nazarenas, ainsi que la magnifique maison coloniale Palade Torre Tagle avec ses balcons en bois ajourés. Finalement, le centre de Lima, sans être exceptionnel, est quand même assez intéressant à découvrir ! Ce samedi, la population locale est plutôt préoccupée par le match de football, opposant la Colombie au Pérou pour la Copa America. En effet, de nombreuses personnes se massent devant les écrans de télévision des commerces alentour. J’assiste d’ailleurs aux prolongations dans un troquet. L’ambiance devient survoltée, lorsque le Pérou marque le second but, signe de qualification pour les quarts de finale. J’ai l’impression de me voir au stade Bollaert de Lens ou au café des supporters, avec quasiment les mêmes réactions que ces gens ! Puis la nuit commençant à tomber, je prends le même chemin pour retourner à Miraflores. Après une bonne heure et demie de marche, je pars récupérer les DVD de mes photos, commandés la veille. Le gars se fout de moi ! Non seulement rien n’est fait, et il me fait payer plus cher ! Vraiment malhonnête le type ! Il me faut alors encore patienter une bonne heure, avant de retourner à la guesthouse pour me reposer. 3.-L-eglise-et-le-monastere-de-San-Francisco.jpg

2.-Procession-religieuse-au-centre-de-Lima.jpg

 

 

Dimanche 17 juillet : Lima - Chosica (50,7 km)

 Confection-de-taureaux-en-papier-dans-la-banlieue-de-Lima.jpg

Je traînaille une bonne partie de la matinée. Du coup, je quitte la guesthouse tardivement vers les 11 h. Durant le vol, mes deux compteurs kilométriques et ma montre ont rendu l’âme. Vraiment bizarre, peut-être l’altitude ou les rayons X ! Bref, je n’en sais rien ! Par contre, je commence sérieusement par en avoir marre de tout ce matériel onéreux qui ne fonctionne plus ou qui casse sans raison ! Et dire que je me suis fait expédier un nouveau, spécialement pour avoir l’altitude dans la Cordillère ! Vraiment rageant ! Avant de m’élancer, je retourne manger au snack de l’avant-veille pour me remplir l’estomac. Je discute encore un bon moment avec un type prêchant la bonne parole… et mon aventure Sud-américaine peut enfin commencer ! La circulation est toujours aussi dangereuse. En plus du trafic routier, je dois éviter les trous et les bosses qui jalonnent la chaussée. Ma vitesse est également fortement ralentie par les minibus. Ils n’hésitent pas à me couper la route pour ramasser quelques passagers. De vrais cinglés ! De plus, l’air est toujours aussi irrespirable à cause de la pollution. Je traverse ainsi les quartiers pauvres de la périphérie, pour prendre la direction de Chosica. Les habitations en briques sont délabrées, pas toujours achevées. Sur le bord de la route, quelques personnes en costume traditionnel chantent et dansent au son d’un orchestre. D’autres confectionnent des taureaux, décorés de papiers et de rubans colorés. Tout cela me redonne un peu de baume au cœur sur cette route désagréable. Sur mon parcours, les villages qui se succèdent sont poussiéreux et très sales. Plusieurs habitations modestes s’entassent sur les proches versants montagneux. Après une trentaine de kilomètres, la brume commence à se dissiper avec l‘altitude, laissant apparaître la rivière Rimac et les hautes montagnes arides alentour. J’atteins alors Chosica en fin d’après-midi. La petite ville est envahie par les mototaxis qui n’arrêtent pas de klaxonner. Dans un troquet, un homme m’invite à boire de la bière. Cela ne se refuse pas ! Je passe un long moment à tenter une discussion hispano-française avec le pseudo-policier Fernando. Je m’installe ensuite à l’hôtel El Paraiso pour un tarif trois fois moins cher qu’à Lima. Puis, je finis la soirée dans les rues animées, bordées de nombreuses boutiques et restaurants. Pendant le repas du soir, je goûte à la limonade nationale Inca Kola, de couleur jaune fluo. Son goût chimique ne me plaît vraiment pas ! Chosica est déjà situé à une altitude d’environ 900 mètres. Je n’ai vraiment pas eu l’impression d’avoir grimpé autant ! Aussi avec ces histoires de compteurs, j’ai oublié de tirer une photo en souvenir de mon passage à Lima !

 

 

Lundi 18 juillet : Chosica - San Mateo (63 km)

 1.-Les-toits-en-tole-de-Chosica.jpg

Comme je me suis rendormi, le levé est encore bien tardif ! Les nombreux toits de tôle ondulée des habitations de Chosica s’étalent abondamment dans la vallée. La route poursuit son ascension le long de la rivière Rimac. Quelques plantations céréalières commencent à apparaître au bord du cours d’eau. Les hautes montagnes désertiques alentour dominent la mignonne petite vallée. Le paysage est vraiment sublime ! D’autant plus que soleil matinal a complètement dissipé la brume de la veille. L’ennui vient du passage des nombreux camions et bus qui empruntent cet itinéraire. La succession de plots de ralentissement disposés sur la chaussée rend également le trajet assez pénible. Après une quarantaine de kilomètres d‘ascension, je casse la croûte pour un tarif dérisoire, dans un petit resto à l‘entrée de Matucana. Puis, ça continue de grimper encore et encore ! La route s’enfonce longuement dans d’étroites gorges creusées par la rivière. Cela devient même inquiétant pour le bivouac du soir ! En effet, il est impossible de planter la tente sur les parois raides des montagnes rocailleuses. La grimpette n’est pas trop difficile, mais les kilomètres s’accumulant rendent les jambes bien lourdes. Aussi sur le parcours, une grosse usine d’embouteillage d’eau détourne le cours d’eau de son lit. Depuis le début de journée, les conducteurs n’arrêtent pas de klaxonner pour m’encourager. Certains me tirent même en photo ! Finalement, j’atteins le village de San Mateo culminant à plus de 3000 mètres. La fin de journée étant proche, je décide de loger dans un petit hôtel improvisé du centre. L’accueil n’est pas des plus charmants ! La propriétaire dédaigneuse tarde même à me rendre ma monnaie. Je la soupçonne d’ailleurs de l’avoir fait exprès ! La minuscule chambre n’est pas franchement propre. Elle est de plus remplie de bric et de broc, réduisant l‘espace vital. Dans un bar typique du village, deux gars déjà bien ivres m‘invitent à leur table pour boire quelques bières. Leur compagnie est sympathique, mais je ne comprends pas grand-chose de leur charabia espagnol. L’alcool y est pour beaucoup ! Du coup, je hoche bêtement la tête en signe d’acquiescement. Aussi, la coutume péruvienne veut que l'on se passe le verre à tour de role. L’urinoir, installé dans la même pièce, dégage une odeur malsaine. Il ressemble d’ailleurs plus à un grand lavabo. Vraiment bizarre ! Je soupe ensuite dans un petit resto, avant de regagner ma misérable chambre.

2.-La-vallee-de-la-riviere-Rimac.jpg

 

 

Mardi 19 juillet : San Mateo - La Oroya (86,2 km)

 1.-Les-pics-enneiges-sur-la-route-de-La-Oroya.jpg

Pas besoin de réveil, il y a un boucan d’enfer dans le couloir ! La famille de la propriétaire braille sans se soucier des gens qui dorment. Jusqu’à présent, c’est l’hôtel le plus inhospitalier de tout mon voyage ! Par chance, je réussis à réparer mon vieux compteur. C’est toujours mieux que rien ! Le ciel est couvert de nuages gris qui rendent le paysage morose. La route poursuit son ascension dans la montagne, toujours le long de la rivière Rimac. Elle croise de temps en temps la ligne de chemin de fer, reliant Lima à La Oroya. Les pentes s’accentuent lorsque le cours d’eau serpente dans d’étroites gorges. Les premiers sommets enneigés font enfin leur apparition. Aussi, la circulation est un moment interrompue à cause d’un éboulement. De nombreuses femmes travaillent également à la rénovation de la chaussée, n’hésitant pas à piocher ou creuser. Au bout d’une quinzaine de kilomètres, j’ai déjà les jambes bien lourdes. La journée risque d’être difficile ! De plus, je me fais attaquer par une meute de chiens. L’un d’eux a bien failli me croquer une sacoche. Ils déguerpissent rapidement à la vue de mon bambou. Les klaxons ont également repris de plus belle ! Bien souvent, ce sont des encouragements ; mais à la longue, cela me casse les oreilles ! Au-dessus de 3000 mètres, il faut prendre garde au mal des montagnes qui peut être fatal. Dès les premiers symptômes, il est préférable de redescendre pour s’acclimater. Plus loin, un camion renversé dans un virage bloque le passage pendant plusieurs heures. Du coup, j’en profite pour manger un morceau sur le bord de la chaussée. Comme rien ne bouge, je dépasse la longue file de véhicules pour forcer le passage. C’est un des avantages de voyager à vélo ! Ma respiration est de plus en plus difficile, à cause de la raréfaction de l’oxygène avec l’altitude. Du coup, je m’essouffle beaucoup plus vite ! Sur fond de pics enneigés, les montagnes environnantes sont parées de couleurs diversifiées. Cela va du noir au jaune, en passant par le rouge et l‘orange. J’atteins enfin le sommet du col Abra Anticona, culminant à 4818 mètres. De toutes mes aventures de cyclovoyageur, c’est de loin le plus haut que j’ai gravi ! C’est également la station de chemin de fer la plus élevée au monde. Il m'aura fallu donc grimper plus de 140 km pour vaincre ma première difficulté andine. Le temps se dégrade un peu plus. Le vent ramène des nuages noirs qui déversent de la pluie et de la grêle. J’attaque alors expressément la raide descente dans le froid. La route borde de jolis lacs d‘altitude, avant de plonger de plus de 1000 mètres vers La Oroya. Après de longues recherches dans la petite ville, je monte les sacs et le vélo dans une chambre de l’hôtel Mister. Le propriétaire et son fils me donnent aimablement un coup de main. Alors que la pluie s’est mise à tomber, je mange dans une petite gargote en compagnie de deux Péruviennes un peu éméchées. Je finis la soirée dans un troquet, pour visualiser la fin du match de football qui voit la défaite du Pérou face à l’Uruguay. De nouveau, quelques clients me proposent de trinquer avec eux. Nous picolons plusieurs cervezas jusque tard dans la soirée.3.-Lacs-d-altitude-apres-le-col.jpg

2.-Le-cycliste-au-sommet-du-col.jpg

 

 

Mercredi 20 juillet : La Oroya - Huancayo (127,1 km)

2.-L-eglise-bleue-de-Muruhuay.jpg

 1.-La-vallee-de-la-riviere-Mantaro.jpg

Dans les rues, quelques stands ambulants proposent des boissons chaudes revigorantes à base de plantes, de céréales, et même de tubercules sucrés comme la maca. La grosse ville industrielle de La Oroya est tournée vers la métallurgie. Elle ne présente pas vraiment d’intérêt, mais elle me plaît bien ! Le temps est idéal pour pédaler. Le ciel est complètement dégagé, et un léger vent me pousse dans le dos. De plus, la route descend tout doucement jusque Huancayo. Elle s’enfonce dans la vallée escarpée de la rivière Mantaro. Au départ, les montagnes rocailleuses sont dépourvues de végétation. Le paysage est totalement minéral. Quelques dizaines de kilomètres plus loin, elles s’arrondissent, revêtues d’une herbe jaunie par le soleil. Le coin est splendide ! Je croise plusieurs bergères habillées d’une sorte de poncho multicolore, qui emmènent leurs moutons paître. Puis, de modestes villages se succèdent sur mon parcours. A la terrasse d’un petit restaurant juste avant Jauja, je mange copieusement une grosse assiette de bœuf accompagné de plusieurs variétés de pomme de terre, le tout cuit au feu de bois. Je suis cependant surpris de devoir manger avec les doigts ! La musique andine diffusée rend l’endroit vraiment enchanteur. Sans carte précise, j’emprunte la route à l’Ouest de la rivière, malheureusement beaucoup plus passante. La vallée devient alors plus agricole en s’évasant. Quelques paysans s’affairent à couper les grandes tiges de maïs desséchées. Après plus de 120 km, j’atteins Huancayo en fin d’après-midi. La ville est fortement polluée par les gaz d’échappement. C’est également reparti pour la cacophonie de klaxons ! Vraiment saoulant ! Je m’installe ensuite dans l’hôtel Villa Rica pour un tarif raisonnable. Cependant, Tornado doit rester dans une remise cadenassée au rez-de-chaussée. Cela ne me plaît pas vraiment, mais je ne tiens pas à refaire la tournée des hôtels ! A cette heure tardive, la rue principale et les quartiers adjacents grouillent de monde. De nombreux commerces sont d’ailleurs encore ouverts. Après avoir soupé maigrement dans un resto, je retourne dans ma chambre pour un repos bien mérité.4.-Paysan-sur-la-route-d-Huancayo.jpg

3.-Le-village-de-Matachico.jpg

 

 

 

 

 

Jeudi 21 juillet : Huancayo - Izcuchaca (73,7 km)

1.-La-cathedrale-d-Huancayo-en-contre-jour.jpg

 

Ma nuit a été fortement perturbée par le vacarme de la rue. Fort heureusement, je récupère Tornado sain et sauf ! Je démarre la journée en me baladant dans les rues autour de la cathédrale. Le bâtiment massif domine une grande place fourmillant de monde. De nombreux enfants de diverses écoles sont vêtus de costumes colorés. Ils défilent au rythme d’une musique andine jouée par un orchestre, notamment le célèbre El Condor Pasa. Tout proche, la constitution péruvienne a été approuvée en 1839 dans la modeste église de La Merced. Je me renseigne auprès de plusieurs personnes pour quitter la ville en direction du Sud. Les propositions sont assez contradictoires. Tant et si bien qu’il me faut prendre une piste caillouteuse pour rallier la bonne route ! Je tombe alors en plein marché à Huancan. Il y a un grand nombre de paysannes qui vendent différentes variétés de pommes de terre étalées sur le sol. Après le village de Huayucachi, la route monte doucement dans les montagnes arrondies. Elles sont parsemées à leur base de champs récemment labourés. A nouveau, l’accès est payant pour les véhicules. Par contre pour les vélos, cela ne coûte pas un sol ! Je grimpe ainsi à plus de 3800 mètres d'altitude, en traversant de mignons villages typiques.Ce qui correspond à un dénivelé approximatif de 600 mètres ! Malheureusement, le soleil matinal a tendance à disparaître derrière de gros nuages blancs moutonneux. Une très longue descente m’amène ensuite dans le gros bourg d’Acostombo. Je mange du lomo saltado (émincés de bœuf accompagnés d’oignons, de pommes de terre et de tomates) dans un minuscule restaurant aux murs défraîchis. Le repas est succulent, mais il vaut mieux ne pas voir la cuisine ! Les clients m’assaillent de questions que j’ai bien du mal à saisir. La longue descente continue en zigzaguant jusqu’au fond de la vallée de Mantaro. J'ai perdu ainsi presque 900 mètres de dénivelé ! Plusieurs blocs rocheux des parois abruptes sont tombés sur la chaussée, rendant certains passages assez délicats. Je longe ensuite facilement la paisible rivière jusque Izcuchaca. Le joli village possède un pont colonial, datant selon la légende de l’époque inca. En cette fin d’après-midi, le vent se lève d’un coup ! De plus, il y a de grossières erreurs de kilométrages sur ma carte routière. Et forcément, c’est en ma défaveur ! Tout cela me sape littéralement le moral ! Je préfère poursuivre mon chemin le lendemain, en espérant que le vent cesse. Je m’installe alors dans une pitoyable chambre de l’hôtel Plaza sur la petite place. En fait, l‘habitation de la vieille dame sert à l’occasion d’hébergement, afin d’arrondir ses fins de mois. Après avoir soupé dans une gargote, je me balade un moment dans les rues sombres du petit village. 3.-Paysage-champetre-dans-les-montagnes-apres-Huancayo.jpg

2.-Marche-a-Huancan.jpg

 

 

Vendredi 22 juillet : Izcuchaca - Huancavelica (81,2 km)

1.-Le-pont-d-Izcuchaca.jpg

 

Comme je ne connais pas le kilométrage exact jusque Huancavelica, je préfère décamper relativement tôt. Par chance, le soleil est une nouvelle fois au rendez-vous. La route s’élève immédiatement, offrant de splendides vues sur la vallée de la rivière Mantaro. Elle s’enfonce ensuite dans les montagnes jusque Huando. Par le plus grand des hasards, j’assiste à la fiesta del pueblo. Plusieurs personnes en costume traditionnel coloré défilent dans la rue principale, en dansant sur des airs joués par une fanfare. Quelques musiciens soufflent dans d’impressionnants cornets allongés. L'ascension devient ensuite beaucoup plus douce, pour flirter au final avec une altitude estimée à 3800 mètres. J'ai ainsi repris près de 900 mètres depuis Izcuchaca ! Puis, la route descend d'un bon 200 mètres dans une petite vallée, pour regrimper de plus belle sur l’autre versant. En chemin, je traverse le village de Cachi Alta, aux maisons joliment décorées de couleurs vives. Pendant l’ascension, je suis stoppé par une famille péruvienne circulant en voiture. Ils me posent un tas de questions sur mon aventure. Tout finit par une photo de groupe avec Tornado ! J’atteins alors le village d’Ayaccocha au sommet. Je profite d’un petit restaurant pour dîner sur le pouce. La route se stabilise pendant quelques kilomètres, puis tombe dans une autre jolie vallée. Elle s’élève encore rapidement de l’autre côté, jusqu‘à un col estimé à plus de 4000 mètres. Comme un peu partout au Pérou, un chien de berger me course sur une longue distance. Aussi, j’aperçois enfin mes premiers lamas. Je plonge ensuite à grande vitesse vers Huancavelica, situé près de 400 mètres plus bas, par d’interminables virages. La chaussée est par endroits très abîmée à cause d’une faille géologique. En effet, la cordillère des Andes est encline à de nombreuses secousses sismiques. Après quelques derniers efforts le long de la rivière Ichu, j'atteins enfin la petite ville. Je la visite expressément, afin de profiter des derniers rayons du soleil pour les clichés. Puis, je m’installe à l’hôtel Senor de Oropesa à côté de la gare, avant de souper dans une sorte de cantine populaire pour moins d'un euro. Cette étape m’a complètement usé, j’ai les yeux qui ferment tout seul !les-champ3.-Murets-dans-s-avant-Huancavelica.jpg

2.-Fete-a-Huanda.jpg

 

 

Samedi 23 juillet : Huancavelica - Environs de CCochaccasa (57,6 km)

 1.-Huancavelica-et-sa-cathedrale.jpg

Ma nuit a été fortement perturbée par le bruit de la fête en ville. La musique et les claquements des pétards ont duré jusqu’aux aurores. Je consacre une bonne partie de la matinée à la découverte de Huancavelica. Entourée de montagnes escarpées, la ville possède plusieurs charmantes placettes et de jolies églises. La massive cathédrale du 17ème S domine la grande place d’Armes, au cœur de la cité. Les autres édifices religieux sont dispersés dans les rues animées tout autour. Malheureusement, soit les portes sont closes, soit un office est célébré ! Je me rends alors aux sources minérales perchées sur les hauteurs, afin de jouir d’une belle vue d’ensemble sous le soleil. Malgré de nombreuses habitations délabrées, Huancavelica me plaît bien ! C‘est pourtant la ville la plus pauvre du Pérou ! Je prends la route vers 10 h, en direction de Lircay. A mon grand étonnement, je me retrouve immédiatement sur une mauvaise piste. Elle grimpe méchamment dans la montagne pour s’échapper de la vallée encaissée. Les pierres saillantes font sauter régulièrement les roues du vélo. Il est bien difficile de garder une allure de pédalage régulière dans ces conditions ! Le paysage qui m’entoure est sublime, mais je garde les yeux rivés sur le chemin tellement cela secoue. Je pousse même le vélo sur les parties les plus difficiles. Du coup, je ne progresse pas beaucoup. Il me faut plus de 3 heures pour grimper la petite vingtaine de kilomètres jusqu’au col estimé à près de 4300 mètres, soit 600 mètres de dénivelé environ. Malgré les encouragements des rares conducteurs, je n’arrête pas de pester ! Plusieurs personnes m’avaient annoncé une courte montée. A mon avis, les distances européennes et péruviennes ne sont pas les mêmes ! Au sommet, je pique-nique rapidement avec de maigres restes de nourriture. La courte, mais périlleuse descente n’est pas beaucoup plus rapide. Je dois zigzaguer sur la piste, car mes roues n’arrêtent pas de déraper. Tant et si bien que je finis par chuter ! Comme ma vitesse est au ralenti, je m’en sors avec quelques égratignures. Dans ces conditions, il m’est difficile d’atteindre Lircay dans la journée. Un gars m’avait pourtant indiqué 5 heures à vélo. « Il n’a jamais pédalé de sa vie, ce n’est pas possible ! ». De plus, cela n’arrête pas de monter et descendre à plus de 4000 mètres. Toutefois après 35 km, la piste devient caillouteuse. Certes, elle est plus poussiéreuse, mais surtout plus roulante. Je décide alors de poursuivre ma route jusqu’à la tombée de la nuit, afin de me rapprocher au maximum de la petite ville. Deux gamins m’accompagnent durant quelques kilomètres après le village minier de Machaycucho. Puis, je pousse encore le vélo dans le noir à l'aveuglette, à la recherche d’un coin pour bivouaquer. Je finis par trouver une parcelle plate au bord de la piste à proximité de CCochaccasa, situé à une vingtaine de kilomètres de Lircay. Que je pense, car je suis un peu déboussolé ! La température devient glaciale, cela ne change pas beaucoup de mes nuits australiennes !3.-Paysage-de-montagnes-desertiques-apres-Huancavelica.jpg

2.-Les-lamas-dans-la-montee-du-col.jpg

 

 

Dimanche 24 juillet : Environs de CCochaccasa - Ayacucho (63,8 km)

2.-Les-lacets-dans-la-montagne-apres-Lircay.jpg

 1.-Le-bivouac-sur-le-plateau.jpg

La toile de tente est complètement givrée. La température nocturne est passée une nouvelle fois sous la barre des 0°C. Fort heureusement, le soleil matinal la sèche rapidement. La piste descend longuement dans la vallée de Lircay, située 1000 mètres plus bas, en zigzaguant sur plus d‘une vingtaine de kilomètres. Cela semble vraiment interminable ! A chaque virage, le paysage est époustouflant. Je bombarde d’ailleurs le coin de nombreux clichés ! La petite ville déborde de commerces en tout genre. Du coup, j’en profite pour déjeuner avant de poursuivre mon parcours. La traversée de Lircay est rendue bien difficile par les nombreux travaux pour la réfection des rues. La piste grimpe ensuite légèrement le long d’une tranquille rivière, encaissée dans de jolies gorges. Elle monte ensuite en lacets sur le flanc de la montagne pendant plus d’une vingtaine de kilomètres, jusqu’au petit hameau de Buenavista. Pendant mon pique-nique au bord du chemin, un couple de Péruviens me prédise encore une dizaine d’heures de pédalage jusque Ayacucho. Ce qui me paraît peu probable ! De toute façon, la distance et le temps varient énormément d’une personne à l’autre. Je poursuis mon chemin dans une large vallée relativement plate, avant de monter sur l’autre versant en zigzaguant. Après une quarantaine de kilomètres d‘efforts depuis Lircay, j‘atteins le sommet qui doit avoisiner les 4500 mètres. Soit près de 1200 mètres de dénivelé positif ! Comme le soleil ne va pas tarder à se coucher, je m’habille chaudement avant d’attaquer la folle descente jusque Ayacucho. D’après mes prévisions, il ne me reste plus qu’à me laisser glisser pendant environ 35 km. Aussi, je sais pertinemment que je n’atteindrai pas la ville avant la tombée de la nuit. A peine démarré, trois ouvriers dans un pick-up proposent de m’emmener. Après quelques hésitations, nous chargeons Tornado à l’arrière du véhicule. Auparavant, ils doivent faire quelques mesures de prise de terre sur un groupe électrique hybride solaire-éolien, situé sur les hauteurs. Mes compagnons de route sont très sympathiques, mais le retour me semble bien long. Les heures tournent, et je n‘aperçois toujours pas de ville illuminée. Cela devient extrêmement inquiétant, lorsque nous empruntons des pistes isolées et complètement défoncées. Je me retrouve ainsi avec trois individus inconnus, au milieu de nulle part. Après de longues heures de doute, nous rejoignons enfin la route bitumée en direction d’Ayacucho. Ouf ! En fait, le chauffeur s’est tout simplement trompé de chemin. A l’entrée de la ville, un groupe de jeunes tente d’arrêter le véhicule en jetant de gros cailloux. Franchement pas rassurant ! Comme il est déjà 22 h, je descends au même hôtel Yanez que Luis et Mario. Le tarif est bien élevé, mais j’ai besoin d’une bonne douche chaude après toutes ces journées poussiéreuses. Par contre, le chauffeur retourne à sa maison. Nous partons ensemble souper dans un petit restaurant. Je suis même invité par mes deux compères ! Puis, nous finissons dans une boite de nuit, à la musique latino-américaine. Je suis d'ailleurs le seul gringo présent ! De même, Luis et Mario refusent que je paye ma tournée. Du coup, je n’ai pas dépensé un sol de la soirée ! Après plusieurs bières, nous rentrons joyeusement à l’hôtel. Il est déjà presque 3 h du matin !

4.-Paysage-juste-avant-le-sommet-du-col.jpg

3.-Le-cycliste-sur-la-piste.jpg

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1 janvier 2015 4 01 /01 /janvier /2015 11:56

Lundi 25 juillet 2011 : Ayacucho - Environs d’Ayacucho (35,5 km)

 

1.-La-place-d-Armes-d-Ayacucho.jpg

 

Forcément après la soirée d’hier, je me lève plus tard, et un peu vaseux. Je consacre toute ma matinée à la découverte à pied d’Ayacucho. Plus d’une trentaine d’églises sont éparpillées dans la ville. Du coup, j’en sélectionne quelques-unes, car je ne peux toutes les visiter. Malheureusement, elles sont quasiment toutes fermées. Les rues sont envahies par une foule immense. La grande place d’Armes est bordée par la jolie cathédrale et par de beaux bâtiments administratifs. La préfecture et le palais de justice renferment notamment de mignonnes cours cloîtrées. Puis, je salue une dernière fois Luis et Mario, avant de quitter l’hôtel. Je mange copieusement dans un petit resto populaire, puis prends la route. L’étape risque d’être très courte, car il est déjà presque 14 h. En ce début d’après-midi, le soleil cogne bien fort ! Je transpire les mille gouttes ! Immédiatement, la route grimpe dans la montagne. Et une nouvelle fois, cela va durer pendant plusieurs dizaines de kilomètres ! De plus, les travaux de rénovation de la chaussée me font perdre un temps précieux. Après une petite trentaine de kilomètres, je n’ai toujours pas traversé un seul village ! Je cherche alors un coin pour planter la tente. Cependant, les versants pentus des montagnes me rendent la tâche bien difficile. Finalement, un homme miséreux m’autorise à bivouaquer à proximité de son baraquement délabré. Il cohabite avec d’autres ouvriers agricoles dans cette frêle bâtisse. Le coin est jonché de détritus, mais je n’ai pas vraiment le choix. Mon kilométrage s’élève aujourd’hui à plus de 20 000 km, depuis le début de mon aventure !

2.-Luis-et-Mario.jpg

 

 

Mardi 26 juillet : Environs d’Ayacucho - Chumbes (89,7 km)

 

1.-Le-plano-juste-avant-Ocros.jpg

 

C’est peut-être psychologique, mais je passe souvent des mauvaises nuits à de hautes altitudes. J’ai toujours l’impression d’étouffer ! D'ailleurs, cela s’est déjà produit durant mon trek au Népal. A mon réveil très matinal, toute la troupe est regroupée autour de la tente, observant mes moindres faits et gestes. D’un seul coup, ils partent tous travailler dans les champs en contrebas. Comme un imbécile, j’ai oublié de me réapprovisionner à Ayacucho ! Le ventre vide, je continue ma lente ascension dans la montagne. De nouveau, des travaux me coupent dans mon élan. Cela commence sérieusement à devenir pénible ! A mon grand étonnement, la route se transforme en une piste caillouteuse. Ma carte indique pourtant du bitume ! En fait, ce ne sont pas des travaux de rénovation, mais plutôt de recouvrement de la piste. En plus des odeurs nauséabondes de goudron et de gaz d’échappement, je respire les nuages de poussière soulevés par les bus et les camions. Certains passages ne sont même pas damés, ou seulement recouverts de grosses pierres. Il me faut alors pousser péniblement le vélo. Après une bonne trentaine de kilomètres, j’atteins ce que je pense être le sommet. J'estime le dénivelé à plus de 1400 mètres depuis Ayacucho. Cependant, la piste continue de monter et descendre. Elle serpente longuement sur un vaste plateau entouré de montagnes dénudées, à une altitude évaluée à 4200 mètres. Le nombre de virages en épingle à cheveux est incroyable ! Au vu du peu de différence de hauteur, c’est à se demander pourquoi ne pas avoir coupé plus directement ! Aussi, la fringale n’est pas loin, et le coin est complètement désertique ! J’arrête alors un camion, afin de me renseigner sur les possibilités de restauration sur mon parcours. Le chauffeur me rassure en m’indiquant un restaurant au prochain village dans quelques kilomètres. La passagère s’apitoie sur mon sort, et m‘offre même une orange. Après avoir parcouru 25 km sur le plateau, j’amorce enfin l’impressionnante descente. Le paysage est vraiment sensationnel ! Les virages se succèdent longuement sur les parois abruptes des montagnes jusque Ocros. La mignonne petite place est entourée de bâtiments colorés, qui resplendissent sous le soleil. Je me jette alors dans le restaurant, complètement affamé. En effet, il est presque 15 h, et je n’ai rien mangé depuis hier soir. Puis, la piste poursuit sa folle dégringolade jusque Chumbes. Par malchance, un gros caillou casse net mon garde-boue avant. Après un moment de relaxation dans un bar, je m’installe dans un modeste hôtel situé dans une ruelle bien sombre. Une panne électrique générale fait tomber le village dans le noir total. Seul un restaurant routier, fonctionnant sur un groupe électrogène, est éclairé. Du coup, j’en profite pour casser la graine. Force est de constater que les kilométrages sur ma carte routière sont complètement erronés. Google Maps sur internet ne vaut pas beaucoup mieux ! Cela m’inquiète pour le rendez-vous à Cuzco avec mes deux amis ce samedi ! Même si ce n’est pas dans mes habitudes, il va peut-être falloir prendre le car !

2. Le village d'Ocros   3. Le cycliste sur la piste-

 

 

Mercredi 27 juillet : Chumbes - Chincheros (36 km)

 

    1. Cactus dans la descente

Je me réveille aux aurores de manière à faire une grande étape. La piste continue de descendre sur une bonne dizaine de kilomètres, jusqu’au fond de la vallée de la rivière Pampas. J'ai ainsi chuté de 2200 mètres environ, par rapport au sommet sur le plateau ! En chemin, je croise mes premiers cyclos au Pérou. Annelies et Hannes sont deux Autrichiens circulant à vélo depuis deux ans, principalement en Amérique du Sud. Nous discutons longuement sur le bas-côté, s’échangeant quelques conseils. Ils me confirment qu’atteindre Cuzco en trois jours est quasiment impossible avec tous les dénivelés. Je longe ensuite le magnifique cours d’eau, traversant quelques villages typiques. Il est à peine 11 h, mais je préfère m’arrêter à Ahuayro pour manger dans un petit restaurant. En effet, je ne tiens pas à avoir le même coup de fringale qu’hier ! La cuisinière ne peut malheureusement me servir que dans une bonne demi-heure. Dans la rue, des enfants s’apprêtent à défiler pour une fête d’école. Ils sont tous intrigués par Tornado chargé comme un baudet. Je repars sous le coup de midi, sous un soleil écrasant. La piste devient bien meilleure. Un vieux bitume délabré remplace les cailloux et la poussière. C’est en tout cas beaucoup plus roulant ! Elle s’enfonce dans la montagne avec des pentes raisonnables. Après une bonne dizaine de kilomètres, je crève par malchance de la roue arrière. Les pierres acérées de la piste ont eu raison de mon pneu ! Après plus de 20 000 km, il s’est arraché sur la bande de roulement. Fort heureusement, j’ai toujours celui que Gilles m’a laissé au Laos ! Je répare l’ensemble sous le regard curieux d’un vieux paysan quechua et de quelques enfants. Aussi, de nombreux moucherons me piquent désagréablement partout sur le corps. Ce petit pépin me fait perdre un temps fou ! Je poursuis ensuite l’ascension sur quelques kilomètres jusque Chincheros. Après de longues hésitations, je décide de m’installer dans le petit hôtel San Jorge. En effet, l’après-midi est déjà bien avancé ! Du coup, je n’ai parcouru que très peu de distance aujourd‘hui. Je cherche vainement une connexion internet, puis soupe dans un resto populaire. Il faut absolument que demain je donne des nouvelles à mes amis Aurélie et Ben, afin de ne pas se rater à Cuzco ! Par malchance, mon téléphone ne capte aucun réseau au Pérou. Cela tombe toujours dans les moments primordiaux !  

2. La vallée de la rivière Pampas  3. Paysan sur la route de Chincheros  

 

 

Jeudi 28 juillet : Chincheros - Andahuaylas (89,5 km)

 

1. Mon pneu entaillé  2. Le plano avant la descente sur Andahuaylas 

La première règle à suivre au Pérou est de ne pas prendre au pied de la lettre ce que les gens vous disent ! Hier, un policier m’avait estimé le col à une petite dizaine de kilomètres. Au bout du compte, il m’aura fallu plus de 4 heures pour gravir les 30 km de montée. De plus, on m’avait dit ne rien trouver à Uripa, situé sur les hauteurs de Chincheros ; alors que de nombreux commerces et quelques hôtels s’agglutinent au centre du village. Tout ceci me fusille le moral, déjà que j’ai les jambes bien lourdes ! Pour rajouter une couche, un camion humidifie la piste afin de limiter la poussière. La boue s’accumulant sur mes pneus ralentit encore plus ma progression. Je mouline alors péniblement jusqu’au sommet, situé à nouveau aux alentours de 4200 mètres. Malheureusement, une brume de chaleur voile en partie le magnifique paysage montagneux. Sur le plateau d'altitude, les cailloux de la piste cèdent la place au goudron fraîchement appliqué. Comme je n’ai pas prévu de provisions à cause de la soi-disant courte ascension, mon repas du midi se limite à une pomme et une orange. La route serpente facilement sur le plano, puis plonge vers Andahuaylas. Plus de 40 km de descente ! Je me laisse griser un moment par la vitesse de mon bolide, qui file à plus de 50 km/h. Puis, je suis freiné par de très nombreux travaux pour le goudronnage de la piste. Je renoue alors avec la poussière et les odeurs nauséabondes. Le chantier est titanesque, employant un nombre incalculable d’ouvriers qui ne manquent pas de me saluer au passage. En fin d’après-midi, j’atteins Andahuaylas, tout au fond d’une vallée. J'ai ainsi reperdu près de 1300 mètres d'altitude ! Je trouve à loger dans le miteux hôtel La Palmera, puis soupe dans un modeste snack. Il faut se rendre à l'évidence, il m’est impossible de rallier Cuzco avec un vélo chargé en deux jours. D’autant plus que le dénivelé n’est pas en ma faveur ! Ce n’est pas dans mes habitudes, mais je vais devoir prendre le car afin de ne pas rater le rendez-vous prévu avec Aurélie et Ben. Après un an de voyage, cela va vraiment faire plaisir de retrouver leurs bouilles !

 

  3. Les montagnes dans la descente

 

 

Vendredi 29 juillet : Andahuaylas

 

  La place d'Andahuaylas

Malgré que ce soit une journée de repos, je me lève assez tôt pour ne pas être farcé avec l’achat du billet de bus. La compagnie Celtur propose un trajet au même prix que ses concurrents, mais sans supplément pour le vélo. Je reste quand même assez perplexe ! Les billets en poche, je me rends sur la place d’Armes de la ville qui s’avère peu intéressante. La cathédrale ressemble plus à une grosse église ! Je déambule ensuite au hasard des rues. La ville est malheureusement en pleins travaux de rénovation. Les corps de métiers sont regroupés par quartiers : d’un côté les coiffeurs, de l’autre les services médicaux… A midi, je mange dans un modeste petit resto à proximité de l’hôtel. Il jouxte le mercado, un large bâtiment sur deux étages renfermant un grand marché bien organisé. Les étals de viande et de légumes sont au rez-de-chaussée, tandis que les autres commerces se situent au niveau supérieur. Il est à peine 13 h, et je commence déjà à tourner en rond ! C’est pourquoi je rentre à l’hôtel pour classer notamment mes photos. J’ai tellement tiré de clichés depuis mon arrivée en Amérique du Sud, que cela me prend la majorité de l’après-midi. En début de soirée, je pars souper dans une petite cantine populaire. Le monde se presse à l’entrée du bâtiment. Le service a d’ailleurs bien du mal à suivre. Je rentre ensuite tranquillement dans ma chambre froide, pour tenter de dormir un peu. En effet, le car part demain à 7 h du matin !

 

 

Samedi 30 juillet : Transport en car pour Cuzco (5,5 km à vélo)

 

Ma nuit a été très courte ! A l’aube, je me rends au terminal de la compagnie Celtur. Par précaution, je surveille le chargement du vélo et des bagages dans la soute. Vers 7 h, le car s’élance enfin vers Cuzco. Je suis placé à côté d’un vieux Péruvien assez sympathique. A la sortie de Andahuaylas, la piste grimpe longuement dans les montagnes alentour. La température extérieure augmente rapidement dès le levé du soleil. Le car plonge ensuite durant de nombreux kilomètres dans une large vallée. Il rejoint ensuite Abancay situé sur l’autre versant, par la grosse nationale bitumée en provenance de Lima. Comme beaucoup de passagers, je dîne dans un restaurant routier à l‘entrée de la ville. Une heure plus tard, nous reprenons le chemin de Cuzco. La route s’élève à nouveau de 2000 mètres, avant de replonger d’autant. Durant la dernière montée, le conducteur a bien du mal à passer ses vitesses. Il arrête plusieurs fois son véhicule sur le coté, créant quelques embouteillages. L’embrayage et la boite font de bien étranges bruits. Nous effectuons d'ailleurs les derniers kilomètres au ralenti. Comme personne ne donne d’explication, les gens finissent par s‘impatienter. Le car arrive au terminal de Cuzco avec presque 3 heures de retard. Je pédale alors rapidement dans l’obscurité jusque la place d’Armes, lieu de rendez-vous avec Aurélie et Ben. Avec tous ces déboires, ils m’attendent depuis deux bonnes heures. Du coup, nous cherchons tardivement un logement dans la ville. Finalement, nous trouvons difficilement une chambre commune dans l’auberge municipale, située sur les hauteurs de la ville. Ils m'amènent dans leurs bagages une toute nouvelle tente, envoyée gracieusement par l'entreprise Vaude chez ma frangine et mon beauf. Un grand merci à tous pour toutes ces démarches depuis la France ! Puis, nous fêtons les retrouvailles dans le bar Inkaria, avec de la gnôle locale composée de vingt plantes. Après avoir soupé dans une pizzeria proche, je bois un dernier verre avec Ben dans un bar à la musique branchée.

 

 

Dimanche 31 juillet : Cuzco

  La place d'Armes de Cuzco depuis l'auberge

Nous partons ensemble déjeuner dans un petit restaurant, avec vue sur la place d‘Armes depuis les balcons. Le tarif est bien onéreux pour le maigre repas proposé. Au Pérou, il faut vraiment prêter attention à l'argent remis, car de nombreux faux billets sont en circulation. Nous partons ensuite réserver les billets pour l’entrée du Machu Picchu au bureau de l’Institut National de la Culture. Comme je n’ai pas mon passeport pour l’enregistrement, nous retournons gaiement gravir les marches jusque l’auberge. A notre retour, les portes de l’établissement sont malheureusement closes. La fille nous avait pourtant annoncé la fermeture bien plus tard. Elle s’est vraiment foutue de nous ! Nous dînons alors dans un petit resto populaire donnant sur la place San Francisco. Les bureaux étant toujours fermés, nous passons l’après-midi à tenter de réserver nos billets via internet. En vain ! C’est pourquoi nous faisons plusieurs allers-retours jusque l’auberge. Le trekking du Salkantay semble bien compromis pour demain ! Il est presque 17 h, lorsque nous visitons expressément l’église de la Compania et la cathédrale. Lors d’une énième tentative, nous obtenons finalement nos billets pour le Machu Picchu. L‘esprit libéré, nous soupons dans un restaurant bourré de peluches. Nous finissons la soirée dans le même troquet que la veille, avec une bouteille de gnôle anisée. Aussi, j’ai malheureusement perdu ma petite sacoche avec toutes les piécettes étrangères, que je traîne depuis le début de mon périple asiatique. Il ne reste que quelques heures de sommeil, avant de prendre le car en direction de Mollepata demain matin.

 

 

salkantay-machu-picchu-map (2)

 

 

Lundi 1er août : 1er jour de trekking : Mollepata - Soreypampa

 

1. Aurélie et Ben au pique-nique  Le sentier partant vers le sommet enneigé duTacarhuay

 

La nuit fut très, très courte ! Un taxi nous emmène dans le quartier d’Arcopata, afin de prendre le minibus de 5 h en direction de Mollepata. Le trajet dure environ trois bonnes heures. Sur les derniers kilomètres, la piste caillouteuse au bord du précipice est assez périlleuse. Nous déjeunons ensuite tranquillement dans le petit village, avant d’entamer la randonnée. Sans le vouloir, nous empruntons le chemin qui grimpe vers le village étalé de Marcocasa. Puis, il zigzague sur le versant montagneux, donnant du fil à retordre à quelques-uns d‘entre-nous. Au sommet, le panorama sur les deux vallées est vraiment grandiose sous le soleil. Nous profitons de ce magnifique décor naturel, pour casser la croûte sur un alpage à l’herbe rase. Malheureusement, de nombreuses petites mouches nous assaillent durant tout le repas. Le sentier reste ensuite plus ou moins en ligne de crête, puis rejoint l’autre itinéraire beaucoup plus fréquenté. Les cimes des montagnes qui se présentent face à nous sont complètement enneigées. Nous marchons dans leur direction, tout en mâchouillant quelques feuilles de coca. A la tombée de la nuit, nous atteignons finalement le rudimentaire campement de Soreypampa. La présence des glaciers rafraîchit considérablement l’atmosphère. La température chute d’un coup, et devient glaciale ! Après avoir installé la tente, nous nous réfugions dans une sorte de cabane de berger pour préparer à souper. La popote n’étant pas prévue pour trois personnes, le repas est une vraie catastrophe ! Les spaghettis se transforment en une plâtrée compacte, peu appétissante. Mais quand on a faim, on ne fait pas la fine bouche ! Puis, les porteurs des groupes de randonneurs nous demandent de quitter brusquement les lieux. Dans la précipitation, un drôle d’individu vide complètement les bouteilles de bière à peine entamées. Merci Ben ! Aussi, le discours d’un guide m’inquiète un peu pour l’étape de demain. En effet, il nous faut franchir le col d’El Paso, perché à 4600 mètres sur les contreforts du Salkantay. A ma grande fierté, cela fait déjà un an que j’ai donné mes premiers coups de pédale !

 3. Le Tacarhuay enneigé

 

 

Mardi 2 août : 2ème jour de trekking : Soraypampa - Chaullay

 

1. Vendeurs péruviens sur le sentier

2. Petit lac dans la montée  

Pourtant serrés comme des sardines dans la tente, Aurélie et Ben ont quand même eu froid dans leur duvet léger. Il faut reconnaître qu’il fait vraiment frisquet ce matin ! Aussi, un gros caillou sous le tapis de sol m’a complètement détruit le dos. En effet, le matelas autogonflant est resté à l’hôtel, afin de s’alléger au maximum. Le sentier longe un moment la rivière Rio Blanco, puis grimpe abruptement sur les contreforts du Salkantay. Fort heureusement, nos corps se réchauffent rapidement grâce aux efforts fournis. D’autant plus que le soleil montre enfin le bout de son nez ! D’innombrables lacets s’enchaînent sur le raidillon rocailleux. Ben et Aurélie ont bien du mal à progresser, à cause des lourds sacs et de l’altitude. Pour ma part, j’ai plus de facilité grâce à ma condition physique accrue par le vélo, notamment au niveau du souffle. La plupart des autres randonneurs sont accompagnés de porteurs ou de mules. Ils n’ont d’ailleurs pas grand-chose à s’occuper, car les tentes sont montées à leur arrivée, et les repas préparés par les accompagnateurs. Une formule de trekking beaucoup plus aisé ! Nous atteignons alors une petite pampa désertique, dominée par le sommet enneigé du Salkantay culminant à 6271 mètres. Après une dernière pente abrupte, j’atteins enfin le col d’El Paso à 4600 mètres. Le paysage est merveilleux ! Malgré le vent violent, les nuages restent accrochés aux montagnes alentour. Plusieurs minutes après, j’aperçois Aurélie et Ben grimpant péniblement les derniers mètres. Après quelques photos glorifiant l’évènement, nous entamons une longue descente dans un vallon aride. Nous pique-niquons dans un petit pâturage, accompagnés par quelques condors qui virevoltent au-dessus de nos têtes. Le sentier rejoint ensuite la vallée sombre de la rivière Huamantay. Avec la baisse d’altitude, la végétation refait tout doucement son apparition. Nous dévalons à grande vitesse les derniers kilomètres, à cause des mauvais renseignements d’un guide. Finalement, nous atteignons le minuscule village de Chaullay avant la tombée de la nuit. Nous installons immédiatement la tente, avant de partir à la recherche d'un bon repas. La gérante d’un petit commerce rallume même ses fours spécialement pour nous. Vraiment sympa ! De plus, le coût du souper est complètement dérisoire. Finalement, la nuit risque d’être bien meilleure, car la température est sensiblement plus élevée.

3. Les randonneurs au sommet

4. Piton rocheux devant le Salkantay 

 

 

Mercredi 3 août : 3ème jour de trekking : Chaullay - Sahuayaco (La Playa) et minibus pour Santa Teresa

 

  1. Bergeries à proximité de Chaulley

Des chiens ont aboyé toute la nuit ! Une vraie calamité ! Nous poursuivons notre chemin dans la vallée de la rivière Santa Teresa. Notre trek rejoint ainsi celui de Choquequirau. Le début du trajet n’est pas très agréable. Nous marchons sur une piste à flanc de montagne, empruntée par de nombreux véhicules qui soulèvent la poussière. Fort heureusement, quelques kilomètres plus loin, un fragile pont en bois permet de rejoindre le sentier de randonnée qui borde le cours d’eau. La végétation tropicale a totalement envahi la vallée resserrée. Après seulement trois petites heures de marche sous le soleil, nous sommes tout surpris d’atteindre déjà le village de Sahuayaco (surnommé également La Playa). Nous dînons alors en terrasse d’un modeste restaurant au bord du sentier. Après réflexion, nous décidons de rejoindre le village de Santa Teresa par minibus, plutôt que de poursuivre le trekking. Dommage ! De toute façon, la quasi-totalité des randonneurs s’arrête ici ! Après une bonne heure sur une piste chaotique, notre chauffeur nous dépose au centre de la petite ville. Elle se situe au confluent des rivières Santa Teresa et Urubamba. Nous nous installons à l’hôtel Aranibar, tenu par une charmante vieille dame. Une foule de gens se presse pour observer un match de football, qui se déroule en contrebas à proximité du cours d’eau. Plus tard, nous nous attablons dans un restaurant mexicain pour souper. Nous finissons la soirée dans une discothèque à la musique latino-américaine. L’ambiance est assez sympathique, mais le comportement de certains touristes anglais ou américains est carrément pitoyable !

  2. La petite ville de Santa Teresa

 

 

Jeudi 4 août : Santa Teresa - Aguas Calientes

 

1. La voie ferrée pour Aguas Calientes  2. La rivière Vilcanota

La matinée est consacrée à flâner dans les rues de Santa Teresa. De précaires baraquements en tôle ondulée côtoient des habitations en dur pas toujours achevées. Bien souvent, de longues ferrailles dépassent des toits pour la construction d’un éventuel étage. Malgré tout, Santa Teresa reste agréable. Elle possède d’ailleurs des thermes publics assez réputés. La rue principale est bordée par de nombreux cafés et restaurants. La large place abrite également une vieille maison basse décrépie, renfermant le commissariat. Ce qui ne manque pas de nous amuser ! Nous cassons la graine dans un modeste restaurant populaire, où la propreté n’est pas la priorité des propriétaires. Après dîner, un taxi nous conduit au barrage hydro-électrique situé à quelques kilomètres. De ce lieu, un train peut nous emmener ensuite jusque Aguas Calientes. Toutefois, nous préférons longer la voie ferrée à pied jusque la petite ville. Elle s’enfonce dans l’impressionnante vallée de la rivière Urubamba, qui enserre le site du Machu Picchu perché sur les hauteurs. La promenade s’avère beaucoup plus agréable par rapport à ce que j’imaginais ! Grâce à l’humidité ambiante, de nombreuses fleurs colorées et de grands arbres tropicaux jalonnent le parcours. Les montagnes sont également envahies par des nuages bas menaçants. D’ailleurs, une pluie fine se met à tomber en fin de journée. Après plus de 3 heures de marche, nous atteignons finalement Aguas Calientes. A l’entrée, les nombreux hôtels qui se succèdent témoignent de l’aspect hyper touristique de la ville. D’ailleurs, les commerçants ne se gênent pas pour augmenter les prix. Nous trouvons finalement refuge à l’hôtel Inti-Wasi surplombant une petite rivière. Au centre, la rue Pachacutec n’est qu’une succession de restaurants en tout genre. Les rabatteurs n’arrêtent pas de nous assaillir. On ne peut pas faire un mètre sans se faire agripper ! C’est vraiment pénible ! Du coup avec toute cette concurrence, Ben et moi tentons de négocier les tarifs. Après une première tentative dans un établissement au service lent et peu cordial, nous finissons par en trouver un autre relativement correct. J’en oublie même mon appareil photo ! J’ai quand même eu beaucoup de chance de le récupérer ! Demain, une dure journée nous attend avec l’ascension des marches jusqu’au Machu Picchu.

  3. Le train pour Aguas Calientes

 

 

Vendredi 5 août : Visite du Machu Picchu

 

1. Les montagnes dans la brume matinale  2. Les randonneurs au sommet du Wayna Picchu

Nous nous levons aux aurores, de manière à arriver avant les cars de touristes au Machu Picchu. Comme personne n’est présent à l’accueil de l’hôtel, nous sommes peu rassurés de laisser les sacs dans un petit local. Une bonne heure est nécessaire pour gravir les 1716 marches des escaliers menant au site. Autant dire que ce ne fut pas une partie de plaisir ! De plus, la météo ne nous gâte pas, tout est noyé dans la brume ! Je suis complètement abattu ! Notre calvaire n’est pourtant pas fini, car il nous faut à présent monter les raides escaliers de la montagne Wayna Picchu. Seuls deux groupes de 200 personnes y ont accès par jour. Comme par magie, la brume se dissipe subitement durant l’ascension. Les hautes montagnes dominant la vallée de la rivière Urubamba se dévoilent d’un coup. Tous ces efforts valent vraiment la peine ! La vue plongeante sur les ruines incas est tout simplement prodigieuse. Nous profitons un moment du panorama, avant de redescendre par le même chemin. Comme il est interdit d’introduire de la nourriture, nous pique-niquons à l’entrée du site. La construction du Machu Picchu aurait commencé au 15èmeS, sous le règne de l’empereur inca Pachacutec. Il est divisé en deux grands quartiers. La ville haute comprend le mirador, les maisons des agriculteurs et les terrasses cultivées ; tandis que la ville basse renferme de nombreux temples, les greniers et différents quartiers d’habitations. Nous déambulons ainsi une bonne partie de l’après-midi dans ce dédale de rues pavées. A cause du manque d’indications, il n’est pas toujours facile de localiser les différentes curiosités ! Après cette longue visite, nous redescendons les marches gravies durant la matinée jusque Aguas Calientes. Notre retour vers Cuzco semble bien compromis. En effet, le seul train qui part aujourd’hui vers Ollantaytambo coûte la bagatelle d’environ 250 $ US (un peu plus de 210 euros). Ce qui en fait l’un des tronçons de chemin de fer le plus cher au monde ! Les locaux ne payent pourtant que 10 Nuevo Sol pour le trajet, soit un peu plus de 2 euros. « On a pas du tout l’impression de se faire berner ! » Finalement, nous dégottons des billets pour le lendemain matin au tarif de 50 $ US par personne. Contraints et forcés, nous reprenons une chambre au même hôtel. Nous partons ensuite souper dans un petit restaurant de la rue principale, tenu par un mexicain. J’ai vraiment hâte de quitter cette ville qui sent l’arnaque à chaque coin de rue !

 

3. Les ruines du Machu Picchu  4. Vue d'ensemble du Machu Picchu

 

 

Samedi 6 août : Aguas Calientes - Cuzco

 

1. Le village d'Ollantaytambo depuis la forteresse  2. Les terrasses de Moray

Nous embarquons vers 8 h 30 dans un train de luxe de la compagnie Incarail, en direction d’Ollantaytambo. Les fauteuils en cuir, la musique andine, les vitres panoramiques, les petits biscuits et le chocolat ne suffisent pas à faire passer la pilule des 50 $. La voie ferrée évolue le long de la rivière Urubamba, dans un magnifique décor de montagnes aux sommets parfois enneigés. Après presque 2 heures de trajet, nous débarquons dans le charmant village d’Ollantaytambo. Les ruelles pavées sont bordées de belles maisons coloniales, bâties sur les fondations de la période inca. Nous dînons dans une petite gargote, avant d’entamer la visite de la forteresse. Du haut de son promontoire, elle domine les trois vallées alentour. Elle a été le théâtre d’une terrible bataille contre les espagnols. Un raide escalier mène à différentes terrasses cultivées. Au sommet, une série de blocs rocheux constituerait le temple du Soleil. Il faut quand même avoir une sacrée imagination pour deviner une figure géométrique représentant le cycle de la vie ! Puis, nous négocions le trajet en taxi jusque Chinchero, avec quelques arrêts sur différents sites. Une piste poussiéreuse mène à l’ingénieux système de terrasses incas concentriques de Moray. Les spécialistes supposent qu’il s’agirait d’un laboratoire agronomique. Quelques kilomètres plus loin, nous découvrons les surprenantes salines de Las Salinas. Des milliers de bassins ont été creusés dans une petite vallée encaissée. A notre arrivée, plusieurs personnes y travaillent encore pour récolter le sel. Notre chauffeur nous fait ensuite le coup de la panne ! Il nous plante à l’intersection de la route pour Maras. Il nous réclame de surcroît le triple du prix annoncé, prétextant que le tarif était individuel. Il se sauve rapidement, nous laissant en proie à d’autres chauffeurs. Assez énervés, nous décidons alors de prendre le bus direct pour Cuzco. Tant pis pour Chinchero ! De toute façon, le soleil commence déjà à se coucher ! Aussi, j’interpelle une cyclovoyageuse allemande sur le bord de la chaussée. Swinde voyage à vélo depuis la Terre de Feu en Argentine jusqu’en Alaska. Il fait complètement noir lorsque nous atteignons l’ancienne capitale inca. Dans un troquet d’un quartier populaire, nous assistons par hasard à une danse de séduction appelée marinera, rythmée par la musique d’un orchestre. Nous récupérons ensuite nos affaires restées en consigne à l‘auberge municipale, pour s‘installer dans une autre chambre un peu plus exiguë. Puis, nous soupons dans le petit restaurant italien, situé en face de notre bar péruvien Inkaria. Encore quelques cruches d’alcool aux vingt plantes avant un dodo mérité !

 

3. Cactus devant la vallée de la rivière Urubamba  4. Les salines de Las Salinas

 

Dimanche 7 août : Escapade à Pisac dans la Vallée Sacrée

 

1. Tisseuses au marché de Pisac

2. Les terrasses devant les ruines de Pisac

 

La soirée étant un peu trop arrosée, nous décampons plus tardivement que nos prévisions. Un minibus nous emmène en moins d’une heure à la petite ville de Pisac, située à l’extrême Est de la Vallée Sacrée. Un marché coloré se tient sur la place de la Constitution. Nous nous baladons ainsi à travers les nombreux étals de nourriture et de souvenirs pour touristes. Puis, nous dînons dans la petite cour d’un restaurant en bordure de la place. Un taxi nous amène ensuite sur les hauteurs pour la visite du site archéologique inca. La vue sur Pisac à la jonction des deux vallées est vraiment spectaculaire. De nombreuses terrasses descendent à flanc de montagne, cernant les quartiers des maisons en ruines. A proximité, des trous dans la falaise servaient de sépulture aux défunts. Aussi, un sentier escarpé permet de rejoindre à pied la petite ville. Toutefois à cause du manque de temps, nous préférons redescendre en taxi. La longue file d’attente pour le minibus de Cuzco nous fait également changer nos plans. Nous tentons alors de négocier le trajet jusque Tambomachay avec un chauffeur pas très honnête. Tout cela finit par nous énerver ! Au bout du compte, un autre accepte de nous emmener au tarif annoncé. Cependant, sa conduite nous donne quelques frayeurs. Il n’hésite pas à doubler les véhicules dans les virages, sans aucune visibilité. Le site de Tambomachay renferme une source d’eau sacrée inca, qui s’avère décevante. A proximité, les derniers rayons chatoyants du soleil illuminent la forteresse de Pukapukara. Nous embarquons ensuite dans un colectivo pour le site de Q’enco. Il s’agit d’un ancien sanctuaire aménagé dans un gros bloc rocheux. Depuis une sorte d’amphithéâtre,  un petit tunnel mène à un autel servant au sacrifice des animaux. Une brèche en zigzag traverse également le rocher de part en part. Ben et moi cherchons longuement dans l’obscurité le monolithe censé représenter un puma. Nous sommes déçus lorsqu’un guide nous indique un vulgaire rocher pointu. Puis, nous rejoignons le centre de Cuzco, entassés dans un colectivo avec la population locale. Dans la soirée, nous retournons au restaurant de la place San Francisco pour déguster des pizzas géantes. Nous retrouvons ensuite notre endroit fétiche. Ce soir, l’ambiance est particulièrement survoltée. C‘est l‘anniversaire d’un ami du patron, qui ressemble un peu à Jean-Pierre Castaldi en version péruvienne. Les verres d’eau-de-vie aux vingt plantes (coupée au Sprite !) défilent, et se boivent cul sec jusque tard dans la nuit !

 

 3. Dame péruvienne avec son lama

 

 

Lundi 8 août : Visite de Cuzco

 

1. La cathédrale derrière les colonnes  2. L'église de la Compania sur la place d'Armes de Cuzco  

Après cette folle soirée, le réveil est difficile pour tout le monde. Surtout pour Aurélie qui a bien du mal à émerger ! Après un rapide déjeuner, nous entamons la visite de Cuzco par la cathédrale. Des audioguides en français sont à disposition pour mieux découvrir les richesses de l’édifice. Deux églises jouxtent les côtés latéraux de l’imposant bâtiment religieux. Elles possèdent de nombreux autels baroques et rococo, décorés de nombreux miroirs. La « Croix de la Conquête » apportée par le conquistador Pizarro est également exposée. La cathédrale proprement dite date de la fin du 16ème S. Elle possède trois grandes nefs renfermant des centaines de toiles, notamment du célèbre peintre Marco Zapata. Nous découvrons entre autres l’image vénérée de la Vierge de la Linda, ainsi que le calvaire du Christ des Tremblements noirci par la fumée des bougies. Porté en procession, il aurait fait cesser le tremblement de terre de 1650. Le maître-autel possède également un splendide retable en argent. Un autre en bois, tout aussi remarquable, est situé juste derrière. De magnifiques stalles baroques, ainsi qu’une belle chaire, trônent au milieu de l’édifice religieux. Nous enchaînons rapidement avec l’église jésuite de la Compania, qui présente une jolie façade baroque. Pour ne pas concurrencer la cathédrale, l’édifice ne possède qu’une seule nef. Elle renferme également de splendides tableaux religieux et un gigantesque maître-autel finement décoré. Nous jetons ensuite un œil dans le cloître de l’université. Puis, nous retournons au restaurant populaire de la place San Francisco. Cette fois-ci, le repas n’est vraiment pas fameux ! Le service est d’ailleurs complètement dépassé par les évènements. Nous déambulons ensuite jusqu’au mercado San Pedro, pour déguster un succulent jus de fruit frais. Ce marché couvert propose une grande variété de produits alimentaires (pommes de terre déshydratée, œufs de poissons, algues…). Nous nous baladons ensuite dans les rues commerçantes de la ville pour rejoindre le musée de l’Art Religieux, situé de l‘autre côté de la place d‘Armes. Il est installé dans une magnifique demeure coloniale, renfermant un joli petit cloître. Il présente de nombreuses œuvres religieuses de l’école de peinture de Cuzco, mélangeant les styles colonial et inca. Les plafonds de la chapelle et le maître-autel doré à l’or fin sont également de toute beauté. Nous passons ainsi un long moment dans les différentes salles, avec l’audioguide sur les oreilles. A l’extérieur, la célèbre pierre à douze angles est visible dans les soubassements du bâtiment. Comme il commence à être tard, nous accélérons la visite jusque l’église du quartier de San Blas. Ciselée dans du bois de cèdre, la chaire baroque est un véritable bijou. Elle est démesurément décorée de personnages religieux, d’anges, de colonnes et même de fruits. L’édifice renferme également un merveilleux retable, ainsi qu’un christ noir avec les bras et les jambes amovibles. La nuit commençant à tomber, nous rentrons tout doucement à l’auberge. Quelques heures plus tard, nous revenons dans le quartier pour souper dans un restaurant. Malgré l’heure tardive, le propriétaire accepte de nous servir. Comme de coutume, Ben et moi repartons au bar Inkaria pour fêter notre dernière soirée ensemble. 

3.-Le-musee-de-l-Art-Religieux.jpg  4. La célèbre pierre à douze angles  

 

Mardi 9 août : Visite de Cuzco

 

1. La forteresse inca de Sacsayhuaman  2. Le monastère de Santo Domingo  

Après une dizaine de jours passés ensemble, c’est déjà l’heure des séparations ! En effet, Aurélie et Ben reprennent l’avion ce matin pour Lima. En tout cas, cela m’a fait vraiment plaisir de les retrouver ! Je pars ainsi seul jusqu’au site de Sacsayhuaman, perché sur une colline dominant Cuzco. L’ancienne forteresse inca a été en partie détruite par les espagnols. Toutefois, les blocs les plus lourds sont restés en place, parfaitement ajustés les uns aux autres. Depuis le promontoire, la vue sur la ville est également époustouflante. Je redescends par le même sentier rocailleux pour joindre le centre historique. Je visite alors le monastère de Santo Domingo, construit par les espagnols sur le temple de Qorikancha. Les bâtisses incas furent conservées pour bâtir l’église et le cloître des Dominicains. Par conséquent, le lieu forme un mélange assez curieux. Une galerie, installée dans une aile du monastère, expose quelques toiles religieuses de l’époque coloniale. Comme pour tous les édifices religieux de Cuzco, les photos sont interdites à l’intérieur. L’ensemble est également entouré de jolis jardins fleuris. Par contre, l’intérieur de l’église reste assez sobre. Je me rends ensuite au couvent de Santa Catalina, construit également sur un site inca. Une partie de l’édifice religieux a été transformée en musée. Plusieurs objets liturgiques et toiles religieuses sont présentés dans les différentes salles, notamment une surprenante crèche pliante. Les murs de la sacristie sont décorés par de belles fresques, représentant grosso modo le Bien et le Mal. A l’étage, la vie monastique des dominicaines a été reconstituée. Puis, je mange rapidement dans un bouiboui à proximité, avant de poursuivre la visite de la ville. Le monastère de la Merced possède un superbe cloître sur deux étages. Les plafonds en bois sont magnifiquement sculptés, et les murs sont décorés de grandes fresques datant de l’époque coloniale. Le père Francisco Salamanca vécut cloîtré dans une petite cellule, durant onze longues années. Les murs sont remplis de surprenantes fresques, représentant d’un côté le Paradis, de l’autre l’Enfer. Un petit musée expose également quelques belles pièces en or et en argent, notamment un splendide ostensoir serti de pierres précieuses. D’autres toiles religieuses sont exposées dans une galerie à l’étage. Malheureusement, l’église et une partie du monastère sont fermées au public. Je déambule ensuite dans le quartier bohème de San Blas, pour tirer quelques clichés. Les ruelles escarpées sont bordées de maisons toutes blanches, avec des balcons colorés. Le temps se dégrade d’un coup. Un vent glacial se met soudainement à souffler. Je rejoins alors l’église San Cristobal, à proximité de l’auberge municipale. Une fête populaire religieuse s’y déroule depuis quelques jours. Un orchestre joue régulièrement de la musique latino-américaine, entrecoupée par le claquement des nombreux pétards. Des stands sous tente proposent toute sorte de nourriture et de boissons. C’est ainsi que je goûte au fameux cuy grillé, c’est-à-dire du cochon d’Inde. La viande est assortie d’une sorte de pain de mais, d’algues, d’œufs de poisson, de fromage de brebis et de bien d’autres choses non identifiées. Le goût est assez fort, mais pas mauvais. La bière coule également à flots. Un ivrogne complètement saoul me cherche même la cogne ! Aussi, de nombreux clients sans complexe n’hésitent pas à uriner dans les escaliers. Bonjour les odeurs ! Quelques heures plus tard, je retourne à proximité du centre historique pour souper dans un restaurant végétarien. Je passe le reste de la soirée dans ma chambre, pour commencer à mettre à jour le blog. En effet, un retard considérable s’est accumulé durant ces derniers jours !

 

3. Le monastère de la Merced  4. Cochons d'Inde grillé  

 

Mercredi 10 août : Cuzco

 

1. La fontaine sur la place d'Armes de Cuzco

Encore une journée peu passionnante ! Je passe toute la matinée à taper le récit de ces dernières journées. Vers l’heure du midi, je pars en ville pour dîner dans une petite gargote à l’arrière d’une cour délabrée. Le cordial propriétaire s’intéresse énormément à mon aventure. Cela fait toujours plaisir ! Je fais ensuite quelques boutiques pour l’achat de nouvelles chaussures. Les anciennes ont rendu l’âme après avoir supporté les chaleurs des déserts du Moyen-Orient, l’humidité de l’Asie, et les rudes hivers d’Europe centrale et d’Australie. Puis, je retourne au boulot durant quelques heures. Je soupe ensuite dans un minuscule boui-boui, un peu à l’écart du centre. Le repas ne coûte même pas un euro ! Comme toujours, je finis la soirée à l’Inkaria. Fréquenté uniquement par des Péruviens, cet endroit me plaît vraiment ! La décoration désordonnée lui donne un côté chaleureux. Des paquets de cigarettes et des cartons de bière sont accrochés au plafond. Tout comme un grand drap représentant les positions du kamasutra ! De même, les murs sont tapissés de vieilles affiches usées, et de grosses bombonnes d’alcool trainent un peu partout. Je bois encore quelques verres avec Lucho, le sympathique patron, et ses acolytes. Ses bouteilles aux vingt plantes se vendent toujours à grande vitesse. C’est vraiment incroyable !

 

 2. Les maisons aux balcons colorés de la place d'Armes

 

 

Jeudi 11 août : Cuzco

 

  1.-Le-monastere-de-San-Francisco-copie-1.jpg

Au vu du travail encore à accomplir pour rattraper mon retard, je m’accorde une journée supplémentaire à Cuzco. Je passe à nouveau toute la matinée à taper le texte pour le blog, et faire quelques recherches sur internet. A l’heure du midi, je pars en ville pour casser la graine dans la même gargote de la veille. Le sympathique propriétaire se rappelle même de mon prénom ! Pour me changer les idées, je décide de visiter l’église et le monastère de San Francisco. Le cloitre renaissance sur deux étages est le plus vieux de Cuzco. Seulement, je suis obligé de suivre un guide peu accueillant pour visiter le bâtiment. Les explications étant en espagnol, je passe par l’intermédiaire d’un jeune allemand pour avoir la traduction en anglais. Les plafonds du cloître sont magnifiquement peints. L’édifice renferme quelques belles peintures religieuses, notamment une immense toile représentant l’arbre généalogique de l’ordre franciscain. L’acoustique est également étonnante. Le guide me place face à un mur, alors que mon interprète se situe à l’opposé. Les paroles chuchotées sont parfaitement audibles. Elles se transmettent par l’intermédiaire des voûtes de la pièce. A la fin de la visite, le désagréable guide a le culot de réclamer une donation. Je retourne ensuite à l’auberge pour finir mon déplaisant travail. En début de soirée, je rencontre Benoît, un jeune auvergnat voyageur. Nous soupons ensemble dans un petit restaurant à proximité de la place d’Armes. Je commence à avoir des fourmis dans les jambes, il faut absolument que je prenne la route demain.

 

  2. La place d'Armes illuminée

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31 décembre 2014 3 31 /12 /décembre /2014 10:00

Vendredi 12 août 2011 : Cuzco - Andahuaylillas (44,6 km)

 

1.-Le-cycliste-sur-la-place-de-Cuzco.jpg

 

Comme après chaque interruption, je quitte l’auberge plus tard que mes prévisions. Je rejoins la place d’Armes en poussant le vélo, pour ne pas chuter dans les raides ruelles pavées de gros galets. Plus d’une dizaine de personnes viennent à ma rencontre, intriguées par mon aventure cycliste. Plusieurs me tirent même en photo, ou pausent avec moi devant la fontaine. Comme l’heure a bien tourné, je préfère dîner à mon habituel boui-boui, avant de prendre le départ. La route traverse les quartiers périphériques de Cuzco, avant de s’enfoncer dans une large vallée. Elle reste relativement plate tout le long du parcours, à plus de 3000 mètres d'altitude. Plus loin, le site inca de Tipon est malheureusement un peu trop à l’écart de mon itinéraire. De toute façon, je ne peux tout visiter ! Par contre, j’aperçois au loin les vastes ruines de Pikillaqta peu impressionnantes. Aussi, les maisons des villages traversés sont toutes construites avec des briques de terre de couleur ocre. Le temps se dégrade lorsque j’atteins Andahuaylillas en milieu d’après-midi. Je préfère alors m’installer à l’hôtel El Nogal, afin de visiter l’église San Pedro Apostol tout à mon aise. L’intérieur de l’édifice religieux est décoré à profusion. Le plafond en bois peint est de toute beauté. Les fresques des murs de la nef se mêlent aux larges toiles représentant les vies de St Pierre et St Paul. De somptueux autels dorés encadrent également le chœur. Malheureusement, ce dernier est en pleine rénovation. En effet, le maître-autel baroque revêtu de miroirs est en partie masqué par un échafaudage. De même, la voûte est cachée par la plateforme en bois. La façade extérieure possède aussi de belles fresques protégées par un vieux toit en bois, mais elles sont également dissimulées par les travaux. Puis, je jette un coup d’œil au petit musée proche de l’église. Il présente notamment des crânes humains incas étrangement déformés. Le reste s’avère peu intéressant ! Je me balade ensuite dans les ruelles pavées, autour de la mignonne place bordée de somptueux arbres. De nombreuses maisons aux tuiles rouges sont flanquées de balcons en bois. Le soir venu, le village semble complètement endormi. Je dois être l’unique gringo à passer la nuit ici ! Je soupe copieusement dans une gargote déserte, tout à coté du musée. Puis, je rentre directement à l’hôtel pour me reposer. En effet, une longue étape est prévue demain, afin d’avancer sur mon itinéraire !

 

2.-La-fontaine-devant-l-eglise-d-Andahuaylillas.jpg 3.-Squelette-inca-au-crane-deforme.jpg

 

 

Samedi 13 août : Andahuaylillas - Sicuani (105,5 km)

 

1.-La-riviere-Vilcanota.jpg

 

Au petit matin, la place du village est déjà envahie par les cars de touristes. Moi qui voulais faire quelques clichés, c’est plutôt raté ! Je poursuis alors mon bonhomme de chemin dans la vallée de la rivière Vilcanota. Sans être impressionnant, le paysage est tout de même bien joli sous le soleil matinal. Les versants montagneux sont par endroits boisés, ou parsemés de cultures en terrasses. La route oscille légèrement en suivant plus ou moins le cours d’eau. Elle est par contre assez fréquentée par les véhicules. Certains cars, reliant Cuzco à Puno, me rasent de très près à grande vitesse. De vrais cinglés ! Après une quarantaine de kilomètres, je m’arrête dans la petite ville de Cuispata pour manger dans une petite gargote. Elle est tenue par une vieille dame, tout étonnée de voir un gringo s’attabler dans son établissement. J’effectue ensuite quelques réparations sur Tornado. En effet, la roue arrière mérite un léger dévoilage. De même, la cage du pédalier commence à avoir un sacré jeu. Sans vraiment s’en apercevoir, la route continue de grimper tout doucement. Les pentes sont relativement faibles, et un léger vent me pousse dans le dos. J’atteins ainsi les ruines incas de Raqchi en fin d‘après-midi. A cause de l’heure avancée, je pénètre dans le site sans payer l’entrée. Seul un pan de mur de l’ancien temple, d’une hauteur de 12 mètres, est encore debout. Derrière, quelques entrepôts et des habitations ont été rénovés récemment. Cependant, ma visite est très rapide, car les gardiens sont sur le point de fermer l‘accès. A proximité, une jolie église domine une petite place occupée par plusieurs dames en costume traditionnel. Elles vendent principalement des bibelots bon marché pour les touristes de passage. Un aigle a également élu domicile dans le village. Le rapace étant peu farouche, je soupçonne qu’il ne soit apprivoisé ! Malgré le coucher du soleil imminent, je décide de faire la dernière quinzaine de kilomètres jusque Sicuani. Après quelques recherches infructueuses, je m’installe quand même dans une chambre assez délabrée, située dans l’arrière-cour de l’hôtel Senor de Huacan. Aussi, la ville propose un grand choix de restauration. Par contre, il est bien plus difficile de trouver un bar servant de la cerveza. Comme souvent au Pérou, la musique d’une fête populaire retentit jusque tard dans la nuit.

 

 2.-Les-ruines-incas-de-Raqchi.jpg 3.-Vendeuse-a-Raqchi.jpg

 

 

Dimanche 14 août : Sicuani - Ayaviri (115,4 km)

 

1.-Le-cycliste-au-col-de-la-Raya.jpg

 

La ville de Sicuani étant peu intéressante, je démarre l’étape rapidement. La route poursuit son ascension, avec des pentes un peu plus sévères que la veille. Je traverse des villages étalés, aux maisons construites de briques de terre. Après Aguas Calientes (le nom ne m’évoque pas que de bons souvenirs !), j’atteins le sommet du col de La Raya, culminant à 4335 mètres. J’ai ainsi grimpé presque 800 mètres depuis ce matin ! Les cimes enneigées des montagnes alentour resplendissent sous le soleil. Malheureusement, des étalages d’artisanat local brisent la sérénité des lieux. En effet, de nombreux cars s’y arrêtent déversant leur flot de touristes. Du coup, je ne m’y attarde pas ! J’entame alors rapidement la courte descente sur l‘Altiplano, à presque 4000 mètres d'altitude. La distance pour rejoindre Santa rosa me paraît cependant bien longue. Cette foutue carte routière indique une nouvelle fois des mauvais kilométrages ! Je rejoins ainsi le gros village à une heure bien tardive. Affamé, je me précipite immédiatement dans un boui-boui pour manger un morceau. Les clients locaux me dévisagent comme une bête curieuse. De même, je fais fureur dans un petit bar. D'ailleurs, une famille péruvienne tient absolument à me tirer en photo en leur compagnie. Ce qui ne manque pas d’amuser les femmes ! Il me reste encore une petite quarantaine de kilomètres en légère descente pour atteindre Ayaviri. Cependant, le vent qui s’est levé me ralentit considérablement. Le paysage de hautes collines désertiques de l’Altiplano est magnifique. Aussi, quelques rapaces semblent m’accompagner durant quelques kilomètres. Finalement, j’arrive à destination juste avant la tombée de la nuit. Je m’installe dans le modeste hôtel Grau, avant de me balader dans les ruelles de la petite ville. La place d’Armes est dominée par une imposante église assez jolie. Tout autour, de nombreux stands rudimentaires permettent de se restaurer. Toutefois, je préfère manger dans une minuscule gargote tenue par une charmante fille. Le repas ne me coute même pas un euro !

 

2.-Cabane-de-berger-sur-l-Altiplano.jpg 3.-La-riviere-Pukara-sur-l-Altiplano.jpg

 

 

Lundi 15 août : Ayaviri - Puno (145,3 km)

 

1.-L-eglise-d-Ayaviri.jpg 2.-File-d-attente-a-Ayaviri.jpg

 

Pas besoin de réveil, ça braille au rez-de-chaussée avec la radio à fond ! Déjà que la nuit fut fortement agitée, autant dire que je n’ai pas mon compte de sommeil ! Autour de la place, des stands improvisés proposent des jus chauds à base de racines (maca...), de céréales (cebada, quinoa, lizana...), de plantes ou de fruits… Rien de tel pour se réchauffer en attendant que la température ambiante augmente ! En effet, il fait vraiment frisquet ce matin ! D’ailleurs, tout le monde semble s’amuser de mes gambettes à l’air libre. La route se poursuit dans les collines désertiques de l’Altiplano. Je progresse tellement rapidement, qu’atteindre Puno devient envisageable ! Au fil des heures, les rayons du soleil deviennent de plus en plus brûlants. L’écart de température entre la nuit et le jour est impressionnant ! Après le village de Pukara, la route se dégrade d’un coup. Il me faut alors zigzaguer entre les trous et les bosses de la chaussée détériorée. Pédaler dans ces conditions devient vite lassant ! Du coup, ma vitesse diminue énormément, anéantissant mes projets. Plusieurs dizaines de kilomètres plus loin, des travaux de rénovation de la chaussée me redonnent espoir. En effet après Calapuja, la route est fraîchement revêtue de bitume. Je peux ainsi filer à grande vitesse jusque Juliaca. Par contre, le paysage devient beaucoup moins spectaculaire. Avec l’embranchement pour Arequipa, la circulation s’intensifie également. Je mange dans une gargote à l’entrée de la ville, occupée par de nombreux ouvriers péruviens. Il est à peine 13 h, et j’ai déjà parcouru presque 100 km ! Tout à coup, le vent se lève. Le beau ciel bleu ne tarde pas à se couvrir de nuages gris. Les bourrasques soulèvent également la poussière. La ville étalée de Juliaca est peu intéressante. J’emprunte ainsi des rues complètement embouteillées dans un concert de klaxons. A cause de la circulation et des conditions climatiques, la route pour Puno devient vite désagréable. Elle finit par grimper les hautes collines qui ceinturent le lac Titicaca. C‘est le plus haut navigable au monde ! Au sommet, la vue sur Puno au bord de la grande étendue d’eau est admirable. Je plonge jusqu’au centre de la ville, afin de trouver l’hôtel Duque Inn recommandé par mon ami Ben. Par contre, il a oublié de préciser que les pentes pour y accéder sont terribles. Je dois même pousser le vélo sur la dernière portion. Dur, dur ! La fille à l’accueil me propose une chambre qui ressemble plus à un placard aménagé. Le tarif est anormalement identique par rapport à une ordinaire, mais comme je ne tiens pas à faire la tournée des hôtels ! Je redescends ensuite souper dans une gargote très populaire, aux alentours du mercado. Puis, j’arpente les rues de la ville, afin de trouver un troquet peu fréquenté par les touristes. L’ambiance est forcément plus pittoresque, et le prix des boissons mousseuses beaucoup moins élevé.

 

3.-La-riviere-Pukara-avant-le-village-de-Calapuja.jpg 4.-Puno-et-le-lac-Titicaca.jpg

 

 

Mardi 16 août : Excursion sur les îles Uros et Taquile

 

1.-Peruvienne-des-iles-Uros-surveillant-les-enfants.jpg 2.-Cabane-en-roseaux-sur-les-iles-flottantes.jpg

 

A 6 h 30 du matin, je me jette précipitamment dans un minibus pour le port de Puno. Je me retrouve notamment avec un groupe de quatre Toulousains bien sympathiques. Nous embarquons rapidement sur une petite navette pour une traversée d’une demi-heure, en direction des îles flottantes Uros sur le lac Titicaca. Plusieurs couches de roseaux empilées forment un radeau d’une épaisseur de 3 mètres, amarré à de longs poteaux. Les cabanes et les meubles sont également construits artisanalement avec le précieux végétal. Plus de 2500 personnes vivent sur ces 23 îles artificielles. Notre guide semble réciter sa leçon sur le mode de vie des habitants. On se croirait presque à l’école ! L’endroit reste quand même intéressant à découvrir, même si tout semble factice. Une embarcation contrefaite à têtes de dragon balade même la majorité de notre groupe jusqu’à une autre île. Moyennant payant bien entendu ! Les frenchies préfèrent cependant ne pas participer à l’attraction guignolesque. Les malheureux résidants sont également mis à contribution pour divertir les touristes de passage. Tout cela tourne à la dérision, et me met mal à l’aise ! De plus, ça sent l‘exploitation de la population locale à plein nez par les agences touristiques ! Nous reprenons ensuite notre lente embarcation pour Taquile. Après plus de deux heures de traversée, nous accostons enfin sur l’île située au large du lac. Les habitants nous accueillent de nouveau en costume traditionnel. Le sentier qui grimpe depuis le débarcadère est envahi par un flot de touristes qui se suivent en file indienne. A cause de l’altitude à presque 4000 mètres, certains ont bien du mal à monter les quelques marches. Je trouve toutefois le paysage assez banal ! Les cultures s’étagent en terrasses délimitées par de petits murets en pierres, sur le versant aride de la colline. Aussi, la tôle ondulée a malheureusement remplacé le chaume des toitures. La longue ascension prédite par notre guide s’avère être une courte montée jusqu’à une maisonnette. Quelques locaux nous attendent pour une démonstration de danse traditionnelle. Sans autre alternative, je me sens obligé de manger avec tout le groupe le repas onéreux proposé. Un vrai attrape-touristes ! Nous grimpons ensuite les dernières marches jusqu’à la banale place du village. Après un peu moins de trois heures sur l’île, nous rejoignons tout doucement le bateau pour rentrer sur Puno. Autant dire que je suis assez déçu par l’excursion ! Le retour d’une durée de trois heures semble bien long. Mes compagnons toulousains Elodie, Laura, Ludovic et Vincent me proposent de souper dans un restaurant du centre-ville. Je passe ainsi une agréable soirée en leur compagnie. Ils attrapent demain le bus pour Cuzco, tandis que je prends la direction opposée vers la Bolivie.

 

 3.-Vieil-homme-sur-l-ile-de-Taquile.jpg 4.-Avec-le-petit-groupe-de-toulousains-sur-l-ile-de-Taquil.jpg 5.-Le-lac-Titicaca-depuis-l-ile-de-Taquile.jpg

 

 

Mercredi 17 août : Puno - Juli (90,2 km)

 

1.-Botte-de-roseaux-en-bordure-du-lac-Titicaca.jpg 2.-L-eglise-de-Chucuito.jpg

 

Ma nuit fut courte et saccadée. Je me lève alors beaucoup plus tôt que prévu ! Du coup, je peux saluer une dernière fois mes compagnons toulousains avant leur départ. Je discute aussi longuement avec une famille nordiste de Marcq-en-Baroeul, fascinée par mon aventure cycliste. Décidemment, l’hôtel est truffé de Français ! Avant de démarrer l’étape, je jette un coup d’œil rapide à la cathédrale de Puno. Elle possède une splendide façade mêlant les styles renaissance et baroque, avec quelques détails indiens incorporés. Puis, la route longe un bon moment le mythique lac Titicaca. Après une bonne quinzaine de kilomètres, je pénètre dans le village de pêcheurs de Chucuito. Un étrange cadran solaire du 19èmeS trône au milieu de la place. Cette dernière est dominée par une imposante église, resplendissante sous le soleil. Par contre, l’intérieur est relativement sobre et délabré. Après la tumultueuse ville de Puno, la sérénité du village est vraiment plaisante ! Il offre également une magnifique vue sur le lac. Dans un stand de rue, je goûte à la fameuse truite de la région. Un vrai délice ! A la sortie, deux gigantesques têtes d’incas sculptées dans la roche semblent veiller sur le petit bourg. La route s‘enfonce ensuite dans les terres au pied des collines. Le coin devient alors un peu plus agricole. Quelques champs labourés s’étendent à proximité des villages composés de maisonnettes en briques de terre rouge. Les rochers alentour ont également parfois des formes bizarres. Au bord de la chaussée, quelques paysans ou pêcheurs fabriquent des cordages avec d’étranges machines manuelles. En fin d’après-midi, je croise un couple de cyclos suisses. Katja et Félix parcourent l’Amérique du Sud depuis six mois. Ils touchent quasiment à la fin de leur périple. Après une courte grimpette, le joli village de Juli se dresse au creux des collines. Je m’installe alors dans le rudimentaire hôtel San Bartolome, situé autour de la place d’Armes. Je bois ensuite quelques bières dans un troquet populaire. Les clients d’un certain âge sont tous vêtus de noir, et portent un large chapeau. L’agressivité verbale de certains complètement ivres finit par me faire déguerpir. Je mange ensuite dans une polleria (un boui-boui proposant du poulet rôti), avant de rentrer dans ma sinistre chambre. Demain, c’est normalement ma dernière journée au Pérou !

 

3.-Pas-de-pierres-sur-la-route--.jpg 4.-Barque-devant-les-maisons-en-briques-de-terre-a-El-Coll.jpg

 

 

Jeudi 18 août : Juli - Copacabana (Bolivie) (65,7 km)

 

1.-Le-village-de-Juli.jpg

 

Dans la matinée, je me balade à pied dans les ruelles du village, à la découverte des différents édifices religieux. Il y a quelques années, le clocher de l’église de la Vierge de l’Assomption a été endommagé par la foudre. San Juan de Latran est une jolie bâtisse de couleur rouge, assez massive. Plus loin, la jésuite Santa Cruz est malheureusement en partie masquée par un échafaudage en bois. Sur la place d’Armes, l'église San Pedro possède une belle façade baroque sculptée. A cette heure matinale, c‘est la seule qui a ses portes ouvertes ! L’intérieur est d’ailleurs ornementé de magnifiques retables. Aussi, il est impossible de poster mes dernières cartes postales. C’est quand même incroyable ! De plus, mes timbres ne seront plus valables en Bolivie. Encore une perte d’argent inutile ! Puis, je pousse longuement le vélo dans une ruelle escarpée pour rejoindre la route principale. Toutefois, cette dernière redescend rapidement en bordure du lac Titicaca. Vraiment énervant ! Le soleil est particulièrement brûlant aujourd’hui ! Mes cuisses ne tardent pas à attraper de vilains coups de soleil ! Après une trentaine de kilomètres au pied des collines désertiques, j’atteins la bifurcation pour Copacabana au village de Chacachaca. Un énorme marché coloré est installé tout autour de la place. Comme souvent, les femmes en costume traditionnel refusent de se faire photographier. Je profite d’un stand de restauration pour regoûter à la truite locale. Puis, je poursuis mon parcours avec le vent de face. A peine redémarré, je crève de la roue arrière. Vraiment pas de chance ! Je répare précipitamment, car il me faut atteindre le poste-frontière avant sa fermeture. En chemin, plusieurs portions non goudronnées laissent apparaître une piste caillouteuse. J’effectue ainsi les derniers kilomètres péruviens très rapidement. La frontière entre le Pérou et la Bolivie est délimitée par une sorte d’arche. Par chance, je trouve une boite aux lettres pour mes cartes. Les formalités administratives se font très rapidement. Les policiers sont impressionnés par Tornado chargé comme un baudet. Désormais, il ne me reste que 8 km de petites montées et descentes pour atteindre Copacabana. Aussi, il y a une heure de décalage positive entre les deux pays. Le petit port est archi-touristique. Restaurants et hôtels se succèdent le long de la rue principale. Je m’installe donc à l’hôtel Sonia, situé derrière la cathédrale. Depuis la terrasse sur le toit, j’assiste au magnifique coucher de soleil sur le lac Titicaca. Je rencontre ainsi Jean-Paul, un voyageur français quinquagénaire expatrié depuis une quinzaine d’années. Nous partons souper ensemble dans une petite gargote autour du marché. Dans la rue, une bande d'enfants se divertissent en regardant un dessin animé de Walt Disney, diffusé sur le petit écran de télévision d'un commerce. Comme le repas était peu consistant, je me remplis la panse dans un autre restaurant populaire. Enfin repu, je peux rentrer à l’hôtel pour me reposer !

 

2.-Le-cycliste-a-la-frontiere-bolivienne.jpg 3.-Coucher-de-soleil-sur-le-lac-Titicaca-a-Copacabana.jpg

 

 

Vendredi 19 août : Excursion sur l’Isla del Sol

 

1.-Cactus-sur-l-Isla-del-Sol.jpg

 

La journée est consacrée à la découverte de l’Isla del Sol (l’île du Soleil). Elle se situe dans le prolongement de la péninsule de Copacabana, séparée par un étroit détroit. Vers 8 h 30, je m’installe sur le toit d’un petit bateau en direction du Nord de l’île. Malgré le soleil matinal, la traversée de deux heures est quand même bien frisquette ! Aussitôt débarqué à Cha‘llapampa, je grimpe le chemin pédestre jusqu’aux vestiges incas de Chinkana. Forcément, l’accès au site est payant ! Cependant, la vue depuis les hauteurs vaut son pesant d’or ! Les collines désertiques de l’île dominent les petites criques enserrant les eaux bleu obscur du lac. Au sommet, les ruines en pierres forment un curieux labyrinthe de couloirs et de terrasses. Elles furent autrefois un lieu sacré pour les Incas. A l’horizon, on devine les îles Taquile et Amantani au Pérou. Sur l’autre rive, les pics enneigés de la cordillère Royale s’étendent au loin. J’emprunte ensuite le sentier des Cimes, qui (comme son nom l’indique !) oscille facilement en ligne de crête. Tout en marchant, je grignote quelques morceaux de pain en guise de dîner. De nouveau, il faut s’acquitter d’un droit de passage. Cela devient pénible ! Fort heureusement, le paysage reste toujours aussi spectaculaire. Après plus de deux grosses heures de marche, j’atteins le village de Yumani. Et encore un péage ! Ils se foutent de nous, ce n’est pas possible ! Puis, de nombreux escaliers dévalent la pente jusqu’au port Sud de l’île. Vers 15 h 30, j’attrape le bateau pour le retour. Cette fois, la traversée dure un peu moins d’une heure et demie. Il faut reconnaître que l’excursion est largement plus plaisante que celle d’Uros et Taquile, il y a quelques jours ! Arrivé à bon port, je flâne un moment dans les ruelles de Copacabana. Je visite également la cathédrale baroque, qui renferme une vierge vénérée par les habitants. Sa façade extérieure blanche est décorée de nombreuses faïences. Sur le parvis, plusieurs commerçants vendent toutes sortes d’articles religieux. Juste derrière l‘édifice, une sombre salle renferme la chapelle d’une Sainte. Tous les murs sont noircis par les cierges. De nombreux dessins à la cire représentent les désirs des fidèles. Sur le chemin du retour vers l’hôtel, je retrouve Jean-Paul. Du coup, nous repartons au même restaurant populaire de la veille. L’endroit est toujours aussi désert, les touristes préférant dépenser leurs bolivianos dans l’onéreux quartier proche du port.

 

2.-Les-ruines-de-Chinkana-sur-l-ile.jpg 3.-La-cordillere-Royale-depuis-l-ile.jpg

 

 

Samedi 20 août : Copacabana - Huarina (90,1 km)

 

1.-La-cathedrale-de-Copacabana.jpg 

Comme j’ai classé une partie de mes photos jusque tard dans la nuit, j’ai très peu dormi ! Un nombre impressionnant de voitures sont garées en double file devant la cathédrale. Joliment décorées de fleurs et de guirlandes colorées, elles attendent d‘être baptisées par le prêtre. Les conducteurs viennent de tout le pays, et même du Pérou pour le cérémonial. La route grimpe facilement de 400 mètres sur une bonne dizaine de kilomètres, dans les hautes collines désertiques de la péninsule de Copacabana. Elle oscille un moment sur les sommets, avant de plonger vers Tichina sur la rive opposée. Malheureusement, le ciel couvert de nuages brumeux rend le paysage bien sombre. La petite ville est séparée en deux par le détroit. De vieux bacs en bois permettent alors de rejoindre l’autre rive sur la péninsule d’Huata. Malgré leur aspect fragile, ils transportent même les camions et les autocars. Mon embarcation fait d'ailleurs un bruit de craquement peu rassurant, en se déformant avec les flots du lac. Je dîne ensuite dans un rudimentaire restaurant, à proximité du petit port. Puis, je regrimpe légèrement à flanc de collines, avant de rejoindre la route qui borde le lac Titicaca. Elle reste relativement plate, traversant de nombreux villages étalés. La plupart des maisons, construites avec de grosses briques rouges, restent inachevées. Tout cela donne un côté sinistre au lieu ! Je me désaltère ensuite dans un troquet d‘Huatajata, afin de me renseigner sur les hôtels sur mon parcours. Le sympathique vieil homme m’en indique un à une douzaine de kilomètres. J’atteins alors le village d’Huarina. Les habitants me font tourner chèvre ! Les uns me montrent une direction, tandis que les autres m’indiquent l’opposé ! Bref, personne n’en sait rien ! Du coup, je rebrousse chemin sur quelques kilomètres, pour tenter ma chance au somptueux hôtel Titikaka près du grand lac. Comme je m’y attendais, le tarif est bien trop onéreux pour ma bourse. La nuit commençant à tomber, je plante la tente derrière quelques arbustes, juste à côté du bâtiment. Dans la soirée, j’ai droit à un long concert d’aboiements. C’est incroyable, le coin doit être peuplé par des centaines de chiens !

 

2.-Le-bapteme-des-voitures-devant-la-cathedrale.jpg 3.-Tornado-sur-le-bac-a-Tichina.jpg

 

 

Dimanche 21 août : Huarina - La Paz (80 km)

 1.-Premier-bivouac-en-Bolivie.jpg

 

Cela peut paraître étrange, mais je dors beaucoup mieux dans ma tente ! Je décampe lorsque le soleil commence à pointer son nez. Après le village d’Huarina, je quitte la rive Est du lac Titicaca pour prendre la route en direction de La Paz. Le trafic routier augmente alors considérablement. De nombreux véhicules crachent d’épaisses fumées noires polluantes. Déjà qu’il n’est pas facile de respirer avec le manque d’oxygène à cette altitude ! Des pierres jalonnent encore la chaussée, témoins des barrages routiers des récentes grèves. A quelques jours près, il aurait été impossible de passer ! Ces soulèvements populaires contre les mesures gouvernementales sont coutumiers en Bolivie ! Le paysage est également assez rébarbatif. Les collines désertiques de l’Altiplano s’étendent à perte de vue au Sud ; tandis qu’au Nord, elles sont dominées par les somptueux pics enneigés de la cordillère Royale. La plupart des villages traversés ne sont que des enchevêtrements de bâtiments délabrés et de maisons inachevées. La route restant majoritairement plate, je progresse très rapidement. A l’heure du midi, je dîne expressément dans une petite gargote de San Roque. Après une vingtaine de kilomètres, j‘atteins le miséreux quartier périphérique d‘El Alto. Les rues déglinguées et sales sont complètement embouteillées par les minibus. La route descend ensuite en lacets jusqu’au centre de la capitale. La vue est vraiment sensationnelle. La Paz est surplombée par de hautes montagnes, certaines culminant à plus de 6000 mètres comme l’Illimani. Les quartiers les plus pauvres s’accrochent aux versants des collines, alors que les plus riches se situent plus au fond du « cratère ». En effet, l’altitude plus basse offre un climat moins rude. Je me laisse alors griser par la vitesse jusque la place San Francisco, quelques 500 mètres plus bas. Toutefois, je suis arrêté un moment par un groupe costumé, défilant au son d’un orchestre. Il me faut ensuite pousser le vélo dans les rues escarpées de la ville, pour rejoindre l’hôtel Cactus. Seul un dortoir de deux personnes est encore disponible. Je partage alors la chambre avec une jeune Espagnole d’Andalousie. Puis, je déambule dans le quartier à la recherche d’un troquet populaire. L’ambiance est assez fêtarde. Les haut-parleurs hurlent de la musique latino-américaine, faisant danser et chanter les clients tous complètement ivres. Je soupe ensuite dans un stand de rue proposant des chicharron, en compagnie de quelques locaux importuns. Il s’agit de morceaux de porc frits dans l’huile, servis avec des patates douces. Je poursuis ma balade nocturne, pour me retrouver dans un autre bistrot tout aussi arrosé d’alcool. Malgré la surveillance policière, le quartier ne me semble pas très sûr !

 

2.-La-Paz-depuis-les-hauteurs.jpg 3.-Le-cycliste-devant-La-Paz.jpg

 

 

Lundi 22 août : Visite de La Paz

 

 1.-La-place-Murillo-de-La-Paz-avec-la-cathedrale.jpg 2.-Ruelle-dans-la-vieux-quartier-colonial.jpg

 

Ma matinée est consacrée à la découverte de La Paz. Il fait encore bien froid lorsque je rejoins la place Murillo. Elle est bordée par la cathédrale, le congrès et le palais présidentiel. Aussitôt, je me fais rabrouer par la sécurité, lorsque je tire quelques clichés des bâtiments officiels. La journée commence bien ! Je pénètre à l’intérieur du sobre édifice religieux, qui s’avère être dénué d’intérêt. Plusieurs jolis bâtiments sont également éparpillés tout autour du vieux quartier colonial. C’est le cas de l’église Santo Domingo, qui possède une belle façade mêlant les styles baroque et indien. La plupart des musées sont aussi implantés dans de belles demeures coloniales. Certaines possèdent de jolies cours entourées d’arcades. Je visite ensuite l’importante église San Francisco, qui renferme de nombreux retables dorés. La façade baroque extérieure est de toute beauté. La pierre est harmonieusement sculptée, incorporant de nombreux motifs indigènes, comme des fruits ou des fleurs. Il est à peine 11 hlorsque j’achève la visite. Il faut bien avouer que l’architecture de La Paz ne me laissera pas un souvenir impérissable. Au troquet de la veille, un sympathique homme m’offre spontanément une bière. Le prix du repas étant assez dérisoire, j’en profite pour dîner. Comme je suis toujours indécis sur la suite de mon itinéraire, j’essaye de glaner quelques infos sur internet. En effet, il ne me reste que deux mois pour rejoindre Buenos Aires. Il paraît alors bien difficile de traverser le désert salé d’Uyuni, et de visiter Potosi dans la foulée. Il va certainement falloir faire un choix ! Les rues autour de l‘hôtel sont assez animées. Les boutiques vendent de l’artisanat inca pour touristes, notamment des ponchos colorés. D’autres proposent des remèdes magiques pour soigner toutes sortes de maux, comme ces fœtus de lamas sensés porter bonheur lors de la construction d’un édifice. Plus loin, des étals de fruits et légumes débordent sur la chaussée. En début de soirée, je soupe dans un petit boui-boui du quartier populaire à proximité. Cependant, je ne tarde pas à rentrer à l’hôtel, car ces deux prochains jours risquent d’être bien physiques !

 

3.-L-eglise-San-Francisco.jpg 4.-Foetus-de-lamas-sur-les-marches.jpg

 

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30 décembre 2014 2 30 /12 /décembre /2014 14:33

Mardi 23 août 2011: 1erjour d’ascension du Huayna Potosi

 

1.-Cimetiere-sur-la-route-du-Huayna-Potosi.jpg

 

Pour pimenter encore un peu plus mon aventure, j’ai décidé de gravir le sommet de l’Huayna Potosi dans la cordillère Royale. La montagne s’élève à un peu plus de 6000 mètres, à une quarantaine de kilomètres au Nord de La Paz. Il y a deux jours, je l’apercevais depuis la rive septentrionale du lac Titicaca. N’ayant aucune pratique de la randonnée sur glacier (ni l’équipement d‘ailleurs !), je passe par l’intermédiaire de l’agence du docteur Berrios. Il est vrai que pour une première expérience, je ne fais pas dans la facilité ! L’ascension se réalise normalement pour les non-initiés en trois jours, accompagnés d’un guide. Toutefois, la première journée ne m’est pas vraiment utile, car elle est surtout consacrée à l’acclimatation à l’altitude. Vers 9 h, j’embarque dans un minibus avec un petit groupe, composé principalement de Français et d’Argentins. Il emprunte une piste poussiéreuse traversant des collines arides, pour rejoindre le camp de base situé à 4624 mètres au pied de l’Huayna Potosi. Finalement, seul un Grec prénommé Yourgos m’accompagne pour l’ascension sur deux jours. Après dîner, nous empruntons le chemin de randonnée, avec le lourd équipement spécifique dans nos sacs à dos. Nous longeons tout d’abord un barrage hydroélectrique, avant de grimper dans la pierraille et les blocs rocheux des moraines. Malheureusement, le paysage montagneux est rapidement masqué par l’arrivée de nuages. Nous enfilons ensuite les chaussures en plastique pour quelques centaines de mètres enneigées, jusqu’au camp d’altitude à environ 5300 mètres. Nous partageons alors le rudimentaire refuge avec trois Espagnols indépendants. Notre guide Juan Mario prépare rapidement à souper, car demain le réveil est prévu tôt dans la nuit ! Je n’ai pourtant pas du tout sommeil !

 2.-Le-barrage-au-pied-du-Huayna-Potosi.jpg

 

 

Mercredi 24 août: 2èmejour d’ascension du Huayna Potosi

 

1.-La-vue-depuis-le-sommet-du-Huayna-Potosi.jpg 2.-Mon-premier-6000.jpg

 

La nuit a été horrible. Nous sommes tous entassés sur des couchettes disposées sur deux niveaux. La raréfaction de l’oxygène à cette altitude se fait fortement ressentir. A chaque fois que je ferme les yeux, j’ai l’impression d’étouffer. De plus, la respiration bruyante de Yourgos à mes oreilles, ainsi que le remue-ménage des Espagnols, m’empêchent carrément de dormir. Je change même de place en pleine nuit pour tenter de trouver le sommeil. Du coup, je suis presque soulagé d’entendre le réveil sonner à 2 h 30 du mat. A cause du froid extérieur estimé à -12°C, je m’habille chaudement avec trois couches de vêtements. Nous partons ensuite en cordée, avec les crampons aux pieds, le piolet à la main et la lampe sur le front. Le paysage est totalement invisible dans la nuit noire. Le lever de la Lune n’y change pas grand-chose ! Je marche ainsi machinalement sur les traces de notre guide Juan Mario. Mon compagnon grec a beaucoup plus de mal à suivre. Il prétexte n’importe quoi pour ralentir le rythme. Déjà qu’il est parti sans lampe et sans protection solaire…! Pour quelqu’un qui a soi-disant de l’expérience, c’est assez étonnant ! De toute façon, nous ne pouvons traîner, car la fonte de la neige par le soleil peut occasionner des avalanches dans l’après-midi. Les premiers rayons illuminent merveilleusement le glacier, faisant apparaître de nombreuses crevasses profondes. Le souffle court, nous escaladons un dernier éperon au bord du précipice, jusqu’au sommet situé à 6088 mètres d’altitude. Il nous aura fallu moins de cinq heures pour atteindre notre but ! La vue porte sur les autres sommets enneigés de la cordillère Royale, ainsi que sur l’immense lac Titicaca de l‘autre côté. Il faut reconnaître que je ne suis pas peu fier d’avoir gravi mon premier 6000 ! Nous redescendons ensuite par le même chemin, découvrant les splendides paysages glacés, invisibles à l’aller. Yourgos traîne à nouveau la patte. Cela devient même pénible à la longue ! Il arrive au camp d’altitude complètement cramé. Malgré le manque de sommeil, je ne ressens pas trop la fatigue. Notre guide Juan Mario me félicite même de mon physique et de mon endurance. Après plus d’un an de vélo, c’est quand même beaucoup plus facile ! Nous empruntons ensuite le sentier de randonnée jusqu’au camp de base. J’apprends que beaucoup de personnes ont abandonné l’ascension, à cause du mal de l’altitude ou par manque de physique. C‘est d‘autant plus glorifiant pour nous ! Après le dîner, nous embarquons dans un minibus pour le retour sur La Paz. Dans un premier temps, je récupère Tornado et toutes mes affaires, laissés en consigne à l’hôtel Cactus. Je retrouve ma chambre commune, que je partage cette fois avec un Argentin. Puis, je pars fêter l’évènement dans mon troquet populaire habituel. Il y a toujours autant de clients soûls ! Je soupe à proximité dans le même boui-boui d‘il y a deux jours, avant de retourner rapidement à l‘hôtel. Mon compagnon de dortoir fait de bien étranges bruits de ronflements et de sifflements en dormant. Pire que dans « La Grande Vadrouille » ! C’est vraiment incroyable ! Encore une bien mauvaise nuit en perspective !

 

3.-Paysage-glace-dans-la-descente.jpg

 

 

Jeudi 25 août : La Paz - Patacamaya (104,7 km)

 

 Les-curieux-autour-de-Tornado.jpg

 

Quitter La Paz n’est pas chose facile ! En effet, la capitale bolivienne se situe dans une cuvette encaissée. Il faut alors regrimper les 500 mètres de dénivelé, pour rejoindre la ville tentaculaire d’El Alto à 4100 mètres d'altitude environ. Je tente vainement de retrouver l’itinéraire emprunté lors de la descente. Du coup, les ruelles sont tellement escarpées, qu’il me faut pousser péniblement le vélo. Rien de tel pour transpirer un peu en début de journée ! Puis, je retrouve enfin la route qui mène au plateau. El Alto est toujours aussi vivant. Les nombreux étalages et stands de restauration attirent une foule immense. Tout cela occasionne un gigantesque embouteillage dans une cacophonie de klaxons. Une fête populaire est de plus organisée. Des couples dansent sur des airs traditionnels joués par un orchestre. Des centaines de vieilles dames au chapeau bolivien se sont également regroupées pour observer le spectacle. Toutefois, mon arrivée ne passe pas inaperçu ! Tornado a presque autant de succès que les danseurs ! Je me retrouve vite encerclé par de nombreuses personnes curieuses. La route qui suit est assez ennuyeuse. Elle traverse un paysage monotone de collines arides. Seuls les sommets blancs des montagnes Mururata et Illimani sont encore visibles au loin. De plus, les nombreux travaux pour son élargissement rendent la chaussée poussiéreuse. Comme souvent, les ouvriers ne manquent pas de me saluer à mon passage. Le trafic est de surcroît infernal ! Les cars roulent comme des tarés, en me rasant de très près. Sur le seuil d’un commerce de Calamarca, je grignote expressément quelques morceaux de pain en guise de dîner. Accompagnés d’une bière du pays, bien entendu ! En effet, je tiens absolument à rejoindre Patacayama ce soir. Malheureusement, un vent du diable s’est tout à coup levé. Soufflant majoritairement de côté, je suis tantôt aspiré par le dépassement des véhicules, tantôt projeté sur le bas-côté lors d’un croisement. C’est dans ces conditions pénibles que j’atteins la petite ville en fin d’après-midi. Je m’installe alors à l’hôtel Santa Elenita, avant de souper copieusement dans une gargote populaire. Patacayama se situe à l’intersection de deux grands axes routiers. De nombreux taxis, minibus et cars attendent les éventuels passagers. Tout ce trafic provoque un vacarme très tard dans la nuit !

 

 

Vendredi 26 août : Patacayama - Oruro (132, 6 km)

 

Attention-traversee-de-lamas--.jpg

 

Une grosse étape m’attend ! Je quitte Patacayama relativement tôt, pour tenter de rejoindre Oruro avant la fin de journée. Comme hier, le paysage est assez rébarbatif. La route plate traverse le plateau de l’Altiplano entouré de collines désertiques. De plus, la circulation est toujours aussi démente. En chemin, je croise un petit groupe de quatre cyclos argentins qui se dirige vers Lima. Les renseignements qu’ils me fournissent sur le dénivelé ne me rassurent pas pour la suite du parcours ! Quelques kilomètres plus loin au péage du village de Konani, des policiers me demandent de me ranger sur le côté. En fait, le passage est interrompu le temps d’une course automobile. Du coup, j’en profite pour casser la graine dans un petit restaurant populaire. Aussi, je répare plus sérieusement mon garde-boue avant, cassé depuis plusieurs semaines. Les bolides traversent le village à grande vitesse, sous le regard curieux de la population locale. Vers 14 h 30, la course prend fin. Je peux alors reprendre la route. Cependant, il me reste encore plus de 80 km à parcourir pour atteindre mon but. Fort heureusement, un léger vent me porte. J’appuis alors un peu plus sur les pédales pour accélérer la cadence. Tel un robot, je pédale longuement le nez dans le guidon. En milieu d’après-midi, le ciel se couvre de nuages gris, masquant le soleil étincelant de la journée. A une dizaine de kilomètres d’Oruro, le vent tourne subitement de direction. Et forcément, je le prends en pleine face ! Comme souvent, des chiens errants tentent de me courser. L’un d’eux n’a pas le temps d’approcher, qu’il a déjà pris un coup de bambou sur la gueule. Il y en a vraiment partout, c’est incroyable ! La ville industrielle s’est développée autrefois grâce aux mines d'argent et d’étain. Avec ses logements abandonnés à la périphérie, et ses rues poussiéreuses, elle semble bien triste. Je me rends alors au terminal des bus, afin de trouver à loger. Les tarifs appliqués dans les nombreux établissements sont bizarrement plus élevés que dans le reste du pays. Je trouve finalement une minuscule chambre peu onéreuse à l’alojamiento El Anexo. Par contre, il ne faut être trop regardant sur la propreté. A mon avis, cela fait une paire de jours, voire de semaines qu’elle n’a pas été nettoyée ! Après avoir soupé copieusement en ville, je retourne sans traîner dans ma misérable cellule. Je m’écroule d’un coup, mort de fatigue !

 

 

Samedi 27 août : Oruro - Challapata (130,2 km)

 

1.-Paysage-desertique-apres-Oruro.jpg 2.-Vieille-dame-surveillant-ses-lamas.jpg

 

La journée commence bien mal ! En effet, une vieille dame vendant des jus sur la place me compte le double du prix par rapport à un local. Puis, je cherche longuement mon chemin pour quitter Oruro en direction du Sud. Une nouvelle fois, les habitants me font tourner en rond pendant une bonne heure. Le paysage ne varie pas beaucoup par rapport aux deux jours précédents. Toutefois, quelques bancs de sel commencent à apparaître sur le plateau. Les minuscules villages se composent de pauvres maisonnettes en terre, parfois recouvertes d’un toit de chaume. Les activités principales tournent autour de l’agriculture ou de l’élevage de moutons et de lamas. Par contre, certaines bourgades se sont développées grâce à l’extraction de minerais. Elles semblent d’ailleurs beaucoup plus animées. Le soleil brille de mille feux, mais un léger vent de côté ralentit ma cadence. La chance ne me sourit pas, car je crève de la roue arrière juste à l’entrée du village minier de Poopo. Je pousse alors le vélo longuement jusque la petite place centrale, avec l’espoir de trouver une gargote ouverte. Les informations glanées auprès des habitants s’avèrent encore contradictoires. Cela finit par être agaçant à la longue ! De plus, le seul restaurant du village a ses portes closes. Du coup, je répare ma chambre à air, avant de chercher à manger. Je me rabats donc sur des pains fourrés de riz et de crudités, vendus par une dame sur le trottoir. Il faut bien se remplir la panse ! L’heure est déjà bien avancée lorsque je reprends mon parcours. Il me reste encore plus de la moitié du trajet à faire ! J’avale ainsi les kilomètres durant de longues heures. La route longe à distance le lac Poopo qui s’étale à l’Ouest. Avec la réverbération de la lumière, les petites montagnes qui le bordent semblent flotter dans l'air. La nuit est quasiment tombée, lorsque j’aperçois Challapata complètement illuminée. Les lumières de la ville semblent vraiment proches. Pourtant, il me faut encore pédaler une bonne dizaine de kilomètres. Cela me paraît interminable ! J’ai l’impression qu’elles s’éloignent au fur et à mesure de mon avancée ! A proximité de la place centrale, je trouve une chambre à la residencial Diar. Je soupe ensuite dans la gargote attenante, à l’accueil très chaleureux. Le jeune tenancier me pose un tas de questions sur mon aventure autour du monde. Après cette longue journée, je ne fais pas long feu avant de m’endormir.

 3.-Riviere-avant-la-petite-ville-de-Challapata.jpg

 

 

Dimanche 28 août : Challapata - Environs de Cutimbora (78,3 km)

  1.-Le-village-de-Quillacas.jpg

 

Ma décision est prise, je vais tenter de traverser le désert salé d’Uyuni à vélo. Comme il n’existe aucune carte précise de la région, je passe un moment sur internet pour récolter quelques informations. Après une douche glacée (alors que le proprio m’avait certifié qu’elle serait chaude !), je m’élance vers 10 h 30. Une quinzaine de kilomètres plus loin, j’atteins le village d’Huari. Malgré qu'il soit encore bien tôt, je préfère manger à un stand de rue, de peur de ne rien trouver par la suite. En effet, la région désertique au Sud du lac Poopo est peu habitée. A la sortie du village, un jeune chien se jette carrément dans les roues de mon vélo. Miraculeusement, je ne chute pas, mais l’animal détale en criant de douleur. Puis, je quitte ensuite la grosse nationale pour une route secondaire qui file plein Sud-ouest. Juste avant Quillacas, la chaussée en pleine rénovation se dégrade fortement. De plus, je prends le vent en plein dans le pif ! Le village est de surcroît perché sur une petite colline. Dur, dur ! Le bitume cède ensuite la place à une piste caillouteuse. Le terrain aride alentour est parsemé d’une végétation rase et éparse. Aussi, la couleur du sol alterne par endroits merveilleusement le jaune, le blanc et le rouge. J’aperçois également au loin quelques magnifiques vigognes, qui détalent rapidement à ma vue. La piste devient de plus en plus défoncée. En plus de la « tôle ondulée » occasionnée par les 4 x4, de gros cailloux font tressauter Tornado. Et par de la même occasion le cycliste ! Cela secoue tellement, que je préfère emprunter la piste parallèle sablonneuse, quitte à pousser dans les parties où les roues s’enlisent. La fin de journée étant proche, je plante la tente derrière une petite colline à l’abri du vent. La température chute rapidement lorsque le soleil se couche à l’horizon. La nuit risque d’être glaciale !

 

2.-Terre-rouge--aride-apres-Quillacas.jpg 3.-Riviere-sur-terrain-desertique-apres-Quillacas.jpg

 

 

Lundi 29 août : Environs de Cutimbora - Salinas de Garci Mendoza (70,3 km)

 

1.-Le-bivouac-sur-le-terrain-desertique.jpg

 

La température à l’intérieur de la tente a dû avoisiner zéro degré durant la nuit, car l’eau dans la gourde est presque gelée. Par contre à presque 3800 mètres d'altitude, je n’ai nullement eu froid dans mon duvet douillet. Comme il fait encore bien frisquet ce matin, j’attends que le soleil réchauffe un peu l’atmosphère pour décamper. La piste est par endroits toujours aussi pourrie. J’alterne alors régulièrement avec la parallèle plus sablonneuse. De nombreux tas de gravillons sur le côté font penser qu’elle sera très prochainement goudronnée. J’évite tant bien que mal trous et bosses, le pire étant cette « tôle ondulée » formée de gros cailloux. Il est déjà midi, et je n’ai parcouru qu’une petite trentaine de kilomètres ! J'atteins ainsi un minuscule village qui s’avère être Tambo Tambillo. Mentionné sur ma carte, je m’attendais à une plus grosse bourgade. C’est incompréhensible, la carte n’indique même pas Huari et Quillacas qui sont beaucoup plus importants ! Pour l’heure, je dois absolument me ravitailler en nourriture. Malheureusement, le village semble complètement désert. Finalement, un brave homme m’emmène à un petit commerce sur la place. La vieille dame ouvre spécialement pour moi. Il n’y a toutefois pas grand-chose à se mettre sous la dent ! Je pique-nique quand même à l’ombre du petit kiosque, sous le regard curieux des enfants sortant de l’école. En reprenant le chemin, je découvre un immense cratère formé par l’impact d’une météorite. Vraiment impressionnant ! Désormais, j’ai en point de mire le volcan Tunapa, culminant à plus de 5400 mètres. A son pied, le désert salé blanc scintille sous le soleil. Les secousses engendrées par la mauvaise piste finissent par m’agacer. Je perds ainsi beaucoup plus de temps que prévu ! Il va falloir revoir sérieusement mon planning ! En fin d’après-midi, j’installe la tente derrière un enclos en pierres, juste avant un petit hameau. Je suis couvert de poussière, tout comme mon matériel !  

 

 3.-Le-cratere-de-meteorite.jpg 2. Le-cycliste-sur-la-piste-sablonneuse.jpg

 

 

Mardi 30 août : Salinas de Garci Mendoza - Jirira (35,6 km)

 

1.-Terrain-aride-devant-le-volcan-Tunapa.jpg

 

Je démonte le bivouac lorsque le soleil pointe à l‘horizon. Le gros village de Salinas de Garci Mendoza se présente au détour du premier virage. Et dire que j’avais hésité de poursuivre mon chemin hier soir, j’aurais pu dormir un peu plus au chaud à l’hôtel ! Le clocher de la modeste église domine la mignonne place centrale. Malheureusement, sa façade est en partie masquée par de nombreux échafaudages. Une dame m’annonce également qu’il faut l’autorisation du prêtre pour pénétrer dans l‘édifice religieux. Tant pis ! Puis, je me ravitaille pour plusieurs jours dans différents magasins. En effet, il est quasiment impossible de trouver de la nourriture dans le désert salé ! Aussi, l’accueil de certaines commerçantes est à la limite de l’impolitesse. Cela commence par être insupportable ! J’emprunte ensuite la piste qui borde le flanc oriental du volcan Tunapa. Plusieurs portions sont très sablonneuses. Tant et si bien que je dois pousser péniblement le vélo tous les 500 mètres ! Les villages traversés renferment de nombreuses maisons abandonnées en terre. La piste monte ensuite abruptement sur les contreforts du volcan. La grimpette est rendue bien difficile par la pierraille qui a remplacé le sable. Depuis le sommet, j’aperçois le désert d’Uyuni qui s’étend majestueusement d’un blanc éclatant. La descente vers Jirira est également bien pénible. Cela secoue dans tous les sens ! Le village se situe en bordure de la vaste étendue salée, à l’ombre de l’impressionnant volcan. L’heure est déjà bien avancée, lorsque je pique-nique sur la petite place déserte. Du coup, je décide de m’arrêter dans ce charmant endroit isolé pour souffler un peu. Toutefois, la seule maison susceptible de me loger semble fermée. Je m’apprête à partir, lorsqu’une dame ouvre la porte de la posada Dona Lupe. Je passe ainsi le reste de l’après-midi à ranger mes clichés, car c’est un vrai foutoir ! Les gérantes sont bien aimables, mais le manque d’eau dans la salle de bain commune n’est toujours pas résolu. Je suis même obligé de me débarbouiller dans l’évier de la cuisine. Ce n’est pas encore ce soir que je vais pouvoir prendre une douche chaude ! Décidemment, cela devient coutumier en Bolivie !

 

2.-Maisons-abandonnees-avant-Jirira.jpg 3.-L-eglise-de-Jirira.jpg

 

 

Mercredi 31 août : Jirira - Isla Incahuasi (Salar d’Uyuni) (49 km)

 

1.-Muret-en-pierres-devant-le-volcan-Tunapa.jpg 2.-Le-cycliste-avec-l-ambassadeur-des-Pays-Bas-sur-le-salar.jpg

 

Ce matin, je me sépare enfin de mes vieilles chaussures que je trimballe depuis Cuzco. Tout le monde s’en fout, mais il fallait que je le précise ! La piste se poursuit autour du volcan Tunupa. Au départ, elle est tellement sablonneuse, que je passe autant de temps à pousser le vélo qu’à pédaler. De grosses pierres saillantes rendent également certaines parties impraticables. Au bout d’une douzaine de kilomètres, j’atteins non sans mal le petit village de Coqueza. Il n’est que 11 h, mais je préfère manger un morceau sur la petite place, avant d’attaquer la traversée du désert d‘Uyuni. Une jolie lagune de couleur bleu émeraude borde le salar. Malgré les dires des locaux, l’eau chargée de sel corrosif est bien trop profonde. Je ne tiens pas à bousiller Tornado et mon matériel ! Du coup, j’en parle à deux chauffeurs de 4x4, qui me proposent de charger le vélo à l’arrière de leur véhicule. Ils attendent juste le retour de leurs clients partis en excursion dans le coin. Le couple, que je prends au départ pour de simples touristes, s’avère être l’ambassadeur des Pays-Bas et son épouse. Sympathiquement, ils m’invitent à leur table pour partager leur pique-nique. Je goûte entre autres à de la viande séchée de lama, ainsi qu’à de la bière de quinoa. Un petit orchestre improvisé joue affreusement quelques airs traditionnels en leur honneur. Forcément, je relate mon aventure cycliste autour du monde, qui semble les impressionner. Après cet agréable moment, nous franchissons la petite lagune en voiture. Je poursuis ensuite mon chemin à bicyclette, en suivant les quelques traces des véhicules en direction de l’île d’Incahuasi. Elle se situe au beau milieu de l’étendue blanche qui réverbère dangereusement les rayons du soleil. D’ailleurs, il est nécessaire de se protéger correctement contre les radiations ! Les formes hexagonales sur la couche épaisse de sel se succèdent par centaines de milliers. A certains endroits, les rebords devenant plus prononcés secouent fortement le vélo. La petite île apparaît soudain au loin. J’ai beau pédaler, j’ai l’impression qu’elle ne se rapproche pas ! Le paysage alentour est complètement surréaliste, comme sorti d‘un rêve. En fin d’après-midi, j’atteins finalement l’îlot isolé. Il est parsemé de nombreux cactus se dressant sur les rochers. J’assiste ensuite au coucher du soleil sur le désert blanc, tout en sirotant une bière. Après l’effort, le réconfort ! Je consulte ensuite le registre du coin, signé par de nombreux cyclos. Je ne manque pas d’y laisser ma griffe ! Malgré le froid qui tombe rapidement, j’installe le bivouac dans un renfoncement rocheux au bord du salar. La nuit est une nouvelle fois superbement étoilée.

 

3.-Formes-hexagonales-sur-le-desert-d-Uyuni.jpg 4.-Coucher-de-soleil-sur-le-salar-depuis-l-ile-d-Incahuasi.jpg

 

 

Jeudi 1erseptembre : Isla Incahuasi - Colchani (77,5 km)

 

1.-Les-cactus-de-l-ile-d-Incahuasi.jpg 2.-Le-cycliste-pedalant-sur-le-desert-d-Uyuni.jpg

 

Comme je me suis rendormi, je me lève plus tard d’une bonne heure. Les rochers environnants m’ont abrité du vent glacial. Par conséquent, la nuit a été moins froide que prévue. Enfin, tout est relatif ! Après avoir remballé le matériel, je pars à la découverte de l’île. Un sentier pédestre a été aménagé à travers les milliers de cactus. Certains ont des formes assez originales. Depuis le sommet, je jouis d’un splendide panorama de 360° sur le salar d’Uyuni, qui représente une surface de 12500 km². Cependant à l'avenir, l'exploitation du lithium dans le sous-sol risque de mettre en péril cette merveille naturelle. Il est déjà 10 h, lorsque je prends la direction de l’Est. Les traces des véhicules sont nettement plus apparentes que la veille. En effet, le trajet entre Colchani et l’île d’Incahuasi est beaucoup plus fréquenté. Je pédale ainsi sous le soleil durant de nombreux kilomètres, photographié par quelques touristes en 4x4. Comme hier, les lunettes sont obligatoires sous peine d’être complètement ébloui. Alors que je pique-nique à même le sol salé, un motocycliste allemand vient à ma rencontre. Nous échangeons longuement quelques informations quant à nos itinéraires respectifs. Puis, je poursuis mon chemin routinier en direction de Colchani. Après une quarantaine de kilomètres, j’atteins le dernier hôtel de sel encore ouvert en bordure du salar. Seule une jeune et charmante Japonaise occupe les lieux. Il faut dire que la nuitée n’est pas donnée ! A l’approche du village étalé, des centaines de tas de sel sont alignés, afin d’être exploités par l’usine de traitement toute proche. Il me faut également slalomer pour éviter les grandes flaques d’eau salines. En recherchant un logement pour la nuit, je fais la connaissance d’un jeune cyclo colombien se prénommant Maurizio. Il me propose de partager un dortoir de trois personnes assez rudimentaire. Cependant, le propriétaire se fait bien discret ! Tant pis, on verra bien ! Il est également bien difficile de trouver quelque chose pour se restaurer. Nous nous rabattons sur un petit commerce proposant de maigres hamburgers. Aussi, une fête des écoles se prépare pour la soirée. Rien de bien exceptionnel, mais la musique retentit tardivement !

 

3.-Toujours-sur-le-salar--.jpg 4.-Tas-de-sel-a-Colchani.jpg

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29 décembre 2014 1 29 /12 /décembre /2014 08:28

Vendredi 2 septembre 2011 : Colchani - Uyuni (25,6 km)

 

 Maurizio-et-moi-a-Colchani.jpg

 

C’est incroyable, la musique de l’orchestre n’a pas arrêté de la nuit ! Enfin, cela ne m’a pas empêché de bien dormir ! Le mobilier de la chambre est assez original. Tout est fait avec des blocs de sel : la table, les chaises et même le sommier. Maurizio est un gars vraiment sympathique. Cependant, nos chemins se séparent déjà. En effet, il prend la direction opposée à la mienne, c’est-à-dire l’île d’Incahuasi. Son parcours de plusieurs mois traverse toute l’Amérique du Sud depuis la Colombie. Aussi malgré la protection, le soleil de la veille m’a complètement explosé les lèvres dans le salarLa piste pour rejoindre Uyuni, situé à une petite trentaine de kilomètres, est complètement défoncée. C’est de la "tôle ondulée"     bien creuse, tout du long ! Comme il y a quelques jours, j’emprunte une piste sablonneuse parallèle. Elle augmente un peu la distance, mais c’est beaucoup mieux pour mon fessier ! J’atteins finalement la ville assez rapidement. Je me relaxe alors un moment à la terrasse d’un troquet de la plaza Arce. Le prix de la bière est exorbitant ! Les commerçants profitent de la manne touristique pour augmenter les tarifs. Je m’installe ensuite dans une chambre correcte de l’hôtel Avenida, puis dîne dans un boui-boui à quelques pas. Uyuni n’a pas grand intérêt. Les rues rectilignes s’entrecroisent au cordeau. Elles sont bordées principalement d’agences proposant des excursions dans la région. Près de la gare, de vieilles locomotives rouillent dans une sorte de cimetière ferroviaire. Je passe ainsi mon après-midi à diverses tâches banales : lessive, alimentation du blog, triage des photos… et enfin une douche bien chaude ! Je nettoie également au jet d’eau Tornado, afin de le débarrasser du sel qui s’est agglutiné. Au soir, je préfère casser la croûte dans une petite gargote, plutôt que dans les restaurants à touristes qui ont quadruplé les tarifs. Etrangement, la vie est bien plus chère à Uyuni que dans le reste du pays !

 

 

Samedi 3 septembre : Uyuni - Cerdas (82,8 km)

 

 1.-Paysage-sablonneux-aux-environs-de-Cerdas.jpg

 

Même dans la chambre, il fait très froid ! La température nocturne a certainement chuté sous le 0° C. Après des jours de cogitation, je prends la décision de rejoindre directement Tupiza. En effet, la rallonge à vélo sur Potosi risque de me faire courir par la suite. La ville baroque est à plus de 200 km, complètement à l’écart de mon itinéraire. Ce choix me laissera également une plus grande marge de manœuvre en Argentine ! Je quitte alors Uyuni sur une piste caillouteuse et poussiéreuse, complètement dégradée. Je maudis tous ces 4x4 et ces cars, qui forment cette satanée « tôle ondulée » ! Fort heureusement, elle reste relativement plate, traversant un paysage désertique assez chaotique. La chance me sourit également, car le vent violent souffle dans ma direction. Il forme d’ailleurs de nombreux tourbillons de poussière au loin. A l’heure du midi, je pique-nique à l’ombre d’une maisonnette d’un village abandonné. Le paysage devient ensuite au fil des kilomètres beaucoup plus agréable. Une végétation basse et éparse parsème les terres arides rougeâtres qui s‘étalent au pied des basses collines. Après des heures de secousses, je me détends un moment dans le troquet d’un minuscule village. Je profite aussi du petit commerce attenant pour me ravitailler de quelques provisions. En fin de journée, le secteur devient beaucoup plus sablonneux. La piste disparait d’ailleurs parfois sous une épaisse couche de sable gris. Ce qui m’oblige à pousser péniblement Tornado ! Aussi, les conducteurs de 4x4 se prennent vraiment pour les rois de la route. Sans ralentir, ils me noient à chaque fois dans un nuage de poussière. Quelques kilomètres après le village de Cerdas, j’installe discrètement la tente derrière une petite dune. La chute du vent laisse planer un silence de cathédrale.

 

 2.-Tornado-sur-la-piste-de-sable.jpg

 

 

Dimanche 4 septembre : Cerdas - Environs de Tolamayu (59,7 km)

 

1.-Les-montagnes-colorees-sur-le-chemin-d-Atocha.jpg 2.-La-gare-d-Atocha.jpg

 

Ces derniers temps, j’ai un sacré manque de motivation. C’est pourquoi je décampe une nouvelle fois bien tard ! En plus du mauvais état, la piste n’arrête pas de monter et descendre. Un vrai casse-pattes ! Elle se faufile dans de splendides montagnes multicolores, à une altitude moyenne de 3800 mètres. Au fil de mon avancée, les strates apparentes de la roche changent de teintes. Le jaune et le marron alternent régulièrement avec le blanc et l’orangé. A chaque virage, c’est l’émerveillement ! Du coup, je bombarde le coin de clichés. Ce qui ne me fait pas beaucoup progresser ! En chemin, deux voitures officielles du Dakar me dépassent à grande vitesse. Les passagers sont peut-être déjà en repérage pour le prochain rallye ! Puis, la piste plonge vertigineusement vers Atocha, blotti dans le lit d’un fleuve asséché. Le nombre croissant de détritus annonce malheureusement l’approche de la petite ville minière. Un avion Cessna est curieusement exposé sur la place centrale. Peut-être celui de Nicolas Hulot utilisé lors d’une de ces émissions dans la région ! Je mange rapidement dans une gargote, puis bois un verre dans un bar à la musique assourdissante. De nombreuses personnes cherchent à discuter avec le gringo. Comme je n’ai parcouru qu’une grosse vingtaine de kilomètres, je ne peux malheureusement trop m’attarder. Sur l’autre rive du fleuve, la piste remonte terriblement d’une bonne centaine de mètres. Elle continue ensuite à faire le yoyo sur un plateau désertique entouré de jolies montagnes. Par endroits, on se croirait dans l’Ouest américain ! Quelques kilomètres plus loin, je me rends compte avoir perdu une de mes gourdes. Elle est certainement tombée avec les fortes secousses de la « tôle ondulée » dans une descente ! J’espère seulement trouver un village avant Tupiza pour me ravitailler en eau, car cela risque de faire un peu juste jusque demain soir. Je traverse encore un terrain aride, puis une sorte de canyon exploité pour l‘extraction de minerais. La piste descend ensuite abruptement dans un sombre et étroit défilé rocheux. En cette fin de journée, la fatigue commence à se faire sentir. Je plante alors la tente dans le lit poussiéreux de la rivière tarie. Malgré la difficulté du parcours, ce fut l’une des plus belles étapes sud-américaines de mon voyage ! C’est d’autant plus agréable, qu’il y a très peu de circulation !

 

3.-Le-cycliste-sur-la-piste-copie-2.jpg 4.-Les-montagnes-sombres-aux-environs-de-Tolamayu.jpg

 

 

Lundi 5 septembre : Environs de Tolamayu - Tupiza (77 km estimé)

 

1.-Ca-descend-sec-vers-Tupiza--.jpg 2.-Petite-riviere-s-ecoulant-dans-les-montagnes-arides.jpg

  

Les hautes parois des gorges empêchent le soleil de réchauffer le bivouac. Il fait alors glacial lorsque je décampe au petit matin. En fait, j’espère rejoindre Tupiza avant la fin de journée. La piste s’élève brusquement d’un bon 200 mètres, sur les hauteurs du défilé. Au bout d’une dizaine de kilomètres de montées et descentes, je suis rassuré de pouvoir me réapprovisionner en eau au village minier de Tolamayu. Aujourd’hui, le vent est extrêmement violent. Par chance, il souffle majoritairement dans ma direction. A peine redémarré, je crève de la roue arrière. Les pneus commencent par montrer de sérieux signes de faiblesse ! Je répare alors la petite déchirure en collant un morceau de chambre à air. Puis, le chemin poussiéreux tournicote vertigineusement dans les montagnes désertiques à presque 4200 mètres d’altitude, au bord de ravins abrupts. Il redescend ensuite d’environ 300 mètres, dans une vallée où se dissimulent quelques habitations. Avant d’attaquer la terrible remontée, je préfère reprendre quelques forces au bord du chemin. La piste caillouteuse oscille ensuite en ligne de crête. Les minerais donnent de splendides couleurs variées aux montagnes alentour. Aussi, les bourrasques sont tellement violentes, qu’elles me déportent sur le côté. Elles me font même chuter avec le vélo, alors que je tire un cliché. C’est à ce moment que je me rends compte avoir perdu mon compteur. Les fortes secousses l’ont certainement décrochées. Ce n’est pas possible, je dois être maudit ! Je retourne à pied sur mes pas (ou plutôt sur mes roues !), pour tenter de le retrouver. Avec un peu de chance, on ne sait jamais ! Forcément, je reviens bredouille ! Contrarié par l’incident, je poursuis quand même ma route. Tout à coup, la piste plonge longuement dans la vallée de la rivière Tupiza. Mon vélo est secoué de toute part à cause de la caillasse. Je descends alors prudemment avec les doigts sur les freins, pour éviter une nouvelle casse. Sur mon chemin, de nombreux cactus parsèment les flancs des montagnes. Le long du cours d’eau, presque 800 mètres plus bas, la piste n’est pas en meilleur état ! Elle est couverte d’une méchante « tôle ondulée ». Moi qui pensais finir tranquillement les vingt derniers kilomètres, c’est plutôt raté ! J’en ai vraiment ras le bol ! De plus, chagriné par la perte de mon compteur, je pète un peu les plombs ! La vallée enserrée de montagnes rouges est pourtant bien jolie. C’est d’ailleurs ce qui me motive à poursuivre ! Les formations rocheuses sont en effet spectaculaires. Elles changent parfois de couleurs, d’un côté ocre et sable, de l’autre vert et rouge. Des pics émergent également au bord de canyons ciselés comme de la dentelle. On se croirait en plein Far West ! Les rayons chatoyants du soleil couchant rendent le lieu encore plus féerique. A cause de la fatigue, la dernière côte pour atteindre Tupiza est vraiment pénible. Je suis mort de fatigue, noir de poussière, et complètement affamé ! Aussitôt, je pénètre dans une petite gargote à l’entrée de la ville pour casser la graine. La nuit tombée, je m’installe dans une étroite chambre de l’hôtel Bolivar proche de la place centrale. Je finis la soirée dans un troquet, devant un écran de télévision diffusant le match de football de la Bolivie contre le Pérou.

 

 3.-Le-cycliste-dans-la-vallee-de-la-riviere-Tupiza.jpg 4.-Cactus-et-pics-rocheux-dans-la-vallee-de-la-riviere-Tu.jpg

 

 

Mardi 6 septembre : Excursion pédestre au Sud de Tupiza

 

1.-L-eglise-de-Tupiza.jpg 2. La Puerta del Diablo

 

Ma matinée n’est pas bien passionnante ! Sans vraiment trop y croire, je fais la tournée des commerçants dans les rues du centre-ville, ainsi que le mercado, afin de dégotter un nouveau compteur kilométrique. Les gens semblent vouloir se débarrasser de moi, et m’envoient n’importe où ! Finalement, je tombe sur un réparateur de vélos bien sympathique. Nous discutons forcément « Petite Reine », mais il n’a pas en stock ce que je cherche. Bref, il va falloir attendre la frontière de l’Argentine ! Je grimpe ensuite jusqu’à la colline El Mirador dominée par un Christ Rédempteur, pour apprécier la vue sur Tupiza. La ville n’a pas de réel charme. Toutefois, le décor de montagnes rouges qui l’entourent est magnifique. Puis, je dîne rapidement dans un restaurant populaire à proximité de l‘hôtel. Comme il fait un beau soleil, je décide de me balader dans les montagnes au Sud de la ville. Ma journée de repos sera pour plus tard ! Un sentier pédestre rejoint aisément un surprenant rocher plat et fendu, nommé la Puerta del Diablo. Non loin, la Valle de Los Machos présente des pics effilés en forme de pénis. D’où le nom ! Je poursuis mon chemin jusqu’à l’impressionnant canyon del Inca, rougeoyant sous le soleil. L’escalade étant trop périlleuse, je préfère faire demi-tour. Les autres curiosités rocheuses sont plus difficiles à trouver, ou bien trop éloignées. A cause de ma carte peu précise, je me balade un peu au hasard des chemins. Il faut reconnaître que tous ces sentiers qui s’entrecroisent m’embrouillent un peu. Du coup, je ne découvre pas grand-chose de plus ! La promenade reste quand même bien agréable. Il est cependant dommage de voir tous ces détritus qui traînent un peu partout ! Après plus de quatre heures de marche, je retourne au même restaurant pour trier mes photos, avec une bonne bière à la main. Du même coup, j’en profite pour souper. Ma soirée est loin d’être terminée, car il me reste encore pas mal de boulot !

 

3. Les pics érotiques de la vallée de Los Machos 4.-Cactus-et-formations-rocheuses-aux-environs-de-Tupiza.jpg

 

 

Mercredi 7 septembre : Tupiza - Villazón (96 km estimé)

 

Cactus-dans-les-sombres-montagnes-arides-a-proximite-de-C.jpg

 

Avant de démarrer, je tiens à jeter un coup d’œil sur mes emails. La connexion est tellement longue que je finis par abandonner ! Et bien sûr, comme souvent en Bolivie, on ne peut me rendre la monnaie ! Comme promis, je passe ensuite au magasin de cycles pour présenter Tornado. Le sympathique homme est admiratif devant ma bicyclette chargée. Il m’indique aussi le chemin pour quitter la ville en direction de Villazón. Je suis alors surpris de découvrir que la piste vient d’être asphaltée. Ce qui n’est pas pour me déplaire ! Cela fait même tout bizarre de n’être plus secoué dans tous les sens ! La route longe la rivière Tupiza, qui serpente dans le merveilleux arrière-pays. Au fil des kilomètres, le paysage devient beaucoup plus banal. Les montagnes s’arrondissent, et prennent une teinte grisâtre. De plus, une légère brume de chaleur accentue la morosité du coin. Il est vrai qu’avec la baisse d’altitude sous la barre des 3000 mètres, la température a grimpé de quelques degrés. A Suipacha, je pique-nique brièvement sous le kiosque de la petite place. Encore une fois, le village semble complètement désert. Après le pont de la rivière Tupiza, je grimpe longuement plus de 600 mètres de dénivelé jusqu’au village de Calderilla. La récente route n’étant pas complètement terminée, il me faut emprunter l’ancienne piste caillouteuse sur certaines portions. De nombreux cactus et autres épineux sont disséminés dans les basses montagnes alentour. Puis, la route oscille longuement sur un plateau à la végétation basse et éparse. Avec le vent de côté, les derniers kilomètres semblent interminables. En fin de journée, j’atteins la ville frontière de Villazón. Comme la fatigue commence à se faire sentir, je me précipite dans l’alojamiento Potosi. L’accueil du petit vieux est vraiment désagréable. Par contre, le tarif est super doux (environ 2 euros). Certes, ce n’est pas le grand luxe, mais pour une nuit cela fera l’affaire ! Puis, je file souper dans un boui-boui à proximité. Le propriétaire et ses amis sont complètement ivres. Une dame coiffée du chapeau bolivien ne marche même plus droit ! Je déambule encore un moment dans les ruelles sombres, avant de regagner ma minuscule chambre.

 

 

Jeudi 8 septembre : Villazón - Environs de Pumahuasi (Argentine) (37 km estimé)

 

Le-cycliste-a-la-frontiere-de-l-Argentine.jpg

 

L’art et la manière de perdre une journée ! Durant la matinée, je cherche longuement une boutique de cycles autour de la place centrale et des nombreux marchés couverts, pour acheter un nouveau compteur kilométrique. En vain ! Comme il est déjà presque 11 h, je décide de manger sur place avant de prendre la route. Le service du premier resto populaire est vraiment trop long ! Au bout d’une heure, je quitte les lieux pour m’attabler dans un autre établissement. Après manger, je prends la direction de la frontière de l’Argentine. Les formalités administratives sont très rapides. Par contre, un gendarme consciencieux fouille brièvement mes bagages. Vient ensuite la recherche d’un distributeur automatique de billets dans la ville frontalière de La Quiaca ! Je tourne en rond un bon moment, avant de retirer une somme ridicule dans une banque. Bonjour les frais bancaires en France ! C’est fou ce qu’ils peuvent se sucrer sur le dos des voyageurs, ça me dégoûte ! Comme il est déjà bien tard, j’hésite à passer la nuit dans la petite ville sans charme. Finalement, je prends la route, avec l’idée de pédaler un maximum de kilomètres jusque la tombée de la nuit. La nationale traverse une région désertique à l’herbe rase, où lamas, alpagas et moutons gambadent en toute liberté. Un vent à décorner les bœufs contrarie cependant mes plans. Je pédale ainsi à vitesse très réduite, sur une route pourtant plate. Assez rageant ! Comme au Pérou et en Bolivie, de nombreuses croix ou petits sanctuaires au bord de la chaussée témoignent des accidentés de la circulation. Après le village de Pumahuasi, je poursuis sur une petite dizaine de kilomètres. Le froid s’abat d’un coup avec le coucher du soleil. Je m’installe alors derrière une bergerie en briques de terre, pour me protéger du vent violent. L’endroit est clôturé, mais je n’ai pas vraiment d’autre choix ! Aussi, mon brûleur ne veut pas démarrer. Je suis obligé de le démonter complètement pour le nettoyer. Il faut reconnaître que l’essence bolivienne est de très mauvaise qualité !

 

 

Vendredi 9 septembre : Environs de Pumahuasi - Sierra Santa Victoria (86 km estimé) 

 

1.-Le-puits-au-bivouac-de-Pumahuasi.jpg 2.-Lamas-sur-la-route.jpg

 

Il a fait encore extrêmement froid cette nuit ! Le plateau étant situé à une altitude moyenne de 3500 mètres, il ne faut pas s’attendre à des températures estivales ! Toutefois, le soleil matinal réchauffe agréablement la tente. Je décampe assez rapidement, afin de faire un maximum de kilomètres avant que le vent ne se lève. La route qui file vers le Sud traverse rectilignement le plateau désertique, coincé entre deux petites chaînes montagneuses. A cause du climat rude, l’élevage du bétail est favorisé aux cultures. Il est d’ailleurs amusant de voir tous ces lamas lever la tête à mon passage. J’atteins ainsi aisément le gros village d’Abra Pampa. Sans tarder, je dîne copieusement dans une sorte de petit restaurant routier. C’est affolant, les prix en Argentine sont doubles, voire triples par rapport à la Bolivie ! Je suis également surpris de l’heure de décalage positive par rapport au pays limitrophe. Après quelques courses, je reprends la route qui s‘incurve fort heureusement vers l‘Est. En effet, le vent qui s’est levé brusquement souffle du même coup dans ma direction. La nationale grimpe tout doucement jusque 3700 mètres dans la sierra Santa Victoria, puis descend dans le canyon de la rivière Rio Grande. Les montagnes sont spectaculaires ! Elles présentent différentes strates colorées de sédiments, aux formes ondulantes. Cependant comme le canyon est déjà dans l’ombre, je préfère planter le bivouac dans une petite carrière à l’écart de la route. J’espère ainsi profiter du lieu illuminé par le soleil demain matin. Aussi, le montage de la tente est rendu bien difficile par les bourrasques du vent. Comme pour me narguer, il cesse de souffler lorsque tout est monté !

 

3.-Montagnes-colorees-ondulantes-a-Tres-Cruces.jpg 4.-La-petite-riviere-Colorado-a-l-entree-de-la-quebrada-.jpg

 

 

Samedi 10 septembre : Sierra Santa Victoria - Environs de Tilcara (76 km estimé)

 

 1.-Cactus-devant-la-quebrada-d-Humahuaca.jpg

 

Durant la nuit, des rafales ont secoué violemment la tente. Fort heureusement, sans conséquence ! Par contre, le vent souffle encore et toujours aussi fortement. Le canyon (ou quebrada) illuminé par le soleil est vraiment magnifique. La rivière Rio Grande serpente dans les montagnes aux teintes variées. La roche érodée expose toute une palette de couleurs, passant principalement du rouge au blanc. La route continue tout doucement sa descente jusque Humahuaca, situé à 3000 mètres environ. L’étape serait vraiment aisée, sans ce foutu vent que je prends en pleine poire ! Cela commence sérieusement à devenir pénible ! Je mange un morceau dans une petite gargote, avant de visiter le village. Les rues pavées sont bordées de maisons en pisé. La place centrale est entourée d’une église et d’une inesthétique tour de l’Horloge. Un large escalier mène également à l’imposant monument de l’Indépendance qui domine le village. Le coin est assez joli, mais beaucoup trop touristique à mon goût ! Quelques kilomètres plus loin, je pénètre dans la minuscule église du 17ème S d’Uquia. Elle renferme un beau retable doré, ainsi qu’une série de peintures représentant des archanges armés. Avec la baisse d’altitude, le climat devient moins rude. Quelques champs agricoles commencent d’ailleurs à border la rivière. Je franchis ensuite symboliquement le tropique du Capricorne. Il est signalé par un immense cadran solaire assez moche. Je m’apprête à tirer une photo avec Tornado, lorsqu’un car décharge son lot de touristes. Au secours ! Il faut attendre que tout ce petit monde sans gêne quitte le lieu, pour enfin tirer tranquillement le cliché. Le vent souffle toujours aussi violemment. Il finit même par m’épuiser ! Au bout de quelques kilomètres, je plante la tente à l’abri d’une petite falaise. Je ne pense pas trouver beaucoup mieux avant le village de Tilcara !

 

2.-L-hotel-de-ville-d-Humahuaca.jpg 3.-Le-cycliste-au-tropique-du-Capricorne.jpg

 

 

Dimanche 11 septembre : Environs de Tilcara - Cuesta de Barcena (69 km estimé)

 

1.-Prairie-devant-les-montagnes-colorees-de-la-quebrada.jpg 2.-La-Palette-du-Peintre-au-village-de-Maimara.jpg

 

Une nouvelle fois, je me lève aux aurores avant que le vent souffle. Du coup, je rejoins aisément Tilcara, situé à une petite dizaine de kilomètres. Cependant, je passe mon chemin pour rejoindre Maimara, qui est beaucoup plus séduisant. Le petit village est dominé par une montagne appelée la Paleta del Pintor (la Palette du Peintre). Les strates sédimentaires colorées ondulent magnifiquement sur la paroi rocheuse. Il est malheureusement dommage qu’une légère brume de chaleur masque en partie ce splendide panorama. A l’entrée de la localité, le cimetière s’étale à flanc de colline. Une multitude de tombes sont embellies de couronnes colorées, composées de fleurs artificielles. A mon retour de visite, ma roue arrière est à plat. Il faut avouer que je cherche les problèmes ! En effet, le pneu et la chambre à air sont complètement amochés, et cela fait plusieurs jours que je dois tout inverser avec l’avant. Évidemment après la réparation, le vent s’est levé ! A croire qu’il n’attendait que cela pour m’enquiquiner un peu plus ! Par conséquent, ma vitesse n’est plus du tout la même ! J’ai alors l’impression de ne plus avancer, alors que la route est en pente descendante. Du coup, je n’arrête pas de pester, et finis même par insulter Eole ! Bref, je perds la boule ! Avec le nez dans le guidon, je ne peux malheureusement pas profiter pleinement du spectaculaire paysage. C’est vraiment désolant ! De plus, certains cars de touristes me rasent de très très près ! Ils sont vraiment cinglés ! Je bifurque ensuite sur une route en légère montée vers Purmamarca, un peu à l’écart de la nationale. Le minuscule village est merveilleusement situé au pied du Cerro de los Siete Colores, autrement dit le Mont des Sept Couleurs. Le cadre est vraiment magnifique. Les rues autour de l’église sont bordées par quelques belles maisons en pisé. Le coin est cependant gâché par l’affluence touristique. Il n’y a que des restaurants, des hôtels et des boutiques à babioles. D’ailleurs, le prix des repas est augmenté en conséquence ! Du coup, je mange un maigre sandwich, avant de retourner sur la nationale en direction de San Salvador de Jujuy. A cause de ce satané vent, je sais que je ne rejoindrai pas la ville dans la soirée. Je grappille ainsi difficilement kilomètre après kilomètre. Après le banal village de Volcan, c’en est malheureusement fini de la quebrada d’Humahuaca ! La route grimpe encore une petite colline, puis dévale vers la vallée du Rio Grande qui s’évase. Je m’arrête alors dans un petit hameau, au lieu-dit Cuesta de Barcena. Une vieille paysanne m’autorise à m’installer dans une prairie rocailleuse, parsemée d’épineux. Aussi, il me faut encore démonter le brûleur qui ne veut décidemment pas démarrer. Dans la soirée, j’ai droit à un concert de meuglement de vaches comme berceuse !

 

3.-Le-mont-des-Sept-Couleurs-a-Purmamarca.jpg 4.-Passerelle-sur-le-Rio-Grande-a-Tumbaya.jpg

 

 

Lundi 12 septembre : Cuesta de Barcena - San Salvador de Jujuy (36 km estimé)

 

 1.-Le-bivouac-a-la-Cuesta-de-Barcena.jpg

 

Je suis réveillé en pleine nuit par un bruit suspect. Peut-être un rôdeur ! Fausse alerte, ce n’est qu’une vache qui broute juste à côté de la tente ! Avec la perte d’altitude, les nuits sont largement moins froides. Je poursuis la descente dans la vallée du Rio Grande, toujours autant embrumée. Je quitte ainsi tout doucement l’Altiplano andin. D’ailleurs, les montagnes se couvrent progressivement de forêts clairsemées. A l’approche de San Salvador de Jujuy, la circulation s’intensifie dangereusement. De plus, de nombreux travaux rendent le trajet bien pénible. Le centre-ville s’étend entre les cours d’eau Rio Grande et Xibi Xibi. Je déambule ainsi longuement dans les rues à la recherche d’un logement bon marché. La tache est rendue bien difficile par les tarifs abusifs. Il va peut-être falloir que je cesse la comparaison avec la Bolivie ! Je me rends alors dans le quartier populaire proche du mercado del Sur, situé au Sud de la rivière Xibi Xibi. Les rues alentour grouillent de monde. Je trouve finalement une chambre assez minable à l’hospedaje Santiago del Estero, juste à côté de la gare routière. Après toutes ces nuits de bivouac, je peux enfin recharger mes batteries, et prendre une douche chaude… non froide ! Comme l’heure est déjà bien avancée, je mange sur le pouce des empanadas dans la rue. Il s’agit d’une sorte de pâte brisée, fourrée de viande de bœuf ou de poulet accommodé d’une sauce piquante. Je visite ensuite très rapidement la ville. Les principaux centres d’intérêt se situent à proximité de la place Belgrano. La cathédrale s’avère bien décevante ! Elle ressemble plus à une simple église. Rien à voir avec les bâtiments gothiques européens ! De même, l’hôtel de ville et l’église San Francisco ne sont guère plus impressionnants. Certes, les bâtiments sont jolis, mais enserrés entre d’affreux immeubles. De plus en ce milieu d’après-midi, les édifices sont mystérieusement fermés. Tout comme les commerces du centre-ville ! Cependant, Jujuy devient beaucoup plus vivant en début de soirée. Je soupe ensuite dans une sorte de cantine populaire à deux pas de l’hôtel. Les bouteilles de bière d‘un litre défilent à grande vitesse. D’ailleurs, certains clients ne tardent pas à s’assoupir sur leur table. Je rejoins ensuite ma bruyante chambre. Une bonne nuit en perspective s’annonce !

 

2.-La-vallee-du-Rio-Grande-depuis-le-mirador-de-Leon.jpg 3.-L-eglise-San-Francisco-a-San-Salvador-de-Jujuy.jpg

 

 

Mardi 13 septembre : San Salvador de Jujuy - Salta (94 km estimé)

 

 1.-Le-lac-artificiel-de-Las-Maderas--depuis-les-montagnes-b.jpg

 

Je n’ai pratiquement pas fermé l’œil de la nuit ! Déjà que je me suis couché bien tard ! Le petit hôtel est un vrai hall de gare ! Durant de nombreuses heures, le va-et-vient incessant de certains clients a fait un boucan d’enfer. En Amérique du Sud, les gens sont vraiment sans gêne ! Ils parlent à haute voix, ou écoutent de la musique à fond à toutes heures, sans vraiment se soucier des autres. A cela, il faut rajouter les ronflements des dormeurs et les pleurs d’un bébé pour avoir une insomnie parfaite ! Je quitte San Salvador de Jujuy vers le Sud, sur une inintéressante route désormais plate. Après trois jours de descente le long du Rio Grande, j’ai perdu plus de 2400 mètres d’altitude ! Je traverse alors de banals champs agricoles, qui s’étalent au pied de la chaîne montagneuse andine. Une brume de chaleur masque malheureusement les hauts sommets désertiques. A partir du lac artificiel de La Cienega, à proximité d’El Carmen, le décor devient beaucoup plus séduisant. En fait, je suis agréablement surpris du parcours ! Je m’imaginais une étape peu reluisante, traversant usines et entrepôts pour joindre Salta. Et c’est tout le contraire ! La nationale se transforme en une étroite route, qui grimpe en serpentant interminablement sur le flanc de basses montagnes boisées. Soit 350 mètres de dénivelé positif environ ! De plus, la circulation est quasi-inexistante. Les rares conducteurs que je croise m’encouragent généralement d’un signe de la main. Après de nombreux jours à pédaler dans la poussière, je retrouve aussi les agréables senteurs dégagées par la végétation. En contrepartie, les insectes réapparaissent et ne tardent pas à piquer mes gambettes. En approchant du sommet culminant à 1500 mètres, le terrain devient plus clairsemé. La route rejoint un autre lac artificiel retenu par le barrage de Campo Alegre, puis descend longuement au bord de la rivière de La Caldera. Je reperds ainsi rapidement le dénivelé acquis lors de la montée. A une petite quinzaine de kilomètres de Salta, l’appel de la bière se fait ressentir ! Le patron du rudimentaire troquet est heureux de me présenter un Parisien d’une cinquantaine d’années. Rodolphe est expatrié en Argentine depuis de nombreux mois. Nous discutons durant deux bonnes heures, tout en sirotant quelques bouteilles de cervezas. Je reprends mon chemin, alors que la nuit ne va pas tarder à tomber. A l’entrée de la ville, un mauvais coup du sort s’abat sur moi ! Je crève encore de la roue arrière ! Pour accélérer la réparation, je monte une nouvelle chambre à air. Prêt à repartir, mon pneu se retrouve une nouvelle fois à plat. La moutarde commence à me monter au nez ! Dans l’obscurité, je passe un temps fou à trouver les minuscules trous, occasionnés par deux petites épines incrustées dans le pneu. De plus, la valve semble défectueuse. Bref, c’est la mouise ! Après une grosse heure, je peux enfin repartir. Je mange rapidement une grande pizza à un stand de restauration de la place Belgrano, puis me rends à la residential Balcarce à proximité. Le prix de la nuitée est un peu plus élevé que prévu, mais un peu de confort ne fait pas de mal ! D’autant plus que le camping est assez éloigné du centre ! Le quartier alentour est assez touristique, avec de nombreux bars et restaurants chics. Je préfère cependant boire un dernier verre dans un boui-boui crasseux du côté de la gare. Le tarif est beaucoup plus raisonnable !

 

2.-Les-montagnes-boisees-dans-l-ascension.jpg 3.-La-riviere-de-La-Caldera.jpg

 

 

Mercredi 14 septembre : Visite de Salta

 

1.-L-hotel-de-ville-sur-la-place-du-9-juillet-de-Salta.jpg

 

Je passe la matinée à régler divers tracas qui traînent depuis quelques temps. J’arpente notamment les rues de la ville, afin de dégoter un compteur kilométrique. Après quelques recherches, je trouve finalement bonheur dans un magasin de cycles bon marché. De marque complètement inconnue, j’espère qu’il fonctionnera au moins jusque Buenos Aires ! Avant de visiter Salta, je casse la croûte rapidement dans une sandwicherie. Les rues quadrillent parfaitement la ville. Elles s’entrecroisent rectilignement à angle droit, comme aux Etats-Unis. Il est donc très facile de s’orienter ! De plus, tous les centres d’intérêts sont regroupés autour de la place du 9 Juillet. La cathédrale de couleur rose fait face aux arcades de la galerie du cabildo, c’est à dire l’hôtel de ville. L’esplanade est bondée de monde en raison du pèlerinage du Seigneur et de la Vierge de Milagro. D’ailleurs, de nombreux fidèles venant de tout le pays processionnent dans les rues alentour, brandissant des statues ou des images saintes. Il est même très difficile de pénétrer à l’intérieur de l’édifice religieux ! Le chœur et la nef sont forcément enjolivés pour la circonstance. Quelques rues plus loin, je pénètre dans l’église San Francisco. De couleur ocre et jaune, c’est sans doute le bâtiment le plus impressionnant de Salta. La décoration intérieure est entièrement réalisée en stuc, avec des fresques en trompe-l’œil. Le cloître attenant est assez ordinaire, mais abondamment fleuri. J’y pénètre sans autorisation, pour tirer quelques clichés. Plus loin, le couvent de San Bernado est éblouissant sous le soleil. Il ne peut malheureusement être visité qu‘à de rares exceptions. Sa porte principale en bois est aussi superbement sculptée. En début de soirée, je rejoins la place Belgrano pour grignoter quelques empanadas, au même stand de restauration de la veille. L’accueil y est toujours aussi sympathique ! Je passe ensuite le reste de mon temps dans la chambre de l’hôtel, à combler le retard du classement de mes photos. Ce petit travail va me mener jusque 5 h 30 du matin !

 

2.-La-cathedrale-de-Salta-durant-le-pelerinage.jpg 3.-L-eglise-San-Francisco-de-Salta.jpg

 

 

Jeudi 15 septembre : Visite de Salta

 

1.-Reflet-de-la-cathedrale-dans-un-batiment-en-verre.jpg

 

Ma nuit fut très courte. Je me lève péniblement vers les 9 h, afin de profiter du splendide soleil de la journée. Le pèlerinage du Seigneur et de la Vierge de Milagro touche à son apogée. La place du 9 Juillet est noire de monde. Des personnalités religieuses célèbrent la messe sur le parvis de la cathédrale. La cérémonie est également diffusée par de grands haut-parleurs disséminés dans les rues alentour. L’évènement est même retransmis par les télévisions locales. Impressionnant ! Je rejoins ensuite directement le parc San Martin, pour prendre le téléphérique qui grimpe sur la colline du Cerro San Bernardo. Depuis le sommet, la vue sur Salta est vraiment magnifique. La ville s’étend lointainement jusqu’aux contreforts des montagnes andines. Les rues et les avenues sont alignées au cordeau. La terrasse du site comprend aussi un ensemble de petites cascades, peu esthétique avec ses blocs de béton. Puis, je redescends par le sentier pédestre à flanc de colline, jusqu’au monument pour Güemes. Une grande statue représente le général à cheval. Je réitère le repas de la veille à la sandwicherie, puis flâne longuement le reste de l’après-midi. Salta est une ville vivante qui me plaît bien ! Toutefois, les curiosités touristiques sont assez limitées. On en fait rapidement le tour ! A cause de la procession religieuse, il est bien difficile de rejoindre l’hôtel. Les rues sont bloquées, et il me faut faire un très long détour. Je grignote ensuite sur le pouce sur la place Belgrano. Il n’est pas bien tard, mais avec le manque de sommeil, je suis complètement épuisé !

 

2.-Le-telepherique-du-Cerro-San-Bernardo.jpg  

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28 décembre 2014 7 28 /12 /décembre /2014 10:02

Vendredi 16 septembre 2011 : Salta

 

Relativement en avance sur mes prévisions, je décide de rester une journée de plus à Salta. Il faut aussi reconnaître que j’ai un peu la flemme de reprendre la route ! Je m’accorde alors un moment de totale relaxation… enfin presque ! Les doigts de pieds en éventail, je déjeune tranquillement sous la pergola de l’hôtel envahie par des vignes grimpantes. Comme je n’aime pas rester trop longtemps inactif, je règle les petits pépins mécaniques sur Tornado. C’est ainsi que je passe plus de trois heures à démonter le pédalier qui commence à avoir du jeu, inverser enfin les deux pneus, changer les patins de freins à l’arrière, et monter le nouveau compteur. Je fais ensuite un peu de lessive, et quelques recherches sur internet pour la suite du parcours. Bref, rien de passionnant ! Malgré tout, la fin de journée approche rapidement ! En guise de souper, je mange quelques sandwichs sur la place Güemes, arrosés de deux grandes bouteilles de bière. On ne perd pas aussi facilement ses habitudes chtimis ! Par rapport aux Andes, la population de la ville est plus diversifiée. Les personnes de souche indienne disparaissent au profit d’Argentins issus des vagues d’immigration européenne, notamment espagnole et italienne. Enfin demain, je devrais prendre la direction de Cafayate à deux ou trois jours de vélo.

 

 

Samedi 17 septembre : Visite de Salta

     

Danseurs-et-musiciens-sur-la-place-du-9-juillet.JPG

 

C‘est la poisse ! Au réveil, il tombe des cordes avec de fortes rafales de vent. C’est pourquoi je préfère attendre l’accalmie pour prendre la route. Vers 10 h, le temps ne s’est toujours pas amélioré ! La direction de l’hôtel me presse à prendre une décision pour la chambre. Dans le doute, je décide de rester une nuit supplémentaire sur Salta. Au vu des prix des logements sur Buenos Aires, ce n’est peut-être pas plus mal ! J’erre ainsi durant des heures dans les rues commerçantes autour de la place du 9 Juillet. Moi qui n’aime pas le shopping, je suis servi ! Vers midi, je grignote dans la rue de maigres sandwichs, puis rentre à l’hôtel pour régler quelques derniers soucis sans grande importance. Même s’il s’est amélioré, le temps reste toujours maussade. Je me rends alors au musée de l’Archéologie de la Haute Montagne. Il renferme les corps momifiés de trois enfants, découverts lors d’une expédition sur le volcan Llullaillaco en 1999. En effet, les Incas sacrifiaient de jeunes humains pour satisfaire les dieux, afin de s’assurer leur protection. Ils les menaient au sommet des montagnes sacrées, puis les ensevelissaient vivants après les avoir drogués. Le corps d’une adolescente (La Doncella) est exposé dans une sorte de globe de protection, à pression et température basses. Les enfants momifiés sont présentés au public à tour de rôle. Ils étaient accompagnés de nombreux objets funéraires, comme notamment ces splendides petites figurines humaines recouvertes d’or, d’argent, de plumes et de textiles. Après cette intéressante visite, je dévore une grosse pizza savoureuse dans une cantine populaire. Sur le chemin du retour, plusieurs chanteurs, musiciens et danseurs donnent une représentation sur un podium installé en face de la cathédrale. Malgré le crachin persistant, le public est bien nombreux !

 

 

Dimanche 18 septembre : Salta - Talapampa (106, 3 km)

 

Le-bivouac-a-Talapampa.jpg

 

Le beau temps n’est pas au rendez-vous. La motivation non plus ! Malgré tout, je quitte Salta en direction de Cafayate. Après les faubourgs de la ville, la route traverse une banale région agricole située dans la vallée de Lerma. Les champs et les prairies s’étendent jusqu’au pied des montagnes andines. Les sommets sont malheureusement masqués par les nuages. D’ailleurs, le ciel bas et gris rend le coin sombre et triste. A l’entrée de San José de Los Cerrillos, je crève encore de la roue arrière. Cette fois, la chambre à air est déchirée au niveau de la valve. Elle est bonne pour la poubelle ! En chemin, plusieurs perruches vertes et perroquets noirs s’envolent à mon passage en poussant des cris stridents. J’aperçois également quelques rapaces que je n’arrive pas à identifier. A l’heure du midi, je goûte au locro régional dans un petit restaurant d‘El Carril. Il s‘agit d‘une sorte de potée de maïs épaisse, accompagnée de viande de bœuf bouilli. Après le village, le paysage devient un peu plus vallonné. Le temps maussade ne le met cependant pas en valeur ! En fin de journée, ma roue avant tangue étrangement avec un bruit inquiétant de craquement. Je la démonte alors délicatement pour ne pas perdre de pièces, notamment les petites billes du roulement. Mes craintes sont malheureusement justifiées, car l‘axe du moyeu est brisé en deux. Comme je ne peux rien faire dans l’immédiat, je remonte tant bien que mal en serrant un maximum l’ensemble. J’espère seulement que ma réparation de fortune va tenir jusqu’au prochain magasin de cycles ! A cause des nombreux terrains privés clôturés, il est bien difficile de trouver un coin tranquille pour bivouaquer. C’est pourquoi je préfère revenir légèrement sur mes pas jusqu’au cours d‘eau asséché de Tobar, à l‘entrée du village de Talapampa. Les cris et les chants des animaux tropicaux me rappellent un peu l’ambiance de l’Asie. Ils sont à peine perturbés par le meuglement des bovins, parqués dans la prairie juste derrière le campement.

 

 

Lundi 19 septembre : Talapampa - Cafayate (108,9 km)

 

1.-La-riviere-las-Conchas-dans-la-Quebrada-de-Cafayate.jpg 2.-Le-cycliste-dans-la-Quebrada-de-Cafayate.jpg

 

Comme le ciel est toujours aussi couvert, je démarre la journée bien contrarié. En effet, j’espérais avoir du meilleur temps pour la traversée de la réputée quebrada de Cafayate. La route s’enfonce alors dans la vallée de la rivière Rio de las Conchas, enserrée par des montagnes rendues bien sombres sous la grisaille. Pourtant à l’entrée du fameux canyon, quelques rayons de soleil semblent vouloir percer l’épaisse couche nuageuse. La chance est peut-être de mon côté ! Comme pour Humahuaca, les parois abruptes érodées présentent des strates sédimentaires aux teintes variées. Je pique-nique dans ce splendide décor en bordure de route. Il est cependant dommage que de nombreux détritus traînent un peu partout ! Les gens sont vraiment dégueulasses ! Mon moral est complètement regonflé, lorsque le soleil fait ressortir les couleurs chatoyantes des rochers. Entre autres, le rouge vif se mêle au vert nébuleux. Plusieurs intéressantes formations rocheuses jalonnent le parcours. Les impressionnants couloirs de la « Gorge du Diable » et de « l’Amphithéâtre » dévoilent une roche déformée par le mouvement tectonique. D’autres sont moins spectaculaires, mais tout aussi intéressants, comme le rocher du « Crapaud » ou celui de « l’Obélisque ». Au vu du nombre de photos que l’on tire de moi sur Tornado, je dois être la vedette du jour ! Je vais finir par me faire payer ! Tout à coup, un vent violent se lève en fin d’après-midi. Par chance, il me pousse majoritairement sur les derniers kilomètres. J‘arrive ainsi à Cafayate à grande allure. De nombreuses bodegas (maisons vinicoles) sont dispersées autour du gros bourg, au beau milieu des vignobles. En effet, la région est célèbre pour la qualité de ses vins. Je m’accorde d'abord une courte pause dans un troquet, puis tourne longuement dans le village touristique afin de trouver un coin pour bivouaquer. Finalement après de nombreux allers-retours, je m’installe au camping Lorohuasi à coté du cours d’eau. Il est vrai que j’aurais mieux fait de planter la tente quelques kilomètres avant le village ! Malgré tout, le jeune qui gère le terrain est très sympathique. Il me pose d'ailleurs un tas de questions sur mon aventure autour du monde.

 

3.-Formations-rocheuses-dans-le-canyon.jpg 4.-Montagnes-colorees-dans-la-Quebrada-de-Cafayate.jpg

 

 

Mardi 20 septembre : Visite de Cafayate et de ses alentours

     

1.-Rocher-perce-pres-du-Rio-Colorado.jpg

 

Je décide de passer la journée à Cafayate. Tôt le matin, je pars à pied en direction de la rivière Rio Colorado, située à 6 km à l’Ouest du village. La piste est empruntée malheureusement par de nombreux véhicules qui se rendent dans les bodegas alentour. A chaque passage, ils me noient dans un nuage de poussière. Vraiment pénible ! Après les grands champs de vignes, le paysage devient plus désertique. Quelques cactus se dressent sur le flanc des montagnes arides. Un sentier mène aussi à diverses peintures rupestres, cachées sous de gros blocs rocheux. Il est d’ailleurs bien difficile de les repérer. Un dessin ressemble vaguement à un lama, tandis que d’autres représentent divers symboles célestes. Un curieux rocher est également percé de gros trous équidistants. Je poursuis ma balade jusqu’à l’entrée du Rio Colorado. Le sentier longe le petit cours d’eau dans une étroite vallée. Il mène à une ingénieuse cascade artificielle, qui récolte l’eau de la rivière pour irriguer les grandes plantations viticoles alentour. Le sentier se perd ensuite dans la pierraille et les gros blocs rocheux. Peu certain d’être sur le bon chemin, je préfère abandonner la promenade. Tant pis pour les chutes en amont ! Il me faut alors reprendre les interminables kilomètres de la piste poussiéreuse jusqu’au centre du village. En début d’après-midi, je mange dans le même troquet que la veille un bien maigre lomito (un sandwich avec un fin steak, du fromage et de la salade). Puis, je déambule dans les rues autour de la place centrale. Le cadre rural de Cafayate est assez agréable, mais bien trop touristique à mon goût. D’ailleurs, les restaurants et les hôtels pratiquent des tarifs super élevés. En fouinant un peu, je finis par trouver un axe de moyeu pour réparer Tornado. Reste à voir demain s’il est compatible avec ma roue avant ! Après avoir cassé la graine dans la rue, je me rends dans une cave à vins pour une dégustation. Plutôt que de goûter une série de pinards à la chaîne, je préfère déguster un verre de grand cru. Le sommelier me conseille un vin rouge malbec de la bodega Mayuco, qui s’avère excellent. A l’extérieur, de nombreux chars conçus et décorés par les écoles du village s’apprêtent à défiler autour de la place. Demain 21 septembre, c’est le printemps en Argentine !

 

2.-L-eglise-de-Cafayate.jpg

 

 

Mercredi 21 septembre : Cafayate - Ruines de Quilmes (61,2 km)

     

Les-vignes-de-Cafayate.jpg

 

Au réveil, j’ai la désagréable surprise de constater que mon pneu arrière est à plat. La journée commence bien ! Je change ensuite l’axe du moyeu de la roue avant. Sans outillage adéquat, la réparation prend plus de temps que prévu. Comme il est déjà presque midi, je préfère rejoindre le centre pour pique-niquer. A l‘entrée du village, mon pneu arrière se dégonfle à nouveau. Toutefois, je préfère d’abord m’alimenter tranquillement sur un banc, avant d’entamer la seconde réparation de la journée. Bizarrement, un copeau de métal s’est glissé sous le fond de jante. Je pense pouvoir démarrer l’étape, mais rebelote 300 mètres plus loin ! Ce n’est pas possible, le mauvais sort s’acharne sur moi ! J’essaye de garder tant bien que mal mon calme, car la crise de nerfs est toute proche. Avec tous ces déboires, il est déjà 15 h lorsque je quitte enfin Cafayate. La route traverse de nombreuses plantations de vignes, qui s’étalent dans la large vallée de la rivière Santa Maria. Une brume masque malheureusement les montagnes arides alentour. En effet, il fait une chaleur de bête ! Au fil des kilomètres, le paysage devient plus désertique. De nombreux cactus géants, appelés localement cardon, refont leur apparition dans les rochers. J’atteins ainsi sans grande difficulté le minuscule village de Quilmes. En plus d’être une marque de bière brassée à Buenos Aires, c’est surtout le nom de la communauté indienne qui vécut à l’époque pré-inca. Elle fut déportée à Buenos Aires par les espagnols au 17ème S. Une piste sablonneuse permet de se rendre aux ruines, situées environ 5 km plus à l‘Ouest. Avec l’autorisation du sympathique gardien, je plante la tente juste à l’entrée du site. Comme les nuits sont beaucoup plus chaudes par rapport à l’Altiplano, je prends le temps de repérer quelques constellations de l’hémisphère Sud avec mon planisphère (entre autres la Croix du Sud, le Centaure, le Scorpion, le Sagittaire…).

 

 

Jeudi 22 septembre : Ruines de Quilmes - Eglise San Antonio (45,3 km)

     

1.-Les-ruines-de-Quilmes.jpg

 

Pour pas changer les habitudes, ma roue avant est à plat. En fait, les rustines achetées en Bolivie sont de très mauvaise qualité ! Moi qui voulais visiter les ruines de Quilmes avant l‘arrivée des cars de touristes, c‘est plutôt raté ! La forteresse indienne s’étale à flanc de montagne. Elle est constituée de nombreux murets en pierres, formant les contours des différents bâtiments de l’époque. Je grimpe à pied au bastion Nord situé au sommet de la colline, pour apprécier toute l’étendue du site. Après la visite, je rejoins à vélo la route principale en direction de Tafi del Valle. Elle monte longuement dans les montagnes de la Sierra del Aconquija. De nombreux automobilistes et motards m’encouragent en me croisant ou me dépassant. Au bout d’une petite quinzaine de kilomètres, je stoppe à Amaicha del Valle pour pique-niquer sur la place centrale. Lorsque je redémarre, un vent du diable se lève ! Et bien entendu, je l’ai en pleine face ! Ma vitesse chute alors terriblement, elle varie à peine entre 8 et 6 km/h ! Aussi, la vallée de Santa Maria en contrebas est à nouveau complètement embrumée par la chaleur. Les rafales sont tellement violentes qu’elles me font poser pied à plusieurs reprises. Bref, je m’essouffle rapidement ! Pour ma dernière grosse ascension en Amérique du Sud, je suis gâté ! D’ailleurs, mon moral en prend un sacré coup ! C’est pourquoi plutôt que de lutter péniblement contre les éléments naturels, je préfère m’arrêter prématurément à l’église San Antonio. De plus, le petit bâtiment blanc permet d’abriter légèrement la tente des fortes bourrasques. Sans permission, je n’ai osé pas m’installer dans l’édifice religieux resté ouvert ! J’espère seulement que mon frêle abri va tenir le coup durant la nuit. Si le vent pouvait cesser pour demain, ce serait vraiment parfait !

 

2.-La-vallee-de-la-riviere-Santa-Maria-dans-la-montee.jpg

 

 

Vendredi 23 septembre : Eglise de San Antonio - Santa Lucia (99, 3 km)

 

1.-Riviere-dans-les-montagnes-arides-lors-de-l-ascension.jpg 2.-Le-cycliste-au-sommet-du-col-El-Inifernillo.jpg

 

Le vent a secoué la tente une bonne partie de la nuit ! Par chance, il a complètement chuté ce matin ! Je décampe alors expressément à l’aube, de peur qu’il ne se lève à nouveau. La grimpette est forcément bien plus aisée dans ces conditions. D’autant plus que le soleil est encore au rendez-vous ! L’étroite route surplombe une petite rivière, qui se faufile entre les montagnes désertiques parsemées de grands cactus. Après une bonne dizaine de kilomètres, j’atteins enfin le col d’El Infiernillo situé à 3042 mètres. Je suis quand même bien étonné d’avoir monté plus de 1400 mètres de dénivelé pour passer la Sierra del Aconquija ! La vallée sur l’autre versant est totalement sous les nuages. La descente s’avère alors bien plus périlleuse que prévue ! Mon champ de vision est réduit à moins de 100 mètres. Autant dire que je ne vois absolument rien du paysage ! De plus, le froid me transperce le corps. Mes mains et mes pieds ne tardent pas à s’engourdir. Un petit millier de mètres plus bas, j’atteins Tafi del Valle complètement frigorifié. J’ai d’ailleurs un mal de chien à me réchauffer ! Je pique-nique ensuite aux abords du parc, situé sur la place semi-circulaire de la petite bourgade. Comme par enchantement, le ciel se dégage d’un coup. C’est fou ce que quelques rayons de soleil peuvent faire du bien ! Je discute avec un vieil homme, qui me donne quelques renseignements sur le trajet vers Tucuman. Cerné pourtant par de jolies montagnes, Tafi del Valle ne me laissera pas un souvenir impérissable ! Comme partout en Argentine, les commerces ferment durant l’après-midi. Sans animation, les rues deviennent alors bien mornes. Lorsque je repars, le méchant vent de face s’est levé dans la large vallée encore légèrement embrumée. Après quelques hésitations, je bifurque vers El Mollar. En effet, le village renferme un parc archéologique, avec plus d‘une centaine de menhirs sculptés découverts dans la région. Le passage des vitesses sur Tornado devenant de plus en plus pénible, je change un maillon de chaîne qui commence à se déformer méchamment. Plus loin, sur une piste qui rattrape     l’itinéraire principal, ma sacoche de guidon se décroche en faisant valdinguer mon appareil photo. Par chance, sans gravité ! La route plonge ensuite longuement dans les étroites gorges de la rivière Rio Los Sosas. Les montagnes sont envahies par une épaisse et verdoyante forêt tropicale. Le contraste avec l’aridité des hauts plateaux est flagrant ! Je descends cependant prudemment, à cause des nombreux lacets au revêtement fortement détérioré. Je ne tiens pas à finir en bas du ravin ! Les kilomètres défilent quand même à grande vitesse, faisant chuter l’altitude d’environ 1700 mètres. Après presque 40 km de folle descente, je rejoins la nationale en direction de Tucuman. Juste après le village de Santa Lucia, je plante la tente en bordure d’un champ humide. Des odeurs d’humus et de plantes sucrières s‘y dégagent. Désormais, les montagnes andines sont derrière moi !

 

3.-Menhir-sculpte-a-El-Mollar.jpg 4.-Les-gorges-verdoyantes-de-la-riviere-Los-Sosas.jpg

 

 

Samedi 24 septembre : Santa Lucia - San Miguel de Tucuman (61,3 km)

 

Statue-au-parc-historique-de-La-Famailla.jpg

 

La température nocturne a sensiblement augmenté avec la baisse d’altitude. La tente est également détrempée par la rosée matinale. Une grosse cinquantaine de kilomètres me sépare de San Miguel de Tucuman. La route complètement plate traverse principalement de grands champs de canne à sucre. En effet, l’économie de la région repose fortement sur l’industrie sucrière. D’ailleurs, de nombreux camions excessivement chargés rendent la circulation bien dangereuse. Ils me rasent de très près à chaque dépassement, me déportant parfois sur le bas-côté. Au bord de la chaussée, de nombreuses personnes me regardent passer comme une bête curieuse. Beaucoup me font un signe de la main pour m’encourager. A Famailla, le parc thématique historique présente quelques statues et sculptures curieuses. Devant la bâtisse blanche étincelante sous le soleil, plusieurs mannequins sont exposés retraçant quelques scènes rurales du 19ème S. Vers midi, je casse la croûte dans un jardin d’enfants au hameau de la Reduccion. Au fil des kilomètres, la région devient plus urbanisée, signe de l’approche de la grande ville. De suite, je prends quelques nouvelles sur internet pour le logement de ce soir. Une amie de Gilles (toujours le cycliste rencontré en Asie !) est prête à me recevoir pour quelques nuits. Reste à savoir si elle est disponible ce week-end, car elle fut prévenue bien tard de mon arrivée ! Devant la cathédrale et l‘église de la Merced, une procession religieuse se prépare à nouveau. Les haut-parleurs, placés tout autour de la place de l’Indépendance, diffusent les prières et les chants spirituels des fidèles. Aujourd’hui, c’est la date anniversaire de la bataille de Tucuman ! En 1812, les indépendantistes argentins ont vaincu les royalistes espagnols. La Vierge de la Merced fut alors choisie comme patronne de l’armée de la république. Après avoir erré quelques heures, j’ai la confirmation pour séjourner chez Zumela. Elle m’accueille chaleureusement dans sa petite maison, un peu à l‘écart du centre. Toutefois à cause de mon rudimentaire espagnol, les discussions sont parfois bien compliquées ! Ce qui rend certaines situations assez cocasses !

 

 

Dimanche 25 septembre : Visite de San Miguel de Tucuman

 

1.-La-cathedrale-de-Tucuman.jpg

 

Pour une fois, je m’accorde une grasse matinée ! Je discute longuement avec Zumela, notamment sur les différentes curiosités de la ville. En début d’après-midi, je retourne directement sur la Plaza Independencia. Elle est entourée de quelques belles bâtisses, comme la majestueuse maison du Gouverneur de style néoclassique (Casa de Gobierno). Toutefois, d’affreux buildings cassent l‘harmonie de la place. La cathédrale est par contre un bel édifice néoclassique. Elle renferme quelques fresques au plafond et un petit chœur en bois assez décevant. Après avoir mangé rapidement dans la rue, je rejoins le parc du 9 Juillet, situé quelques centaines de mètres plus à l’Est. De nombreux habitants viennent y chercher un peu de fraîcheur à l’ombre des arbres. En effet, il fait un temps caniculaire ! D’ailleurs, plusieurs vendeurs de glaces circulant à vélo font le bonheur des enfants. De belles demeures sont éparpillées dans l’espace vert. La Casa del Obispo Colombres présente différents outils et machines en relation avec l’industrie de la canne à sucre. Plus loin, une jolie pergola en cercle est également abondamment fleurie. Le reste est beaucoup plus banal ! Le coin est malheureusement pris d’assaut par une multitude de touristes venus en car. D’ailleurs, un petit train permet de faire le tour du parc pour les enfants, les plus âgés… ou les plus paresseux ! Je poursuis la visite de Tucuman en flânant dans les rues commerçantes autour du centre. Je découvre entre autres la Casa del Independencia, où fut signé l’indépendance du pays en 1816. Aussi, quelques supporters ont envahi la place pour le championnat de football. Le derby de la journée oppose San Martin à l‘Atlético, les deux clubs de la ville. En début de soirée, je mange quelques empanadas dans un petit restaurant diffusant le match. Avec l’ouverture des commerces, les rues sont forcément beaucoup plus vivantes que dans l’après-midi. La place Urquiza est notamment bondée de monde. Quelques airs de tango émanent des haut-parleurs. Ambiance Argentina !

 

2.-Le-parc-du-9-Juillet-de-Tucuman.jpg 3.-La-Casa-del-Gobierno-illuminee.jpg

 

 

Lundi 26 septembre : San Miguel de Tucuman

 

1.-Vendeur-de-glaces-dans-le-parc.jpg

 

C’est certainement la journée la plus inactive de tout mon périple cycliste autour du monde ! En effet, j’ai passé mon temps… à ne rien faire ou presque ! En fin de matinée, je laisse Zumela à ses occupations. Elle prépare notamment une manifestation pour le droit à l'avortement en Argentine. Je retourne alors au parc du 9 Juillet, pour classer tranquillement mes derniers clichés à l‘ombre d‘un grand arbre. Il faut reconnaître que la chaleur caniculaire ne motive vraiment pas pour bouger ! De plus, tous les commerces autour de la place Independencia sont fermés pour la siesta. Du coup, j’en profite également pour piquer un petit somme ! Toutefois même dans l‘oisiveté, les heures défilent à grande vitesse. En début de soirée, je rejoins Zumela et son amie Cecilia dans un bar proche du centre. Même si les langues espagnol et française ont les mêmes racines latines, j’ai bien de la peine à suivre la discussion. C’est assez frustrant ! Nous finissons par manger quelques empanadas, avant de rentrer bien tard à la casa.

 

2.-Jeunes-pecheurs-dans-le-parc.jpg

 

 

Mardi 27 septembre : San Miguel de Tucuman

 

A cause d’une certaine incompréhension avec Zumela, je me sens « obligé » de rester une journée supplémentaire à Tucuman. En effet, comme elle est partie travailler, je ne tiens pas à quitter les lieux sans la remercier. C’est pourquoi j’erre de nouveau dans les rues commerçantes de la ville toute la journée. Je finalise également mon parcours sur internet pour le retour din ch’Nord depuis Madrid ! Il devrait logiquement avoir lieu entre la mi et la fin novembre. Même s’il me reste deux petits mois à voyager, ça commence à sentir la fin ! (A moins que…!). J’en profite également pour faire une grosse lessive, et quelques réparations sur les sacoches qui ont souffert ces dernières semaines. Cela fait quand même plus d’une dizaine d’années que je les trimbale un peu partout dans le monde ! Bref, tout cela n’est pas bien intéressant pour mes fidèles lecteurs ! Je soupe rapidement au même resto populaire de l’avant-veille, avant de retrouver une dernière fois la maison de Zumela.

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27 décembre 2014 6 27 /12 /décembre /2014 13:02

Mercredi 28 septembre 2011 : San Miguel de Tucuman - Monteagudo (95,1 km)

 

1.-Riviere-sur-la-route-de-Simoca.jpg

 

Dans la matinée, je quitte Zumela avec l’intention de faire une grosse étape en direction de Cordoba. Durant ces trois jours, elle m’a accueilli chaleureusement dans son humble demeure, avec grande confiance. Avant de prendre la route, je pique-nique prématurément sur un banc proche de la place Urquiza. Pour sortir de la ville, les nombreux taxis rendent la circulation bien pénible. Sur les conseils de quelques autochtones, j’emprunte la nationale 157 complètement plate qui file vers le Sud. Selon les dires, elle devrait être moins fréquentée par les camions. Elle traverse tantôt de vastes champs labourés, tantôt une végétation composée d’arbustes épineux. Depuis mon entrée en Argentine, de nombreuses chapelles et autels sont parés de drapeaux rouges et d’offrandes. Ils rendent hommage à El Gauchito, une sorte de Robin des Bois du 19ème S vénéré par la population. Le trajet du jour n’est pas bien difficile. La seule véritable difficulté vient de la chaleur étouffante qui ne motive vraiment pas à pédaler ! C’est pourquoi je marque une longue pause au petit village de Simoca, afin d’attendre une légère baisse de la température. En début de soirée, je plante la tente en bordure d’un champ, quelques kilomètres après le village de Monteagudo. Le coin qui semblait tranquille est infesté de nombreux insectes volants. Mon repas du soir est du même coup beaucoup plus protéiné que d’habitude ! De plus, les bébêtes m’assaillent de piqûres. Tout cela me rappelle la même situation dans les tourbières écossaises, plusieurs années en arrière !

  

2.-Chapelle-en-memoire-d-El-Gauchito.jpg

 

 

Jeudi 29 septembre : Monteagudo - Lavalle (78,9 km)

 

Les bestioles sont toujours présentes, mais beaucoup moins coriaces que la veille. Malgré tout, je déguerpis assez rapidement. Au bout d’à peine 3 km, je crève encore de la roue avant. Le paysage est toujours aussi monotone. Les prairies et les champs alternent avec les immenses étendues d’arbustes. La circulation routière est curieusement plus importante que la veille. Je suis carrément soufflé par les camions qui me croisent ou me dépassent. De plus, un vent chaud s’est levé. Et forcément, je le prends en pleine face ! L’air devient également plus suffocant avec la température qui grimpe au fil des heures. J’ai la gorge qui s’assèche constamment, et il n’y a pas beaucoup de troquets sur la route ! Au petit village de Taco Ralo, je pique-nique sur une table à l’ombre d’un arbre. La chaleur et le vent contraire ne donnent vraiment pas envie de reprendre la route. Du coup, les kilomètres ne défilent pas très rapidement. J’ai l’impression de ne pas avancer beaucoup ! La fatigue commençant à se faire sentir, je me désaltère à la terrasse d’un commerce du village de Lavalle. Un cyclo argentin vient tout à coup à ma rencontre. Juan Alberto, qui se surnomme sans modestie Superman, compte pédaler en Amérique du Sud durant une année. Après de longues discussions, nous partageons nos maigres aliments à côté de la station-service toute proche. Il me propose ensuite de camper avec lui derrière le bâtiment. Le petit terrain est cependant rempli de détritus. Il est de surcroît complètement à découvert. Peu rassuré, j‘installe quand même la tente. Avec le passe-passe des bruyants camions au carrefour des deux nationales, la nuit risque d’être bien difficile !

 

 

Vendredi 30 septembre : Lavalle - Recreo (127,9 km)

 

1.-Juan-Alberto-et-moi-au-bivouac-de-Lavalle.jpg

 

Je me lève aux aurores en même temps que mon compagnon. Il me quitte rapidement pour prendre la direction de San Fernando del Valle de Catamarca, plus à l’Ouest. Mon parcours ne varie pas beaucoup par rapport à celui de la veille. La seule différence importante est l’absence du vent. Ce qui n’est pas pour me déplaire ! C’est pourquoi j’envisage de faire une grosse étape, afin de rejoindre plus rapidement Cordoba dans quelques jours. Le ciel bas et nuageux masque en partie les montagnes de la Sierra del Alto. J’aperçois à peine leur silhouette, tellement c‘est brumeux ! J’atteins donc aisément Frias en fin de matinée. Je casse alors la graine sous un arbuste, en bordure de la nationale. Par chance, la couche nuageuse se dissipe subitement, laissant apparaître un beau soleil. Par contre, les camions roulent toujours aussi vite. Certains veulent toute la largeur de la route pour eux, tandis que d’autres klaxonnent par sympathie me faisant un geste de la main. En chemin, un splendide rapace à la tête colorée et plusieurs perruches vertes s’envolent à mon passage. De nombreux nids sont d’ailleurs construits sur les pylônes électriques, qui bordent la nationale de chaque côté. Puis, je stoppe à San Antonio de la Paz pour reprendre quelques forces. Depuis le début de journée, de nombreuses personnes engagent la conversation avec moi. Un petit vieux du village descend même de vélo pour discuter. Toutefois, mon gaillard semble beaucoup plus intéressé par ma bouteille de cerveza, que par mon récit cycliste ! Finalement, je décide de parcourir les derniers kilomètres jusque Recreo. Malheureusement, une énième crevaison stoppe une nouvelle fois ma progression. Cette fois, je monte une chambre à air toute neuve pour être tranquille. J’ai compté pas moins de douze rustines sur l’ancienne ! J’atteins alors le village à la tombée de la nuit. Après plus de 120 km, les jambes commencent à être bien lourdes ! Je discute avec un jeune commerçant bien sympathique, qui m’autorise à m’installer sur l’espace vert devant sa boutique. Le coin est encore très bruyant à cause du passage des camions. Et je ne suis pas beaucoup plus tranquillisé par rapport à la dernière nuit !

 

2.-Ane-tirant-une-charrette-a-Frias.jpg

 

 

Samedi 1er octobre : Recreo - Environs de Quilino (112,1 km)

 

1.-Le-paysage-aride-de-la-Salinas-Grandes.jpg

 

Ma nuit fut fortement perturbée par la circulation nocturne. Du coup, je ne suis pas de très bonne humeur ce matin ! Cependant, les habitants et les automobilistes qui me saluent me redonnent du baume au cœur. Il fait encore une chaleur de bête aujourd’hui ! La température doit avoisiner les 30° C ! Le paysage ne varie toujours pas par rapport aux jours précédents. Toutefois, les arbustes disparaissent petit à petit, pour laisser place à des buissons aux épines acérées. Mes jambes sont d’ailleurs égratignées de partout ! Un fort vent de côté se lève d’un coup, faisant chuter considérablement ma vitesse. A l’approche de la région de Salinas Grandes, la végétation s’éparpille entre des petits bancs de sel. A l’horizon, la grande étendue blanche étincelle sous le soleil. Il est malheureusement impossible de s’en approcher, car tout le coin est clôturé. Comme un peu partout en Argentine d‘ailleurs ! La circulation est toujours infernale. Je surveille constamment mon rétroviseur pour dégager sur le bas-côté caillouteux, lorsque deux camions se croisent à pleine vitesse. Depuis mon départ de Tucuman, tous les villages possèdent de hautes antennes de télécommunications visibles au loin. Ce n’est pas très esthétique, mais cela permet au moins de juger la distance qui reste encore à parcourir ! Comme le village de Totoralejos semble être rayé de la carte, je poursuis jusque Lucio Victorio Mansilla. Avec la chaleur, je consomme énormément d’eau ! Par chance, le vent cesse aussi brusquement qu’il est apparu. Le compteur indique déjà plus de 70 km, lorsque je pique-nique enfin à la terrasse d’un resto routier du village. Je traînaille deux bonnes heures en sirotant quelques bières, avant de poursuivre mon chemin. En fin d’après-midi, j’installe le bivouac derrière quelques arbustes au bord de la nationale. Avec le vacarme de la circulation, le coin est loin d’être idéal ! D’autant plus qu’il est infesté de petites mouches enquiquinantes, ainsi que de nombreux coléoptères qui n‘hésitent pas à pénétrer dans la tente !

 

2.-Tornado-sur-la-route-de-la-Salinas-Grandes.jpg

 

 

Dimanche 2 octobre : Environs de Quilino - Sarmiento (86,8 km)

 

1.-Cactus-devant-la-sierra-Chica.jpg

 

Les mouchettes me font décamper très rapidement. Elles se collent partout sur le visage et le corps. C’est vraiment agaçant, il y a de quoi péter les plombs ! Le soleil tente difficilement de percer les nuages gris qui couvrent le ciel. La route en faux plat montant et le vent de face rendent le pédalage bien pénible. A cela, il faut rajouter la circulation incessante ! Au bout d’une dizaine de kilomètres, je rejoins Quilino, un village non indiqué sur ma carte. Et dire que je me suis rationné en eau toute la soirée d’hier ! Quelques silhouettes de montagnes commencent à se dessiner à l‘horizon. A l’entrée de Dean Funes, je croise un voyageur suédois à vélo. Rasmus entame un périple en Amérique du Sud, au départ de Buenos Aires. Puis, je pique-nique rapidement sur le seuil d’une maison du village. La route poursuit ensuite sa légère ascension entre la Sierra Ambargasta et la Sierra Chica. Les arbustes et les épineux ont totalement disparu, cédant la place à de vastes champs s’étendant jusqu‘au pied des montagnes. Comme je commence à fatiguer, je m’accorde une pause-bière à Avellaneda. Le charmant petit village est complètement désert ce dimanche. Le coin me plaît bien pour passer la nuit, mais je tiens absolument à rejoindre Cordoba demain soir ! Une vingtaine de kilomètres plus loin, je plante la tente au bord de la nationale, au milieu de grandes plantes desséchées. A l’inverse des jours précédents, il fait bien frisquet en ce début de soirée !

 

2.-La-sierra-Ambargasta-sous-les-nuages.jpg

 

 

Lundi 3 octobre : Sarmiento - Cordoba (92,4 km)

 

1.-Le-cycliste-sur-la-piste-au-bivouac-de-Sarmiento.jpg

 

La météo semble être détraquée ! Le ciel est à nouveau couvert de nuages gris, et la température a chuté de plusieurs degrés. Mon bivouac se situe non loin du village de Sarmiento, un peu à l’écart de la route. Après l’embranchement avec la nationale 9, la circulation devient complètement folle. Les camions roulent comme des tarés ! Beaucoup klaxonnent pour me faire dégager sur le bas-côté. Ces conditions dangereuses finissent par sérieusement me taper sur le système ! A l’Ouest, la plaine agricole s‘étend toujours jusqu‘aux basses montagnes de la Sierra Chica. J’atteins ainsi rapidement la petite ville de Jesus Maria. Elle renferme une estancia jésuite du 17ème S, entourée de jolis jardins fleuris. Cette fois, la chance ne me sourit pas, car l’église et le couvent sont fermés le lundi. Avant de reprendre l’infernale route en direction de Cordoba, je pique-nique sur la petite place centrale. Après quelques kilomètres, la chaussée est beaucoup plus sécurisante grâce aux bandes d’arrêt d’urgence goudronnées. A l’entrée de la grosse agglomération, la circulation devient brusquement interdite aux vélos. La bonne blague, je fais comment ? Peut-être faut-il s’envoler ou même creuser pour rejoindre Cordoba ? La ville s’étale interminablement sur des kilomètres. Une longue avenue me mène directement au centre-ville. Je réserve de suite une chambre à l’hôtel Garden. Le tarif est élevé, mais un peu plus de confort ne fait pas de mal après ces nombreuses nuits dans la « brousse » ! Je parcours ensuite les rues illuminées et vivantes, à la recherche d’un endroit pour manger. Je trouve finalement un petit snack populaire bon marché. A mon retour, quelques gouttes de pluie commencent à tomber, mais rien de bien méchant !

 

2.-L-estancia-de-Jesus-Maria.jpg

 

 

Mardi 4 octobre : Visite de Cordoba

 

1.-La-cathedrale-et-le-cadilbo-de-Cordoba--sur-la-place-Sa.jpg  2.-L-eglise-elancee-Sagrado-Corazon-de-Jesus-de-los-Capu.jpg

 

Comme je compte rester deux jours sur place, je démarre la visite de Cordoba prématurément, de manière à voir un maximum de monuments pour être plus relax le lendemain. Les rues piétonnières commerçantes débordent de monde flânant de vitrine en vitrine. A proximité de l’hôtel, la belle cathédrale domine la place San Martin très animée. Les murs intérieurs et le plafond sont recouverts de magnifiques fresques colorées. Je pénètre ensuite dans le musée de la Mémoire. Il est installé dans l’ancien bâtiment de détention et de torture, ayant servi à l’armée durant la dictature des années 70. Un peu comme à Phnom Penh au Cambodge, de nombreuses photographies des victimes sont accrochées aux murs décrépis des cellules. Plus loin, le quartier jésuite forme un grand ensemble uni, appelé Manzana. Il comprend l’église de la Compania de Jesus renfermant un bel autel baroque, l’université national de Cordoba avec son splendide cloître, et le collège national de Monserrat. Derrière l’édifice religieux, le plafond de la chapelle domestique présente de magnifiques fresques sur des peaux de vaches tendues. Je ne peux malheureusement jeter qu’un rapide coup d’œil, car une cérémonie y est célébrée. Dans les ruelles alentour, je découvre de belles demeures coloniales coincées entre de banals buildings, ainsi qu’une crypte jésuite datant du 18ème S. Cette dernière fut redécouverte en 1989, lors de travaux pour le passage de câbles téléphoniques. Dans l’après-midi, je déambule dans le quartier de Nueva Cordoba. Seuls quelques rares bâtiments méritent le détour. Le Paseo del Buen Pastor est une ancienne chapelle transformée en salle de spectacle. Aussi, la façade de l’église élancée Sagrado Corazon de Jesus de los Capuchinos est ornée de splendides sculptures religieuses. Plus loin, le palais Ferreyra est un joli bâtiment datant du début du 20ème S, construit dans un style Louis XVI. Puis, je me balade un moment dans le vaste parc Sarmiento pour tirer quelques clichés. Je retourne ensuite au centre-ville par la rue Belgrano dans le quartier de Güemes. Elle est bordée de nombreuses boutiques d’antiquités et d’artisanat. Je finis la visite par l’église Santa Teresa à la façade rose, puis les cours intérieures du cabildo (l’hôtel de ville colonial). Après cette longue journée, je file manger dans un petit restaurant populaire. Les argentins ont pour habitude de boire du vin rouge bon marché, coupé avec de l’eau gazeuse ou de la limonade. Franchement, il y a très peu de chance que je retente l’expérience !

 

3.-Les-arcades-de-la-cour-interieure-du-cabildo.jpg

 

 

Mercredi 5 octobre : Visite de Cordoba

 

1.-Brasero-dans-la-cour-de-la-maison-colonial-de-Rafael-Nun.jpg  2.-L-eglise-Nuestra-Senora-de-la-Merced.jpg

 

Peu reposé, je poursuis tardivement la découverte de la ville. Je consacre une bonne partie de la matinée à la visite de quelques musées. Plusieurs toiles de peintres célèbres de l’école de Cordoba sont exposées dans le palais Garzon, notamment celles de Genaro Pérez. Comme je ne tiens pas à faire le malin, il faut bien reconnaître que je n’ai aucune connaissance dans ce domaine ! Plusieurs salles sont malheureusement interdites au public, à cause des travaux pour une exposition temporaire. Je retourne ensuite à la chapelle domestique de l’église de la Compana de Jesus, qui reste toujours fermée. Décidemment, la chance n’est pas avec moi aujourd’hui ! Plus loin, je pénètre gratuitement dans la maison coloniale du 18ème S du gouverneur Rafael Nunez. Elle compte de jolies cours, et plus d’une vingtaine de pièces exposant du mobilier et divers objets de l’époque. La façade blanche présente également un superbe balcon en fer forgé. J’occupe ensuite mon début d’après-midi à classer mes derniers clichés, et faire quelques recherches sur internet. Puis, je visite rapidement la basilique Nuestra Senora de la Merced, qui propose un intérieur d’un relatif intérêt. Le soir, je décide finalement de pique-niquer à l’hôtel, pour régler les derniers problèmes avant d’attaquer la dernière ligne droite jusque Buenos Aires.

 

3.-Le-cabildo-et-la-cathedrale-illumines.jpg

 

 

Jeudi 6 octobre : Cordoba - Oliva (89,7 km)

 

1.-Le-cycliste-sur-la-place-San-Martin-de-Cordoba.jpg

 

Comme souvent dans chaque grande ville, je quitte l’hôtel bien plus tard que mes prévisions. En fin de matinée, je rejoins la nationale 9 en direction de Villa Maria. Parallèle à une autoroute, je mise sur une fréquentation plus faible ! De toute façon, je n’ai pas 36 000 possibilités pour atteindre Buenos Aires ! En tout cas, de nombreux travaux sur la chaussée rendent la sortie de Cordoba encore plus pénible. A cause d’une forte secousse causée par un gros trou, la bouteille de bière que je viens juste d’acheter s’explose sur le bitume. Sacrilège ! Cela m’apprendra à ne pas fermer correctement mes sacoches ! Un peu plus loin, je pique-nique dans un petit parc situé dans les faubourgs de la ville. Le paysage alentour est ensuite assez banal ! D’immenses champs céréaliers tapissent la plate pampa. De plus, le vent qui souffle fortement de côté me fait encore des misères. « Il ne me lâchera donc jamais ! ». Sur la chaussée, un serpent vient juste de se faire écraser. Son corps ondule encore nerveusement pour tenter d’avancer. Le trafic routier est par contre moins important que je l’imaginais. Toutefois, l’absence de bandes d’arrêt d’urgence goudronnées rend la circulation à vélo assez dangereuse ! D’autant plus que certains automobilistes roulent comme des cons ! L’un d’eux double même sur le bas-côté herbeux à ma droite, pour esquiver un camion qui freine derrière moi. Si j’avais dégagé pour laisser passer le poids lourd, c’était l’accident assuré ! A quelques kilomètres d’Oliva, je plante la tente derrière quelques arbustes sur une aire de repos. Une bande de chiens n’arrêtent pas d’aboyer, j’espère qu’ils vont la fermer avec la nuit tombée !

 

2.-Serpent-sur-la-route.jpg

 

 

Vendredi 7 octobre : Oliva - Bell Ville (124 km)

 

Ciel-menacant-au-dessus-des-champs-de-Villa-Maria.jpg 

 

Un orage a tourné dans le coin une bonne partie de la nuit. Il a ramené du même coup la pluie. J’attends alors une légère accalmie pour décamper. La malédiction des compteurs frappe encore ! Le nouveau acheté à Salta montre des signes de faiblesse. J’ai d’ailleurs bien du mal à le relancer ! Tous ces petits inconvénients me font démarrer l’étape bien tardivement. Sur la petite place d’Oliva, quelques avions de combat de l’armée sont curieusement exposés. Par chance, le crachin a cessé, mais les nuages gris et noirs restent toujours menaçants. Les champs et les prairies se succèdent continuellement entre les villages. Rien ne change vraiment par rapport à hier ! Des rongeurs, ressemblant à des marmottes de petite taille, détalent dans les fossés à mon passage. De même, il y a un nombre incroyable de variétés d’oiseaux : grandes perruches vertes, passereaux colorés, rapaces et échassiers. Après une bonne soixantaine de kilomètres, je casse la croûte en bordure de la nationale, à la sortie de la petite ville de Villa Maria. Je profite également d’une des rares éclaircies pour faire sécher la tente au soleil. Puis, je pédale encore et encore durant de longues heures. Juste après le village de Bell Ville, je bifurque sur un sentier en terre pour trouver un coin tranquille. Tout est à nouveau clôturé ! Toutefois, j’enjambe les barbelés pour installer le campement derrière quelques buissons. Le coin est rempli de crottins de cheval, mais après un peu de nettoyage, cela fait l’affaire ! Comme la circulation est moins pire que ce que j’attendais, je prends la décision de poursuivre l’itinéraire jusque Rosario.

 

 

Samedi 8 octobre : Bell Ville - Armstrong (109,2 km)

 

Champs-inondes-a-Armstrong.jpg

 

Pour la énième fois, ma roue avant est à plat ! En fait, la chambre à air s’use par frottement avec mon pneu complètement mort. Il va quand même falloir le remplacer pour la dernière partie du voyage ! Après une longue discussion avec un conducteur qui me proposait son aide, je peux enfin prendre la route. Le vent souffle terriblement de trois-quarts face. Il commence sérieusement à me gonfler ! C’est le cas de le dire ! Je pédale ainsi péniblement, sans énormément progresser. Je peste, je râle, je l’insulte… et brusquement, il s’estompe comme s’il m’avait entendu ! Du coup, je profite de l’aubaine, et poursuis mon chemin jusque Leones sans m’arrêter. Ma vitesse augmente alors de plus de 10 km/h. En contrepartie, il s’est mis à pleuviner ! La pampa devient complètement masquée par la bruine. A l’entrée du village, je m’arrête boire un verre à la terrasse couverte d’un commerce. Impressionné par le vélo, un client m’invite à sa table pour discuter. Une vraie pipelette ! Il débite tellement vite en espagnol que je finis par décrocher ! Je préfère même pique-niquer un peu plus loin près de la gare routière, pour être un peu plus au calme. La pluie cesse enfin, mais le ciel reste toujours aussi menaçant. A Marcos Juarez, je tourne longuement pour me ravitailler. Une nouvelle fois, toutes les épiceries sont fermées à l’heure de la siesta. Cela devient pénible ! Quelques dizaines de kilomètres plus loin, au niveau de Tortugas, la circulation est beaucoup moins importante. A mon grand bonheur, de nombreux chauffeurs préfèrent emprunter l’autoroute pour Rosario. Avec toutes ces terres fertiles, les parcs industriels autour des villages sont majoritairement tournés vers l’agroalimentaire (conditionnement de céréales, laiterie, fromagerie et autres). A l’entrée d’Armstrong, je m’écarte de la nationale pour bivouaquer au bout d’un grand champ. Le terrain est assez boueux, mais je n’ai pas d’autres choix ! Malheureusement, la pluie reprend de plus belle à la tombée de la nuit. J’espère seulement que ce n’est que passager, car la tente risque fortement de se retrouver dans une mare d’eau demain matin.

 

 

Dimanche 9 octobre : Armstrong - Rosario (Granadero Baigorria) (120,7 km)

 

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Avec toute l’eau tombée durant la nuit, les grenouilles sont à la fête ! Je patauge un peu dans la gadoue, mais il faut reconnaître que je m’attendais à bien pire ! Le ciel est toujours grisâtre, et un fort vent s’est levé. Tout cela ne motive pas pour décoller ! Néanmoins, je suis agréablement surpris de constater qu’il souffle quasiment dans ma direction. Comme durant ces derniers jours, le paysage champêtre reste plat comme une crêpe ! Je pédale ainsi très facilement une bonne cinquantaine de kilomètres jusque Carcarana. Je pique-nique alors dans une rue paisible, à peine troublé par quelques chiens errants. A la sortie du village, un automobiliste admiratif demande de m’arrêter pour discuter sur le bord de la chaussée. Tout semble se dérouler sans anicroche, lorsque soudain mon pneu arrière se retrouve à plat. Ce n’est pas possible, je vais devenir fou ! Si ce n’est pas l’un, c’est l’autre ! Forcément à l’approche de Rosario, la circulation s’intensifie. Je traverse les vastes faubourgs jusqu’au centre de la grosse ville. Fascinées par mon vélo lourdement chargé, de nombreuses personnes me félicitent à nouveau. Cela fait toujours plaisir ! Comme il se fait déjà tard, je cherche un logement dans les hôtels du centre. C’est incroyable, il n’y a aucune chambre bon marché disponible ! Du coup, je reviens sur mon idée première, c’est-à-dire rejoindre le camping municipal de Granadero Baigorria, une petite dizaine de kilomètres plus au Nord. En plus du manque d’indications, des travaux m’embrouillent encore plus. Toutefois me fiant à mon sens de l’orientation, je suis fier de rejoindre le terrain sans grande difficulté. Il est situé à proximité du fleuve Parana, le deuxième plus long en Amérique du Sud après l‘Amazone. Comme c’est la fin du week-end, le camping est assez bruyant ! Les gens sont vraiment sans gêne ! Ils mettent la musique à fond, crient, chantent sans se préoccuper des autres. A cela, il faut rajouter les aboiements des chiens, à cause d’un gugusse qui fait mumuse avec sa bruyante moto dans le quartier !

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26 décembre 2014 5 26 /12 /décembre /2014 11:55

Lundi 10 octobre 2011 : Visite de Rosario

 

 

1.-Rosario-et-le-rio-Parana.jpg

 

Avec tout le bruit durant la nuit, je suis encore complètement crevé ! Du coup, j’ai bien du mal à me motiver pour sortir de mon duvet douillet ! Comme par magie, les nuages pluvieux ont disparu, laissant place à un splendide soleil. Je passe la matinée à raccommoder une sacoche avant, puis à démonter le pneu arrière pour une réparation plus méticuleuse. Au final, il m’est impossible de regonfler la chambre à air à cause de la valve défaillante. Le vendeur m’avait pourtant certifié de la qualité du produit ! Vu l’heure avancée, je préfère pique-niquer sur place avant de partir visiter Rosario. Je prends alors le bus en direction du centre. La ville est bâtie en bordure du Rio Parana, emprunté par de nombreux cargos. Le fleuve est bordé par des entrepôts réhabilités en zones de loisirs. D’ailleurs, beaucoup de monde flâne tout du long. Je rejoins ensuite la haute tour du monument national de la Bandera. En effet, le drapeau argentin a été créé à Rosario par Manuel Belgrano. Derrière cet imposant édifice, la cathédrale domine la petite place du 25 Mai. La nef intérieure et la coupole sont joliment décorées de peintures. Elle renferme également quelques vitraux intéressants. Puis, je me rends à la maison natale du révolutionnaire Ernesto Guevara, plus connu sous le pseudonyme du Che. L’immeuble privé est cependant assez quelconque. Encore une fois, Rosario ne me laissera pas un souvenir impérissable ! Il faut certainement y séjourner plus longtemps pour mieux l’apprécier ! Aussi, il est déjà l’heure de rentrer en bus. A mon arrivée, le terrain de camping est presque vide. Désormais, le calme règne en maître ! Le contraste avec le vacarme de la veille est vraiment saisissant !

 2.-Les-entrepots-rehabilites-de-Rosario.jpg

 

Mardi 11 octobre : Repos à Granadero Baigorria (9,3 km)

 

Avant de démarrer l’étape, je me penche sur le problème des crevaisons à répétition de la roue arrière du vélo. En fait, un rayon cassé endommage la chambre à air. De plus, il y a de nouveau du jeu dans le moyeu. Les réparations me prennent une bonne partie de la matinée. Du coup, je décide de prendre la route plutôt demain. De toute façon à cause des tarifs élevés des hôtels, je ne suis vraiment pas pressé de rejoindre la capitale argentine ! Je casse ensuite la croûte au camping, avant d’occuper mon après-midi à diverses taches quelconques (notamment sur le net !). Je jette également un coup d’œil au rivage de la rivière Parana, située à quelques dizaines de mètres du terrain. Plusieurs îlots verdoyants complètement plats occupent le milieu du large cours d‘eau. Les heures défilent ainsi rapidement. Il n’y a vraiment rien d’intéressant à développer cette journée banale ! J’espère seulement avoir une nuit paisible, pour aborder plus sereinement les derniers jours jusque Buenos Aires.

 

 

Mercredi 12 octobre : Rosario - Avarez (38,9 km)

 La-petite-famille-de-Gloria-et-Marcelo.jpg

Quelle poisse, le mauvais temps s’est réinstallé ! Je quitte rapidement le camping avec l’idée de faire une grosse étape. C’est sans compter sur ce foutu vent qui souffle en provenance de l’Est ! Je le prends de trois-quarts face, c’est carrément démoralisant ! De plus, les feux rouges à chaque carrefour me font perdre beaucoup de temps. Il y en a un presque tous les 100 m ! Comme dans la plupart des villes d’Amérique du Sud, les rues s’entrecroisent à angle droit. Je pédale ainsi péniblement dans le bruit et la pollution du trafic routier de Rosario. Après de nauséabondes immondices à la sortie de la ville, je retrouve la pampa qui s’étend à perte de vue. Encore une fois, les camions roulent à grande vitesse sur l’étroite nationale. Il me faut régulièrement dégager sur le bas-côté, tantôt caillouteux, tantôt herbeux, pour les laisser passer. Au fil des minutes, le temps se dégrade dangereusement. Le tonnerre se met à gronder puissamment, et des éclairs jaillissent de partout. Ce que je craignais arrive brusquement ! De fortes averses me trempent des pieds à la tête, et le vent redouble de force ! Il devient alors extrêmement dangereux de pédaler dans ces conditions. Je me réfugie sous la véranda d’un petit commerce d’Avarez, qui fait également restaurant. Pour ne pas perdre trop de temps, je pique-nique en attendant l’accalmie. Les heures défilent sans aucune amélioration climatique. Bien au contraire, la tempête semble s’être installée. Une employée propose alors de m’héberger pour la nuit. Après quelques hésitations, je finis par accepter. En effet, je me vois mal reprendre la route sous le déluge. De plus, les champs risquent d’être totalement inondés pour le bivouac de ce soir. Je suis alors la voiture de son mari jusque leur humble demeure isolée. Toutefois, la boue et les flaques d’eau m’obligent à poursuivre à pied. Marcelo me présente ses trois enfants, puis me fait faire le tour du propriétaire. Il m’expose notamment ses travaux de compostage et d’élevage de porcs, ainsi que ses futurs projets de maison écologique. Je suis reçu comme un roi ! Je partage même le rituel maté avec la famille. Il s‘agit d‘une infusion de feuilles de plante (la yerba maté), que l’on aspire chacun son tour par une paille munie d‘un filtre (la bombilla). Gloria prépare ensuite un succulent repas avec de la viande de chevreau. Je loge finalement dans une remise aux murs décrépis, en compagnie d’un de leurs jeunes amis. En comptant deux jours de visite, il ne m’en reste plus que trois pour rejoindre Buenos Aires. Cela commence à être très tendu ! De plus, de nombreuses personnes me mettent en garde sur la circulation de la route N°8. Je n’ai cependant pas d’autre solution ! La 9 est une autoroute interdite aux vélos, et la 7 me fait faire un trop gros détour. Comme je ne tiens pas à finir sous les roues d’un camion, j’envisage peut-être de prendre le car au départ de Pergamino pour rejoindre la capitale. Tout dépendra de la météo de demain !

 

 

Jeudi 13 octobre : Avarez - Pergamino (109,4 km)

 1.-Le-cycliste-avec-Gloria-et-ses-enfants.jpg

Au petit matin, Marcelo vient me saluer avant de partir vers Rosario. Après le déjeuner, j’accompagne Gloria jusque la supérette pour faire quelques courses. Ce charmant couple m’a accueilli naturellement, comme si j’étais un ami de longue date. Le temps s’est un peu amélioré par rapport à hier. La pluie a enfin cessé, et le vent a légèrement changé de direction. Par contre cette fois, je ne le prends plus trois-quarts, mais pleine face ! Encore une journée qui s’annonce bien difficile ! Je pédale ainsi péniblement la tête dans le guidon, sans trop me soucier du paysage alentour. Au bout d’une trentaine de kilomètres, j’en ai déjà plein les bottes ! Malgré les pluies de la veille, les vastes champs dénués de cultures semblent complètement asséchés. Ils alternent régulièrement avec de grandes prairies verdoyantes pour l’élevage des bovins. Je bifurque ensuite vers le village de Santa Teresa pour pique-niquer dans un petit parc pour enfants. Dans l’après-midi, le vent n’a toujours pas faibli ! Ras-le-bol, j‘ai les nerfs à vif ! L’œil rivé sur le compteur, j’effectue kilomètre après kilomètre la distance qui me sépare de Pergamino. Le soleil, qui fait enfin son apparition, me redonne quand même un peu de courage. En début de soirée, j’atteins enfin la petite ville de campagne. La nuit tombée, je tourne longuement dans les environs afin de trouver un coin pour bivouaquer. Après un court interrogatoire par des policiers en patrouille, je fais finalement marche arrière sur la nationale, pour planter la tente à l’orée d’un bosquet. De nombreux oiseaux ont trouvé refuge dans les arbres feuillus. Le terrain est partiellement rempli de détritus, mais je n’ai ni la volonté, ni la force de chercher autre chose.

 2.-Les-champs-de-la-pampa-avant-Pergamino.jpg

 

Vendredi 14 octobre : Pergamino - Solis (134 km)

 

1.-Le-cycliste-dans-la-province-de-Buenos-Aires.jpg

 

Je décide quand même de pédaler sur la route 8 à vélo. Si elle est vraiment trop dangereuse, je peux toujours faire demi-tour pour prendre le car ! Toutefois, ce choix m’oblige à deux longues étapes pour profiter de la capitale par la suite. Je décampe alors prématurément, afin de faire un grand nombre de kilomètres. La bonne nouvelle vient des conditions météorologiques, car le soleil est au rendez-vous. Le vent a également faibli, et n’est plus aussi défavorable. Les petits bois et bosquets, désormais beaucoup plus nombreux dans les prairies et les champs, me protègent également sur mon parcours. Les rares villages traversés sont tous encerclés de hauts silos à grains. Apparemment, la culture du soja prédomine dans la région. Après une soixantaine de kilomètres, je pique-nique rapidement dans un parc de la bourgade d’Arrecifes. Sur la nationale, la circulation reste assez dangereuse. Cependant,  je m’attendais à bien pire aux dires alarmistes des locaux ! Quoique ! Un car en train de me dépasser se fait percuter violemment par un pick-up dérapant sur le bas-côté opposé. Le véhicule décolle et pivote sur lui-même, à deux doigts de faire des tonneaux. Les deux passagers indemnes ont eu énormément de chance ! Par contre, la voiture est bonne pour la casse ! Je laisse mes coordonnées au chauffeur du car, et poursuis ma route avec une vigilance redoublée. Après une bonne centaine de kilomètres de pédalage, les jambes commencent à ne plus tourner rond. Aux abords de San Antonio de Areco, je prends un peu d’énergie à base d’orge brassicole pour relancer la machine. Juchés sur leurs chevaux, quelques gauchos coiffés d’un boina (une sorte de béret) me font amicalement un signe d’encouragement. Juste avant le minuscule village de Solis, je plante la tente discrètement sous quelques arbres, en bordure de la bruyante nationale. Toutefois, quelqu’un a du cafter, car un policier vient soudainement à ma rencontre. Bizarrement, il est déjà au courant que je circule à vélo ! Rien de bien grave, mais c’est quand même pénible de se sentir épié !

 2.-Coucher-de-soleil-dans-la-pampa-a-Solis.jpg

 

Samedi 15 octobre : Solis - Buenos Aires (115,9 km)

 Le-dernier-bivouac-en-Amerique-du-Sud.jpg

Avec le vacarme de la circulation sur la route 8, la nuit n’a pas été de tout repos ! Autant dire que j’ai les jambes en guimauve ! Fort heureusement, la météo est clémente pour ma dernière grosse étape. En effet, en plus du soleil radieux, un léger vent souffle dans ma direction. Je peux ainsi profiter pleinement des derniers kilomètres à vélo dans la plate pampa. Sans ce satané trafic routier, il serait vraiment agréable de pédaler dans cette belle campagne étendue ! J‘atteins ainsi sans peine la petite ville de Pilar en fin de matinée. Malgré qu’il soit encore très tôt, je pique-nique sur un banc aux abords d‘un petit parc. La route devient ensuite beaucoup plus défoncée, avec de nombreux trous et bosses. Elle se transforme ensuite en une large autoroute, forcément interdite aux vélos. Les rares panneaux indicateurs m’y ramènent constamment. C’est pourquoi je cherche longuement un autre trajet dans les faubourgs de la capitale fédérale. Sans carte précise, la tâche s’avère peu aisée ! Je me fis beaucoup à mon instinct ! De nombreux conducteurs impressionnés par le vélo chargé klaxonnent à nouveau pour me féliciter. Les bus qui bloquent l’accès et les feux tricolores à chaque croisement me font perdre un temps fou. C’est vraiment pénible de devoir constamment se relancer ! Finalement après de très longs kilomètres, j’atteins le centre-ville en début de soirée. Mireille, la compagne de Gilles rencontrée également au Laos, m’a fourni une adresse via internet pour loger. Cependant comme je n’ai pas de nouvelles de la personne, et que je ne tiens pas à déranger les gens un samedi soir à l’improviste, je pars à la recherche d’un hôtel. Malheureusement comme à Rosario, tout est complet ! Au final, je trouve tardivement bonheur à l’hôtel Sportsman, situé dans une ancienne bâtisse à proximité du Congrès. L’accueil est chaleureux, et les tarifs sont corrects pour une capitale ! Les grandes chambres assez vieillottes ont également une hauteur de plafond impressionnante ! Je me balade ensuite à pied dans le quartier, afin de repérer les lieux pour la visite de demain.

 

 

Dimanche 16 octobre : Visite de Buenos Aires

 1.-L-obelisque-de-la-place-de-la-Republique.jpg  2.-Le-theatre-Colon-sur-la-place-Lavalle.jpg

Rien à faire ! Il est vraiment trop difficile de se procurer une place pour voir l’équipe de football de Boca Juniors évoluer dans son stade mythique de la Bombonera. J’aurais du m’y prendre bien à l’avance ! Du coup, cela me laisse beaucoup plus de temps pour visiter la capitale. Par malchance, le temps est devenu bien maussade. Une légère brume flotte étrangement dans la ville. A proximité de l’hôtel, je découvre le gigantesque palais du Congrès, comparable au Capitole des Etats-Unis. Quelques pâtés de maisons plus loin, la place Lavalle est entourée de plusieurs jolis édifices ; notamment l’école Presidente Roca, le palais de justice, l’imposant théâtre Colon, ainsi que la plus grande synagogue d‘Argentine. L’avenue du 9 Juillet est la plus large du monde avec seize voies. Je la traverse pour rejoindre la place surélevée du Général San Martin. Elle est bordée entre autres de deux beaux palais, et de la tour des Anglais d’une hauteur de 76 mètres. Je rebrousse ensuite chemin jusque la place Lavalle pour pique-niquer à l’ombre d’un gigantesque arbre. Rassasié, je peux reprendre la visite dans le quartier du Microcentro. Les galeries Pacifico forment un ensemble commercial réhabilité, renfermant d’intéressantes fresques aux plafonds. Puis, j’atteins la célèbre place de Mayo. Elle est cernée par le cabildo (enfin du moins ce qu’il en reste !), la jolie Casa Rosada (maison Rose) et la cathédrale baroque Metropolitana. L’intérieur de l’édifice religieux renferme la tombe du célèbre général San Martin, un héros national vénéré en Argentine. Plus au Sud, je découvre l’église San Ignacio bâtie dans la Manzana de Las Luces (maisons des Lumières), ainsi que la basilique Santo Domingo qui possède une tour criblée de boulets datant de la retraite anglaise en 1806. La fin de journée approchant, je rejoins tout doucement l’hôtel en flânant dans les rues commerçantes. Finalement, je soupe dans un petit resto une bonne côte de bœuf avec un verre de pinard argentin ; Et cela pour changer de mes habituelles pastas !

 3.-Danseurs-de-tango-dans-la-rue.jpg  4.-La-Casa-Rosata-sur-la-place-de-Mayo.jpg

 

Lundi 17 octobre : Visite de Buenos Aires

 1.-Le-stade-de-la-Bombonera.jpg  2.-Habitations-colorees-de-la-Boca.jpg

Par hasard, j’apprends qu’un nuage de cendres, provenant du volcan chilien Puyehue, bloque les transports aériens depuis plusieurs jours dans une grosse partie de l’Amérique du Sud. C’est bien ma veine ! La brume d’hier en est certainement la conséquence ! Je repars à pied à la découverte de Buenos Aires sous un beau soleil, jusqu’au quartier de San Telmo situé au Sud de la place de Mayo. Il renferme des bâtiments historiques plus ou moins intéressants, et de nombreuses boutiques d’antiquités le long des ruelles pavées. Je pénètre alors dans l’église baroque Nuestra Senora de Belen, juste à côté de la jolie place Dorrego. En piteux état, l’intérieur de l’édifice religieux s’avère assez décevant ! Puis, je parcours le mercado qui comprend de nombreuses échoppes. La plupart sont malheureusement fermées le lundi. Je pousse ensuite plus au Sud, jusqu’au quartier populaire de la Boca. Les rues autour du gigantesque stade de football de la Bombonera sont toutes aux couleurs jaune et bleu du club de Boca Juniors. Et forcément, Diego Maradona qui a joué de nombreuses années au club est représenté partout ! Il est cependant dommage de n’avoir pu assister au match de la veille contre Belgrano Cordoba ! Pour me consoler, je fais un rapide tour dans la boutique, avant de poursuivre la visite jusque la ruelle Caminito. Elle est bordée de nombreuses habitations en tôle ondulée, peintes de couleurs vives. Le coin est charmant, mais beaucoup trop touristique à mon goût ! Quelques danseurs de tango s’exhibent même pour tout ce petit monde venu en car ! Je reviens ensuite sur mes pas pour casser la croûte sur un banc du parc Lezama. Puis, je bifurque jusqu’au quartier moderne de Puerto Madero. Plusieurs anciens entrepôts en briques ont été reconvertis en appartements ou en bureaux. Le superbe trois-mâts Sarmiento de la Marine argentine est également amarré dans un bassin. Comme il me reste du temps de libre, je retraverse le centre-ville pour rejoindre le quartier de Recoleta plus au Nord. Il renferme un petit cimetière où reposent de nombreuses célébrités du pays. De belles statues et d’impressionnants monuments funéraires se succèdent le long des allées. Je retourne ensuite à l’hôtel, en jetant un coup d’œil au Palacio de las Aguas Corrientes de style français (le palais des Eaux Courantes). Sur le balcon de la chambre, je prépare à souper avec quelques maigres restes. J’organise ensuite mes sacoches pour faciliter l’embarquement dans l’avion de demain. Mon aventure en Amérique du Sud touche à sa fin !

 3.-La-fregate-Sarmiento-a-Puerto-Madero.jpg  4.-Monuments-funeraires-au-cimetiere-de-Recoleta.jpg

 

Mardi 18 octobre : Buenos Aires - Aéroport d’Ezeiza (46,9 km)

 1.-Le-cycliste-devant-le-Congres-de-Buenos-Aires.jpg

Apparemment, les vols internationaux ont repris hier dans la journée ! Comme j’appréhende l’embarquement, je me lève aux aurores pour arriver au plus tôt à l‘aéroport d‘Ezeiza. Il est de plus situé à une petite quarantaine de kilomètres de l’hôtel. Pour éviter de me perdre dans les faubourgs Sud de Buenos Aires, je suis à la lettre le trajet pêché sur internet la veille, en évitant les autoroutes interdites. Toutefois sans autre possibilité, il me faut quand même emprunter une petite portion sur le final. Immédiatement, je me renseigne pour l’enregistrement de Tornado. L’hôtesse m’indique qu’il suffit juste de dégonfler les pneus. Tout paraît se dérouler sans problème ! Une heure plus tard, on m’informe qu’un carton d’emballage est nécessaire. Et bien sûr, la compagnie brésilienne Tam n’en dispose pas ! En plus, tout mon outillage est déjà rangé au fond du sac. Après de longues discussions avec la superviseuse, le vélo est enveloppé avec du film plastique bien mince. Je ne vois pas en quoi cela protège, mais faut pas chercher à comprendre ! Pour une fois, tout semble s’arranger ! Que nenni ! A l’enregistrement des bagages, une autre hôtesse me refait un cinéma. La bicyclette trop volumineuse ne peut passer dans l’appareil aux rayons X. Ils se foutent de moi ! On me demande alors de démonter les roues et le guidon. Fort heureusement, j’ai conservé dans ma poche les deux petites clés Allen. Par contre, je suis obligé d’arracher le plastique qui m’a coûté les yeux de la tête ! Puis, on refilme grossièrement l’ensemble démantibulé. J’ai bien peur de retrouver Tornado complètement amoché à Madrid. S’il arrive jusque là ! Après une course folle avec un employé de la compagnie, j’embarque tout de même de justesse vers 13 h. Avec ces déboires qui deviennent habituels, je n’ai pas pu changer mes derniers pesos argentins. La somme s’élève quand même à plus de 50 euros ! Le vol jusque Sao Paulo au Brésil dure environ deux heures et demie. Au contrôle des bagages à main, on me confisque mes deux clés. J’ai beau expliquer que j’en ai besoin pour remonter le vélo à Madrid, il n’y a rien à faire ! Il est vrai que l’on a vu souvent des détournements d’avions avec ce type d’outillage ! De vrais abrutis ! J’en ai vraiment marre de ces consignes de sécurité bidon aux aéroports, et de toutes ces compagnies aériennes qui ne font absolument rien pour faciliter le transport des bicyclettes. Et dire qu’il y a quelques années, je ne rencontrais quasiment jamais de problème ! Après un transit de presque trois heures, j’embarque à nouveau dans un airbus de la compagnie Swiss Air, cette fois-ci en direction du Vieux Continent.

 

2.-Tornado-dans-son-film-plastique.jpg

 

 

Kilométrage de Lima à Buenos Aires : 5011 km 

 

Kilométrage total : 24376 km

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25 décembre 2014 4 25 /12 /décembre /2014 14:09

Description du trajet de Madrid à Neuville en Ferrain

    europemin06

 

Il s’en est fallu de peu que je rejoigne Dakar au Sénégal pour remonter vers la France. Néanmoins, plusieurs facteurs m’ont fait abandonner cette hypothèse. En effet, la rallonge de deux mois m’aurait fait rentrer en plein hiver. Déjà qu’il risque de faire bien froid ! Du coup; je reste sur mon idée première, c’est-à-dire rentrer dans le Nord au départ de la capitale espagnole Madrid. Un autre projet me trotte également dans la tête depuis plusieurs années : la traversée de la chaîne pyrénéenne de la Méditerranée à l’Atlantique, en passant par les grands cols du Tour de France. Cependant, certains comme l’Aubisque et le Tourmalet sont déjà fermés à cette période de l’année. Avec tous les kilomètres accumulés, ce serait pourtant le bon moment ! Par conséquent, mon parcours sera beaucoup plus direct. De Madrid, je rejoindrai Pampelune pour franchir les Pyrénées côté Pays Basque. En France, je traverserai les Landes jusque Bordeaux, avant d’atteindre la région Poitou-Charentes. Mon parcours passera par Tours sur les rives de la Loire, puis Chartres et sa célèbre cathédrale. Après quelques jours de repos sur Paris, je retrouverai finalement mon Nord natal, et Neuville-en-Ferrain terminus de cette fabuleuse aventure de 16 mois.

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24 décembre 2014 3 24 /12 /décembre /2014 14:34

Mercredi 19 octobre 2011: Vol pour Madrid (Espagne)

 

Avec-mon-neveu-Hugo--.jpg

 

Il me faut encore transiter par Zurich pour atteindre ma destination finale. Il n’y a rien à comprendre, ce trajet biscornu est beaucoup moins onéreux qu’un direct pour l’Espagne ! Le vol depuis Sao Paulo va durer presque douze heures. Avec le décalage horaire, j’atterris en Suisse vers 11 h 30. Je n’ai cependant qu’une petite heure pour attraper ma correspondance. Et comme l’avion a pris un peu de retard, c’est vraiment la course ! Deux heures plus tard, j’atteins enfin Madrid pour la dernière partie de mon aventure cycliste autour du monde. Je récupère le lourd sac renfermant tout mon matériel, mais Tornado manque à l’appel. Les ennuis continuent ! Au bureau des objets perdus, on m’apprend qu’il est resté bloqué à Zurich. Décidemment, les vols aériens vont finir par me rendre fou ! Dans le hall d’entrée, Céline, Jérôme et mon petit neveu Hugo m’attendent depuis un bon moment. J’ai également l’agréable surprise de retrouver mes parents qui ont fait le déplacement jusque Madrid. Cela fait quand même plus d’un an que je ne les ai pas revus ! Après de chaleureuses retrouvailles, nous empruntons le métro pour rejoindre l’appartement loué par ma frangine et mon beauf. Il est situé en plein centre-ville, à proximité de la place d’Espagne (Plaza Cristino Martos). En soirée, nous arrosons mon retour en Europe avec plusieurs pichets de sangria, à la terrasse du troquet juste au coin de l’immeuble.

 La-famille-a-l-aeroport-de-Madrid.jpg

 

Jeudi 20 octobre : Visite de Madrid

     

1.-Le-palais-royal.jpg

 

Sous un splendide soleil matinal, nous partons nous balader tranquillement dans la capitale espagnole. Nous découvrons alors l’imposant Palacio Real de style néoclassique, divisé en trois parties : le palais, la place d’Armes et la nouvelle cathédrale Santa Maria la Real de la Almudena. Quelques rues plus loin, l’église baroque San Miguel renferme de splendides fresques au plafond, ainsi que de beaux retables dans les chapelles latérales. La célèbre Plaza Mayor est entourée de jolies habitations du 17ème aux façades rougeâtres. Seule la Casa de la Panaderia possède de belles fresques colorées. Nous terminons la visite par la petite place Santa Ana, dominée par le majestueux hôtel de couleur blanche Reina Victoria. Céline et Jérôme rentrent à l’appartement pour la sieste d’Hugo, tandis que mes parents et moi mangeons copieusement dans un restaurant à proximité. L’établissement est abondamment décoré d’affiches et de photos relatives à la corrida. L‘accueil est également bien sympathique. Vers 16 h, je reprends seul le métro en direction de l’aéroport, afin de récupérer mon vélo. A l’arrivée, les hôtesses me font faire le passe-passe d’un bureau à l’autre. Elles jouent vraiment avec mes nerfs ! Finalement, je récupère ma fidèle monture emballée grossièrement dans son film plastique vert. Comme je m’y attendais, la bicyclette a bien morflé ! Les jantes sont éraflées, les garde-boue complètement pliés, et il m’est surtout impossible de remonter la chaîne dans le dérailleur. En fait, la butée de tension est carrément tordue, et le ressort de rappel détendu ! Je passe ainsi un long moment à tenter une réparation. En vain ! Comme je ne peux pédaler dans ces conditions, je préfère rentrer en métro avec Tornado. Toutefois à cause des nombreux usagers, les surveillants ne m’autorisent à l’emprunter qu’à partir de 21 h. Soit une bonne quarantaine de minutes à patienter ! Forcément dans l’appartement, tout le monde m’attend pour souper. Et ce n’est pas la grande joie durant la soirée !

 

2.-La-plaza-Mayor.jpg 

 

Vendredi 21 octobre : Escapade à Ségovie

     

1.-La-cathedrale-de-Segovie.jpg  2.-La-Castille-depuis-le-chateau.jpg

 

Nous partons en métro jusque la gare Chamartin au Nord de la capitale, afin d’attraper le train de 9 h 40 pour Ségovie. Comme aux aéroports, les sacs sont passés aux rayons X. Certainement les conséquences de l’attentat terroriste de mars 2004 ! Le trajet à travers les collines arides de la Castille dure une bonne trentaine de minutes. Comme la gare est située à 7 km, il faut encore prendre un bus pour se rendre au centre de la petite bourgade. Un splendide aqueduc romain surplombe la ville basse. Les pierres parfaitement ajustées (sans mortier !) forment un ensemble d’arcades sur deux niveaux. La légende veut qu’une femme lassée de transporter l’eau tous les jours aurait donné son âme au diable pour construire l’ouvrage. Prise de remords, elle aurait imploré la Vierge, afin d’écourter la nuit pour que le malin ne puisse finir les travaux à temps. Nous déambulons ensuite dans les ruelles de la ville haute bordées de jolies demeures, comme l’étrange Casa de los Picos à la façade truffée de pointes. Plusieurs églises romanes sont également disséminées dans la vieille ville. Celle de San Martin possède plusieurs galeries d’arcades, avec des colonnes surmontées de chapiteaux joliment sculptés. L’intérieur ne peut malheureusement être visité à cause de la célébration d’un office. Plus loin, la grande cathédrale dorée est un bel édifice gothique du 16ème S. Les hautes voûtes intérieures sont magnifiques, tout comme certains retables outrageusement ornementés, notamment celui de la chapelle du Saint-Sacrement. De belles stalles en bois trônent également au milieu de la nef. Le joli cloître attenant renferme un musée présentant diverses peintures, tapisseries et pièces d’orfèvrerie religieuses. Puis, nous dînons dans un petit restaurant traditionnel à proximité de la place centrale. Un peu plus loin, le haut donjon du château médiéval, avec ses tourelles crénelées, domine le plateau castillan. Les salles de la forteresse sont munies de plafonds magnifiquement décorés. Elles renferment aussi des meubles gothiques, des tapisseries, des vitraux colorés et plusieurs armures de l’époque. Depuis les remparts, les monastères et églises éparpillés autour de Ségovie prennent des teintes orangées avec le soleil de fin d’après-midi. Nous buvons tranquillement un dernier verre sur la Plaza Mayor, avant de prendre le train de 18 h30 pour la capitale. De retour à Madrid, nous sirotons encore un gros pichet de sangria à la terrasse du café d’à côté, puis soupons copieusement dans l‘appartement.

 

 3.-Le-chateau-feodal-de-Segovie.jpg  4.-L-aqueduc-romain.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Samedi 22 octobre : Madrid (16,7 km)

     

Reparation-de-Tornado-apres-les-aleas-aeriens.jpg

 

La journée est assez inintéressante ! Nous passons la matinée à boucler les sacs et nettoyer l’appartement, afin de rendre en état les lieux. Nous dînons ensuite à la terrasse d’une cafétéria, située sur l’avenue Gran Via. L’heure des séparations sonne vers 15 h. En effet, tout le monde prend l’avion en début de soirée pour rentrer à la casa. Sauf le cycliste forcément ! Nous devrions nous retrouver logiquement sur Paris pour les uns, et dans le Nord pour les autres ! Je passe ensuite une bonne heure à réparer tant bien que mal Tornado. Lorsque tout est plus ou moins en règle, j’arpente les rues à la recherche d’un hôtel pour la nuit. Après deux refus catégoriques, je décide finalement de me rendre au camping Osuna, situé non loin de l’aéroport. A cause des nombreuses autoroutes qui ceinturent le centre-ville, j‘ai bien du mal à m‘orienter au départ. Après une bonne dizaine de kilomètres, j’atteins finalement le terrain sans trop de difficulté ! Le coin fourmille de chats qui n’hésitent pas à se réfugier sous le auvent de la tente.

 

 

Dimanche 23 octobre : Visite de Madrid

 

  1.-Azulejos-sur-la-place-Santa-Ana.jpg

 

Tôt dans la matinée, je prends le métro pour le centre-ville de Madrid. En effet, j’espère trouver un troquet pour visualiser la finale de la Coupe du monde de rugby. Après quelques recherches, c’est finalement dans un pub irlandais que j’assiste à la défaite de la France face à la Nouvelle-Zélande. Comme la victoire des All Blacks ne s’est jouée qu’à un point, je suis extrêmement déçu ! Le temps a malheureusement viré au mauvais ! Une épaisse couche de nuages gris couvre le ciel. Je redécouvre ensuite plus méticuleusement le palais Royal, ainsi que les places Mayor et Santa Ana. De nombreux carreaux de faïence, appelés azulejos dans la péninsule ibérique, ornent les façades des bâtiments alentour. La mignonne Plaza de la Villa est bordée par le bel hôtel de ville en briques datant du 16ème, ainsi que de la tour des Lujanes d’influence mudéjare. Il s’agit du nom donné aux musulmans d’Espagne, devenus sujets des royaumes chrétiens après le 11ème S. Au centre de la Plaza de la Puerta del Sol, une statue représente un ours dressé sur un argousier, correspondant aux symboles de la ville. De nombreux édifices religieux sont également éparpillés dans le centre historique. Malheureusement, tout est fermé ! Les couvents de las Descalzas Reales et de la Encarnation ont porte close, tout comme les églises de San Ginés, San Pedro, San Francisco el Grande, San Andrés, et San Isidor. Je me balade alors sur les grandes avenues autour de Plaza Cibeles et de Plaza Colon. L’une est entourée de majestueux bâtiments administratifs, comme la grande poste et la banque d’Espagne ; l’autre est bordée par la bibliothèque nationale. Je me promène ensuite dans le parc del Buen Retiro. A l’abri du bruit du trafic routier, ce vaste espace vert renferme un petit lac nommé l‘Estanque, un joli palais en verre, et une roseraie. Puis, je poursuis jusque la gare ferroviaire d’Atocha, afin de découvrir le jardin botanique qu‘elle abrite. La fin de journée approchant, je retourne au camping par le métro. Tout comme le dîner, mon souper se résume à quelques maigres restes de nourriture !

 

 2.-Balcons-sur-les-facades-devant-l-eglise-San-Miguel.jpg  3.-Le-palais-de-Cristal-dans-le-parc-del-Buen-Retiro.jpg

 

Lundi 24 octobre : Visite de Madrid

 

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Il n’a pas arrêté de pleuvoir et de venter toute la nuit ! La météo est complètement détraquée ! A cause de la bruine incessante, je préfère me rendre directement au célèbre musée du Prado, pour découvrir les nombreuses œuvres d’art exposées ! Le bâtiment est malheureusement fermé au public le lundi. Décidemment, je n’ai vraiment pas de chance ! La pluie redoublant, je me réfugie dans la jolie église San Jeronimo el Real, située juste à côté. Je déambule ensuite dans les quartiers populaires et cosmopolites de Lavapiès et Latina. En effet, les commerces et les restaurants qui bordent les rues sont en majeure partie tenus par des immigrés du monde entier. Malgré une légère accalmie, mes vêtements se retrouvent rapidement trempés. Comme les portes de la cathédrale San Isidro sont ouvertes, j’en profite pour jeter un coup d’œil. Elle recèle quelques beaux retables dorés et illuminés. En milieu d’après-midi, le mauvais temps se calme enfin ! Toutefois, les nuages gris et noirs rendent le ciel toujours aussi menaçant. Je traverse ensuite la Plaza Mayor pour rejoindre le quartier de Malasana. Une arche en briques trône au centre de la place Dos de Mayo. Il s’agit de l’unique vestige de la caserne défendue par les madrilènes contre les troupes napoléoniennes en 1808. Je parcours ensuite la large avenue Gran Via, bordée de gigantesques immeubles bancaires, hôteliers ou administratifs. Curieusement, des chars romains en bronze sont disposés sur quelques toits des bâtiments. La majestueuse tour de la Telefonica, inspirée de l’architecture américaine de la fin du 19ème, domine tout le quartier. Les statues équestres de Don Quichotte et de Sancho Panza, inspirées du célèbre roman de Cervantès, se dressent également derrière la place d’Espagne. Puis, je flâne dans les boutiques du centre, afin de faire quelques achats pour la suite de mes aventures. En début de soirée, je rentre tranquillement en métro, et soupe dans un troquet du quartier de Canillejas proche du camping.

 

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Mardi 25 octobre : Visite du musée du Prado

 

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Je décide de séjourner une journée de plus sur Madrid, afin de visiter le Prado. L‘édifice du 18ème S renferme une collection impressionnante de tableaux, constituée par les rois d’Espagne sur plusieurs générations. Même si mes connaissances en la matière sont assez limitées, il serait dommage de passer à côté de l’un des plus beaux musées du monde ! Je prends le métro tôt dans la matinée, afin d’éviter la queue au guichet. Les œuvres sont exposées dans des salles sur deux étages. La majeure partie est forcément consacrée à la peinture espagnole. Goya est d’ailleurs fortement représenté. Je découvre notamment ces deux plus célèbres tableaux noirs « le 3 mai » et « Saturne dévorant un enfant ». Du moins, ce sont les seuls que je connaissais avant la visite ! Le musée renferme également de nombreuses peintures de Vélasquez (« les Fileuses », « les Ménines », « la Reddition de Breda »…), de Le Greco (« l’Adoration des Bergers »…), de Zurbaran (« Vision de St Pierre Nolasque »…), et bien d’autres encore. Par contre, il n’y a bizarrement qu’une seule toile de Pablo Picasso ! La peinture étrangère est également représentée, avec notamment des œuvres de Rubens (« les Trois Grâces »…), Raphaël (« la Vierge au Poisson »…), Bosch (« le Jardin des Délices »…), Poussin (« le Parnasse »…), et autres. Je ne peux toutefois citer tous les peintres (et cela n‘a d‘ailleurs pas vraiment d‘intérêt !), tellement le musée du Prado est fourni. Absorbé par ces toiles magnifiques, je quitte les lieux bien plus tard que mes prévisions. Comme le soleil a fait enfin son apparition, je me promène au hasard des rues pour tirer quelques derniers clichés de Madrid. En fin d‘après-midi, je rejoins rapidement le camping en métro, afin de régler les derniers pépins avant mon nouveau départ. Plutôt que de souper en ville, je préfère pique-niquer dans la salle commune. Demain, j’entame la dernière partie de mon périple à vélo à travers l’Espagne et la France, pour rentrer au bercail !

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Mercredi 26 octobre : Madrid - Puebla de Belena (80,7 km)

 

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Une nouvelle fois, la mise en route est bien longue ! J’avais pourtant l’intention de démarrer l’étape le plus tôt possible ! C’est sans compter sur une énième crevaison de la roue avant de Tornado, à cause du fameux pneu usé. Je passe également une bonne demi-heure à nettoyer la tente, prise pour cible par quelques oiseaux. Forcément avec tous ces petits pépins, l’heure tourne ! Comme il est déjà midi, je préfère pique-niquer dans le parc Juan Carlos à proximité du camping, avant de m’élancer. Je prends ensuite la direction du Nord-est, vers l’aéroport de Madrid. Après la bourgade de Barajas, la route s’enfonce dans un tunnel sous les pistes d’atterrissage. A mon grand dam, elle devient interdite aux cyclistes. J’essaye alors de trouver tant bien que mal un autre itinéraire. Cependant rien n’est prévu pour les vélos ! Il me faut emprunter des chemins barrés, et même des portions d’autoroutes pour retrouver le trajet prévu. Autant dire que je ne suis pas très rassuré durant ces premiers kilomètres ! Gentiment, un automobiliste s’arrête pour m’indiquer le bon chemin. Je finis par rejoindre une petite route de campagne, qui oscille dans des collines couvertes de prairies jaunies par le soleil. Toutefois cet après-midi, l’astre du jour se fait prier ! Il est masqué par une épaisse couche de nuages menaçants, progressant rapidement avec le vent du Sud. Les montagnes de la Sierra de Guadarrama s’étendent un peu plus à l’Ouest. Après une bonne côte, j’atteins un large plateau parsemé de champs labourés et de petits bosquets. Quelques kilomètres avant le village de Puebla de Belena, je plante la tente au bord d’un chemin envahi par de grandes herbes. Le bivouac est un peu à découvert, mais le coin semble assez tranquille.

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Jeudi 27 octobre : Puebla de Belena - Paredes de Siguënza (79,8 km)

 

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Quelle poisse, il n’arrête pas de pleuvoir ! Je dois prendre mon courage à deux mains pour démonter le bivouac. La route continue d’osciller dans les collines couvertes de prairies rocailleuses et de bois de conifères. Toutefois, le paysage est bien souvent masqué par la pluie. Elle s’abat sur moi par intermittence, me trempant de la tête aux pieds. C’est dans ces conditions difficiles que j’atteins Cogolludo. La mignonne placette est bordée par le palais de los Duques de Medinaceli, dont la façade est malheureusement bâchée pour cause de restauration. L’imposante église Santa Maria et les ruines d’un château fort surplombent les maisons du village aux tuiles romanes orangées, ainsi que l’église San Pedro un peu plus en contrebas. Je profite d’une légère accalmie pour pique-niquer sur un banc à proximité de l’édifice religieux. Lorsque je repars, le tonnerre gronde. Une grosse averse me remouille en quelques secondes ! La route longe ensuite le lac artificiel d’Alcorlo, puis plonge longuement dans la vallée de la petite rivière de Canamares. Quelques kilomètres plus loin, Atienza est dominé par le donjon d’une forteresse moyenâgeuse, perchée sur un impressionnant éperon rocheux. Frigorifié, je m’abrite au bar d’un restaurant, attendant une petite amélioration de la météo. Au village suivant de Cincovillas, je cherche vainement une boulangerie. C‘est alors qu’une vieille dame propose spontanément de me fournir du pain. Elle rajoute en plus des fruits et un chorizo dans le sachet. Felisa m’offre même le café avec quelques gâteaux dans sa demeure. Comme elle a du mal à comprendre, je passe par l’intermédiaire de son aide ménagère Fabiola pour expliquer mes péripéties à travers le monde. Cependant, mon médiocre espagnol ne me permet pas d’engager une longue conversation. A cause de son âge avancé, je n’ose demander l’hospitalité. Je quitte alors ces charmantes personnes à la recherche d’un coin pour bivouaquer. Quelques kilomètres plus loin, je plante la tente encore trempée, sur une épaisse couche de feuilles mortes au pied de quelques arbres. 2.-Les-ruines-du-chateaude-Cogolludo-devant-la-campagne.jpg  3.-Le-lac-d-Alcorlo-sous-la-pluie.jpg

 

     

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Vendredi 28 octobre : Paredes de Siguënza - Soria (79,5 km)

     

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Lorsque je sors la tête de la tente, une couche nuageuse grise couvre encore le ciel. Mes doigts sont complètement engourdis par le glacial vent matinal. Par chance, il chasse rapidement les nuages, faisant apparaître les doux rayons du soleil. La route traverse de moyennes collines, avant de grimper sur un vaste plateau agricole sans aucun relief. Le changement de paysage est vraiment saisissant ! Après un court séjour en Castille-La Manche, je pénètre en Castille-et-Leon. Je grimpe ensuite le col d’Altos de Barahona à 1140 mètres d’altitude. Soit moins de 150 mètres de dénivelé, autant dire une bagatelle ! Puis, j’atteins la bourgade d’Almazan qui possède une jolie place. Elle est enserrée par la charmante église de San Miguel, le vieux palais défraîchi de los Mendoza, et une porte surmontée de la tour de l’Horloge. Le centre-ville est également entouré de remparts, qui offrent de belles vues sur les bois alentour. Après le pique-nique, j’emprunte une étroite route peu fréquentée, en direction de Cubo de la Solana. Elle traverse des forêts parées de magnifiques couleurs automnales. Après le village campagnard, elle longe la rivière Duero bordée de splendides arbres au feuillage jaune. De grands rapaces, que je n’arrive pas à identifier, virevoltent dans le ciel. Puis, il me faut gravir une longue côte pour rejoindre Soria. Au sommet, je préfère cependant bifurquer sur un chemin terreux, afin de trouver plus facilement un endroit pour bivouaquer. Je m’installe sous quelques arbustes, malgré les aboiements de quelques canidés qui m’ont repéré. En fin de soirée, un type en quad n’arrête pas de passer, devancé par ses chiens de traîneaux.

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Samedi 29 octobre : Soria - Aldealices (44,3 km)

 

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Il fait de nouveau frisquet ce matin. J’ai bien du mal à déguerpir ! De plus, le ciel s’est couvert de nuages durant la nuit. Pas moyen de se réchauffer ! Du coup, je rejoins le centre de Soria, complètement frigorifié. Je débute alors la visite par la Plaza Mayor. Elle est entourée du joli palais de l’Audience surmonté d’un clocheton, de l’hôtel de ville (ayuntamiento) et de l’église Santa Maria la Mayor. Une charmante fontaine aux lions sculptés trône au centre de l‘esplanade. L’imposant palais de los Condes de Gomara, avec sa robuste tour, se situe à quelques pas. La rue piétonnière Collado est également bordée de hautes maisons, aux façades garnies de balcons en encorbellement. Je visite ensuite la cathédrale de San Pedro datant du 16ème S, qui renferme deux splendides retables. En plus du prix d’entrée, il faut encore payer pour les illuminer ! On fait de l’argent comme on peut ! Les plafonds voûtés sont également assez impressionnants. Toutefois, le clou du site reste le cloître roman attenant. Les colonnes des arcades sont surmontées de magnifiques chapiteaux sculptés. Puis, je mange un morceau juste à côté de l’édifice religieux. Comme la petite ville me plaît bien, et que le soleil fait enfin son apparition, je décide d’approfondir la visite. A environ deux kilomètres, un ermitage édifié dans les falaises surplombe la paisible rivière Duero. Malheureusement, les portes se ferment à mon arrivée. Aussi, un groupe d’Espagnols me félicite en apprenant mon périple. J’ai même droit à quelques applaudissements ! Les monuments historiques ne rouvrant qu’à 16 h, je retourne au centre-ville pour tirer quelques clichés sous le soleil. Je découvre aussi la banale église del Espino, ainsi que les églises romanes San Juan de Rabanera du 13ème et Santo Domingo. Seule cette dernière a ses portes ouvertes. Elle possède d’ailleurs un merveilleux tympan de la fin du 12ème S. L’intérieur est cependant assez ordinaire ! Je redescends ensuite vers les ruines de l’ancien monastère San Juan de Duero. Les magnifiques arches du cloître mélangent les styles roman et arabe. Certaines sont comme entrelacées. L’édifice religieux attenant est assez austère. Toutefois, il renferme également de jolis chapiteaux sculptés. Je discute un moment avec un couple de Français quinquagénaire ébahi par mon aventure, avant de quitter les lieux en direction d’Almajano sur des petites routes de campagne. Les maisons des villages traversés sont majoritairement construites avec de gros blocs de pierre. Beaucoup sont malheureusement abandonnées. Certaines penchent dangereusement, tout comme cette mignonne chapelle romane à la sortie d’Almajeno. Finalement avant que la nuit tombe, je plante la tente en bordure d’un ruisseau à Aldealices. Durant la soirée, les tracteurs s’activent pour préparer les champs aux prochaines cultures.

  2.-L-ermitage-de-San-Saturio-dominant-la-riviere-Duero.jpg  3.-Les-arches-entrelaces-du-monastere-San-Juan-de-Duero.jpg

 

 

 

 

Dimanche 30 octobre : Aldealices - Autol (78,2 km)

 

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Il n’y a pas un seul nuage dans le ciel. La journée s’annonce bien ! Immédiatement, la route s’élève dans les montagnes couvertes de hautes herbes dorées. En effet, il me faut gravir le col du Puerto de Oncala, culminant à 1454 mètres. Cependant le dénivelé étant assez faible (un peu plus de 300 mètres !), j’atteins aisément le sommet. De nombreuses éoliennes sont plantées sur les crêtes de la Sierra de Montes Claros. Il faut bien reconnaître que ce n’est pas très esthétique visuellement ! La longue descente est vertigineuse. Je rejoins rapidement Villar del Rio, niché au bord de la rivière Cidacos. Je pique-nique juste à côté d’un ancien lavoir, tout en faisant sécher la tente au soleil. La route longe ensuite le joli cours d’eau. A quelques coups de pédale, Yanguas est un mignon petit village aux maisons construites en pierres. Je déambule dans les étroites et pentues ruelles pavées, pour découvrir notamment le château fort en cours de restauration. Les travaux de consolidation enlaidissent toutefois l’ouvrage ! La rivière s‘enfonce ensuite dans d‘étroites gorges, bordées d‘arbres aux couleurs chatoyantes de l’automne. A chaque virage, c’est l’émerveillement ! Je bombarde d’ailleurs le coin de clichés ! Malheureusement avant Enciso, la construction d’une nouvelle route défigure totalement le paysage. La vallée s’élargit ensuite, laissant apparaître brusquement des parois rocheuses de couleur orangée. Elles sont criblées de cavités, servant de dépôt pour les habitants. Sur tout le trajet, plusieurs châteaux en ruines dominent les villages traversés. Au bord de la rivière, la petite ville d’Arnedo aux nombreux immeubles n’a pas réellement de charme. Seule la forteresse perchée sur un haut rocher mérite un coup d’œil lointain. Puis, je discute longuement avec deux petits vieux à la terrasse d’un troquet. Comme l’heure tourne rapidement, il est déjà grand temps de chercher un coin tranquille pour camper. Juste avant Autol, j’emprunte une voie verte aménagée sur une ancienne ligne de chemin de fer. Je plante d’ailleurs la tente sur de hautes herbes couchées, en contrebas de l’ancienne petite gare désaffectée. C’est ce genre de journée fabuleuse qui me fait aimer voyager à vélo !

  2.-La-vallee-aux-arbres-colores-de-la-riviere-Cidacos.jpg  3.-Le-village-de-Peroblasco.jpg

 

 

 

 

Lundi 31 octobre : Autol - Pueyo (69,4 km)

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Ce matin, la tente est en partie recouverte de givre. La température nocturne a dû approcher le zéro degré. Toutefois, l’atmosphère se réchauffe rapidement avec le lever du soleil. La voie verte se poursuit le long d’une nationale, jusqu’à la petite ville de Calahora perchée sur une basse colline. Cependant, je ne m’y attarde pas ! Je pénètre quand même dans la cathédrale Santa Maria, plus jolie intérieurement qu’à l’extérieur. En effet, les chapelles des nefs latérales et du déambulatoire possèdent pour certaines de splendides retables décorés. Des stalles en bois sculptées sont disposées également devant le chœur de l’édifice. En cherchant mon chemin, je tombe sur le monastère San José qui s‘avère assez banal. La route grimpe ensuite un petit coteau rempli de vignes rangées. Elle redescend sur Peralta, traversant des champs fraîchement labourés. Je quitte ainsi la minuscule communauté autonome de La Rioja, pour entrer en Navarre. Je traverse alors le gros village sans m’y arrêter, pour rejoindre rapidement Olite à une vingtaine de kilomètres. Les crêtes des collines environnantes sont couvertes de centaines d‘éoliennes. Don Quichotte aurait eu énormément de boulot à combattre ces moulins à vent modernes ! La longue place centrale de la petite bourgade est dominée par un impressionnant château royal de style gothique. Elle est également bordée par la haute tour du Chapitel, qui a accueilli au 14ème S la première horloge à sonnerie de la péninsule ibérique. L’église Santa Maria est enserrée entre le nouveau et le vieux château. Ce dernier est désormais transformé en hôtel de luxe. Sa façade présente un magnifique portail du 13ème finement sculpté. Je mange un morceau à proximité sur la petite place des Teobaldos, avant de partir à la découverte des édifices religieux dispersés autour du centre historique. L’église San Pedro possède une tour élancée et un joli portail. Les monastères de San Francisco et des Clarisses s’avèrent plus décevants. De plus, tous ces bâtiments n’ouvrent qu’aux heures des offices. Il me reste une quarantaine de kilomètres pour atteindre Pampelune. Je décide néanmoins de visiter le château royal, sachant que je n’atteindrai pas la ville avant la tombée de la nuit. Au 15ème S, Charles III le Noble réhabilita l’ancien château en lui adjoignant un nouveau palais. Malheureusement, l’édifice a été grandement détérioré durant la guerre d’indépendance de 1813. Au début du 20ème S, une équipe entreprend de le restaurer avec cependant quelques modifications. Le premier étage abrite les chambres de la reine et du roi, bordées d’un magnifique jardin cloîtré et d’une splendide galerie aux arches gothiques. De nombreuses tours surplombent le centre du château, offrant de beaux points de vue sur le village et les alentours. Les remparts sont également pourvus de belles tourelles circulaires. L’ensemble est de toute beauté, et je ne regrette nullement la visite ! Malgré l’heure tardive, je prends quand même la route pour me rapprocher de Pampelune. Après seulement une petite dizaine de kilomètres, je plante la tente derrière quelques arbustes en bordure de la rivière Cidacos, juste avant le petit village de Pueyo. Le coin est loin d’être idéal avec le trafic de la national et la voie ferrée !

 

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Mardi 1er novembre : Pueyo - Eusa (Pampelune) (55,8 km)

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La météo est complètement détraquée ! Il n’arrête pas de pleuvoir ! Je démarre donc la journée sous le crachin. Du coup, je ne vois absolument rien du paysage alentour ! Les collines sont complètement noyées dans les nuages. Je pédale alors machinalement le nez dans le guidon. Toutefois après plusieurs kilomètres, la pluie cesse enfin. Le soleil fait même quelques timides apparitions. Au niveau de Noain, la nationale rejoint l’autoroute. L’accès est forcément interdit aux vélos, et il n’y a aucune échappatoire ! Il me faut rebrousser chemin jusqu‘au village pour trouver un autre itinéraire. Au loin, un aqueduc de 94 arches, datant de la fin du 18ème, traverse interminablement la campagne environnante. Finalement en fin de matinée, j’atteins le centre de Pampelune sur une petite nationale. Je pique-nique à proximité de l’arène Plaza de Toros, la deuxième plus vaste d‘Espagne. Lors de la célèbre feria de San Fermin, les taureaux sont lâchés dans les rues envahies par la foule. Les habitants sont revêtus d’une tenue blanche, d’un foulard et d’une ceinture rouge. Les bovins sont ensuite « combattus » l’après-midi durant la corrida. Je démarre la visite depuis la large place del Castillo entourée de jolis bâtiments. Tout autour, les rues sont bordées de quelques palais et de nombreuses églises plus ou moins intéressantes. Cependant, la majorité des édifices religieux sont fermés en ce jour de Toussaint. L’hôtel de ville est particulièrement joli avec sa façade mélangeant les styles néoclassique et baroque. La cathédrale Santa Maria est également impressionnante. Néanmoins, les portes sont également closes. Dommage, je ne verrai pas la haute nef, ni le cloître gothique attenant ! Près du palais de l’Archevêché, le fronton Labrit est un bâtiment couvert pour la pratique de la populaire pelote basque. Aussi, les fortifications et les remparts au Nord de la ville ont été aménagés en un agréable chemin de promenade. A la fin du 16ème S, ils servaient à défendre le royaume d’Espagne face aux Français. Je jette ensuite un coup d’œil à la citadelle datant du 17ème. Ressemblant curieusement au style Vauban, la forteresse n’a cependant pas été construite par le célèbre architecte militaire, mais par un ingénieur italien se nommant Pelearo. En fait, tout s’explique car ce dernier s’est inspiré de celle d’Anvers ! Après ce long circuit, je goûte au patxaran, une liqueur de Navarre à base de prunelles sauvages macérées dans l’anis. Je quitte ensuite la ville en direction d’Eusa, pour rejoindre le camping Ezcaba en bordure de la rivière Ultzama. Le tarif est vraiment excessif, au vu du peu de prestations offertes. En effet, tout est fermé à cette période de l’année, et le proprio fait payer de surcroît la connexion internet !

 

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Mercredi 2 novembre : Eusa - Telleria (73,5 km)

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Le parcours prévu traverse aujourd’hui la chaîne pyrénéenne en direction du Sud-ouest de la France. Toutefois, rien de bien méchant ! En effet, seuls deux petits cols se dressent sur ma route. Un vent violent s’est levé durant la nuit. Par chance, il souffle approximativement dans ma direction. Au départ, un chemin longe agréablement la rivière Ultzama jusque Sorauren. A peine démarré, quelques gouttes se mettent à tomber. Je rejoins ensuite la grosse nationale et son trafic routier. Néanmoins, j’essaye le plus souvent de la quitter en empruntant les portions de l’ancienne route qui traversent les villages. C’est beaucoup plus intéressant, et surtout plus tranquille ! Comme les tunnels sont interdits aux cyclistes, j’attaque la première difficulté de la journée : l’ascension du Puerto de Belate. Forcément, la circulation est quasi-nulle, et ce n’est pas pour me déplaire ! La grimpette de 5 km me mène au sommet du col culminant à 847 mètres. Le paysage alentour est désormais beaucoup plus verdoyant, formé de pâturages et de forêts. Il est malheureusement en majeure partie voilé par un rideau de pluie. Puis, la route descend en tournicotant dans la montagne, pour rattraper la nationale à l’autre bout du tunnel. A cause du mauvais temps, je préfère stopper un moment dans un bar-restaurant pour me réchauffer. La patronne Xefe (un prénom d’origine basque !) est vraiment sympathique. Comme elle semble intéressée par mon aventure cycliste, nous discutons longuement du sujet. La descente continue jusque Oronoz-Mugairi, toujours aussi enivrante (à moins que ce ne soit le verre de liqueur locale !). Ma pointe de vitesse atteint même les 70 km/h ! Je bifurque ensuite dans la belle vallée de Batzan. Je casse la graine tardivement, près d’un ancien lavoir du village d’Arraioz. La route se poursuit le long du cours d’eau, puis grimpe à nouveau dans la montagne jusqu’au Puerto de Otxondo à 602 mètres. C‘est le dernier col avant la France ! En cette fin de journée, le ciel gris rend le paysage bien triste. J’entame la descente, alors que la nuit commence à tomber. Du coup, j’installe le bivouac dans une prairie avant Telleria, juste à côté de quelques ballots de foin. Dans la soirée, le vent se déchaîne. La tente est secouée dans tous les sens. Une vraie tempête ! Je ressors pour l’amarrer plus solidement avec d’autres tendeurs. J’espère qu’elle ne va pas se briser durant la nuit sous les coups de butoir des puissantes bourrasques ! Je ne suis franchement pas rassuré !

 

2.-Muret-en-pierres-dans-les-prairies-avant-le-Puerto-de-Ot.jpg  3.-Ciel-menacant-dans-les-Pyrenees-au-coucher-du-soleil.jpg

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